Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Décision

[1] Par consentement, l’appel est accueilli.

Introduction

[2] Le 14 août 2015, la division générale a rejeté l’appel interjeté par l’appelant à l’encontre de la décision précédente de la Commission.

[3] Dans les délais, l’appelant a présenté une demande de permission d’en appeler à la division d’appel, et la permission d’en appeler a été accordée.

[4] Le 3 mars 2016, une audience par téléconférence a été tenue. La Commission y a pris part et a présenté des observations, mais pas l’appelant. Puisque l’appelant a parlé plus tôt avec le personnel du Tribunal et a indiqué connaître la date et l’heure de l’audience, j’étais convaincu qu’il a été dûment avisé et j’ai procédé en son absence.

Droit applicable

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Analyse

[6] À première vue, cet appel a pour but de déterminer si la Commission a calculé correctement le taux de prestations de l’appelant. Cependant, cette affaire a pour but, en fait, de déterminer si la conduite de la Commission au cours du processus d’appel est conforme à la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale.

[7] Les faits en l’espèce sont complexes, mais les faits substantiels ne le sont pas.

[8] L’appelant a demandé des prestations dans quatre demandes distinctes qui ont été acceptées par la Commission. La Commission a calculé un taux de prestations initial pour chacune des demandes, mais l’appelant n’en était pas satisfait. À l’époque, le processus de révision qui est maintenant mandaté par la Loi sur l’assurance-emploi n’existait pas. Alors, l’appelant a interjeté appel directement auprès du conseil arbitral (maintenant la division générale).

[9] Avant que le conseil arbitral ne tienne son audience, l’appelant a interjeté appel d’une décision d’assurabilité de l’Agence du revenu du Canada auprès du ministre du Revenu national (MRN), ce qui trancherait la question en litige dans sa demande. Pour cette raison, son dossier a été mis en suspens jusqu’à ce que la décision soit disponible.

[10] Finalement, le MRN a rendu une décision en faveur de l’appelant, et l’appel qui était en suspens a été assigné à un membre de la division générale afin qu’il soit entendu.

[11] À ce stade, les choses ont commencé à se gâter.

[12] La Commission, après avoir refusé d’interjeter appel de la décision du MRN, a ajusté en conséquence ses taux de prestations établis précédemment, ce qui a entraîné l’annulation du trop-payé de l’appelant. Il n’est pas clair, à la lecture du dossier, du moment auquel l’appelant a été informé de la nouvelle décision de la Commission, s’il a bel et bien été informé, ainsi que des effets de cette décision.

[13] Du côté du Tribunal, une audience a été fixée dans les délais prescrits.

[14] À l’audience, le membre a révisé le nouveau taux de prestations amélioré qui a été révisé par la Commission, et a déterminé que celui-ci était correct puisque cela reflétait la décision du MRN. Pour cette raison, le membre a rejeté l’appel de l’appelant.

[15] Puisqu’il était certainement confus et contrarié par le rejet de son appel, l’appelant a porté de nouveau cette décision en appel. Encore une fois, la Commission a maintenu dans ses observations écrites que ses calculs ont été basés sur la décision du MRN et, par conséquent, étaient corrects. La Commission a également indiqué que [traduction] « la question à savoir si la DG du TSS a rejeté ou accueilli l’appel de [l’appelant] est sans intérêt », et elle a demandé que l’appel de l’appelant soit rejeté.

[16] Cela soulève deux questions.

[17] Premièrement, je tiens encore une fois à souligner que ni moi ni aucun membre de la division générale n’avons la compétence isolée de nous prononcer sur des questions comme bon nous semble. Nos compétences découlent uniquement de la loi et se limitent à rendre une décision dans le cadre d’une décision de révision ou de décisions (ou, si elles ont été déposées avant le 1er avril 2013, la décision ou les décisions initiales) de la Commission qui font l’objet d’un appel. En fait, la division générale est tenue par la loi de se prononcer sur chacune de ces décisions, faute de quoi, il s’agit d’une erreur sérieuse de compétence, et la division d’appel se doit d’intervenir afin de corriger cette erreur.

