Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

L’appelant a comparu à l’audition de son appel par vidéoconférence.

Contexte

[1] Le 6 mai 2015, l’appelant a présenté une demande initiale de prestations régulières d’assurance-emploi (prestations d’assurance-emploi) et a établi une période de prestations avec effet le 3 mai 2015. L’appelant a ensuite travaillé chez Vango Vapes pendant une période de prestations, et a quitté cet emploi le 14 août 2015 en raison d’un conflit au sujet de son salaire horaire. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission), a fait enquête au sujet du motif de la cessation d’emploi de l’appelant chez Vango Vapes et a déterminé que l’appelant a quitté volontairement son emploi sans justification au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi). Le 26 novembre 2015, la Commission a informé l’appelant qu’il était exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 9 août 2015 parce qu’il a quitté volontairement son emploi sans justification.

[2] Le 21 décembre 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réexaminer sa décision en affirmant qu’il a pris la décision de quitter Vango Vapes parce que le travail ne convenait pas à sa santé et à son bien-être, parce qu’il ne pouvait plus continuer à chercher un emploi, parce qu’il présentait des avantages financiers négligeables et parce qu’il a consulté la Commission de façon constante tout au long de son processus de recherche d’emploi. Le 19 février 2016, à la suite d’une enquête, la Commission a maintenu sa décision selon laquelle l’appelant n’avait pas établi de justification pour quitter volontairement son emploi chez Vango Vapes.

[3] L’appelant a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le Tribunal) le 21 mars 2016.

[4] L’audience a eu lieu par vidéoconférence parce que ce mode d’audience respecte le besoin, en vertu du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[5] Il s’agit de déterminer si l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi à compter du 9 août 2015 parce qu’il a quitté volontairement son emploi chez Vango Vapes sans justification le 14 août 2015.

Droit applicable

[6] Le paragraphe 30(1) de la Loi stipule qu’un prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

[7] La question de savoir si un prestataire a une justification repose sur la prise en compte de l’alinéa 29c) de la Loi, qui prévoit que pour l’application des articles 30 à 33,

  1. (c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
    1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
    2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
    3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
    4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
    5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
    6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
    7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
    8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
    9. (ix) modification importante des fonctions,
    10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
    11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
    12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
    13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
    14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

[8] Aux termes du paragraphe 30(2) de la Loi, l’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

[9] Aux termes du paragraphe 30(5) de la Loi, dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.

Preuve

[10] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 6 mai 2015 (GD3-3 à GD3-12). Dans sa demande, l’appelant a mentionné qu’il a travaillé chez Masters Remediation Services jusqu’à ce qu’il soit mis à pied le 6 mai 2015. L’appelant a établi une demande de prestations d’assurance-emploi avec effet le 3 mai 2015 (GD4-1).

[11] Le 25 août 2015, pendant une période de prestations, l’appelant a contacté la Commission pour l’informer qu’il avait travaillé pendant 3 jours chez un autre employeur avant de quitter cet emploi en raison d’un conflit au sujet de son salaire horaire. Plus précisément, l’appelant a déclaré qu’il était censé recevoir 15 $ l’heure, mais que son salaire s’est plutôt révélé être 13 $ l’heure (voir le document Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations à GD3- 13 et GD3-14).

[12] Le 22 septembre 2015, l’appelant a rempli le questionnaire Départ volontaire (GD3-15 à GD3-16). L’appelant prétend qu’il a quitté son emploi le 14 août 2015 en raison d’une dispute salariale : il a dit à l’employeur qu’il n’accepterait pas moins de 15 $ l’heure, puis l’employeur lui a dit qu’il le paierait seulement 13 $ l’heure.

[13] Le 12 novembre 2015, un agent de la Commission a parlé à l’appelant et a consigné le contenu de la conversation dans un formulaire Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-18). L’agent a noté les déclarations de l’appelant selon lesquelles au cours de l’entrevue d’emploi, il a discuté d’un salaire de 15 $ l’heure, mais l’employeur lui a dit que le salaire de départ n’était pas aussi élevé et qu’il se situait plutôt à 13 $ l’heure. L’appelant affirme qu’il a découvert que la rémunération n’était pas de 15 $ l’heure quand il est allé parler à l’employeur après avoir appris à combien les prestations de maternité de sa femme s’établiraient et après avoir déterminé ses exigences salariales.

