Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Décision

[1] Le Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) accorde la permission d’en appeler devant la division d’appel.

Introduction

[2] Le 12 février 2016, la division générale du Tribunal (DG-TSS) a accueilli l’appel du demandeur en partie. Elle a déterminé que :

  1. Le demandeur est considéré comme étant un travailleur indépendant ou exploitant une entreprise au sens du paragraphe 30(5) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement AE) et que la présomption au paragraphe 39(1) n’a pas été renversée et que le prestataire effectuait des semaines entières de travail à partir du 12 août 2007; et
  2. Le demandeur n’a pas fait sciemment de déclaration fausse ou trompeuse.

[3] En décembre 2012, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a conclu que le prestataire (le demandeur) ne pouvait être considéré comme étant en chômage à partir du 13 août 2007 et qu’il a fait des fausses déclarations sciemment. La Commission a émis un avertissement, mais elle n’a pas demandé au demandeur de payer une pénalité. Un trop-payé de 13 536.00$ a été établi.

[4] Le demandeur a porté cette décision en appel auprès d’un conseil arbitral (Conseil). Le Conseil, en juin 2013, a conclu que l’inadmissibilité imposée était fondée parce que le demandeur n’a pas prouvé qu’il était en chômage et que l’imposition d’une pénalité non monétaire était fondée.

[5] Le 23 juillet 2013, le demandeur a interjeté appel à la division d’appel du Tribunal. Le 19 mai 2015, la division d’appel du Tribunal a accueilli l’appel et a renvoyé la cause devant la DG-TSS pour une nouvelle audience.

[6] L’audience devant la DG-TSS a procédé par téléconférence le 9 décembre 2015. La DG- TSS a rendu sa décision le 12 février 2016.

[7] Le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler (Demande) devant la division d’appel le 15 mars 2016, dans les délais prescrits.

Questions en litige

[8] Est-ce que l’appel a une chance raisonnable de succès?

La loi et l’analyse

[9] Tel qu’il est stipulé aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission. »

[10] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[11] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] La permission d’en appeler sera en effet accordée par le Tribunal si le Tribunal est satisfait que le demandeur a démontré qu’il y a au moins un des moyens d’appel ci-dessus mentionnés et que le Tribunal est satisfait qu’un des moyens ait une chance raisonnable de succès.

[13] Pour ce faire, le Tribunal doit être en mesure de déterminer, conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, s’il existe une question de droit, de fait ou de compétence ou relative à un principe de justice naturelle dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

[14] Le demandeur, dans sa Demande, souligne que:

  1. a) La DG-TSS a commis une erreur de droit en analysant les 6 critères du paragraphe 30(3) du Règlement AE sans déterminer si le prestataire exploitait une entreprise ou travaillait à titre de travailleur indépendant durant la période de prestation;
  2. b) La DG-TSS a commis une erreur de droit en préférant une preuve indirecte par ouï- dire (les propos qu'aurait tenu le prestataire à l'enquêteur de la Commission, lesquels sont niés), preuve par ailleurs inadmissible, au témoignage légal et admissible du prestataire lors des auditions;
  3. c) Le prestataire a été privé de son droit à une défense pleine et entière compte tenu du très long délai écoulé depuis la demande de prestations (juin 2007) l'ayant privé de la possibilité de produire une preuve documentaire adéquate notamment quant à ses recherches d'emploi. Ce long délai est notamment dû à l'inaction prolongée de la Commission de l'assurance-emploi ayant demandé le remboursement plus de 5 ans (décembre 2012) après la demande initiale alors que la documentation pertinente avait déjà été détruite par le prestataire; et
  4. d) La DG-TSS a commis des erreurs manifestes et déterminantes dans l'interprétation des critères du paragraphe 30(3) du Règlement AE notamment quant au temps consacré et quant à la réussite financière de l’entreprise.

[15] Puisque la demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond de l'affaire (advenant qu’une audience soit nécessaire), les parties n’ont pas à prouver leurs arguments. Si le Tribunal est satisfait qu’un des moyens d’appel a une chance raisonnable de succès, la permission d’en appeler sera accordée.

[16] Quant à l’argument du demandeur que la DG n’a pas déterminé s’il exploitait une entreprise ou travaillait à titre de travailleur indépendant durant la période de prestation, la DG- TSS, au paragraphe [27] de sa décision, a déterminé qu’en août 2007 « l’objectif du prestataire était de faire de ce travail indépendant son principal moyen de subsistance ». Ainsi, la DG-TSS a déterminé qu’il exploitait une entreprise ou travaillait à titre de travailleur indépendant durant la période de prestation.

