Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] En date du 15 février 2016, la division générale du Tribunal a conclu que :

  • L’inadmissibilité imposée aux termes des articles 9 et 11 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) et de l’article 30 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) était fondée parce que l’appelante n’avait pas prouvé son état de chômage.

[3] L’appelante a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel en date du 29 février 2016. La permission d’en appeler a été accordée le 11 mars 2016.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a déterminé que cet appel procéderait par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la question en litige;
  • la crédibilité des parties ne figurait pas au nombre des questions principales;
  • le caractère économique et opportun du choix de l’audience;
  • la nécessité de procéder de la façon la plus informelle et rapide possible tout en respectant les règles de justice naturelle.

[5] Lors de l’audience, l’appelante était présente. L’intimée était absente bien que dûment convoquée.

Question en litige

[6] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que l’inadmissibilité imposée aux termes des articles 9 et 11 de la Loi et de l’article 30 du Règlement était fondée parce que l’appelante n’avait pas prouvé son état de chômage.

Arguments

[7] L’appelante soumet les motifs suivants au soutien de son appel:

  • L’intimée a admis son erreur lorsqu’elle lui a accordée 44 semaines de prestations et qu’elle était au courant de sa situation le 4 novembre 2012;
  • Elle n’a pas à rembourser la somme en question car elle était de bonne foi et qu’elle a divulgué sa situation à l’intimée dès le début de sa demande de prestations;

[8] L’intimée soumet les motifs suivants à l’encontre de l’appel de l’appelante:

  • La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel des prestataires qui ont un horaire prévoyant des périodes de travail et de congé en alternance sont réputés être en emploi pendant les périodes de congé;
  • Par politique, l’intimée apporte les corrections nécessaires lorsqu’elle est en présence d’une erreur de sa part à compter de la date courante sauf dans certaines situations, comme lorsque des prestations ont été versées en violation d'une disposition explicite de la Loi;
  • Dans le présent dossier, nous sommes en présence d’une erreur de l’intimée. Selon la Politique de réexamen de l’intimée, celle-ci devait annuler la décision rétroactivement puisqu’il s’agit d’une violation d’une disposition explicite de la Loi puisque l’appelante ne remplissait pas les conditions requises pour établir une demande de prestations au 4 novembre 2012; La décision rendue par la division générale est conforme à la Loi et à la jurisprudence.

La loi

[9] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Normes de contrôle

[10] L’appelante n’a fait aucune représentation quant à la norme de contrôle applicable.

[11] L’intimée soumet que la norme de contrôle applicable aux questions de droit est celle de la décision correcte et la norme de contrôle aux questions mixte de fait et de droit est celle de la décision raisonnable - Pathmanathan c. Bureau du juge-arbitre, 2015 CAF 50.

[12] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (PG) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne au paragraphe 19 de sa décision que lorsque la division d’appel « agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la Division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure ».

[13] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant que :

[N]on seulement la Division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale et [qu’elle] n’est […] donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les «  offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[14] La Cour d’appel fédérale termine en soulignant que « lorsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social, la Division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi. »

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder v. Canada (AG), 2015 FCA 274.

[16] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

[17] L’appelante plaide que l’intimée a admis son erreur après lui avoir accordé 44 semaines de prestations et que cette dernière était au courant de sa situation dès le 4 novembre 2012. Elle soutient qu’elle n’a pas à rembourser la somme en question car elle était de bonne foi et qu’elle a divulgué sa situation à l’intimée dès le début de sa demande de prestations.

[18] L’intimée est d’avis que la division générale n’a pas erré ni en droit ni en fait sur la question de l’état de chômage.

[19] La permission d’en appeler a été accordée dans le présent dossier car les représentations de l’intimée devant la division générale étaient contradictoires sur l’utilisation de son pouvoir de révision aux termes de l’article 52 de la Loi.

[20] Dans un premier temps, l’intimée a admis qu’elle connaissait la situation de l’appelante et que celle-ci ne pouvait raisonnablement savoir qu’elle n’avait pas droit aux prestations. Ce faisant, elle ne pouvait aucunement rendre une décision rétroactive dans le dossier.

[21] Dans ses représentations subséquentes à la division générale, l’intimée était d’avis que selon sa politique de réexamen, elle devait annuler la décision rétroactivement puisqu’il s’agissait d’une violation d’une disposition explicite de la Loi et que l’appelante ne remplissait pas les conditions requises pour établir une demande de prestations au 4 novembre 2012.

[22] L’intimée maintient cette dernière position devant la division d’appel.

[23] L’appelante a fait une demande initiale de prestations d’assurance-emploi prenant effet le 4 novembre 2012. L’employeur, Corporation d’hébergement de Mont-Joli, a émis un relevé d’emploi à la demande de l’appelante en date du 5 novembre 2012. Dès le 21 novembre 2012, l’employeur précise que l’appelante a un horaire de travail 7-7. Elle travaille 7 jours et ensuite elle est en congé pendant 7 jours. Pendant ses journées de congé, elle peut être appelée pour travailler (GD3-13).

[24] Le 12 avril 2013, l’intimée a informé l’appelante qu’elle n’avait pas droit aux prestations d’assurance-emploi à partir du 4 novembre 2012 puisque les périodes pendant lesquelles elle ne travaille pas font partie de son horaire de travail (GD3-17 et GD3-18). Un avis de dette de 1284.00$ a par la suite été acheminé à l’appelante.

[25] Il ressort clairement de la preuve devant la division générale que l’intimée possédait l’information nécessaire au traitement du dossier en novembre 2012 et qu’elle a eu l’occasion de prendre les mesures concernant l’état de chômage, mais n’a rien fait et a continué de payer l’appelante.

[26] Une erreur est imputable à l’intimée si cette dernière disposait de tous les renseignements nécessaires pour prendre une décision, mais qu’elle n’en a pas tenu compte au moment de rendre sa décision finale. L’erreur peut avoir été commise dans le cadre du processus de règlement d’une demande, ou résulter de l’omission de consigner une décision dans le système informatique.

[27] Nous sommes définitivement ici en présence d’une erreur de l’intimée.

[28] Par politique, une erreur de l’intimée doit être corrigée à compter de la date courante, sauf certaines exceptions. L’une des exceptions concerne les cas où l’erreur de l’intimée donne lieu à une décision qui se veut contraire à la structure de la Loi. L’intimée doit alors corriger son erreur de façon rétroactive, même si cela entraîne un trop-payé. Par structure de la Loi, on entend les éléments essentiels à l’établissement d’une période de prestations et au versement de prestations.

[29] Sommes-nous en présence d’une erreur de l’intimée qui donne lieu à une décision qui se veut contraire à la structure de la Loi?

[30] Malheureusement pour l’appelante, il s’agissait d’une décision contraire à la structure de la Loi et l’intimée se devait d’annuler la décision rétroactivement puisque l’appelante ne rencontrait pas les éléments essentiels à l’établissement d’une période de prestations au 4 novembre 2012.

[31] De plus, la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale établit également qu’une somme reçue sans droit, même suivant une erreur de l’intimée, ne dispense pas de rembourser cette somme – Lanuzo c. Canada (PG), 2005 CAF 324.

[32] Pour les motifs ci-dessus mentionnés, le Tribunal n’a d’autre choix que de rejeter l’appel.

Conclusion

[33] Le Tribunal rejette l’appel.

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