[14] L’agent a alors parlé au propriétaire de Vango Vapes (voir le document Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations à GD3-19) et a noté les déclarations suivantes de l’employeur :

  1. L’appelant s’est fait demander quelles étaient ses attentes salariales et il a dit 15 $ l’heure. Toutefois, le propriétaire de Vango Vapes a dit très clairement lors de l’entrevue que tout le monde commence à 13 $ l’heure.
  2. L’appelant a accepté le salaire et l’employeur l’a recruté en probation.
  3. Après la coupure au premier chèque de paie de l’appelant, il a contacté l’employeur et a insisté pour se faire rémunérer au tarif de 15 $ l’heure. Quand il a constaté que l’employeur n’ajusterait pas son taux de 13 $ l’heure, l’appelant a dit qu’il voulait être payé comme un sous-traitant parce qu’il avait été travailleur indépendant par le passé.
  4. L’appelant a dit à l’employeur qu’il allait démissionner et trouver un emploi à 18 $ ou 19 $ l’heure.
  5. L’appelant a démissionné après deux (2) jours de travail, ce qui fait que l’employeur a accepté de payer l’appelant comme sous-traitant, quoique l’employeur avait l’intention lorsqu’il a recruté l’appelant de le payer comme un employé assurable.

[15] Dans une lettre en date du 26 novembre 2015, la Commission a informé l’appelant qu’il ne recevrait pas de prestations d’assurance-emploi à compter du 9 août 2015 (le dimanche de la semaine au cours de laquelle les prestations auraient été versées normalement d’après les dispositions sur la période de prestations d’assurance-emploi) parce qu’il a quitté volontairement son emploi chez Vango Vapes le 14 août 2015 sans justification (GD3-20 à GD3-21).

[16] Le 21 décembre 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réexaminer sa décision de refuser sa demande renouvelée de prestations (GD3-22 à GD3-23). L’appelant a joint un résumé détaillé des raisons pour lesquelles il a quitté son emploi (GD3-24) en énumérant les titres de rubriques principaux qui suivent :

« Le travail ne convenait pas pour ma santé et mon bien-être »
« Incapacité de continuer à chercher un emploi »
« Avantages financiers négligeables »
« Consultation avec des employés de l’assurance-emploi »

[17] Le 9 février 2016, un agent différent de la Commission a parlé à l’appelant au sujet de sa demande de réexamen et a consigné le contenu de l’appel dans le document Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-26 à GD3-27). L’agent a nié les déclarations de l’appelant comme suit (l’appelant est appelé « Monsieur K. L. ») :

[Traduction]
« Monsieur K. L. a déclaré qu’il a accepté le poste parce qu’il voulait travailler. Il a ajouté que lors de l’entrevue, il s’est fait demander à quel salaire il serait prêt à travailler. Monsieur K. L. a déclaré qu’il a dit qu’il ne travaillerait pas à moins de 15,00 $ pour pouvoir faire vivre sa famille. Monsieur K. L. a déclaré que c’est ce qu’il a dit à l’employeur à l’entrevue et que l’employeur lui a dit qu’il pouvait lui verser seulement 13,00 $. Monsieur K. L. a déclaré qu’il a réitéré qu’il ne pouvait pas travailler à ce salaire. Lorsqu’il a reçu une offre d’emploi plus tard dans la journée, il a présumé que l’employeur avait décidé de le payer.

Monsieur K. L. a déclaré que l’autre problème, c’est qu’il fallait trop de temps pour se rendre au travail et que compte tenu du temps qu’il passait à se rendre au travail par les transports en commun, c’est comme s’il ne gagnait pas d’argent. Monsieur K. L. a déclaré qu’il devait faire un trajet de 2 heures tant à l’aller qu’au retour. Ces trajets ajoutaient 4 heures à sa journée, ce qui fait qu’il n’avait pas de temps pour chercher du travail lorsqu’il arrivait à la maison. Il avait donc l’impression de travailler pour encore moins d’argent. L’agent lui a demandé pourquoi il n’avait pas de temps pour chercher du travail. Monsieur K. L. a déclaré qu’à l’heure à laquelle il arrivait à la maison, les entreprises étaient fermées. Il a déclaré qu’il était alors illogique de faire de telles démarches. Il lui faudrait prendre des congés pour se rendre à des entrevues et ainsi de suite. Monsieur K. L. a déclaré qu’il était illogique pour lui d’aller travailler pour 200 $ de plus par mois que ce que l’assurance-emploi lui versait. Monsieur K. L. se demande pourquoi il travaillerait pour si peu alors qu’il pourrait être à la maison et chercher un véritable emploi et faire autant d’argent.

