Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] En date du 18 août 2015, la division générale du Tribunal a conclu que :

  • Il y avait lieu d’imposer une inadmissibilité à l’appelant conformément aux articles 9, 11(1) et 11(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) concernant son état de chômage.

[3] L’appelant a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel en date du 14 septembre 2015. Permission d’en appeler a été accordée le 30 septembre 2015.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a déterminé que l’audience de cet appel procéderait par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la ou des questions en litige;
  • la crédibilité des parties ne figurait pas au nombre des questions principales;
  • l’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires;
  • de la nécessité de procéder de la façon la plus informelle et rapide possible tout en respectant les règles de justice naturelle.

[5] Lors de l’audience, l’appelant était absent mais représenté par Me Yves Gravel. L’intimée était représentée à l’audience par Manon Richardson et Me Carole Vary.

La loi

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant qu’il y avait lieu d’imposer une inadmissibilité à l’appelant conformément aux articles 9, 11(1) et 11(4) de la Loi.

Arguments

[8] L’appelant soumet les motifs suivants au soutien de son appel:

  • Pour que le paragraphe 11(4) de la Loi soit applicable, il doit exister une preuve montrant que le prestataire a travaillé davantage que le nombre d'heures qui sont habituellement travaillées au cours d'une semaine par des personnes employées à temps plein;
  • En omettant de déterminer si, selon la preuve qui lui avait été soumise, l’appelant avait « travaillé davantage que le nombre d'heures qui sont habituellement travaillées au cours d'une semaine par des personnes employées à temps plein », la division générale a mal appliqué la Loi et a ainsi commis une erreur de droit déterminante;
  • La preuve soumise à la division générale ne démontre pas que l’appelant « travaille habituellement plus d'heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine des personnes employées à plein temps »;
  • La preuve indique que l’appelant a travaillé le même nombre d'heures au cours de chaque semaine de son emploi que tous les autres employés;
  • Il appartenait à l'intimée de faire la preuve que l'appelant a travaillé davantage que ce que démontre la preuve produite devant la division générale;
  • La division générale ne pouvait conclure que l'appelant n'était pas en chômage pour le motif qu'il était « en congé périodique au sens de la convention collective de la CCQ », sans commettre une erreur déterminante en appréciant la preuve qui lui a été soumise;
  • Aucun élément de la preuve soumise à la division générale ne lui permettait de conclure que l'appelant recevait « la partie de sa rétribution qui a été mise de côté pour cette période »;
  • De plus, l'application du paragraphe 11(3) de la Loi auquel se réfère la division générale nécessite l'existence d'une « entente entre un employeur et un employé »;
  • Aucun élément de preuve soumis à la division générale ne suggère l'existence d'une telle entente;
  • Par ailleurs, la preuve non contestée par l'intimée établit clairement et de façon non équivoque que l'appelant n'a reçu aucune rémunération pour les périodes contestées;
  • La décision de la division générale concernant l’application du paragraphe 11(3) de la Loi est incompatible avec la preuve présentée;
