Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est accueilli et la cause référée à la division générale (section de l’assurance-emploi) pour une audience uniquement sur la question de la Charte Canadienne des droits et libertés (la « Charte »).

Introduction

[2]  En date du 9 février 2015, la division générale du Tribunal a conclu que :

  • Les gains d’emploi de l’Appelante devaient être traités en vertu de l’article 21(3) de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »).

[3] L’Appelante a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel en date du 11 mars 2015.  Permission d’en appeler a été accordée le 10 juin 2015.

Question en litige

[4] Le Tribunal doit décider si la division générale a refusé d’exercer sa compétence en ne se prononçant pas sur la question de la Charte.

La loi

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Normes de contrôle

[6] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (PG) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne au paragraphe 19 de sa décision que lorsque la division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[7] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant que non seulement la division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la division générale du Tribunal de la sécurité sociale et qu’elle n’est donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[8] La Cour d’appel fédérale termine en soulignant que lorsque la division d’appel entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi.

[9] Le mandat de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder v. Canada (PG), 2015 FCA 274.

[10] À moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle ou ait autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

[11] L’Appelante plaide essentiellement que la division générale a refusé d’exercer sa compétence en ne se prononçant pas sur la question de la Charte.

[12] Elle soutient que depuis le tout début des procédures, elle plaide que la façon dont la loi s'applique à son cas est inéquitable. Sans avoir explicitement soulevé la question de la Charte devant la division générale, elle plaide que les principes qu’elle défend sont tout de même la raison d'être des multiples contestations qu'elle a entreprises. Elle soutient que les questions de Charte soulèvent des questions de droit d'une certaine complexité, particulièrement pour les non-juristes. Elle précise que sa demande d'appel devant la division générale souligne que « la Loi sur l'assurance-emploi et son Règlement concernant les prestations maladies cause un préjudice défavorable au prestataire qui doit faire un retour au travail progressivement. »

[13] Lors de l’audience en appel, le Tribunal a été informé que l’Appelante a produit devant la division générale une décision du juge-arbitre J. Dawson, CUB 62690, qui traite spécifiquement d’un recours en vertu de la Charte et des dispositions pertinentes au présent litige.  On ne retrouve cependant aucune mention de cette cause dans la décision de la division générale.

[14] Il est vrai que l’Appelante n’a pas soulevé spécifiquement la question de la Charte devant la division générale mais le Tribunal est d’avis qu’elle a soulevé la question en sa capacité de non-juriste. La Cour fédérale nous enseigne qu’il faut tenir compte de la nature générale de la clientèle susceptible de porter une décision en appel devant le Tribunal. Les prestataires se représentent souvent eux-mêmes et ne connaissent pas nécessairement la façon de faire et le langage juridique approprié - Bossé c. Canada (PG), 2015 CF 1142.

[15] L’Intimée ne s’oppose pas, considérant les circonstances de la présente affaire, à un retour du dossier devant la division générale.

[16] Considérant les arguments au soutien de l’appel de l’Appelante sur le refus par la division générale d’exercer sa compétence et considérant la position de l’Intimée, et après révision du dossier, le Tribunal est d’accord pour accueillir l’appel.

Conclusion

[17] Le Tribunal accueille l’appel et retourne le dossier à la division générale (section de l’assurance-emploi) afin qu’un Membre procède à une audience uniquement sur la question de la Charte.

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