Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelante n’a pas assisté à l’audition de son appel. Le Tribunal a attendu 25 minutes après l’heure fixée pour l’audience par téléconférence, mais l’appelante ne s’est jamais jointe à l’appel. Le membre a alors procédé à l’audition de l’appel en l’absence de l’appelante, en conformité avec l’article 12 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.Le membre est convaincu que l’appelante a reçu l’avis d’audience, lequel lui a été envoyé par poste prioritaire le 9 novembre 2015. Le bordereau de contrôle de Postes Canada montre que l’avis d’audience a bien été livré à l’adresse figurant au dossier, à l’attention de l’appelante, le 23 novembre 2015 et comprend un scan de la signature de l’appelante à la livraison.

Introduction

[1] On 10 mai 2015, l’appelante a présenté une demande initiale de prestations régulières d’assurance‑emploi (AE). Sur sa demande, l’appelante a indiqué qu’elle a quitté l’emploi qu’elle occupait chez Wal-Mart Canada (Wal-Mart) afin de suivre son époux à une nouvelle résidence, à la retraite de celui‑ci. L’intimée, la Commission de l’assurance‑emploi du Canada (la « Commission »), a enquêté sur les raison de la cessation d’emploi et déterminé que l’appelante a volontairement quitté son emploi sans y être fondée (sans justification). Le 3 juin 2015, la Commission a informé l’appelante qu’elle n’était pas admissible au bénéfice des prestations d’AE au motif qu’elle avait quitté son emploi sans y être fondée.

[2] Le 28 juin 2015, l’appelante a demandé à la Commission de réexaminer sa décision, déclarant qu’elle s’était sentie obligée, en tant qu’épouse, de suivre son mari et qu’elle avait le sentiment qu’elle aurait une assurance raisonnable de trouver immédiatement un emploi une fois installée dans une plus grande collectivité. Le 5 octobre 2015, à l’issue d’une enquête, la Commission a maintenu sa décision voulant que l’appelante n’ait pas démontré qu’elle avait été fondée (justifiée) à quitter volontairement l’emploi qu’elle occupait à Wal‑Mart.

[3] L’appelante a porté cette décision en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») le 26 octobre 2015.

[4] L’audience a été tenue par vidéoconférence du fait que plus d’une partie y assisterait, y compris un interprète dont les services pourraient être retenus, et que le mode d’audience respecte l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de manière aussi informelle et expéditive que le permettent les circonstances, l’équité et la justice naturelle.

Question en litige

[5] Il s’agit de déterminer si une exclusion du bénéfice des prestations d’AE devrait être imposée à l’appelante du fait qu’elle a volontairement quitté son emploi à Wal‑Mart sans justification (sans y être fondée).

Droit applicable

[6] Le paragraphe 30(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi ») stipule que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

[7] Pour déterminer si un prestataire était « fondé » à quitter son emploi, il faut appliquer l’alinéa 29c) de la Loi, qui, pour l’application des articles 30 à 33, porte ce qui suit :

  1. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci‑après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
    1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
    2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
    3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
    4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
    5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
    6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
    7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
    8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non rémunération de celles‑ci,
    9. (ix) modifications importantes des fonctions,
    10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
    11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
    12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
    13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
    14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

[8] Le paragraphe 30(2) de la Loi stipule que l’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestation du prestataire qui suivent son délai de carence et qu’il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

[9] Le paragraphe 30(5) de la Loi prévoit que, dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.

Preuve

[10] L’appelante a présenté une demande initiale de prestations d’AE le 10 mai 2015 (pièces GD3-3 à 15). Sur sa demande, l’appelante a déclaré que son dernier jour de travail était le 24 avril 2015 et qu’elle avait quitté l’emploi qu’elle occupait chez Wal‑Mart. Sur le questionnaire « quitter – suivre un autre » joint à sa demande (pièces GD3-8 et 9), l’appelante a expliqué qu’elle a quitté son emploi pour suivre son époux, qui avait décédé de déménager en raison de son départ à la retraite. L’appelante a déclaré qu’elle n’a pas demandé de transfert à son employeur ni n’a cherché du travail auprès d’un autre employeur avant de quitter volontairement son emploi parce qu’elle et son mari déménageaient de Yellowknife (Territoires du Nord‑Ouest) à Calgary (Alberta) et qu’elle n’était pas familière avec son nouveau lieu de résidence et qu’elle pensait que ce serait mieux de voir où elle vivrait et de vérifier les occasions d’emploi qui seraient proches de son lieu de résidence, vu qu’elle ne conduit pas. Aux dires de l’appelante, elle a emménagé à son nouvel endroit le 1er mai 2015 et elle cherchera « un emploi dès que je serai installée et familière avec mon nouveau lieu de résidence. »

[11] Un relevé d’emploi (RE) a été émis et confirmait que la dernière journée de travail de l’appelante était le 24 avril 2015, indiquant « Quitter » comme raison de la cessation d’emploi (pièce GD3-16).

