Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 11 décembre 2015, la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a refusé d’accorder une prorogation de délai pour la présentation d’un appel. Le demandeur avait besoin d’une prorogation du délai pour porter en appel une décision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission). Du mois de mai au mois d’août 2014, le demandeur avait reçu des prestations pour maladie de l’assurance-emploi. La Commission avait déterminé qu’il avait touché des prestations grâce au régime d’avantages sociaux de son employeur, que celles-ci étaient considérées comme une rémunération et qu’elles seraient déduites de ses prestations. La répartition de cette rémunération a entraîné un trop-payé des 12 semaines de prestations de maladie que le demandeur avait reçues. La décision de révision est datée du 30 octobre 2014.

[2] Le demandeur a interjeté appel à la DG du Tribunal. Le 3 février 2015, il a déposé un avis d’appel (AA) incomplet. Cet AA a été déposé au-delà du délai prescrit pour une demande d’appel à l’encontre de la décision découlant du réexamen de la décision de la DG.

[3] Dans une lettre datée le 5 février 2015, le Tribunal a avisé le demandeur de ce qui était exigé pour que la demande soit complète. Il n’a pas répondu avant le 17 septembre 2015; il a déposé l’information exigée pour compléter la demande le 28 septembre 2015.

[4] Dans une lettre datée le 6 novembre 2015, le Tribunal a requis du demandeur une explication écrite de son retard à déposer son AA complété. Il a téléphoné au Tribunal où on lui a donné une explication verbale de ce qui était requis pour répondre aux exigences énoncées dans la lettre. Le demandeur n’y a pas donné suite dans le délai fixé au 7 décembre 2015.

[5] La DG a déterminé que :

  1. L’information manquante était une copie de la décision de réexamen;
  2. Le demandeur n’avait pas démontré son intention continue de poursuivre l’appel.
  3. Le demandeur n’avait pas démontré que sa cause était défendable. 
  4. Le demandeur n’avait pas fourni d’explication raisonnable pour la totalité de ce retard;
  5. Il n’y aurait aucun préjudice à l’endroit de la Commission.

Sur le fondement de ces conclusions, la DG a refusé la prorogation du délai pour déposer un appel.

[6] Le 1er février 2015, le demandeur a déposé une demande de permission d’en appeler (demande) auprès de la division d’appel (DA) du Tribunal. Il avait reçu la décision de la DG le 14 janvier 2016 et a déposé la demande dans le délai de 30 jours prescrit.

[7] Le Tribunal a requis du demandeur les motifs de son appel. Le demandeur a répondu dans le délai prévu.

Question en litige

[8] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès ?

Droit applicable et analyse

[9] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « la division d’appel accorde ou refuse cette permission ».

[10] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS indique que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[11] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS indique que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Les motifs d’appel du demandeur sont qu’il « est admissible à l’AE » et que le personnel de la Commission avait commis des erreurs au sujet de sa demande. Les arguments du demandeur peuvent se résumer ainsi :

  1. Il avait versé ses cotisations d’assurance-emploi;
  2. Le personnel de la Commission lui avait dit qu’il pouvait recevoir l’AE tout en recevant des prestations d’une assurance privée;
  3. Il ne devrait pas faire les frais des erreurs de la Commission;
  4. Il avait fourni, en annexe de sa demande, les réponses aux questions qui lui avaient été posées en novembre 2015 au sujet de son retard à déposer son AA auprès de la DG.

[13] Le demandeur ne fait mention d’aucun des moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. Il a affirmé qu’il trouvait difficile de comprendre ce qui est entendu par « raisons de l’appel » quand on lui demande ses raisons d’en appeler.

[14] La décision de la division générale renvoie aux décisions Canada (ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattellaro, (2005) CF 883, Muckenheim c. Canada (Commission de l’assurance-emploi), (2008) CAF 249, Canada (Procureur général) c. Larkman, (2012) CAF 204, Canada (ministre du Développement des ressources humaines) c. Hogervorst, (2007) CAF 41 et Fancy c. Canada (ministre du Développement social), (2010) CAF 63.

[15] Toutefois, il ne suffit pas d’énumérer la jurisprudence et d’indiquer correctement le ou les critères juridiques; encore faut-il les appliquer correctement. La division générale se doit d’indiquer correctement le ou les critères juridiques et d’appliquer le droit aux faits. Elle se doit également de respecter les principes d’équité procédurale.

[16] Bien que la division générale ait fait référence à l’affaire Larkman, elle ne semble pas avoir examiné si l’octroi d’une prorogation de délai serait dans l’intérêt de la justice. La division générale semble plutôt avoir appliqué de façon machinale les facteurs établis dans l’affaire Gattellaro, ce qui constituerait une erreur de droit le cas échéant.

[17] Qui plus est, je suis préoccupée par le fait que la division générale ait conclu que l’appel n’avait aucune chance raisonnable de succès sur le seul fondement que le demandeur n’avait pas « relevé aucune erreur de droit déraisonnable à la lumière de l’information au dossier » et que la seule information manquante au dossier de l’appel soit une copie de la décision de réexamen, dont la DG possédait déjà une copie dans son dossier. En effet, un appel à l’endroit de la DG pourrait avoir une chance raisonnable de succès si elle était fondée sur des erreurs autres que des erreurs de droit. Cette information manquante était un document que la DG possédait déjà dans le dossier et qui aurait dû faire l’objet d’une analyse pour déterminer si les intérêts de la justice seraient servis en accordant une prorogation du délai.

[18] Relativement aux moyens d’appel invoquant la possibilité d’un manquement à la justice naturelle de la part de la division générale, ainsi que des erreurs de droit et des conclusions de faits erronées tirées de façon abusive ou arbitraire et sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

[19] J’accueille, par conséquent, la demande de permission d’en appeler. Ce faisant, je souligne que la présente décision sur la demande de permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond du litige.

Conclusion

[20] La demande de permission d’en appeler est accordée.

[21] J’invite les parties à présenter des observations écrites sur la pertinence de tenir une audience et, si elles jugent qu’une audience est appropriée, sur le mode d’audience préférable, et à présenter également leurs observations sur le bien-fondé de l’appel.

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