Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelant a assisté à l’audience de son appel par téléconférence à partir d’Edmonton. Les représentants de l’appelant, Justin Morvay et Tyler Raymond, de la Clinique de litige en assurance-emploi de l’Université d’Ottawa, ont assisté à l’audience par vidéoconférence à partir d’Ottawa. La société mise en cause, TMK IPSCO Canada Ltd. (TMK IPSCO), ancien employeur de l’appelant, était représentée par H. M. (Monsieur H. M.), gestionnaire de l’usine, qui a assisté à l’audience par téléconférence.

Contexte

[1] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations régulières d’assurance-emploi et a indiqué qu’il a été congédié de son emploi le 24 août 2015. L’intimée, la Commission d’assurance-emploi du Canada (la Commission), a fait enquête sur le motif de cessation d’emploi et a établi que l’appelant a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Le 25 septembre 2015, la Commission a informé l’appelant qu’il ne recevrait pas de prestations d’assurance-emploi parce qu’il a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.

[2] Le 15 octobre 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réexaminer sa décision en niant les allégations de son employeur. La Commission a maintenu sa décision initiale et, le 27 novembre 2015, l’appelant a interjeté appel devant la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le Tribunal).

[3] L’audience a été tenue par vidéoconférence et téléconférence du fait que la crédibilité pourrait figurer au nombre des questions principales et que le mode d’audience respecte le besoin, en vertu du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[4] Il s’agit de déterminer si l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi au motif qu’il a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.

Droit applicable

[5] Le paragraphe 30(1) de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») stipule que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

[6] Aux termes du paragraphe 30(2) de la Loi, l’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

[7] Les termes « emploi » et « perte d’emploi » sont définis à l’article 29 de la Loi. L’alinéa 29a) de la Loi stipule que, pour l’application des articles 30 à 33, « emploi » s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de la période de référence ou de sa période de prestations.

[8] L’alinéa 29b) de la Loi stipule que la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais que n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant.

Preuve

[9] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 28 août 2015 (GD3-3 à GD3-16). Dans sa demande, l’appelant a déclaré que son dernier jour de travail a eu lieu le 24 août 2015 et a choisi « Congédié ou suspendu » pour indiquer le motif pour lequel il ne travaillait plus. Avec sa demande, l’appelant a rempli un questionnaire sur son congédiement (GD3-9 à GD3-10) dans lequel il a mentionné qu’il a été congédié de son poste d’électricien en bâtiment parce que son employeur l’a accusé d’avoir commis une infraction à la sécurité qu’il a décrite comme une [traduction] « avoir coupé l’alimentation électrique sans verrouillage » (GD3-9). L’appelant ne convenait pas avoir commis une infraction à la sécurité, et a déclaré que personne n’a été blessé ni qu’aucun bien n’a été endommagé ni n’aurait pu l’être.

[10] TMK IPSCO a fourni un relevé d’emploi (relevé) (GD3-17), qui mentionnait que l’appelant avait travaillé du 18 janvier 2014 au 24 août 2015, et qui donnait comme motif de cessation d’emploi « K » ou « Autre » et comprenait l’énoncé suivant sous « Commentaires » : « Congédié pour infraction au programme de sécurité de la compagnie ».

[11] Le 18 septembre 2015, un agent de la Commission a parlé à un représentant de l’employeur au sujet du motif pour lequel l’appelant ne travaillait plus chez TMK IPSCO et a documenté leur conversation dans un formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-18). L’agent a relevé les déclarations de l’employeur selon lesquelles l’appelant a été congédié parce qu’il avait enfreint une règle de sécurité, c’est-à-dire qu’il n’a pas effectué de verrouillage/essai (le processus qui consiste à verrouiller l’équipement et à faire un essai pour vérifier si le courant a été débranché) sur une pièce d’équipement. D’après l’employeur, l’appelant avait déjà vécu un incident dans une situation identique en novembre 2014 pour lequel il a reçu une suspension de 3 jours. L’employeur a ajouté que la procédure est énoncée dans ses procédures écrites de sécurité.

[12] L’employeur a fourni des documents additionnels à la Commission (GD3-19 à GD3- 26), dont les suivants :

  1. (a) L’engagement en matière de sécurité de 2014 signé par l’appelant et le directeur de l’usine le 20 février 2014 (GD3-20). Ce document comprenait de nombreux engagements en faveur de l’application des règles et règlements de l’employeur sur la sécurité et l’environnement et sur la sécurité personnelle de l’appelant et la sécurité des personnes autour de lui.
  2. (b) Le dossier d’orientation de l’employé sur l’incident du 24 novembre 2014 qui a donné lieu à une suspension de 3 jours infligée à l’appelant pour une infraction de type « absence de verrouillage/essai » (GD3-21). L’incident était décrit comme suit :
    [traduction]

    « Le 24 novembre 2014, un employé coupait un morceau d’un tuyau complet à l’appareil de sciage. D. H. ne pouvait effectuer la maintenance du convoyeur C3. L’employé a terminé la coupe et a retiré le tuyau du convoyeur C2 pour le placer sur le plateau ST2 qui se trouve au nord de C3. Pendant qu’il procédait à cette opération et que le tuyau descendait sur ST2, D. H. est entré dans l’aire de travail à l’extrémité est du plateau ST2 pour extraire un revêtement qui était tombé sous ST2 du côté nord du convoyeur C3, et aurait pu se faire frapper par le tuyau qui descendait sur le plateau.