[12] Le 1er juin 2015, un agent de la Commission s’est entretenu avec le mari de l’appelante sur les raisons pour lesquelles l’appelante ne travaillait plus à Wal-Mart, étant donné que la langue première de l’appelante n’est pas l’anglais et qu’elle a autorisé son mari à parler en son nom. L’agent a documenté cette conversation dans un formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (pièce GD3-20). L’agent y a noté ce qui suit :

  1. La raison du déménagement de Yellowknife était que le mari de l’appelante avait quitté le marché du travail et que le couple voulait se retirer à Calgary.
  2. La possibilité d’un transfert a été discutée avec Wal-Mart, mais l’appelante ne pouvait pas demander un transfert parce qu’ils ne savaient pas exactement où ils allaient vivre et que l’employeur avait besoin de l’emplacement précis du magasin pour traiter une demande de transfert afin de vérifier si Wal‑Mart avait besoin de quelqu’un à cet emplacement.
  3. Ils avaient environ trois mois de préavis avant le départ à la retraite du mari, mais n’ont pas eu le temps de se rendre à Calgary pour vérifier des adresses où demeurer, et le mari n’aurait pas envisagé de partir sans sa femme pour visiter des endroits sans elle. Ils n’auraient jamais envisagé de vivre séparément.

[13] La Commission a informé l’appelante le 1er juin 2015 (pièce GD3-20), et confirmé par lettre datée du 3 juin 2015 (pièces GD3-21 et 22), qu’elle ne toucherait pas de prestations d’AE du fait qu’elle n’a pas démontré qu’elle était fondée à quitter volontairement son emploi.

[14] Le 29 juin 2015, l’appelante a demandé à la Commission de réexaminer sa décision rejetant sa demande de prestations (pièces GD3‑23 à 27). Était jointe à la demande de révision une lettre de l’appelante qui se lisait comme suit :

« En tant qu’épouse, j’ai le sentiment d’avoir l’obligation de suivre mon mari. Je pensais aussi que j’avais une assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat car je m’installais dans une collectivité beaucoup plus grande. »

[15] L’appelante a déclaré en outre qu’elle devrait être en droit de toucher des prestations d’AE parce qu’elle a cotisé au régime d’assurance‑emploi pendant huit ans, puis elle a cité plusieurs décisions de juge arbitre sur la question de la nécessité d’une prestataire d’accompagner son époux (voir la pièce GD3‑27), un cas de figure qui, selon elle, s’appliquait aussi à sa situation.

[16] Le 5 octobre 2015, un autre agent de la Commission a téléphoné à l’appelante et a parlé au mari de l’appelante (sur l’autorisation de cette dernière) de la demande de révision présentée par l’appelante. L’agent a documenté l’appel dans un formulaire Renseignements supplémentaires sur la demande de prestations (pièce GD3‑28). L’agent a noté ce qui suit :

  1. Après que le mari de l’appelante eut définitivement quitté le marché du travail, l’appelante a démissionné de son emploi afin d’accompagner son mari à Calgary. Ils avaient choisi de déménager de Yellowknife à Calgary car ils souhaitaient habiter dans une plus grande ville, après avoir vécu longtemps dans une petite collectivité rurale, et se rapprocher du fils et des petits‑enfants du mari.
  2. Le mari a déclaré qu’il aurait été déraisonnable pour le couple de vivre séparément jusqu’à ce que l’appelante puisse obtenir un emploi à Calgary et qu’il aurait été très difficile à cette dernière de se chercher du travail à Calgary pendant qu’elle demeurait encore dans les Territoires du Nord‑Ouest.
  3. L’appelante a trouvé un nouvel emploi environ deux mois après leur déménagement, de sorte qu’elle n’aurait besoin de prestations que sur une courte période.

[17] Par lettre datée du 5 octobre 2015, la Commission a informé l’appelante que sa décision du 3 juin 2015 était maintenue (pièces GD3-29 et 30).

[18] Dans ses documents d’appel (pièce GD2), l’appelante a inclus une « lettre d’appel » (pièces  GD2-2 à 4) dans laquelle son mari explique que la langue première de l’appelante n’est pas l’anglais et qu’il n’était pas logique pour eux de payer deux loyers pendant qu’elle continuait de travailler à Yellowknife jusqu’à ce qu’elle se trouve un emploi à Calgary. Le mari a ajouté que, comme ils sont « une famille chrétienne », l’appelante a « le devoir de suivre son mari » (pièce GD2-4).

Observations

[19] L’appelante a plaidé qu’elle était fondée à quitter son emploi à Wal‑Mart parce qu’en tant qu’épouse et chrétienne, elle avait le devoir de suivre son mari et de ne pas rester derrière alors qu’il déménageait à Calgary à sa retraite.