  • La division générale a excédé sa juridiction en décidant que l'appelant n'était pas en chômage aux termes du paragraphe 11(3) de la Loi, puisqu'elle n'était pas saisie de la question;
  • La division générale a manqué à un principe de justice naturel en décidant que l'appelant n'était pas en chômage aux termes du paragraphe 11(3) de la Loi, sans avoir donné aux parties l'occasion de faire valoir leur point de vue sur la question;
  • L'appelant soumet respectueusement que la preuve présentée à la division générale aurait dû amener celle-ci à conclure que le paragraphe 11(3) ne s'appliquait pas à son cas;
  • La division générale a erronément appliqué la décision Lépine (A-281-95), puisqu'une fois que le prestataire a fait la preuve que le paragraphe 11(1) s'applique, dans le cas d'exception visé par le paragraphe 11(4), il appartient à l’intimée de faire la preuve au soutien de l'application de la disposition au cas du prestataire;
  • L'appelant soumet que la simple constatation du fait que l'appelant était en congé périodique ne constitue pas une motivation suffisante pour justifier l'application du paragraphe 11(4) de la Loi;
  • La division générale a commis une erreur de droit en s'appuyant sur l'arrêt Merrigan, dans lequel la Cour fédérale ne se prononce pas sur la question de la « compensation » prévue par la version anglaise de l'article 11 de la Loi;
  • Si la division générale s'était penchée sur la question, elle aurait dû conclure que la période de congé de l'appelant ne lui était pas accordée « to compensate for the extra time workedNote de bas de page 1 ». En effet, la division générale convient que la période de congé est accordée à l'appelant, non pas pour compenser des heures, des jours ou des semaines de travail, mais plutôt à cause de l'éloignement;
  • De plus, les employés peuvent continuer à travailler après 28 jours ce qui indique qu'il n'y a pas de lien entre le temps travaillé au cours de la période de travail de 28 jours et le congé prévue par la convention collective, mais qu’il y en a manifestement un entre le congé et l'éloignement;
  • La jurisprudence qui a confirmé le principe selon lequel les prestataires qui ont un horaire prévoyant des périodes de travail et de congé sont réputés être en emploi pendant les périodes de congé qui s'inscrivent dans cet horaire reconnu est erronée, puisqu'il y manque l'élément de « compensation »;
  • Dans Kieley, A-708-92, (même avant l'adoption de la nouvelle disposition), la Cour a tenu compte du fait que le congé avait pour but de compenser « le nombre excessif » d'heures travaillées et dans Canada (PG) c. Merrigan, 2004 CAF 253, la Cour a spécifiquement restreint la portée de sa décision à l'alinéa 11(4)(a) de la Loi;
  • Le contexte dans lequel se situe la détermination permet de conclure que le travailleur qui n'est pas en congé « en raison d'heures supplémentaires déjà travaillées », est en situation d'interruption et peut bénéficier «  d'indemnités temporaires »;
  • La question de l'application de la version anglaise de l’alinéa 11(4)(a) est pour la première fois soulevée devant un tribunal et puisque la division d'appel en est saisie, elle a l'obligation d'en disposer malgré toutes les décisions déjà rendues, y compris les arrêts de la CAF;
  • Tous les éléments de la preuve produite indiquent que les congés ne sont pas donnés « en raison d'heures supplémentaires déjà travaillées »;
  • Dans sa décision, la division générale n'a jamais tenu compte de cette absence de preuve et de ce fait, la décision qui a été rendue est fondée sur des conclusions de faits erronés et ne tient pas compte des éléments mis en preuve.