    D. H. se dépêchait pour accomplir la tâche et devait retirer le revêtement pour le faire. Il n’a pas bien communiqué avec un autre employé pour l’informer qu’il entrait dans l’aire de travail et n’a pas verrouillé le convoyeur C2, car son but premier en ce faisant n’était pas de faire des travaux de maintenance. »
    La mesure corrective a été décrite ainsi :

    [traduction]

    « Infraction aux règles fondamentales de TMK IPSCO – Défaut de se conformer aux procédures de verrouillage. Trois jours de suspension non rémunérés devant être purgés du 25 novembre 2014 au 27 novembre 2014. D’autres cas entraîneront d’autres mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. »

    L’appelant a signé le dossier de consultation le 25 novembre 2014.
  3. (c) Le rapport d’incident portant sur l’incident survenu le 24 août 2015 qui a donné lieu au licenciement de l’appelant (GD3-22). L’incident a été décrit ainsi :
    [traduction]

    « Le 24 août 2015 à 7 h 40, le spécialiste de la SHM a observé que l’employé se trouvait à l’intérieur de la ligne de STS du côté gauche du convoyeur C9. Le spécialiste est alors allé vérifier si la procédure de VE (verrouillage et essai) avait été exécutée. Le verrouillage n’avait pas été effectué. Après avoir parlé à l’employé et au chef d’équipe de la production, il a conclu qu’il n’avait pas communiqué avec les employés dans l’usine pour les aviser qu’il devait vérifier un capteur de proximité sur le convoyeur C9. L’employé a déclaré qu’il avait mis hors tension le boîtier d’alimentation du convoyeur C9; toutefois, il n’avait pas appliqué son verrouillage personnel avant d’entrer dans l’aire de travail. Il n’a pas suivi la procédure EDM-LOTL-009.

    Défaut de verrouiller suivant la procédure EDM-LOTL-009 4.3 L’employé autorisé doit, avant de mettre hors tension le mécanisme C4 OU C4-MDP01 et le mécanisme C9 OU C9- MDP01, informer les employés touchés qui se trouvent dans l’aire de travail que le courant sera coupé, du motif de la coupure de courant et du verrouillage de l’équipement. »

    Au vu de l’infraction antérieure commise par l’appelant, il convenait de le suspendre pendant une semaine sans rémunération, puis de le licencier.
  4. (d) L’avis de mesure disciplinaire (licenciement) donné à l’appelant le 28 août 2015 (GD3-23). L’avis fait référence à l’incident du 24 août 2015 sous le vocable « deuxième infraction aux règles fondamentales de TMK IPSCO – programme de protection contre les dangers » et au défaut de se conformer aux procédures de verrouillage.
  5. (e) Une copie de LOTO-009, qui précise la procédure de verrouillage du convoyeur C9 de l’employeur (GD3-24 à GD3-26).

[13] Le 24 septembre 2015, l’agent a téléphoné à l’appelant au sujet du motif pour lequel il a été congédié et a documenté leur conversation dans un formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-27). L’agent a relevé les déclarations de l’appelant selon lesquelles il a été congédié en raison d’une infraction à la sécurité, et d’autres affirmations qu’il a fermé un convoyeur, mais qu’il n’avait pas de verrou avec lui, ce qui fait qu’il a mis hors tension le boîtier électrique, ce qui arrête l’ensemble du mécanisme. L’appelant a reconnu que le verrouillage de l’interrupteur constitue une « règle fondamentale », mais a déclaré que c’est une règle qui s’applique au personnel de production, alors qu’il s’occupe de la maintenance. L’appelant affirme qu’il lui a fallu deux minutes pour faire ce qu’il avait à faire sans procéder au verrouillage et que même si la procédure appropriée avait consisté à aller chercher le verrou et à l’installer, il n’y avait pas de scénario prévoyant toutes les éventualités.

[14] Dans une lettre datée du 25 septembre 2015 (GD3-28 to GD3-29), la Commission a informé l’appelant qu’il ne recevrait pas de prestations d’assurance-emploi parce qu’il a perdu son emploi chez TMK IPSCO le 24 août 2015 en raison de sa propre inconduite.

[15] Le 15 octobre 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réexaminer sa décision (GD3-30 à GD3-37) en affirmant qu’il a pris une décision en se servant au mieux de son pouvoir discrétionnaire pour l’une des nombreuses tâches de son horaire quotidien occupé. L’appelant a joint une lettre de 6 pages à sa demande, dans laquelle il décrit de façon détaillée la séquence des événements et les motifs pour lesquels il s’est servi de son jugement et de son pouvoir discrétionnaire plutôt que de suivre la politique de verrouillage sécuritaire de l’employeur.

[16] Le 29 octobre 2015, un agent de la Commission a téléphoné à l’appelant au sujet de sa demande de réexamen et a documenté leur discussion dans un formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-38). L’agent a noté que l’appelant a confirmé qu’il a été congédié après une infraction à la sécurité. L’agent a également relevé que l’appelant a manifesté son désaccord avec son licenciement en affirmant qu’il s’est servi de son pouvoir discrétionnaire pour ne pas mettre de verrou sur l’interrupteur parce qu’il travaille dans le domaine de la maintenance et que les politiques de sécurité s’adressaient aux travailleurs de la production. L’appelant soutient qu’il ignorait les attentes de l’employeur qu’il utilise le verrou dans cette situation, que les règles changent constamment et qu’il n’était pas certain de ce qui était autorisé ou non, ce qui fait qu’il s’est servi de son jugement. Il n’a pas quitté l’aire de travail et n’estimait pas qu’il y avait des problèmes ou des préoccupations en matière de sécurité. L’appelant a en outre déclaré qu’il n’était pas d’accord avec la suspension de 3 jours relativement à l’incident précédent, mais qu’il s’y est rangé pour reprendre le travail.