[20] La Commission a plaidé que le déménagement à Calgary à la retraite du mari était une décision personnelle et pas une situation où l’appelante quittait son emploi pour suivre son époux, mais plutôt qu’ils avaient mutuellement pris la décision de quitter leur emploi et de se relocaliser. Une solution raisonnable pour l’appelante aurait été, plutôt que de quitter son emploi, de demeurer à Yellowknife et de continuer à travailler jusqu’à ce qu’elle puisse se faire transférer à un autre magasin Wal‑Mart ou qu’elle prenne un congé jusqu’à ce qu’elle soit établie dans son nouveau lieu de résidence. Par conséquent, l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était fondée à quitter son emploi au sens de la Loi.

Analyse

[21] L’article 30 de la Loi stipule que le prestataire qui quitte volontairement son emploi est exclu du bénéfice des prestations à moins qu’il puisse établir qu’il avait une « justification », c’est‑à‑dire qu’il était fondé à quitter son emploi.

[22]  Il est bien établi en droit qu’il y a « justification » lorsque, compte tenu de toutes les circonstances et selon la prépondérance des probabilités, le prestataire n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter l’emploi (White, 2011 CAF 190; Macleod, 2010 CAF 301; Imram, 2008 CAF 17; Astronomo, A-141-97; Tanguay, A-1458-84).

[23] La liste des circonstances énumérées à l’alinéa 29c) pour indiquer qu’un prestataire serait « fondé » à quitter son emploi n’est ni restrictive ni exhaustive, mais elle délimite le type de circonstances qui doivent être prises en compte (Campeau, 2006 CAF 376; Lessard,2002 CAF 469). Il n’est pas impératif que la situation de l’appelante corresponde précisément à l’un ou l’autre des facteurs énumérés à l’alinéa 29c) de la Loi pour que l’on conclue à l’existence d’une « justification ». Le critère à appliquer est de déterminer si, selon la prépondérance des probabilités, l’appelante n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi, compte tenu de l’ensemble des circonstances, y compris, mais sans s’y limiter, de celles qui sont précisées au sous‑alinéa 29c)(i) à (iv) de la Loi (Canada (Procureur général) c. Landry,A‑1210‑92 (CAF)).

[24] Le fardeau initial de la preuve repose sur la Commission, à qui il incombe de démontrer que l’appelante a quitté son emploi volontairement; une fois qu’il a été satisfait à cette charge initiale, le fardeau de la preuve passe à l’appelante, à qui il  incombe de démontrer qu’elle était « fondée » à quitter son emploi, c’est‑à‑dire qu’elle a quitté son emploi avec « justification » (White, supra; Patel, A-274-09).

[25] Dans la présente affaire, il n’est pas contesté que l’appelante a quitté volontairement son emploi lorsqu’elle a démissionné de l’emploi qu’elle occupait à Wal-Mart le 24 avril 2015.

[26] La charge de la preuve passe ensuite à l’appelante, à qui il incombe de prouver qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait.

[27] Le Tribunal doit prendre en considération les critères établis aux articles 29 et 30 de la Loi ainsi que les circonstances énumérées à l’alinéa 29c) de la Loi pour déterminer si l’une ou l’autre de ces circonstances existait au moment où l’appelante a quitté son emploi. L’existence de telles circonstances doit être évaluée en date du jour où elle a quitté son emploi (Lamonde,A-566-04), c’est‑à‑dire le 24 avril 2015.

[28] Le Tribunal a d’abord pris en considération les déclarations et le témoignage de l’appelante selon lesquels elle a quitté l’emploi qu’elle occupait à Wal-Mart parce qu’elle et son mari avaient décidé de déménager de Yellowknife à Calgary après que le mari eût définitivement quitté le marché du travail. Le Tribunal note que le mari de l’appelante n’a pas obtenu d’emploi à Calgary ni ne se cherchait du travail lorsqu’ils ont déménagé à Calgary. Il ne s’agit pas non plus d’une situation dans laquelle le mari de l’appelante déménageait à Calgary pour recevoir des soins de santé dont il avait besoin. Plutôt, le couple a décidé de se relocaliser et de vivre à Calgary à la retraite du mari, se rapprochant ainsi du fils et des petits‑enfants de ce dernier.