[9] L’intimée soumet les motifs suivants à l’encontre de l’appel de l’appelant:

  • Selon le paragraphe 11(4) de la Loi, l’assuré qui travaille habituellement plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps et qui a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé est censé avoir travaillé une semaine entière de travail au cours de chaque semaine qui est comprise complètement ou partiellement dans cette dernière période;
  • Un prestataire tombant sous le coup de ce paragraphe ne peut être considéré en état de chômage. Il est acquis aux dossiers que l’appelant avait un horaire selon lequel il travaillait de longues heures à tous les jours pendant 28 jours et avait droit par la suite à 10 jours de congé pour des journées de repos. Ces conditions font partie de son contrat de travail ainsi que de celui de tous les employés;
  • L’appelant conserve son lien d’emploi à chaque période de repos. Il s’ensuit donc que l’appelant tombe sous le coup du paragraphe 11(4) de la Loi, qu’il ne peut être considéré en état de chômage pour les périodes en litige et qu’il ne peut bénéficier de prestations d’assurance-emploi pendant ces périodes;
  • L’employeur a confirmé que l’appelant est régi par la convention collective signée par les employeurs, les syndicats avec la Commission de la Construction du Québec (CCQ);
  • Vu l’éloignement, les travailleurs de ces chantiers bénéficient de congés périodiques leurs permettant de retourner à la maison. Ces périodes sont considérées par la Loi comme étant des semaines entières de travail et non des semaines de chômage parce que le lien d’emploi n’est pas rompu et que l’appelant recevra la partie de sa rétribution qui a été mise de côté pour cette période;
  • La question linguistique doit être située dans le cadre des règles modernes d’interprétation législative selon lesquelles il faut non seulement respecter le texte, mais aussi le contexte et l’objet de la Loi;
  • L’appelant ne peut plaider qu’aux termes de l’alinéa 11(4)(b) de la Loi, soit la version anglaise seulement, il était en chômage pendant son congé périodique mais pas selon la version française;
  • Bien que l’expression « to compensate for the extra time workedNote de bas de page 2 » ne se retrouve pas de façon littérale dans la version française du paragraphe 11(4) de la Loi, le congé périodique qui suit une période dans laquelle le prestataire travaille « plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaille habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à temps plein, » et qui se voit accorder après avoir travaillé 28 jours, nécessairement, est en considération du grand nombres d’heures travaillées;
  • L’objectif poursuivi par le législateur en édictant le paragraphe 11(4) de la Loi était de s’assurer que les prestataires qui travaillent plus d’heures qu’une semaine normale de travail ne reçoivent pas des prestations d’assurance-emploi pendant une période de congé en raison de leur horaire de travail qui leur impose de travailler plus d’heures de travail qu’une semaine normale de travail;
  • Par conséquent, si le congé périodique découle de la formule « 28/10 », tel que confirmé par l’employeur, le sens commun veut qu’une personne qui travaille 4 semaines consécutives à raison de 60 heures par semaines n’est pas en chômage lors de sa période de congé qui suit ces quatre semaines de travail.

Normes de contrôle

[10] Les parties n’ont fait aucune représentation quant à la norme de contrôle applicable.

[11] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (PG) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne au paragraphe 19 de sa décision que lorsque la division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[12] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant que non seulement la division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la division générale du Tribunal de la sécurité sociale et qu’elle n’est donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus, un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[13] La Cour d’appel fédérale termine en soulignant que lorsque la division d’appel entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi.

[14] Le mandat de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder v. Canada (PG), 2015 FCA 274.

[15] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

Préambule

[16] L’appelant renonce à porter en appel la décision de la division générale concernant l’inadmissibilité imposée aux termes du paragraphe 36(1) de la Loi parce qu’il a perdu un emploi ou n’a pu reprendre un emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif à l’usine, à l’atelier ou en tout autre local où il exerçait un emploi.

[17] Il renonce également à plaider en appel que la preuve soumise à la division générale ne démontre pas que l’appelant « travaille habituellement plus d'heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine des personnes employées à plein temps » et ce, suite à la décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Jean précitée.

Introduction

[18] L’appelant a travaillé pour Alstom Power & Transport Canada Inc. du 26 juin 2013 au 21 décembre 2013. Durant cette période, il était en congé périodique durant les semaines du 28 juillet 2013 au 10 août 2013 et du 20 octobre 2013 au 2 Novembre 2013. L’appelant est grutier et il est membre de l'Union internationale des opérateurs-ingénieurs, local 905 depuis de nombreuses années. Il détient un certificat de compétence de « compagnon grutier » depuis le 17 mai 1988.

[19] Les employés travaillant sur les chantiers dans le nord tel que la Sarcelle, la Romaine, Eastmain, sont tous régis par une convention collective et sont sujets à l'horaire de « 28/10 », soit au moins 28 jours de travail pour 10 jours de congés.

[20] L’employeur a précisé qu'en temps normal, la majorité des employés demandent leur congé après 28 jours. S'ils veulent continuer à travailler et qu'ils ne sont pas malades ou affectés par l'éloignement, ils peuvent rester.

[21] Tous les employés font 60 heures par semaine. Ils travaillent 6 jours du lundi au samedi et pour le dimanche, c’est selon le besoin ou l'urgence. Ces conditions sont les mêmes pour tous les types d'emploi (grutier, mécanicien, plombier, électricien, manoeuvre, menuisier, etc.).