[17] La Commission a maintenu sa décision initiale du 24 septembre 2015 selon laquelle l’appelant était exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi parce qu’il a perdu son emploi chez TMK IPSCO en raison de sa propre inconduite (GD3-39 à GD3-40).

[18] L’appelant a interjeté appel devant le Tribunal le 27 novembre 2015 (GD2).

[19] Le 14 janvier 2016, après s’être vu attribuer le statut de société mise en cause dans cet appel, l’employeur a fourni des documents additionnels (GD8-1 à GD8-28), dont :

  1. (a) Des copies des examens des procédures de sécurité, d’exploitation et de qualité menées entre avril et juin 2015, toutes signées par l’appelant (GD8-2 à GD8-21).
  2. (b) Le feuillet de formation (GD8-22) pour la révision de la politique de sécurité d’Edmonton (à GD3-23) le 12 août 2015, signé par l’appelant.
  3. (c) La politique sur les règles fondamentales de sécurité de l’employeur, qui a été revue et signée par l’appelant le 16 septembre 2014 (GD8-25). Juste au-dessus de la signature de l’appelant se trouve la politique indiquant qu’un employé qui enfreint l’une ou l’autre des règles fondamentales de sécurité (dont le défaut de suivre les procédures de verrouillage correspond à l’une de ces règles) fera l’objet d’une mesure disciplinaire pouvant mener au congédiement.
  4. (d) Le compte rendu de la causerie sécurité du 6 janvier 2016 intitulée « La sécurité, c’est l’affaire de chacun », qui au dire de l’employeur est une causerie type de celle qui a lieu au début de chaque quart et qui reflète le niveau d’engagement en matière de sécurité (GD3-26 à GD3-28).

À l’audience

Témoignage de l’appelant

[20] L’appelant a témoigné que la procédure de verrouillage du convoyeur C9 est énoncée dans la politique LOTO-009 de l’employeur de GD3-24 à GD3-26. L’appelant a déclaré qu’il a suivi les étapes 1 et 2 du protocole en 5 étapes énoncé à l’article 4.0 de la politique LOTO-009, puis a coupé le courant du convoyeur. D’après l’appelant, le débranchement du courant se faisait à l’extérieur de l’immeuble à l’extrémité du convoyeur, et il pouvait voir le panneau en vue du débranchement en tout temps (bien qu’il se trouvait de l’autre côté) et personne ne pouvait venir dans l’aire de travail sans le voir. De plus, l’usine n’était pas en exploitation à ce moment-là, et ce même si tous les employés des quarts de jour se trouvaient alors sur le site. L’appelant a déclaré qu’il n’a pas suivi l’étape 3 du protocole parce qu’il n’y avait pas d’employés dans les environs, n’a pas suivi l’étape 4 du protocole parce qu’il était impossible que quelqu’un de C4 entre dans cette aire, et n’a pas suivi l’étape 5 parce qu’il n’allait pas dans l’aire mécanique du convoyeur. L’appelant a reconnu que les étapes qu’il a franchi ne « respectaient pas parfaitement » le protocole de verrouillage de l’employeur, mais il a déclaré qu’il s’est conformé aux procédures de sécurité qui étaient nécessaires compte tenu du fait que personne ne se trouvait dans les alentours, et il a ajouté qu’il n’existait pas de véritable danger pour quiconque à la suite des étapes qu’il a franchi.

[21] L’appelant a témoigné que le 24 août 2015, il a procédé à une inspection visuelle de l’aire de travail. Il a remarqué qu’il y avait quelque chose dans le capteur de proximité C9 et voulait examiner cela de plus près. L’appelant voulait vérifier si des dommages ont été causés au capteur ou si des réparations étaient nécessaires. L’appelant a constaté après inspection, que ce n’était qu’un morceau de plastique; il l’a enlevé, a remis le convoyeur sous tension et est revenu dans l’édifice. L’appelant a déclaré que les gestes qu’il a posés ne représentaient pas de danger en raison de la mise hors tension de C9 et qu’il était impossible que quelque chose ait pu être en fonction ou mis sous tension.

[22] L’appelant a témoigné que l’incident a été porté à l’attention de l’employeur parce que [traduction] « la dame de la sécurité m’a abordé ultérieurement et m’a demandé pourquoi je me trouvais dans l’aire de travail qui n’était pas verrouillée. » L’appelant a expliqué qu’il a mis le convoyeur hors tension et qu’il n’est entré dans l’aire de travail que temporairement.

[23] Quand l’appelant s’est fait demander pourquoi il n’a pas verrouillé le débranchement, il a déclaré qu’il était sur place à ce moment-là « pour faire une inspection visuelle » et qu’il voulait seulement voir ce qui l’attendait avant de procéder à un verrouillage. Lorsque l’appelant a examiné le capteur et a constaté qu’il s’agissait seulement d’un morceau de plastique, il a estimé qu’il n’avait pas besoin de verrouillage pour mettre le système hors tension afin de faire d’autres réparations.