[29] Le Tribunal estime que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était « fondée » à quitter son emploi au sens du sous‑alinéa 29c)(ii) de la Loi en invoquant une nécessité d’accompagner son époux à un autre lieu de résidence. La Cour d’appel fédérale a statué que, même si la politique qui sous‑tend les circonstances énumérées au sous‑alinéa 29c)(ii) de la Loi vise la préservation de l’unité de la famille du prestataire, cette politique ne devrait jamais être appliquée aveuglément et de façon automatique sans qu’il soit dûment tenu compte des circonstances particulières du prestataire (Blondahl, A‑209‑93. En l’espèce, le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas déménagé pour suivre son mari, mais a plutôt pris une décision personnelle, de concert avec son mari, pour qu’ils se relocalisent à Calgary à la retraite de ce dernier. La décision de se relocaliser pour des raisons strictement personnelles ne constitue pas une justification en vertu du sous‑alinéa 29c)(ii) de la Loi, d’autant plus que la preuve n’établit pas la nécessité, pour la prestataire, d’accompagner son époux (décision CUB 68759; Canada (PG) c. Gagne, 1996 CAF 633).

[30] Le Tribunal estime qu’une solution raisonnable aurait été, pour le couple, de vivre temporairement séparément pendant que l’appelante aurait continué de travailler à Yellowknife et se serait cherché du travail à Calgary, ou qu’elle laisse son mari s’installer à Calgary puis qu’elle demande à être transférée à un magasin Wal-Mart à proximité du nouveau lieu de résidence.

[31] Le Tribunal a ensuite pris en considération les déclarations de l’appelante relatives à l’assurance raisonnable qu’elle avait de trouver un autre emploi après son déménagement à Calgary. Le Tribunal note que l’appelante a admis qu’elle ne s’était pas mise en quête d’un emploi à Calgary avant de quitter son emploi à Wal-Mart ni qu’elle avait demandé à être transférée à un magasin Wal-Mart de Calgary avant de démissionner. Le Tribunal accepte le témoignage de l’appelante selon lequel elle avait bien l’intention de se chercher du travail une fois établie à Calgary et note que l’appelante a assez vite retrouvé du travail après son déménagement. Cela étant dit, le Tribunal estime que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle avait l’assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat au sens de la circonstance énumérée au sous‑alinéa 29c)(vi) de la Loi pour prouver qu’elle était « fondée » à quitter son emploi. La Cour d’appel fédérale a statué que, pour que le sous‑alinéa  29c)(vi) de la Loi s’applique, il faut qu’il y ait trois choses : l’« assurance raisonnable », « un autre emploi » et un « avenir immédiat » (Lessard,2002 CAF 469). L’intention de l’appelante de se chercher du travail dans un plus grand centre urbain une fois qu’elle se serait installée à son nouveau lieu de résidence ne constitue par l’assurance raisonnable d’un autre emploi. En l’occurrence, l’appelante n’était en contact avec aucun employeur à Calgary avant de démissionner, sans parler de la réception d’une offre d’emploi.

[32] L’appelante avait peut‑être de bonnes raisons personnelles de quitter son emploi à Wal‑Mart, mais la Cour d’appel fédérale a clairement statué qu’une bonne raison de quitter un emploi n’est pas la même chose qu’un « motif valable » (Laughland, 203 CAF 129) et qu’il est possible, pour un prestataire, d’avoir une bonne raison de quitter son emploi sans pour autant être « fondé » à le faire au sens de l’article 29 de la Loi (Vairumuthu, 2009 CAF 277).

[33] Le Tribunal estime qu’une solution raisonnable au départ aurait été, pour l’appelante, de continuer à travailler au magasin Wal-Mart de Yellowknife jusqu’à ce qu’elle se trouve un autre emploi à Calgary, ou encore de prendre un congé de son emploi jusqu’à ce qu’elle ait pris les dispositions nécessaires pour se faire transférer à un magasin Wal-Mart de Calgary.

[34] Finalement, le Tribunal a pris en considération l’observation de l’appelante selon laquelle elle est en droit de toucher des prestations d’AE du fait qu’elle a cotisé au programme d’assurance‑emploi pendant plusieurs années. Le Tribunal fait observer qu’il n’est pas suffisant de cotiser au régime d’assurance‑emploi; l’appelante doit se conformer aux dispositions de la Loi pour être admissible à des prestations d’AE. Bien que le Tribunal reconnaisse la déception de l’appelante qui a cotisé au régime et été exclue du bénéfice des prestations, le fait de cotiser au régime au fil de temps n’est pas pertinent pour trancher la question de savoir si l’appelante était fondée à quitter volontairement son emploi à Wal‑Mart.

Conclusion

[35] Compte tenu de toutes les circonstances susmentionnées, le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle n’avait pas d’autre solution raisonnable que le départ lorsqu’elle a quitté son emploi à Wal‑Mart le 24 avril 2015. Le Tribunal conclut donc que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait une « justification », c’est‑à‑dire qu’elle était « fondée » à quitter volontairement son emploi et que l’appelante est donc assujettie à une exclusion du bénéfice des prestations d’AE pour une période indéfinie en application des articles 29 et 30 de la Loi.

[36] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.