Monsieur K. L. a déclaré que l’emploi avait également un impact sur sa santé parce qu’il devait trop se pencher. Il a déclaré que les bancs étaient trop bas pour sa grandeur. Il a ajouté que le fait de se pencher de cette façon lui causait des nœuds dans le dos d’ici la fin de la journée. L’agent lui a demandé s’il a parlé à l’employeur de ce problème. Monsieur K. L. a déclaré qu’il ne l’a pas fait. Monsieur K. L. a également déclaré qu’il travaillait avec de la nicotine pour fabriquer la vapoteuse à titre d’assistant de laboratoire et qu’il ne voulait pas avoir de la nicotine sur ses mains en tout temps. L’agent a demandé s’il pouvait porter des gants. Il a déclaré qu’il n’a pas posé la question. L’agent a demandé s’il connaissait le travail quand il l’a accepté. Monsieur K. L. a répondu qu’il savait ce qu’ils fabriquaient lorsqu’il a pris le poste.

L’agent a demandé quand le prestataire s’est rendu compte qu’il ne serait pas rémunéré 15,00 $. Monsieur K. L. a déclaré qu’il le savait ce jour-là et que c’est la raison pour laquelle il a quitté son emploi. L’agent a ensuite affirmé que l’employeur a dit que le prestataire n’a pas commencé à soulever la question salariale avant d’avoir reçu un chèque. Monsieur K. L. a confirmé cette affirmation. Il doit avoir pris conscience de la question de l’argent plus tard. L’agent a demandé pourquoi il a démissionné s’il n’a pris conscience de la question de l’argent que plus tard. Monsieur K. L. a déclaré qu’il ne valait pas la peine de travailler, et ce même à 15 $ l’heure. Monsieur K. L. a ajouté qu’après avoir payé les transports en commun, les impôts et autres frais et dépenses, il gagnait à peine plus d’argent que ce que ses prestations lui procuraient, et donc que ça ne valait pas la peine pour lui. De plus, on lui a dit par la suite qu’il n’était pas tenu d’accepter un emploi dont le salaire était si bas et qu’il pouvait continuer à chercher un emploi offrant un meilleur salaire. Monsieur K. L. a déclaré qu’il aimerait que la Commission prévienne les gens, au début du processus des prestations, de ne pas accepter des emplois à l’essai parce que s’ils n’aiment pas les emplois en question et démissionnent, ils ne recevront pas de prestations. »

[18] L’agent s’est ensuite entretenu avec le propriétaire de Vango Vapes (voir le document Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations à GD3-28) et a noté les déclarations de l’employeur comme suit (le propriétaire est appelé « Monsieur G. » et l’appelant « Monsieur K. L. ») :

[Traduction]
« Monsieur G. a déclaré que Monsieur K. L. n’a travaillé que pendant quelques heures pour lui. Il a déclaré qu’il s’agissait d’un total de deux jours.

Monsieur G. a fourni l’adresse du local où Monsieur K. L. travaillait. Il s’agit de X rue X X (C.-B.). Monsieur G. a déclaré que Monsieur K. L. a été recruté au salaire de 13 $ l’heure. C’est ce qu’il a expliqué dès le début de l’entrevue. Il lui avait demandé quel salaire il était prêt à accepter pour ce travail. Monsieur K. L. avait déclaré qu’il voulait obtenir 15 $. Monsieur G. a déclaré qu’il avait mentionné pouvoir verser un salaire maximum de 13 $ l’heure. Il a dit que le salaire peut augmenter au fil du temps mais qu’il y a un salaire de départ. Monsieur G. s’est dit surpris que Monsieur K. L. accepte l’emploi lorsqu’il l’a appelé pour le lui offrir.

L’employeur a déclaré que c’était un emploi d’assistant de laboratoire et que le directeur est payé 15 $. Il a ajouté qu’il était donc impossible d’offrir plus d’argent à Monsieur K. L. Il a déclaré qu’il a précisé ce fait à l’entrevue. L’agent a demandé à Monsieur K. L. comment il avait justifié de quitter son emploi au moment où il l’a fait. L’employeur a déclaré que Monsieur K. L. n’aimait pas le travail et voulait gagner plus d’argent. Il a indiqué qu’il pouvait recevoir un meilleur salaire dans la construction et que c’est donc ce qu’il ferait.