[24] Quand l’appelant s’est fait demander s’il s’agissait de sa première infraction, il a répondu « non ». L’appelant a témoigné que neuf (9) mois plus tôt, il n’avait pas procédé au verrouillage lorsqu’il travaillait sur un convoyeur. Dans ce cas, il travaillait sur un capteur sous un moteur, qu’il a dû retirer et remplacer. L’appelant a déclaré que le [traduction] « remplacement du capteur » n’est pas vraiment une opération mécanique, mais que l’enlèvement du revêtement en est une. D’après l’appelant, un autre employé est entré dans l’aire de travail pour couper le tuyau et utilisait la scie lorsque le revêtement que l’appelant était en train de placer est tombé. L’appelant a dû descendre pour récupérer le revêtement. Pendant qu’il faisait cela, un morceau de tuyau a roulé vers lui alors qu’il s’éloignait en marchant. L’appelant a déclaré qu’il a été suspendu pour ne pas avoir verrouillé le convoyeur sur lequel le tuyau a roulé, soit sur le convoyeur situé en amont sur lequel travaillait l’appelant. L’appelant a établi que le document GD3-21 est la lettre signée en rapport avec la suspension de 3 jours pour cet incident. L’appelant soutient qu’il ne travaillait pas à la hâte pour finir sa tâche, mais qu’il voulait sortir de l’aire de travail afin que l’usine soit relancée.

[25] L’appelant a témoigné qu’il procédait au verrouillage [traduction] « au moins deux fois par jour » entre l’incident disciplinaire du 24 novembre 2014 et l’incident final du 24 août 2015, chaque fois sans problèmes ou avertissements de l’employeur.

Contre-interrogatoire de l’appelant par l’employeur

[26] Quand l’appelant s’est fait demander par Monsieur H. M. si d’autres étapes auraient dû être suivies relativement à l’incident du 24 août 2015, l’appelant a dit qu’il ne pensait pas avoir à faire autre chose parce qu’il faisait [traduction] « seulement une inspection visuelle, il regardait ». Monsieur H. M. a ensuite demandé à l’appelant de lire l’article 2.1 de la procédure sur le verrouillage dans LOTL-009 (à GD3-24). L’appelant a lu ce qui suit :

[traduction]

« Cette procédure s’applique seulement si le personnel autorisé exécute des procédures d’exploitation ou de maintenance régulières sur le convoyeur C9 et en-dehors du plateau ST5. »

L’appelant s’est fait demander s’il était un « employé autorisé » et il a répondu « non ». On lui a alors demandé s’il [traduction] «exécutait des procédures régulières d’exploitation ou de maintenance » et il a répondu « Non, parce que je faisais seulement une inspection visuelle ». Monsieur H. M. a alors souligné que l’appelant a pris les mesures nécessaires pour corriger le problème, qui avait trait à la maintenance, et qu’il n’a pas fait ce qu’il était censé faire.

[27] On a demandé à l’appelant de lire l’article 6.1 de LOTO-009, soit les « Règles fondamentales » de la procédure de verrouillage du convoyeur C9 (à GD3-26). L’appelant a lu ce qui suit :

[traduction]

« Toujours utiliser votre propre verrou du boîtier de verrouillage. »

L’appelant, qui s’est fait demander s’il avait suivi cette règle fondamentale, a répondu « non ».

[28] En réponse à une demande d’explication de l’objet d’un verrouillage, l’appelant a déclaré qu’il vise à mettre hors tension le fonctionnement d’un système pour qu’il ne puisse fonctionner, et il a ajouté qu’il s’agit d’une procédure appliquée pour assurer la sécurité d’un employé ou d’employés dans l’aire de travail.

[29] Quand on lui a demandé comment il pouvait savoir que personne ne viendrait activer le débranchement, l’appelant a déclaré qu’il [traduction] « était en mesure de le voir ». Quand on a demandé à l’appelant à quelle distance il se trouvait du débranchement, l’appelant a déclaré qu’il était à environ 10 pieds, et non à portée de main, mais l’appelant a réitéré qu’il pouvait le voir en tout temps. Quand on lui a demandé s’il était possible qu’un tuyau soit envoyé de C4 à C9 même si C9 est débranché (absence de courant), l’appelant a déclaré : [traduction] « Oui. Un tuyau pourrait descendre d’environ 3 pieds. » Monsieur H. M. a ensuite demandé si la procédure de verrouillage avait pour objet d’empêcher un tuyau de descendre et de frapper un employé, et l’appelant a répondu : « Oui. »

[30] L’appelant s’est fait demander de lire la première phrase du rapport d’incident à GD3-22. L’appelant a lu ce qui suit :

[traduction]

« Le 24 août 2015 à 7 h 40, le spécialiste de la SHM a observé que l’employé se trouvait à l’intérieur de la ligne de STS du côté gauche du convoyeur C9. »

Quand on a demandé à l’appelant s’il contestait cet énoncé, il a dit : [traduction] « Je ne l’ai pas vu. »

