Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le demandeur sollicita la permission d’en appeler de la décision de la division générale (DG) du Tribunal rendue le 18 décembre 2015 au Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal »). Le DG a accordé l'appel du défendeur où la Commission avait déterminé qu'il (le défendeur) ne recevrait pas de prestations, car il n'avait pas respecté le délai de carence de deux semaines prévu dans la Loi sur l'assurance-emploi (Loi AE) et le Règlement sur l'assurance-emploi (Règlements AE).

[2] Le défendeur a demandé une révision de la décision de la Commission. La Commission a maintenu sa décision originale sur le fondement que le défendeur ne pouvait pas respecter le délai de carence de deux semaines, car ses gains étaient supérieurs à 125% de son taux de prestations.

[3] La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler (Demande) devant la division d’appel du Tribunal le 7 janvier 2015. La Demande a été déposée dans le délai de 30 jours.

[4] Les moyens d’appel énoncés dans sa demande sont que la DG a fait des manquements de droit comme suit :

  1. a) le défendeur reçut des gains dans chaque semaine de sa demande et les montants déclarés étaient supérieurs à 125% de son taux de prestations; par conséquent, il a été dans l'impossibilité de respecter son délai de carence;
  2. b) la DG a conclu que sa rémunération ne peut pas le soustraire au respect du délai de carence et devrait, plutôt, être déduite selon le paragraphe 19(10) de la Loi AE et le paragraphe 39(2) du Règlement AE;
  3. c) les articles de la Loi AE et du Règlement AE sur lesquels le membre de la DG s'est appuyé réfèrent à la répartition des gains durant le délai de carence. En l'espèce, comme le défendeur n'a pas respecté le délai de carence, les gains qu'il déclara ne sont pas des [traduction] “gains durant le délai de carence”;
  4. d) la DG ignora les exigences de l'article 13 de la Loi AE;
  5. e) elle transgressa les dispositions du paragraphe 19(1) de la Loi AE et du paragraphe 39(2) du Règlement lorsqu'elle modifia la répartition des gains du défendeur et, par conséquent, annula son délai de carence.

Question en litige

[5] Le Tribunal doit décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable et analyse

[6] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « la division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[7] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS indique que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[8] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] Le Tribunal doit être convaincu que les motifs d’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel énumérés. Au moins l’un de ces motifs doit conférer à l’appel une chance raisonnable de succès avant que la permission d’en appeler puisse être accordée.

[10] Le Tribunal note que le défendeur était présent et qu’il a témoigné à l’audience devant la DG, mais que la demanderesse a décidé de ne pas y assister.

[11] La DG a indiqué, aux pages 12 et 13 de sa décision que : [traduction]

[39] Les faits démontrent que l'appelant avait une période de chômage entre le 2 janvier 2015 et le 26 janvier 2015. L'appelant est retourné au travail de 27 janvier 2015. Le 25 février 2015, pendant qu'il travaillait, l'appelant a complété une déclaration de prestations régulières.

[40] La Commission détermina que la date initiale de prestations était le 8 février 2015. Ainsi, la Commission fit valoir que le délai de carence ne pouvait être respectée car l'appelant gagnait un salaire. L'appelant rapporta des gains de plus de 514 $ par semaine. Comme l'appelant a déclaré des gains dans chaque semaine du délai de prestations (8 février 2015 au 18 avril 2015) il a été incapable de respecter le délai de carence requis.

[41] Le Tribunal constate que l'appelant était inadmissible au bénéfice des prestations d'une période de prestations jusqu'à ce que le délai de carence de deux semaines soit respecté. Selon la date de début établie par la Commission, le délai de carence aurait dû être respecté pour les semaines commençant le 8 février 2015 et le 15 février 2015.