[17] Le demandeur soutient que la DG-TSS a préféré une preuve indirecte par ouï-dire (les propos qu'aurait tenu le prestataire à l'enquêteur de la Commission, lesquels sont niés), preuve par ailleurs inadmissible, à son témoignage lors des auditions. Les propos tenus lors des entrevues sont admissibles en preuve, contrairement à l’argument du demandeur.

[18] En ce qui concerne l’argument du demandeur que la DG-TSS a commis des erreurs dans l'interprétation des critères du paragraphe 30(3) du Règlement AE notamment quant au temps consacré et quant à la réussite financière de l’entreprise, le demandeur a présentés des observations sur la réussite financière de l’entreprise et du temps consacré devant la DG-TSS. La DG-TSS a considéré en détail les critères aux pages 17 à 26 de sa décision.

[19] Le rôle de la DG-TSS comprend la détermination du poids a accordé aux éléments de la preuve portés à son attention. Il n’appartient pas au Membre de la division d’appel qui doit déterminer s’il y a lieu d’accorder une permission d’en appeler d’apprécier et d’évaluer à nouveau la preuve qui a été soumise devant la division générale. Une simple répétition des arguments déjà avancés devant la division générale n’est pas suffisante pour démontrer qu’un des moyens d’appel ci-dessus mentionnés a une chance raisonnable de succès.

[20] Relativement à l’argument du demandeur qu’il a été privé de son droit à une défense pleine et entière compte tenu du délai écoulé depuis la demande de prestations (juin 2007) et de la possibilité de produire une preuve documentaire adéquate, le demandeur a avancé cet argument devant la division générale: voir le paragraphe [12] a) de la décision de la DG-TSS.

[21] La DG-TSS a noté que l’intimée a fait référence au délai dans ses observations écrites: voir le paragraphe [14] u). Mais, la conclusion de la DG-TSS au paragraphe [22] semble être au sujet seulement de la question de savoir si le demandeur avait les documents pour appuyer les informations qu’il a mentionné :

Le Tribunal constate que le prestataire a initialement été contacté par la Commission le 28 décembre 2011 en lien avec l’année 2008 (GD2-95). À ce moment, le prestataire était questionné en lien avec l’année 2008 et avait toujours les documents nécessaires en main puisque le délai de 4 ans n’était pas expiré. Il n’a pas répondu par écrit aux questions qui lui étaient adressées par écrit, mais s’est présenté à 2 reprises au centre Service Canada. Selon les informations contenues au rapport de l’enquêteur et, même si le prestataire conteste l’information qui s’y trouve, le prestataire a apporté le rapport de transactions lui-même et a expliqué la différence entre la date de vente et d’encaissement (GD2-99). Le prestataire a donné des explications similaires au Tribunal tout en ajoutant que le rapport comportait probablement certaines erreurs. Le Tribunal constate que le prestataire n’a pas mentionné d’erreurs en lien avec le rapport à l’enquêteur lorsqu’il lui a remis.

[22] Aux paragraphes [53] et [54] de la décision de la DG-TSS, il est noté que « la Commission n’a pas imposé de pénalité au prestataire en raison du fait que plus de 36 mois s’étaient écoulés entre la décision rendue suite à l’enquête de la Commission et la demande de prestations » et que l’article 41.1 de la Loi AE « indique qu’un avertissement peut être donné dans les soixante-douze mois suivant la perpétration de l’acte délictueux ». La DG-TSS a conclu que le demandeur n’a pas fait sciemment de déclaration fausse ou trompeuse, mais elle n’a pas fait d’analyse sur l’effet du délai entre la demande de prestations et le réexamen de la demande.

[23] L’appel n’est pas une nouvelle audience sur le fond de la demande de prestations d’assurance-emploi du demandeur.

[24] Après révision du dossier d’appel, de la décision de la division générale et des arguments du demandeur, le Tribunal conclut que :

  1. en ce qui concerne les motifs d’appels résumés aux paragraphes [14] a), b) et d), l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès; et
  2. en ce qui concerne le motif d’appel résumé au paragraphe [14] c), le demandeur a soulevé une question relative à une erreur de droit, dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

[25] L’appel a une chance raisonnable de succès relativement à une erreur de droit, décrite au paragraphe [20] ci-dessus.

Conclusion

[26] La permission d’en appeler est accordée. Elle est toutefois limitée par les conclusions énoncées aux paragraphes [22] à [25] ci-dessus.

[27] Cette décision sur la permission d’interjeter appel ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond de l’affaire.

[28] J’invite les parties à présenter des observations sur les questions suivantes : si une audience est appropriée; si oui, le mode de l'audience; ainsi que des observations sur le fond de l’appel.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.