Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 8 juin 2015, la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a rejeté l’appel du demandeur visant à obtenir une révision de la décision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission). La Commission a refusé de verser des prestations d’assurance-emploi (AE) au demandeur, car celui-ci a rempli ses rapports en retard et il n’avait pas de motif valable pour son retard.

[2] Le demandeur a pris part à l’audience devant la DG, tenue par téléconférence. L’intimée n’était pas présente.

[3] La décision de la DG a été envoyée au demandeur par lettre datée le 9 juin 2015.

[4] Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler (demande) à la division d’appel (DA) du Tribunal le 31 juillet 2015. Le demandeur a déclaré avoir reçu la décision de la DG le 30 juin 2015.

Questions en litige

[5] Il s’agit de déterminer si la demande a été reçue dans le délai de 30 jours.

[6] Sinon, il s’agit de déterminer si une prorogation du délai doit être accordée.

[7] La DA doit ensuite déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Droit applicable et analyse

[8] Aux termes de l’article 57 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), la demande de permission d’en appeler doit être présentée à la DA dans les trente jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision pour laquelle il interjette appel.

[9] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « la division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[10] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[11] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence ;
  2. elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ;
  3. elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

La demande a-t-elle été déposée dans le délai de 30 jours ?

[12] La demande a été déposée le 31 juillet 2015. La décision de la DG a été envoyée au demandeur, accompagnée d’une lettre datée du 9 juin 2015. Selon la demande, le demandeur a reçu l’envoi le 30 juin 2015.

[13] Trente (30) jours à partir du 30 juin 2015 donnent le 30 juillet 2015. Le délai de 30 jours se terminait donc le 20 juillet 2015. À ce titre, la demande n’a pas été déposée dans le délai de 30 jours. Elle a été déposée une (1) journée en retard.

Prorogation du délai

[14] Pour que la demande soit prise en considération, une prorogation du délai doit être accordée.

[15] Dans l’affaire X, (2014) CAF 249, la Cour d’appel fédérale, au paragraphe 26, a énoncé comme suit le critère applicable afin d’accorder une prorogation du délai [traduction] :

Lorsqu’il s’agit de décider s’il convient d’accorder une prorogation de délai pour déposer un avis d’appel, le critère le plus important est celui qui consiste à rechercher s’il est dans l’intérêt de la justice d’accorder la prorogation. Les facteurs à considérer sont les suivants :

  1. s’il y a des questions défendables dans l’appel ;
  2. s’il existe des circonstances particulières justifiant le non-respect du délai prévu pour déposer l’avis d’appel ;
  3. si le retard est excessif ;
  4. si la prorogation du délai imparti causera un préjudice à l’intimé.

[16] Le Tribunal n’a pas exigé que le demandeur fasse une demande écrire de prorogation du délai.

[17] Comme il s’agit d’un retard de courte durée et dans l’intérêt de la justice, j’accorde une prorogation de délai pour permettre le dépôt de la demande.

Permission d’en appeler

[18] La demande ne précise pas quelles erreurs se trouvaient dans la décision de la DG. Dans la demande, le demandeur répète et conteste à nouveau la situation de fait. Par conséquent, le Tribunal n’a pas été capable de déterminer sur quel alinéa du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS s’appuyait le demandeur.

[19] Pour cette raison, on lui a demandé de fournir les renseignements supplémentaires suivants :

Pour remplir la demande, le Tribunal a besoin de ces renseignements écrits :

  • Motifs de l’appel :
    • Expliquer en détail pourquoi vous en appelez de la décision de la division générale. Seuls les 3 motifs suivants peuvent être considérés par la loi :
    • Motif 1 : La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence. Par exemple, un appelant a soumis un relevé d’emploi, mais le document n’était pas joint au dossier d’appel.
    • Motif 2 : La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle en est arrivée à sa décision. Par exemple : le membre de la division générale a fondé sa décision sur le mauvais article du droit applicable.
    • Motif 3 : La division générale a commis une erreur importante concernant les faits figurant dans le dossier d’appel. Par exemple, le membre de la division générale a mentionné dans la décision que l’appelant n’a pas soumis de relevé d’emploi, et pourtant il y en a un qui a été soumis et qui se trouve au dossier d’appel.
    • Veuillez identifier tous les motifs applicables au cas présent et inclure le plus de détails possible. Il ne suffit pas d’indiquer qu’il y a eu une erreur ou qu’il y a eu manquement au principe de justice naturelle.
    • Le demandeur doit expliquer quelle était l’erreur ou comment le principe de justice naturelle n’a pas été respecté. Vous pouvez vous référer à des pages spécifiques des documents au dossier ou aux paragraphes de la décision de la division générale.
  • Pourquoi la division d’appel devrait accorder la permission d’interjeter appel :
    • Vous devez d’abord demander à la division d’appel la permission d’interjeter appel. En plus de déterminer les motifs de l’appel, vous devez expliquer pourquoi la demande auprès de la division d’appel a des chances raisonnables de succès.

 

[20] Le demandeur a répondu à la demande, mais encore une fois, il a répété les circonstances de son retard à remplir les documents qui viendraient appuyer sa demande d’AE. Il a indiqué qu’il était en désaccord avec l’affirmation suivante de la décision de la DG [traduction] : « On ne peut affirmer que l’appelant a agi comme une personne prudente et raisonnable. »

[21] Même si le demandeur ne précise pas à quel alinéa du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS il fait référence, le Tribunal procédera en supposant que le demandeur allègue une erreur mixte de fait et de droit, et fait donc référence aux alinéas 58(1)b) et c) de la Loi sur le MEDS.