[18] Ainsi, je rejette en termes non équivoques l’affirmation faite par la Commission dans ses observations écrites qui est que l’appel est d’une façon ou d’une autre [traduction] « sans intérêt ». Le Parlement, lorsqu’il a établi les compétences du Tribunal, a déterminé que le Tribunal ne devrait pas se préoccuper de l’incidence des décisions, mais plutôt se préoccuper de la décision elle-même. Pour être clair, nous devons nous prononcer sur chacune des décisions qui nous sont présentées, quel que soit l’effet concret de ces décisions. Le fait que la décision de la Commission ait une influence sur l’admissibilité d’un prestataire aux prestations, ou encore, augmente ou diminue la somme d’un trop-payé n’a pas d’importance. Tout ce qui compte est de déterminer si la décision de la Commission qui est portée en appel était conforme à la loi et à la jurisprudence.

[19] Deuxièmement, même si la Commission a indiqué être un peu confuse quant à la raison pour laquelle l’appelant a porté en appel la décision de la division générale, je ne suis pas du tout confus quant à la raison pour laquelle il a agi de la sorte : c’est à cause de la décision regrettable de la Commission de modifier sa décision initiale au sujet du taux de prestations lorsque l’affaire était déjà portée en appel.

[20] Cette action, qui va à l’encontre de ce qui est énoncé dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Wakelin, A-748-98, me déroutait encore plus, car la Commission cite fréquemment (et avec raison) cette décision afin d’expliquer qu’elle ne peut pas modifier une décision portée en appel avant que celle-ci ne soit réglée.

[21] La Cour indique clairement dans cette décision qu’il est trop tard pour la Commission de modifier la décision portée en appel lorsqu’un appel a été interjeté. Après tout, si une décision est modifiée au milieu du processus d’appel, la raison pour laquelle la décision est portée en appel porte à confusion, exactement comme ce qui se passe pour cette affaire.

[22] La Commission, dans la plaidoirie qu’elle m’a présentée, a admis volontiers que cet appel n’était pas sans intérêt et qu’elle avait commis une erreur lorsqu’elle a modifié le taux de prestations alors que la décision faisait l’objet d’un appel. Même si elle considère que sa propre décision modifiée est juste et bien-fondée, elle a admis que l’appel de l’appelant portait actuellement sur le taux de prestations avant la décision du MRN, et par conséquent, la Commission a commis une erreur en allant à l’encontre de ce qui est énoncé dans l’affaire Wakelin.

[23] Les faits susmentionnés mènent inévitablement à la conclusion que la division générale a commis une erreur en n’évaluant pas adéquatement sa compétence et en ne déterminant pas adéquatement quelle décision faisait en fait l’objet d’un appel. Je souligne que bien que cette situation ait été causée par la Commission, il incombait au membre de la division générale d’être attentif à des problèmes comme celui-ci. En se prononçant sur la décision modifiée de la Commission et non sur la décision initiale, le membre a commis une erreur de compétence, et il est de mon devoir d’intervenir pour la corriger.

[24] Puisqu’il serait inutile de renvoyer l’affaire à la division générale, je rendrai plutôt la décision que le membre de la division générale aurait dû rendre.

[25] Après révision du dossier et des calculs détaillés de la Commission qui se trouvent dans le document GD4, je suis du même avis que la Commission. Les décisions modifiées sur les taux de prestations étaient justes compte tenu de la décision du MRN. Le taux pour les demandes de 2004, 2005 et 2006 devrait être de 413 $, et le taux pour la demande de 2007 devrait être de 423 $. La Commission m’a indiqué que cela allait éliminer le trop-payé que devait l’appelant.

[26] La décision initiale de la Commission est modifiée en conséquence.

Conclusion

[27] Pour les motifs qui précèdent et sur consentement, l’appel est accueilli.

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