L’employeur a indiqué qu’il n’a pas eu d’autres échos de Monsieur K. L. jusqu’à ce qu’il reçoive son chèque. Monsieur K. L. a alors commencé à téléphoner et à se montrer très hostile à son endroit en lui mentionnant qu’il devait être rémunéré 15,00 $ l’heure. L’employeur a dit que Monsieur K. L. téléphonait à répétition. L’employeur a demandé à Monsieur K. L. pourquoi il avait démissionné de son emploi au moment où il l’a fait s’il croyait qu’il allait recevoir 15 $ l’heure. L’employeur a déclaré que Monsieur K. L. ne lui a pas répondu. »

Au cours d’une conversation subséquente (voir le document Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations à GD3-30), l’agent a noté les déclarations complémentaires suivantes de l’employeur :

[Traduction]
« L’agent a demandé à l’employeur quelle était la hauteur des tables au laboratoire. L’employeur a déclaré que la hauteur est standard et que Monsieur K. L. ne lui a pas parlé de ses problèmes de flexion. L’employeur a déclaré que les employés pouvaient utiliser des tabourets au laboratoire pour le travail.

L’agent a demandé à Monsieur K. L. s’il connaissait le lieu de travail quand il a passé l’entrevue. L’employeur a déclaré qu’il le connaissait parce que l’entrevue s’est tenue au lieu de travail. L’employeur a déclaré que Monsieur K. L. a bénéficié d’une visite guidée pour lui permettre de savoir notamment ce que le travail comportait. »

[19] La Commission a tenu compte des déclarations de l’appelant au sujet du temps nécessaire pour faire le trajet de son domicile à son travail chez Vango Vapes. Selon les renseignements obtenus des services locaux de transport en commun (voir GD3-31), le trajet matinal de l’appelant durait 57 minutes.

[20] Dans une lettre en date du 19 février 2016, la Commission a informé l’appelant que sa décision du 28 novembre 2015 était maintenue (GD3-32 èa GD3-33).

[21] Le 21 mars 2016, l’appelant a interjeté appel auprès du Tribunal. Dans son avis d’appel (GD2A), l’appelant a écrit :

[Traduction]
« Je crois que j’avais un bon motif de ne pas accepter/de quitter un emploi qui ne me procurait pas un salaire que je pourrais obtenir, et qui me rémunérerait, à la suite de mauvais renseignements, un salaire plus bas que je peux refuser selon les normes sur les prestations régulières d’assurance-emploi. De plus, l’emploi nuirait considérablement à ma recherche d’emplois. » (GD2A-4)

L’appelant a également joint une note de 8 pages qui explique sa situation (GD2A-6 à GD2A-13) et qui comprend ses propres calculs mathématiques démontrant qu’après paiement des frais de transport en commun et des déductions, son revenu net à un salaire de 13 $ l’heure serait de 1 608 $ par mois comparativement aux 1 400 $ qu’il recevait de l’assurance-emploi. L’appelant a également établi un scénario dans lequel il aurait pu gagner moins d’argent en travaillant qu’en recevant des prestations d’assurance-emploi (voir GD2A-10).

À l’audience

[22] L’appelant a témoigné que les motifs principaux pour lesquels il a quitté son emploi chez Vango Vapes étaient les suivants :

  1. Il ne gagnait pas assez d’argent.
  2. Des préoccupations de santé à cause de ses conditions de travail.
  3. La durée du trajet ne l’avantage pas sur le plan de sa recherche d’un meilleur emploi.

[23] En ce qui concerne le conflit au sujet de son salaire horaire, l’appelant a nié avoir accepté un salaire de 13 $ l’heure à l’entrevue. Il a également nié que l’employeur lui ait déjà dit que le salaire de départ maximal était de 13 $ l’heure ou qu’il ne pouvait se permettre de payer davantage. L’appelant a témoigné qu’il a dit à l’employeur que son horaire était ouvert et que [traduction] « tout ce qu’il demandait était un horaire à temps plein à 15 $ l’heure ». D’après l’appelant, l’employeur a dit qu’il devrait parler à ses autres employés et faire d’autres entrevues, et qu’il communiquerait de nouveau avec l’appelant par la suite.