[22] Suite à ces informations, une demande de renseignements a été postée à l’appelant le 18 novembre 2014, parce que l’intimée avait observé que l’appelant demandait des prestations d'assurance emploi pour certaines périodes alors qu’il était toujours, selon l’intimée, à l'emploi d’Alstom.

[23] La réponse de l’appelant est parvenue à l’intimée le 1er décembre 2014 concernant les semaines du 27 mai 2013 au 31 mai 2013, du 29 juillet 2013 au 9 août 2013 et du 21 octobre 2013 au 1er novembre 2013. L’appelant précise qu’il travaillait à la Baie-James comme travailleur de la construction. Pour les périodes mentionnées, il travaillait pour Alstom comme grutier et une rotation du personnel était faite selon les horaires qui ne sont pas toutes identiques. L’appelant déclare qu’il n’était pas rémunéré pour toutes les périodes indiquées dans la lettre du 18 novembre 2014. Pendant ces périodes, il se déclarait disponible en tout temps. De même, il se rapportait disponible au local 905 à chaque fois qu’il ne travaillait pas. L’appelant a joint à sa réponse une copie de lettre du syndicat confirmant son métier et son appartenance au local 905. Il a demandé des prestations d’assurance emploi parce qu’il ne travaillait pas durant les périodes mentionnées sur la lettre du 18 novembre 2014. Il s’est rapporté à l'assurance-emploi pour toutes les périodes mentionnées parce qu’il n'avait aucune rémunération durant ces périodes.

État de chômage

[24] Vu les faits du présent dossier, le Tribunal est d’avis que la division générale n’a pas erré en en concluant qu’il y avait lieu d’imposer une inadmissibilité à l’appelant conformément aux articles 9, 11(1) et 11(4) de la Loi.

[25] La Cour d’appel fédérale a confirmé à plusieurs reprises le principe selon lequel les prestataires qui ont un horaire prévoyant des périodes de travail et de congé sont réputés être en emploi pendant les périodes de congé qui s’inscrivent dans cet horaire reconnu - Canada (PG) c. Jean, 2015 CAF 242, Canada (PG) c. Merrigan, 2004 CAF 253, Canada (PG) c. Duguay, A-75-95.

[26] Il est acquis que l’appelant était régi par une convention collective (pages GD3-40 à 41) et était sujet à l'horaire de « 28/10 » soit au moins 28 jours de travail pour 10 jours de congés. Tous les employés effectuaient 60 heures par semaine. Ils travaillaient 6 jours du lundi au samedi et le dimanche selon l’urgence. L’appelant, de sa propre admission, travaillait sur une base de rotation prenant la relève l’un de l’autre.

[27] Il confirme ce fait dans sa demande de permission d’en appeler à la division générale (Pièce GD2-4) lorsqu’il mentionne :

« Je suis un travailleur saisonnier, mon métier est grutier et la compagnie déterminait elle-même les congés pour faire une rotation de personnel et les congés n'était toujours pas pareil afin de donner la chance à tous les travailleurs saisonnier de travailler chacun leur tour et travaillais en région […] »

[28] Également dans sa réponse à la demande d’information de l’intimée (Pièce GD3- 39):

« Je travaillais à la Baie-James en région éloigné, comme travailleur de la Construction, pour ses périodes mentionné, je travaillais pour la Cie Alstom Comme grutier et nous fesons une rotation du personnel selon les cédules Qui ne sont pas toujours pareil. »

[29] Et lors de son témoignage devant la division générale :

« Non ben comme j’te dit, dans mon cas à moé, non, parce comme j’te dit, faut suivre la rotation parce que sinon l’autre ca marche pu là, l’autre qui est en vacances lui y voudra pas passer 20 jours chez eux et pis travailler 10 jours en haut. »

[30] Il ressort donc clairement de la preuve devant la division générale que l’appelant n’a jamais cessé d’être à l’emploi de son employeur. L’horaire de travail était établi par l’employeur et avait été accepté par l’appelant et ses collègues de travail. Il paraît également évident pour le Tribunal que les semaines de relâche en question étaient prévues au terme de la convention collective comme des semaines de congé au sens du paragraphe 11(4) de la Loi. L’appelant réfère d’ailleurs lui-même aux jours de congés comme du temps de vacances dans son témoignage devant la division générale