[31] L’appelant a été interrogé au sujet de sa violation précédente de la procédure de verrouillage impliquant le convoyeur C3 et plus particulièrement de l’effet de la procédure de verrouillage pour les employés sur C3. L’appelant a répondu : [traduction] « Je ne sais pas, j’ai regardé la procédure d’exploitation type dans ce cas précis. » Monsieur H. M. a ensuite déclaré : [traduction] « Si vous travaillez sur C3, vous devez verrouiller C2 et C3 pour empêcher qu’un tuyau roule, comme cela peut survenir sur C9. » Monsieur H. M. a renvoyé l’appelant à la feuille de formation du 14 avril 2015 à GD8-5, et a constaté que le sujet de la formation ce jour-là était « Rév. 3 de LOTO-016 à rév. 3 de LOTO 003 ». Monsieur H. M. a déclaré que ces deux procédures de verrouillage ont été révisées de manière exhaustive avec les employés présents, et a demandé à l’appelant s’il était présent à la séance de formation du 14 avril 2015, ce à quoi l’appelant a répondu : « Oui. » Quand l’appelant s’est fait demander pourquoi son infraction sur C3 s’était produite quatre (4) mois plus tard, l’appelant a répondu : [traduction] « Pour autant que je sache, il n’y avait pas de problème de verrouillage sur C3. Je ne me rappelais pas du volet en amont. »

[32] Lorsque l’appelant s’est fait demander s’il a agi à la hâte et s’il a pris des raccourcis plutôt que de suivre les procédures de verrouillage appropriées dans le cas des deux infractions, il a déclaré :

  1. Dans le cas de l’infraction C3, il tentait simplement de faire le travail et d’« en sortir »; il pensait que l’employé se servait de la scie et ne donnerait pas de coup de pied sur le tuyau. L’appelant affirme que le volet en amont/en aval de la procédure de verrouillage était nouveau pour lui.
  2. En ce qui concerne l’infraction C9, il n’était sur place que pour faire une inspection visuelle et a retiré le plastique, ce qui fait que dans son esprit, le verrouillage n’était pas nécessaire.

[33] Quand l’appelant s’est fait demander s’il avait enfreint les procédures LOTO-009, il a déclaré qu’il ne les avait pas entre les mains à ce moment-là, mais qu’il en avait pris connaissance. L’appelant a déclaré : [traduction] « Je croyais que je pouvais procéder à une mise hors tension avant une inspection visuelle avant d’exécuter un verrouillage. » L’appelant a ajouté qu’il a suivi les procédures au meilleur de ses souvenirs et qu’il a fait ses propres évaluations des situations.

[34] L’appelant s’est ensuite fait demander où les employés peuvent trouver les procédures de verrouillage et a déclaré qu’elles se trouvent dans les postes d’exploitation de chaque convoyeur. Quand il s’est fait demander pourquoi il n’a pas pris [traduction] « deux minutes pour vérifier la procédure », l’appelant a déclaré qu’il ne l’avait pas jugé nécessaire parce qu’il venait d’effectuer une inspection visuelle, qu’il avait vu quelque chose, qu’il avait mis le convoyeur hors tension pour vérifier de plus près, qu’il avait vu un morceau de plastique, l’avait enlevé, et après avoir constaté qu’aucune réparation n’était nécessaire, avait décidé qu’aucun verrouillage n’était requis et avait remis le convoyeur sous tension.

[35] L’appelant s’est fait demander de lire la section « Mesures correctives » du rapport de conseils à l’employé sur l’incident disciplinaire du 24 novembre 2014 (à GD3-21). L’appelant a lu ce qui suit :

[traduction]

« Infraction aux règles fondamentales de TMK IPSCO – Défaut de se conformer aux procédures de verrouillage. Trois jours de suspension non rémunérés devant être purgés du 25 novembre 2014 au 27 novembre 2014. D’autres cas entraîneront d’autres mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. »

Lorsque l’appelant s’est fait demander comment il pouvait affirmer qu’il ne pensait pas être congédié advenant une autre infraction en matière de verrouillage (voir GD2-7 à GD2-8), il a déclaré qu’il ne se souvenait pas de ce volet des mesures correctives jusqu’à ce qu’il en prenne connaissance dans le dossier d’appel qui lui a été envoyé.

Témoignage de Monsieur H. M. pour le compte de l’employeur

[36] Monsieur H. M. a témoigné que les politiques types que l’appelant s’est engagé à suivre le 16 septembre 2014 (voir GD8-25) et la politique de sécurité de TMK IPSCO Canada (à GD8-23) n’ont jamais changé. Monsieur H. M. a déclaré qu’elles ont été mises en place à l’ouverture de l’usine en 2012 et qu’elles ont toujours été en vigueur. Monsieur H. M. a ajouté que l’employeur révise régulièrement ses politiques pour les améliorer au besoin et que les politiques de sécurité propres aux appareils sont mises à jour quand l’appareil est mis à jour ou réoutillé. Dans tous les cas, chaque employé est informé des changements apportés à la politique lorsqu’ils sont mis en œuvre.

[37] Quand Monsieur H. M. s’est fait demander si les gestes posés par l’appelant le 24 août 2015 représentaient un danger, il a déclaré qu’un tuyau ou plusieurs tuyaux auraient pu tomber de C4 à C9. D’après Monsieur H. M., même si les tuyaux ne s’étaient pas déplacés sur toute la longueur du convoyeur parce que le courant était fermé, ils auraient pu se déplacer suffisamment pour blesser l’appelant ou une autre personne dans l’aire de travail ou endommager l’équipement. Monsieur H. M. a déclaré que bien que l’appelant a pu prendre certaines mesures, il n’a pas pris toutes les mesures nécessaires pour sécuriser l’aire de travail avant d’entreprendre le travail qu’il faisait. Monsieur H. M. a également déclaré que l’appelant a été [traduction] « tout simplement chanceux ce jour-là » parce que [traduction] « tout est possible », et c’est pourquoi les employés sont formés pour se conformer aux politiques de sécurité et pour éviter de courir des risques avec leur sécurité et celle d’autrui.

