Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

L’appelante, B. S., ainsi que son représentant, Jan Bicz, n’étaient pas présents à l’audience par téléconférence.

Introduction

[1] L’appelante travaillait pour Peacehold Incorporated (employeur) jusqu’au 13 août 2015.

[2] Le 17 septembre 2015, l’appelante a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi (prestations d’AE).

[3] Le 9 octobre 2015, Commission de l’assurance-emploi du Canada (intimée) a avisé l’appelante qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations d’AE parce qu’elle avait quitté volontairement son emploi le 13 août 2015, sans justification au sens de la Loi.

[4] Le 29 octobre 2015, l’appelante a présenté une demande de révision de la décision rendue par l’intimée le 9 octobre 2015; laquelle lui a été refusée le 1er décembre 2015.

[5] L’audience a eu lieu par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. la complexité de la question ou des questions portées en appel;
  2. le fait que la crédibilité ne pourrait pas constituer un enjeu important;
  3. le fait que l’appelante sera la seule partie présente;
  4. l’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires;
  5. le mode d’audience respecte les dispositions du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale voulant que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[6] Le 8 avril 2016, le service de repérage de Postes Canada a confirmé que l’appelante avait signé l’avis d’audience.

[7] Le 5 mai 2016, puisque l’appelante et son représentant n’étaient pas présents au cours de l’audience par téléconférence, et ce, après avoir reçu l’avis d’audience, le Tribunal a rendu une décision fondée sur la preuve au dossier.

Question en litige

[8] L’appelante était-elle fondée à quitter volontairement son emploi selon les articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

Droit applicable

[9] Le paragraphe 2(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

Définitions :

« conjoint de fait » La personne qui vit avec la personne en cause dans une relation conjugale depuis au moins un an.

[10] L’article 29 de la Loi prévoit ce qui suit :

Pour l’application des articles 30 à 33 :

  1. a) « emploi » s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
  2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
  3. (b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
    1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
    2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
    3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
  4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
    1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
    2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
    3. (iii) (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
    4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
    5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
    6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
    7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
    8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
    9. (ix) modification importante des fonctions,
    10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
    11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
    12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
    13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
    14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

[11] Le paragraphe 30(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

  1. (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage ;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

[12] Le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit ce qui suit :

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

[13] Le paragraphe 30(3) de la Loi prévoit ce qui suit :

(3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.

[14] L’article 51.1 du Règlement prévoit ce qui suit :

Pour l’application du sous-alinéa 29c)(xiv) de la Loi, sont notamment prévues les circonstances raisonnables suivantes :

  1. a) le prestataire est dans l’obligation d’accompagner vers un autre lieu de résidence une personne avec qui il vit dans une relation conjugale depuis moins d’un an, dans l’un ou l’autre des cas suivants :
    1. (i) l’un d’eux a eu ou a adopté un enfant pendant cette période,
    2. (ii) l’un d’eux est dans l’attente de la naissance d’un enfant,
    3. (iii) un enfant a été placé chez l’un d’eux pendant cette période en vue de son adoption;
  2. b) le prestataire est dans l’obligation de prendre soin d’un proche parent au sens du paragraphe 55(2).

Preuve

[15] L’appelante a travaillé pour l’employeur du 8 février 2010 au 13 août 2015.

[16] Le 27 août 2015, l’employeur a produit le relevé d’emploi (RE) de l’appelante et a indiqué comme motif de la cessation d’emploi le code E — Départ volontaire.

[17] Le 17 septembre 2015, l’appelante a présenté une demande de prestations d’AE.

[18] Le 7 octobre 2015, l’appelante a dit à l’intimée qu’elle avait quitté son emploi afin de déménager de X à X (Ontario) pour suivre une personne qui est maintenant son conjoint, mais pas son conjoint de fait. Elle a dit qu’ils n’ont pas vécu ensemble avant le déménagement. L’appelante a indiqué qu’ils sont ensemble depuis environ un an et demi, et qu’ils n’ont pas d’enfant ensemble. Ils n’avaient pas de biens ensemble au moment où elle a quitté son emploi. Ils prévoient se marier en juin 2016. L’appelant a dit qu’elle a fait le voyage entre X et X pendant plusieurs mois pour travailler, mais qu’elle trouvait que le trajet était trop long.

[19] Le 8 octobre 2015, l’appelante a dit à l’intimée qu’elle ne s’était pas cherché un emploi entre le moment de son déménagement en avril et le moment où elle a donné sa démission en août. L’appelante a indiqué que son employeur lui avait permis de travailler de sa maison à X après son déménagement, mais il a ensuite décidé qu’il s’agissait d’un trop gros risque de sécurité. L’appelante a indiqué qu’elle ne s’était pas cherché un emploi près de X avant de donner sa démission, parce qu’elle avait un voyage d’une durée de 3 semaines et demie de réservé.