[31] L’appelant plaide en appel que la jurisprudence qui a confirmé le principe selon lequel les prestataires qui ont un horaire prévoyant des périodes de travail et de congé sont réputés être en emploi pendant les périodes de congé qui s'inscrivent dans cet horaire reconnu est erronée puisqu'il y manque l'élément de « compensation » prévue à la version anglaise du paragraphe 11(4) de la Loi.

[32] L’appelant plaide que si la division générale s'était penchée sur la question, elle aurait conclu que la période de congé de l'appelant ne lui est pas accordée « to compensate for the extra time workedNote de bas de page 3 », selon la version anglaise de l’article 11(4) de la Loi. En effet, selon l’appelant, la division générale convient que la période de congé lui est accordée, non pas pour compenser des heures, des jours ou des semaines de travail. mais plutôt à cause de l'éloignement.

[33] Le Tribunal est d’avis que même si  l’expression « to compensate for the extra time workedNote de bas de page 4 » ne se retrouve pas de façon littérale dans la version française du paragraphe 11(4) de la Loi, le congé périodique qui suit une période dans laquelle le prestataire travaille « plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaille habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à temps plein, » implique nécessairement, au sens de cette disposition, que le congé périodique est en considération du grand nombres d’heures travaillées.

[34] La Cour d’appel fédérale souligne d’ailleurs dans la décision Kieley précitée que le régime de travail peut varier d’un cas à l’autre, mais, essentiellement, il vise toujours à compenser le nombre excessif d’heures et de jours travaillés qui sont exigés des travailleurs ou, selon la version anglaise du jugement, « to make up for an excessive number of working hours and consecutive working daysNote de bas de page 5 ».

[35] La Cour d’appel fédérale dans la récente affaire Jean précitée reproduit d’ailleurs les deux versions française et anglaise de l’article 11 de la Loi dans sa décision et souligne que l’élément de compensation n’est pas nécessaire car il importe peu que le prestataire reçoive une rétribution ou non durant son congé puisqu’il ne se trouve pas en interruption d’emploi mais conserve son lien avec son employeur.

[36] Il apparaît manifeste pour le Tribunal que la preuve devant la division générale démontre que les congés périodiques ont été accordés à l’appelant afin de compenser le nombre excessif d’heures et de jours consécutifs travaillés qui lui sont exigés ou « to make up for an excessive number of working hours and consecutive days working daysNote de bas de page 6 ». Une personne qui travaille 60 heures par semaine pendant quatre semaines consécutives n’est pas en chômage lors de la période de congé qui suit lesdites semaines de travail.

[37] L’objectif poursuivi par le législateur en édictant le paragraphe 11(4) de la Loi était de s’assurer que les prestataires qui travaillent plus d’heures qu’une semaine normale de travail ne reçoivent pas des prestations d’assurance-emploi pendant une période de congé en raison de leur horaire de travail qui leur impose de travailler plus d’heures de travail qu’une semaine normale de travail.

[38] Le Tribunal ne peut souscrire à l’interprétation que propose l’appelant car elle ferait en sorte qu’aux termes de l’alinéa 11(4)(b) de la Loi, soit la version anglaise seulement, il serait en chômage pendant son congé périodique mais pas selon la version française. Cette interprétation va à l’encontre du sens commun des deux versions linguistiques et ne respecte pas la jurisprudence bien établie de la Cour d’appel fédérale.

[39] Compte tenu des faits au dossier, c’est à bon droit que la division générale a conclu que de permettre à l’appelant de recevoir des prestations serait manifestement contraire à l’esprit de la loi et à l’objectif du législateur.

Conclusion

[25] Cet appel est accueilli en partie et la décision de la division générale datée du 18 mars 2016, est infirmée seulement en ce qui a trait à la question de la disponibilité.

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