[24] L’appelant a également témoigné que selon ce qu’il avait compris, il pouvait refuser du travail avant d’accepter le poste à la lumière des conversations tenues avec des agents de Service Canada au cours du premier mois de sa demande de prestations. L’appelant affirme qu’il s’est rendu chez Service Canada et qu’il a [traduction] « passé en revue ce qu’il aurait le droit de refuser ». L’appelant a déclaré que le temps passé chez Vango Vapes était une période d’essai et que le salaire était bien inférieur à ce qu’il avait gagné auparavant, ce qui fait que lorsqu’il s’est rendu compte que cela ne convenait pour un certain nombre de raisons (le conflit au sujet du salaire, les conditions de travail, le trajet), il a quitté son emploi – parce qu’il croyait qu’il avait le droit de le faire sans mettre en péril ses prestations d’assurance-emploi.

[25] En ce qui a trait aux conditions de travail, l’appelant a témoigné que le problème résidait dans la hauteur des bancs en milieu de travail. L’appelant a déclaré qu’il est très grand et qu’il a des problèmes de dos s’il est constamment penché. L’appelant a ajouté qu’il s’est entretenu avec le propriétaire au sujet de la hauteur des tables de travail et qu’il s’est fait dire que le problème se réglerait quand l’employeur adopterait un processus automatisé. L’appelant affirme qu’il n’a pas déposé de plainte formelle parce qu’il n’était pas certain qu’il occuperait le poste chez Vango Vapes très longtemps.

[26] En ce qui concerne le temps requis pour faire le trajet, l’appelant a témoigné qu’il estimait que le fait de travailler et de voyager de 10 à 12 heures par jour limitait beaucoup sa capacité de trouver un autre emploi et lui imposait un inconvénient sur le plan de la recherche d’emplois parce que ça signifiait qu’il ne pouvait pas assister à des salons de l’emploi, qui ont lieu au cours des heures de travail régulières, et qu’il ne pouvait poser sa candidature pour des postes pendant les heures d’affaires régulières. L’appelant a déclaré qu’il lui a fallu trois (3) mois seulement pour trouver l’emploi chez Vango Vapes, qui n’était pas très acceptable, et que c’est la possibilité la plus prometteuse qui s’est présentée à lui lorsqu’il recevait de l’assurance-emploi et avait des journées complètes pour chercher du travail. L’appelant, croyait donc qu’il serait très difficile de trouver un autre emploi quand son emploi chez Vango Vapes nécessitait de 10 à 12 heures de sa journée. L’appelant a renvoyé le Tribunal aux calculs mathématiques dans ses documents d’appel à GD2A-10 pour une explication de la façon dont pourrait recevoir davantage en touchant des prestations d’assurance-emploi qu’en travaillant chez Vango Vapes.

[27] L’appelant a témoigné qu’il avait aussi des responsabilités additionnelles à la maison, soit la préparation de la naissance de son enfant, ce qui constituait une autre raison pour laquelle il avait moins de temps pour chercher du travail au cours des quelques heures restantes après le transport et le travail chez Vango Vapes. L’appelant a nié avoir déjà dit à l’employeur qu’il n’aimait pas le travail comme tel. Il a plutôt déclaré qu’il a dit à l’employeur que sa femme et lui attendaient un enfant et qu’il a parlé à sa femme, qui devait vérifier ses prestations de maternité. Ils ont déterminé que l’appelant ne pouvait pas continuer à travailler chez Vango Vapes.

Observations

[28] L’appelant a soutenu que son emploi chez Vango Vapes était à l’essai et qu’en vertu du Règlement sur l’assurance-emploi, il avait le droit de quitter son emploi parce que son salaire a chuté sous le seuil de 80 % de son ancien salaire et que par conséquent, l’emploi n’était pas considéré convenable en vertu des règles de l’assurance-emploi. L’appelant a également soutenu qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi chez Vango Vapes quelle que soit la justification, à savoir un conflit relatif à son salaire horaire (et d’autres considérations financières), des préoccupations de santé en raison de la hauteur des bancs de travail, et l’inconvénient lié à la recherche d’autres emplois en raison de la durée du trajet.