Observations

[38] L’appelant fait valoir que sa conduite, dont on pourrait soutenir qu’elle représente une violation de l’une des politiques de sécurité de l’employeur, ne correspondait pas à une inconduite au sens de la Loi pour les motifs suivants :

  1. L’appelant n’a pas fait fi de la politique de verrouillage de l’employeur, il a tout simplement omis de respecter tout à fait la politique. L’appelant a abordé la situation de la bonne façon lorsqu’il a pris des mesures pour sécuriser l’aire de travail alors que personne n’y travaillait et qu’il tentait de faire face à un problème le plus efficacement possible pour ne pas faire diminuer la productivité pour l’employeur.
  2. L’appelant comptait seulement deux (2) incidents – à neuf (9) mois d’intervalle – lors de ses vingt (20) mois chez TMK IPSCO, au cours desquels il a procédé à de nombreux verrouillages sans problèmes ni avertissements. Le comportement de l’appelant n’était pas volontaire parce qu’il était inhabituel. En outre, il ne présente aucune tendance établie de non-conformité à la procédure de verrouillage.
  3. L’appelant ne croyait pas raisonnablement qu’il aurait pu être congédié pour non-respect de la procédure de verrouillage LOTO-009 le 24 août 2015. Les clauses contenues dans les documents de l’employeur prévoyant que les infractions feront l’objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement sont des « clauses types » et suggèrent que des mesures disciplinaires autre que le congédiement sont possibles.

[39] La Commission a soutenu que la décision de l’appelant de ne pas se conformer aux procédures de verrouillage a été prise à des fins de convenance et enfreignait l’engagement de sécurité qu’il a pris et les politiques de sécurité de l’employeur. Peu importe qu’il n’y ait pas eu de véritable danger selon l’appelant. Les règles de sécurité sont en place pour certaines raisons et l’appelant connaissait la règle sur le verrouillage et a choisi de ne pas la suivre. Le défaut par l’appelant de se conformer à la procédure de verrouillage LOTO-009 représentait une inconduite au sens de la Loi parce qu’il connaissait la règle de sécurité et a choisi délibérément de ne pas s’y conformer. En outre, comme il avait déjà été suspendu une fois auparavant pour non-respect de la règle de sécurité, il savait que ses gestes pouvaient faire l’objet d’une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’au congédiement.

[40] L’employeur, à titre de société mise en cause, a adopté les observations de la Commission en ce qui concerne le non-respect délibéré de la politique de verrouillage par l’appelant. L’employeur a également fait valoir que la procédure de verrouillage a pour objet d’empêcher les gens de se blesser accidentellement et constitue par conséquent l’une des règles fondamentales de l’employeur, ce qui signifie qu’elle revêt une importance primordiale. L’appelant savait qu’il aurait dû procéder au verrouillage et il ne l’a pas fait. Il n’appartient pas à l’appelant de décider si quelque chose de mauvais aurait pu survenir. L’appelant aurait dû se conformer à la politique, ce qui est la seule façon de veiller à ce qu’il n’y ait pas de problèmes.

Analyse

[41] Aux termes de l’article 30 de la Loi, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd son emploi en raison de son inconduite.

[42] Il incombe à la Commission de démontrer que le prestataire, selon la prépondérance des probabilités, a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite (Larivee A-473-06, Falardeau A-396-85).

[43] Pour prouver qu’il y a eu inconduite, il faut démontrer que l’employé s’est comporté autrement que de la façon dont il aurait dû se comporter et qu’il a fait cela de manière volontaire ou délibérée ou avec une insouciance telle qu’elle frôlait le caractère volontaire : Eden A-402-96. Pour qu’un acte soit qualifié d’inconduite, il doit être démontré que l’employé savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédié (Lassonde A-213-09; Mishibinijima A-85-06; Hastings A-592-06; Lock 2003 CAF 262) et que cette conduite nuirait au rendement professionnel de l’employé, aux intérêts de l’employeur ou, de façon irréparable, à la relation employeur-employé (CUB 73528).

Quelle conduite a mené au congédiement de l’appelant?

[44] La preuve de la Commission, obtenue auprès de l’employeur, est que l’appelant a perdu son emploi chez TMK IPSCO parce qu’il n’a pas respecté la procédure de verrouillage de LOTO-009 pendant qu’il travaillait sur le convoyeur C9 le 24 août 2015. Cet incident est survenu après que l’appelant ait déjà été suspendu pour un incident analogue, c’est-à-dire qu’il n’avait pas respecté le protocole de verrouillage le 24 novembre 2014. L’appelant avait alors reçu l’avertissement suivant : « D’autres cas entraîneront d’autres mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. » (GD3-21).

