Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 7 mars 2016, la division d’appel (DA) du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a accordé la permission d’en appeler au motif d’une conclusion de fait erronée et d’un manquement possible aux principes de justice naturelle. La décision en appel de la division générale (DG) se rapporte au refus à l’égard du demandeur d’une prorogation du délai pour déposer un appel devant la DG.

[2] Le Tribunal a sollicité des parties leurs observations sur le mode d’audience, sur l’opportunité d’en privilégier un en particulier, ainsi que sur le bien-fondé de l’appel.

[3] L’intimée a déposé des observations qui recommandaient que, dans l’intérêt de l’équité procédurale, l’affaire soit renvoyée à la DG pour qu’elle soit entendue à nouveau sur la question de fond à savoir l’inadmissibilité pour inconduite imposée par la Commission.

[4] À la lumière des observations de l’intimée, l’appelant n’a pas eu besoin de présenter des observations.

[5] Cet appel a été tranché sur la foi du dossier pour les raisons suivantes :

  1. l’absence de complexité de la ou des questions faisant l’objet de l’appel;
  2. le besoin, en vertu du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[6] À la lumière des observations des parties, la tenue d’une audience devant la DA n’est pas nécessaire.

Question en litige

[7] La question est de déterminer si la DG a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Si la DG a manqué aux principes de justice naturelle en rendant sa décision.

[9] S’il convient pour la DA de rejeter l’appel, de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, de renvoyer l’affaire à la division générale, ou encore de confirmer la décision, de l’annuler ou de la modifier.

Droit applicable et analyse

[10] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[11] La permission d’en appeler a été accordée pour la raison que l’appelante avait exposé des motifs correspondants aux moyens d’appel énumérés et que l’un de ces motifs au moins conférait à l’appel une chance raisonnable de succès, en l’occurrence les motifs ayant trait aux moyens d’appel prévus aux alinéas 58(1)a) et c) de la Loi sur le MEDS.

[12] Notamment, la décision accordant la permission d’en appeler disait ceci :

[23] Les observations de la demanderesse au sujet des conclusions de fait erronées, soit que la DG a conclu qu’il n’y avait aucun élément de preuve concernant des communications sauf un appel incomplet, aucun élément de preuve de l’intention constante de la part de la demanderesse de poursuivre l’appel et aucune explication raisonnable pour le retard nécessitant un examen plus approfondi. Ces conclusions semblent ne pas concorder avec le dossier de la DG tel que présenté aux paragraphes [3] à [8] ci-dessus.

[24] Je remarque que l’avis d’appel devant la DG est daté le 7 août 2014 et a été estampillé le 11 août 2014 par Service Canada. La demande a été reçue par le Tribunal le 25 août 2014. La décision de révision a été datée le 21 juillet 2014; elle précisait que l’appelant avait 30 jours après avoir reçu cette décision pour déposer un appel. Envoyée par courrier ordinaire, la décision en révision ne serait parvenue à l’appelant que plusieurs jours plus tard.

[25] Par conséquent, je conclus que l’avis d’appel avait été déposé auprès de la DG du Tribunal dans le délai prescrit de 30 jours, mais qu’il y manquait une copie de la décision en révision et nommément la date de réception. Dans une lettre datée le 27 août 2014, le Tribunal a demandé à l’appelant de fournir une copie de la décision de révision et les motifs d’appel [traduction] « sans délai », ce qu’il a fait le 18 septembre 2014.

[26] La lettre du Tribunal datée le 26 septembre 2014 prévenait que si une explication du retard à déposer l’avis d’appel n’était pas produite avant le 26 octobre 2014, le membre de la DG pourrait accorder ou refuser la demande de prorogation du délai en se basant sur l’information déjà au dossier.

[27] Le demandeur a répondu par voie de lettre laquelle renfermait l’information requise sur chacun des éléments. Cette lettre a été estampillée par le Tribunal le 10 octobre 2014.

[28] Dans ces circonstances, il y aurait lieu d’envisager la possibilité que le traitement de l’appel du demandeur devant la DG n’ait pas respecté les principes d’équité procédurale.

[29] Relativement aux moyens d’appel invoquant la possibilité d’un manquement à la justice naturelle de la part de la division générale, ainsi que des erreurs de droit et des conclusions de faits erronées tirées de façon abusive ou arbitraire et sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. L’intimée est d’accord que l’appelant n’accusait pas de retard dans le dépôt de son appel à la DG; il affirme que l’affaire devrait être renvoyée à la DG afin qu’elle soit instruite sur le fond.

[13] La DG a conclu que l’appel était en retard et incomplet. Je conclus que l’avis d’appel n’était pas en retard. Et que le demandeur avait achevé l’appel moins de trois semaines après qu’il eut été avisé de ce qui était requis.

[14] La DG a refusé cette demande de prorogation du délai en se basant sur une application mécanique les facteurs de l’arrêt Gattallero, Canada (ministre du Développement des Ressources humaines) c. Gattellaro, (2005) CF 883. Elle n’a relevé aucune preuve de l’intention de poursuivre l’appel, aucune explication raisonnable pour justifier son retard ni aucune cause défendable.

[15] L’intimée a convenu que le demandeur avait démontré une intention constante de poursuivre son appel et qu’il avait une explication raisonnable pour justifier son retard. À l’examen du dossier, je suis d’accord.

[16] Par conséquent, la décision de la DG était fondée sur une conclusion de fait erronée que la DG aurait tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance et constituait une erreur de droit. De plus, la DG n’a pas respecté un principe de justice naturelle, nommément l’équité procédurale.

[17] Le paragraphe 59(1) de la Loi énonce les pouvoirs de la division d’appel.

La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour révision examen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

[18] À la lumière des observations des parties, de mon examen de la décision de la DG et du dossier d’appel, j’accueille l’appel. Parce que cette affaire n’a pas été entendue sur le fond et qu’elle peut nécessiter que les parties présentent des éléments de preuve, une audience devant la DG serait appropriée.

Conclusion

[19] L’appel est accueilli. L’affaire sera renvoyée à la division générale du Tribunal pour révision.

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