[22] La question que devait trancher la DG concernait le refus de la Commission de verser des prestations, car le demandeur a négligé de retourner ses rapports dans les délais prévus conformément aux articles 10 et 50 de la Loi sur l’assurance-emploi et à l’article 26 du Règlement sur l’assurance-emploi.

[23] La DG a énoncé la jurisprudence et le droit pertinents lorsqu’elle s’est penchée sur les questions relatives à l’envoi tardif et aux motifs valables, aux pages 2 à 4 et 7 à 9 de sa décision.

[24]  La DG a noté que le demandeur avait témoigné à l’audience devant la DG. On retrouve, aux pages 4 à 6 de la décision de la DG, un résumé de la preuve au dossier, du témoignage donné à l’audience et des observations du demandeur. Le demandeur a présenté les mêmes observations à la DG, dans sa demande et dans sa réponse à la demande de précision des motifs d’appel.

[25] La division générale conclut sa décision en ces termes [traduction] :

[27] Dans la présente affaire, le Tribunal constate que l’appelant a attendu jusqu’au 3 juillet 2014 pour déposer sa déclaration relative à la période débutant le 20 avril 2014, et ce, sans en discuter avec la Commission. Il n’a pas démontré qu’il avait, pendant la période qui s’est écoulée avant qu’il remplisse ses prestations, de motif valable justifiant son retard. L’appelant a mentionné au Tribunal que ses tentatives de connexion à Internet avaient échoué. Cet échec était, en fait, attribuable au retard dans le dépôt de ses déclarations.

[28] L’appelant n’a pas tenté de se convaincre de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi en contactant l’intimée. Tout au long de la période de retard, il n’a fait aucun effort pour connaître ses droits et ses responsabilités aux termes de la Loi. On ne peut affirmer que l’appelant a agi comme une personne prudente et raisonnable. L’appelant a déclaré que le processus ne lui était pas familier et que le système n’était pas convivial. L’appelant a fourni au Tribunal une copie de son relevé des prestations du 7 mai 2014 (GD5-2) sur lequel figurent des instructions imprécises selon l’appelant. Le Tribunal est d’avis que le relevé des prestations est clair et sans ambiguïté. Le relevé mentionne, en lettres majuscules : « IMPORTANT- VEUILLEZ REMPLIR VOS DÉCLARATIONS SUR INTERNET À L’ADRESSE SUIVANTE : WWW.SERVICECANADA.GC.CADECLARATIONAE. SI VOUS N’AVEZ PAS ACCÈS À INTERNET, VEUILLEZ UTILISER LE SERVICE DE DÉCLARATION TÉLÉPHONIQUE : 1 800 531-7555 ». Le relevé de prestations donne d’autres consignes dont la note en lettres majuscules voulant que l’appelant DOIT REMPLIR SES DÉCLARATIONS LE SAMEDI 03-05-2014 ou quelques jours après, et si l’appelant n’a pas d’accès à Internet, il doit communiquer avec le service de renseignement de l’assurance-emploi au 1 800 206-7218 ou en se rendant à un bureau de Service Canada.

[29] Le Tribunal refuse d’accepter qu’une personne raisonnable, placée dans les mêmes circonstances, aurait repoussé pendant environ deux mois l’exercice de remplir ses déclarations nécessaires au versement des prestations. La tentative de l’appelant de se connecter au système de déclaration par Internet le 3 juillet 2014 a échoué puisque la déclaration devait être traitée au plus tard le 17 mai 2014 conformément au paragraphe 26(1) du Règlement. Le Tribunal est d’avis qu’une personne raisonnable, placée dans des circonstances similaires, aurait fait des vérifications auprès de Service Canada avant le 3 juillet 2014 pour se convaincre précisément de ses droits et de ses obligations en la matière, ce que l’appelant n’a pas fait.

[26] Les observations du demandeur à l’appui de la demande contestent à nouveau les faits devant la DG. Celle-ci est juge des faits et son rôle consiste à apprécier l’ensemble de la preuve et de tirer les conclusions fondées sur son évaluation de ces éléments de preuve. La DA n’est pas le juge des faits.

[27] Essentiellement, dans la demande, le demandeur plaide à nouveau le cas et ses observations des faits devant la DA.

[28] Si la permission d’en appeler est accordée, alors le rôle de la DA consiste à déterminer si une erreur susceptible de contrôle prévue au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS a été commise par la DG et, si c’est le cas, de fournir une réparation pour cette erreur. En l’absence d’une telle erreur susceptible de contrôle, la loi ne permet pas à la DA d’intervenir. Le rôle de la DA n’est pas de reprendre l’instruction de l’affaire. C’est dans ce contexte que la DA doit déterminer, au stade de la permission d’en appeler, si l’appel a une chance raisonnable de succès.

[29] J’ai lu et examiné soigneusement la décision de la DG ainsi que le dossier. Il n’est aucunement prétendu que la DG n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence en rendant sa décision. Le demandeur n’a relevé aucunes erreurs de droit ou conclusions de fait erronées que la DG aurait tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance lorsqu’elle en est arrivée à sa décision.

[30] Après révision, je suis convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[31] La demande est rejetée.

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