[42] Le Tribunal conteste respectueusement l'interprétation de la législation de la Commission. Le Tribunal détermine que les gains ne peuvent pas, comme prévu par la législation, empêcher un prestataire de ne pas respecter le délai de carence, car lorsqu'interprétés ensembles avec les paragraphes 19(1), 39(1) et 39(2), les gains doivent être déduits dollar pour dollar dans les trois premières semaines suivant le délai de carence.

[43] Le Tribunal constate que la manière, avec laquelle la Commission en est arrivée à la conclusion que des gains durant le délai de carence peuvent faire en sorte que ce délai de carence ne soit pas respecté, n'est pas claire. Comme aucune prestation ne peut être payée durant le délai de carence, et les dispositions susmentionnées prévoient que les gains sont déduits durant le délai de carence - il n'est pas possible pour les gains du délai de carence de réduire à 0 $ les prestations durant ce délai.

[44] De plus, pour déterminer la rémunération admissible durant le délai de carence (i.e. le montant de gains qu'un prestataire peut recevoir avant que les prestations soient réduites à 0 $), la Commission semble s'être fondée sur le paragraphe 19(2). Une fois de plus, le Tribunal ne reconnait pas sous quelle compétence cette décision a été prise. C'est plutôt le paragraphe 19(1) qui traite des gains durant le délai de carence et 19(2) qui traite des gains durant toute autre semaine (i.e. toute semaine autre que celles du délai de carence).

[45] Finalement, le Tribunal conclut que le fait, que 39(2) prévoit le montant maximum à déduire en ce qui a trait aux gains du prestataire pour toute semaine du délai de carence du prestataire est un montant égal au taux de prestation hebdomadaire (ce qui signifie, si le maximum est déduit, aucune prestation, 0 $, n'est payable), contredit la position de la Commission voulant que les gains dans le délai de carence fassent en sorte que le délai de carence n'a pas à être respecté. Si la rémunération fait en sorte que le délai de carence n'a pas à être respecté, alors logiquement, comment cette rémunération pourrait-elle être considérée gains [traduction] “durant le délai de carence” dans le but de les déduire des trois premières semaines qui suivent le délai de carence?

[46] Le Tribunal conclut que le demandeur a démontré que les gains ne devraient pas lui permettre de ne pas respecter son délai de carence.

[12] Sur le fondement de ces conclusions, la DG a accueilli l'appel du défendeur en partie et ordonné que les gains du défendeur soient déduits des prestations payables.

[13] Bien que la DG ait énoncé les dispositions législatives pertinentes aux questions soulevées en appel, la demanderesse soutient que les conclusions de la DG ont ignoré les exigences de l'article 13 de la Loi AE et transgressent les dispositions du paragraphe 19(1) de la Loi AE et du paragraphe 39(2) du Règlement AE.

[14] La conclusion de la DG que la rémunération du défendeur n'aurait pas dû l'empêcher de respecter sa période de carence a mené à la conclusion que seulement la disposition qui s'applique est celle du paragraphe 39(2) qui ordonne la Commission de déduire les gains du délai de carence à [traduction] “un montant égal au taux de prestations hebdomadaires du prestataire”.

[15] La principale question de l'appel est liée à l'interprétation de la législation, en particulier, l'article 13 et le paragraphe 19(1) de la Loi AE et le paragraphe 39(2) du Règlement AE.

[16] Bien qu’une demanderesse ne soit pas tenue de prouver les moyens d’appel aux fins d’une demande de permission d’en appeler, elle doit à tout le moins énoncer certains motifs qui font partie des moyens d’appel énumérés. Ici, la demanderesse a précisé des moyens et des motifs d’appel qui se rattachent aux moyens d’appel énumérés.

[17] Sur le fondement qu’une erreur de droit a pu être commise, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[18] La Demande est accordée.

[19] Cette décision sur la permission d’interjeter appel ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond de l’affaire.

[20] J’invite les parties à présenter des observations écrites sur la pertinence de tenir une audience et, si elles jugent qu’une audience est appropriée, sur le mode d’audience préférable, ainsi que sur le bien-fondé de l’appel.

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