[20] Le 9 octobre 2015, l’intimée a avisé l’appelante qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations d’AE parce qu’elle avait quitté volontairement son emploi le 13 août 2015, sans justification au sens de la Loi. L’intimée a indiqué qu’elle croyait que son départ ne constituait pas la seule solution raisonnable dans son cas.

[21] Le 29 octobre 2015, l’appelante a présenté une demande de révision de la décision de l’intimée datant du 9 octobre 2015.

[22] Le 1er décembre 2015, l’employeur a dit à l’intimée que l’appelante avait déménagé pour vivre avec quelqu’un d’autre et qu’elle faisait un trajet d’au moins une heure et demie pour se rendre au travail. L’employeur a dit que l’appelante trouvait que le trajet était trop long pour elle et qu’elle a par conséquent donné sa démission.

[23] Le 1er décembre 2015, l’appelante a dit à l’intimée qu’elle a déménagée de X à X pour vivre avec son conjoint. Elle a dit qu’elle a fait la navette pendant plusieurs mois, mais qu’elle trouvait que le trajet était trop difficile. Elle a donc donné sa démission. Elle a dit qu’après avoir donné sa démission, elle et son conjoint sont allés en vacances en Pologne pendant trois semaines. Elle a dit qu’elle ne s’est pas cherché d’emploi avant de donner sa démission parce que son voyage de trois semaines était déjà réservé. Elle avait l’intention de commencer sa recherche d’emploi après son retour de vacances.

[24] Le 1er décembre 2015, l’intimée a avisé l’appelante qu’elle n’avait pas modifié sa décision du 9 octobre 2015.

Observations

[25] L’appelante a fait valoir ce qui suit :

  1. Elle n’avait pas d’autre choix que de présenter une demande de prestations d’AE.
  2. Elle ne se faisait pas traiter équitablement, ce qui a causé un stress inutile dans sa vie.

[26] L’intimée a fait valoir ce qui suit :

  1. l’appelante n’avait pas démontré qu’elle était fondée à quitter volontairement son emploi, et par conséquent, elle lui a imposé une inadmissibilité de durée indéfinie à compter du 13 septembre 2015, conformément aux articles 29 et 30 de la Loi.

Analyse

[27] La Loi a pour objet d’indemniser les personnes qui ont perdu involontairement leur emploi et qui n’ont pas de travail (Gagnon [1988] RCS 29).

[28] Aux termes du paragraphe 30(1) de la Loi, un prestataire est exclu du bénéfice des prestations pour une période indéterminée s’il quitte volontairement un emploi sans justification. Le critère à appliquer, en tenant compte de toutes les circonstances, est de savoir si la prestataire avait une solution de rechange raisonnable au départ lorsqu’elle a quitté son emploi.

[29] Les articles 29 et 30 de la Loi prévoient une exception à la règle générale selon laquelle les assurés qui se retrouvent involontairement en chômage ont droit à des prestations. Cette exception doit donc recevoir une interprétation stricte (Goulet A-358-83).

[30] Le sous-alinéa 29c)(ii) de la Loi prévoit que le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi, compte tenu de toutes les circonstances, notamment si y a nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence.

[31] Aux termes du paragraphe 2(1) de la Loi, un conjoint de fait est la personne qui vit avec la personne en cause dans une relation conjugale depuis au moins un an.

[32] Le Tribunal conclut que puisque l’appelante et son conjoint n’étaient pas mariés et ne vivaient pas ensemble depuis au moins un an au moment où l’appelante a quitté son emploi, l’appelante n’était pas fondée à quitter volontairement son emploi pour être avec son conjoint, conformément au sous-alinéa 29c)(ii) de la Loi.

[33] La Cour fédérale a confirmé que de déménager pour être avec un conjoint ne constitue pas une justification pour quitter un emploi.

Canada (Procureur général) c. Thompson, 2007 CAF 391

[34] Le Tribunal conclut que l’appelante avait d’autres solutions raisonnables qu’elle aurait dû explorer avant de quitter son emploi. Elle aurait pu continuer de faire la navette jusqu’à X, et ce, jusqu’à ce qu’elle trouve un emploi convenable plus près de X, avant de donner sa démission. Elle aurait pu demander un congé à son employeur ou elle aurait pu reporter ses vacances en Pologne et se servir de ce temps pour se trouver un emploi plus convenable.

[35] La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel il incombe à un prestataire qui quitte volontairement son emploi de prouver qu’il n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait.

Canada (Procureur général) c. White, 2011 CAF 190

[36] Le Tribunal estime que la prestataire n’a pas prouvé qu’elle n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’elle l’a fait et, par conséquent, elle n’était pas fondée à quitter volontairement son emploi, conformément aux articles 29 et 30 de la Loi.

Conclusion

[37] L’appel est rejeté.

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