[45] Dans ses déclarations à la Commission (à GD3-27 et GD3-38) et à divers moments au cours de son témoignage à l’audience, l’appelant a reconnu qu’il a été congédié parce qu’il ne s’est pas conformé aux procédures de verrouillage sécuritaire de l’employeur dans LOTO-009 le 24 août 2015. L’appelant a fourni des justifications de son infraction à la politique, mais a reconnu qu’il a enfreint la politique de sécurité de l’employeur, et que c’est sa violation de la politique qui a mené à son congédiement. À l’audience, les représentants de l’appelant ont soutenu qu’on pouvait seulement prétendre que la conduite de l’appelant constituait une violation de la politique parce qu’il a franchi les deux premières étapes de la procédure de verrouillage (à GD3-24) et ne s’est pas tout à fait conformé au protocole. Toutefois, le Tribunal constate que les étapes « DÉBUT DU VERROUILLAGE » que l’appelant dit avoir suivies étaient les suivantes :

[traduction]

4.1 L’employé autorisé doit évaluer l’équipement à entretenir.

4.2 Un employé ne doit jamais placer son corps ou une partie de celui-ci de manière à ce qu’il soit en contact avec une ligne sous tension.

L’appelant reconnaît ne pas avoir suivi les étapes ci-après :

[traduction]

4.3 L’employé autorisé doit informer les employés qui sont dans l’aire de travail avant de verrouiller le débranchement de C4 et de C9 et donner le motif du verrouillage.

4.4 Verrouiller le débranchement de C4 et de C9 au moyen des verrous désignés. Conserver toutes les clés dans le boîtier de verrouillage désigné près de cette aire. Joignez votre verrou personnel au boîtier de verrouillage.

4.5 Tenter d’opérer les convoyeurs 4 au poste de fonctionnement 03 (ANLR-OP03) et le convoyeur C9 au poste de fonctionnement 08 (C9-OP08) afin que l’appareil ou l’équipement soit isolé de la source d’énergie.

Le Tribunal constate également que l’appelant n’a respecté aucune des cinq (5) étapes de « RETOUR À LA NORMALE » (GD3-26).

[46] Il est manifeste que les deux premières étapes sont au mieux préliminaires et que ce sont les trois autres étapes, soit la partie la plus importante du processus, qui sont au cœur de la procédure de verrouillage. Ce sont ces trois étapes qui n’ont pas été exécutées par l’appelant. Le Tribunal conclut donc que l’appelant a enfreint la politique de verrouillage de sécurité de l’employeur pendant qu’il était au travail le 24 août 2015.

[47] L’appelant a également reconnu qu’il a déjà fait l’objet de mesures disciplinaires pour non-respect de la politique de verrouillage sécuritaire de l’employeur, quoiqu’il a déclaré qu’il n’était pas d’accord avec la suspension de 3 jours qui lui a été infligée et qu’il a signé la lettre disciplinaire seulement pour pouvoir reprendre le travail (GD3-38).

[48] Le Tribunal conclut que l’appelant a perdu son emploi parce qu’après avoir reçu un avertissement écrit de l’employeur le 24 novembre 2014 pour violation de la politique de verrouillage de sécurité, l’appelant a de nouveau enfreint la politique de verrouillage de sécurité de l’employeur le 24 août 2015.

La conduite constitue-t-elle une « inconduite » au sens de la Loi?

[49] Ayant conclu que l’appelant a enfreint la politique de verrouillage de sécurité de l’employeur, le Tribunal doit maintenant décider si l’infraction est une inconduite aux fins de la Loi.

[50] Le Tribunal a pris en compte les déclarations cohérentes et sans équivoque du représentant de l’employeur en ce qui concerne l’importance et l’application universelle de leurs politiques de sécurité compte tenu de la nature de l’équipement dans l’usine de TMK IPSCO et du potentiel de blessure grave en milieu de travail. La sécurité au travail et en milieu de travail est manifestement une préoccupation de premier plan chez TMK IPSCO, ce qui est démontré clairement et de plusieurs façons aux employés. L’exigence applicable aux employés de signer des engagements de sécurité ne représente qu’une façon pour l’employeur de le souligner. Le Tribunal a noté les dispositions de l’engagement de sécurité de 2014 signé par l’appelant le 20 février 2014 (GD3-20) selon lequel il serait personnellement responsable de :

« toujours accorder la priorité à la sécurité dans l’exécution de ses tâches »,

« se conformer à l’ensemble des règles et règlements de l’employeur sur la sécurité et l’environnement »,

« ne jamais sacrifier ou compromettre la sécurité pour accomplir une tâche plus rapidement ou facilement » et

« insister pour obtenir un engagement complet en faveur de l’excellence en sécurité pour moi et mes collègues. »

[51] En outre, il ne fait aucun doute que les politiques de verrouillage de sécurité constituent l’un des aspects les plus importants de la sécurité en milieu de travail chez TMK IPSCO. Le Tribunal constate que dans les faits, seulement cinq (5) politiques de sécurité sont désignées « règles fondamentales » dans le feuillet de politiques signé par l’appelant le 16 septembre 2014 (GD8-25) :

  • Omission d’utiliser l’équipement de protection individuelle (EPI) approprié
  • Défaut de suivre les procédures de verrouillage
  • Violation de la politique de la compagnie sur un milieu de travail sans drogue
  • Défaut de déclarer un incident pendant le quart de travail visé
  • Contourner, éviter ou gêner un dispositif ou un processus de sécurité.

[52] L’inclusion de la politique de verrouillage de sécurité comme règle fondamentale témoigne de son importance cruciale pour l’employeur et, de fait, de la sécurité en milieu de travail. L’appelant savait ce qu’il aurait dû faire lorsqu’il travaillait sur le convoyeur C9 le 24 août 2015 (voir GD3-27 et son témoignage) et sa déclaration selon laquelle il a respecté le protocole de verrouillage à de nombreuses reprises (« au moins deux fois par jour ») entre le premier et le second incident ne sert qu’à souligner que l’appelant connaissait l’importance de cette politique en particulier.

[53] Le Tribunal a ensuite pris en compte les antécédents disciplinaires documentés de l’appelant. L’appelant n’a pas expliqué pourquoi il a contesté la suspension de 3 jours qui lui a été infligée pour l’incident du 24 novembre 2014, mais le Tribunal ne peut ignorer le fait que c’était essentiellement pour la même conduite (quoique les convoyeurs différaient), à savoir « Infraction aux règles fondamentales de TMK IPSCO – Défaut de se conformer aux procédures de verrouillage » (GD3-21). À ce moment-là, l’appelant s’est fait dire explicitement que « D’autres cas entraîneront d’autres mesures disciplinaires pouvant aller jusqu’au congédiement. » (GD3-21). Comme l’incident du 24 novembre 2014 constituait à la fois un rappel de l’importance cruciale du verrouillage (une « règle fondamentale ») et un avertissement quant aux conséquences de la violation de la règle, il n’est pas plausible de laisser croire que l’appelant ignorait qu’il pourrait perdre son emploi s’il ne respectait pas la procédure de verrouillage de LOTO-009 le 24 août 2015. Le deuxième incident a eu lieu neuf (9) mois après l’incident du 24 novembre 2014 et, ce qui est encore plus contraignant, seulement quatre (4) mois après la formation de l’appelant sur LOTO-009 le 14 avril 2015 (voir feuillet de présence à la formation à GD8-6) et seulement deux (2) jours après la révision complète de la politique de sécurité d’Edmonton à laquelle l’appelant a participé le 12 août 2015. Compte tenu de toutes ces circonstances, le Tribunal conclut que l’appelant savait ou aurait dû savoir que le congédiement constituait une véritable possibilité advenant d’autres incidents comportant l’inobservation de la procédure de verrouillage.

[54] Le Tribunal note que la Cour d’appel fédérale a jugé que la violation d’une politique en milieu de travail peut constituer une inconduite (Vo 2013 CAF 235), et qu’un tel comportement peut être une inconduite au sens de la Loi s’il s’agit d’un comportement insouciant qui montre peu d’égards pour l’employeur (Parsons 2005 CAF 248; Murray A-245-96).

[55] Le Tribunal a ensuite considéré les nombreuses justifications fournies par l’appelant pour sa conduite du 14 août 2015, à savoir qu’il a fait tout ce qui était nécessaire pour sécuriser l’aire de travail d’après son évaluation de la situation. Toutefois, de l’aveu de l’appelant, un tuyau aurait pu être acheminé vers le bas de C4 à C9 même si C9 était mis hors tension. Le Tribunal accepte le témoignage de Monsieur H. M. selon lequel cette situation aurait pu causer une blessure à l’appelant ou à un autre employé ou du dommage à l’équipement. De plus, le Tribunal accepte les observations de l’employeur selon lesquelles il n’appartenait pas à l’appelant de substituer son jugement aux procédures de sécurité établies de l’employeur et conclut qu’il était plus vraisemblable que l’appelant ne voulait tout simplement pas se préoccuper du protocole de verrouillage après avoir décidé qu’il pouvait accomplir ce qu’il avait à faire rapidement à peu près sans probabilité qu’un problème survienne. Compte tenu de ses antécédents disciplinaires, sans parler de sa formation exhaustive et continue en matière de politiques de sécurité et de procédures de verrouillage de l’employeur, l’appelant a adopté une conduite extrêmement insouciante. De plus, la possibilité qu’il se blesse ou qu’il blesse un collègue et qu’il cause du dommage à l’équipement dans l’aire de travail démontre une absence grave de préoccupation à l’égard des employés de TMK IPSCO et de ses opérations commerciales.

[56] Le Tribunal bénéficie dans son analyse du soutien de la décision de la Cour fédérale selon laquelle il n’est pas nécessaire qu’un comportement s’accompagne d’une intention délictueuse pour qu’il y ait inconduite en vertu de la Loi. Il suffit que l’acte ou l’omission ayant fait l’objet de la plainte ait été volontaire, c’est-à-dire conscient, délibéré ou intentionnel : Caul 2006 CAF 251; Pearson 2006 CAF 199; Bellavance 2005 CAF 87, Johnson 2004 CAF 100; Secours A-352-94; et Tucker A-381-85.

[57] En l’espèce, le Tribunal conclut que la connaissance par l’appelant de la politique sur le verrouillage de l’employeur a rendu sa violation de la politique après une mesure disciplinaire pour une infraction antérieure à cette politique tellement insouciante qu’il s’agit presque d’un geste volontaire; que compte tenu de l’importance des protocoles de sécurité pour le poste de l’appelant en maintenance à l’usine TMK IPSCO, cette situation a causé un tort irréparable à la relation employeur-employé; et que l’appelant aurait dû savoir que cela aurait pu mener à son congédiement. Le Tribunal conclut donc que la violation par l’appelant de la politique de verrouillage de TMK IPSCO le 14 août 2015 constituait une inconduite au sens du paragraphe 30(1) de la Loi.

Conclusion

[58] Le Tribunal conclut que l’appelant a perdu son emploi chez TMK IPSCO en raison de sa propre inconduite. Le Tribunal juge donc que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour une durée indéterminée en vertu de l’article 30 de la Loi.

[59] L’appel est rejeté.

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