[29] La Commission a soutenu qu’une fois que l’appelant a accepté l’emploi chez Vango Vapes et a commencé à y travailler, peu importe que ce soit pour une courte durée, il n’était plus considéré comme ayant refusé l’emploi et il devenait visé par les dispositions sur l’admissibilité des articles 29 et 30 de la Loi. La Commission a également soutenu qu’aucun des motifs fournis par l’appelant ne constitue une justification parce que l’appelant avait un choix raisonnable autre que de quitter son emploi chez Vango Vapes, soit de continuer à travailler jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi plus convenable, mieux rémunéré ou présentant un trajet plus convenable. Comme l’appelant n’a pas épuisé tous ces choix raisonnables avant de quitter son emploi, il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi au sens de la Loi.

Analyse

[30] À titre de question préliminaire, le Tribunal se penchera sur l’argument de l’appelant selon lequel il considérait ses deux (2) jours de travail chez Vango Vapes comme un « essai » et selon lequel il avait le droit de quitter cet emploi parce qu’en vertu du Règlement sur l’assurance-emploi, il avait le droit de refuser un emploi s’il se retrouvait à moins de 80 % de son salaire précédent parce qu’il ne convenait pas.

[31] Les dispositions réglementaires auxquelles l’appelant fait référence sont les articles 9.002 à 9.004 du Règlement sur l’assurance-emploi, et plus particulièrement l’article 9.004, qui énumère les critères qui servent à déterminer ce qu’est un « emploi convenable » pour l’application de l’article 9.001 du Règlement et des paragraphes 18(1) et 50(8) de la Loi, qui eux prévoient que pour avoir droit à des prestations d’assurance-emploi, un prestataire doit prouver qu’il s’efforce de trouver un « emploi convenable ». Autrement dit, les dispositions réglementaires sur l’assurance-emploi que l’appelant tente de faire valoir pour justifier d’avoir quitté son emploi ne s’appliquent, dans les faits, qu’à l’examen de la question de savoir s’il était apte et disponible à travailler et incapable d’obtenir un « emploi convenable » pendant une période de prestations, comme l’exige l’article 18 de la Loi. Ni la Loi ni le Règlement ne comprend de dispositions prévoyant qu’un prestataire peut accepter un emploi à l’essai. Toutefois, un prestataire est autorisé à quitter un emploi n’importe quand si le prestataire est fondé à le faire en vertu des articles 29 et 30 de la Loi. La Commission a donc établi à juste titre (à GD4-3) que l’article 9.004 du Règlement définit les paramètres en vertu desquels un prestataire a le droit de refuser une offre d’emploi. Toutefois, si une offre d’emploi est acceptée et que le prestataire commence à travailler – peu importe que ce soit pour une courte durée – le prestataire n’est plus considéré comme ayant refusé l’emploi et est désormais visé par les articles 29 et 30 de la Loi.

[32] L’appelant a témoigné qu’il a été informé par un agent du bureau local de Service Canada au début de sa période de prestations qu’il pouvait refuser un emploi dont le salaire était de moins de 80 % de sa rémunération précédente, mais le Tribunal constate que dans sa déclaration préliminaire faite à l’agent en réponse à sa demande de réexamen, il a dit avoir découvert cela après avoir quitté son emploi chez Vango Vapes (GD3-26 à GD3-27). Le Tribunal ne tire toutefois aucune conclusion sur la question de savoir si l’appelant a été mal informé par Service Canada. L’appelant ne peut tout simplement pas procéder par analogie pour invoquer les articles 9.002 à 9.004 du Règlement afin d’accepter un emploi à l’essai et, deux jours plus tard, quitter cet emploi parce que le salaire horaire ne convient pas (comme il le soutient), car ce Règlement ne s’applique pas à une situation dans laquelle un prestataire accepte un emploi puis entre en fonctions.

[33] L’analyse doit plutôt porter sur la question de savoir si l’appelant était fondé à quitter son emploi chez Vango Vapes le 14 août 2015.

[34] L’article 30 de la Loi prévoit qu’un prestataire qui quitte volontairement son emploi est exclu du bénéfice des prestations, sauf s’il peut établir qu’il est fondé à quitter son emploi.

[35] D’après un principe bien établi, il existe une justification si, eu égard à toutes les circonstances, selon la prépondérance des probabilités, le prestataire n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi (White 2011 CAF 190, Macleod 2010 CAF 301, Imram 2008 CAF 17, Astronomo A-141-97, Tanguay A-1458-84).

[36] Initialement, il incombe à la Commission de démontrer que l’appelant a quitté son emploi volontairement; une fois qu’elle s’est acquittée de ce fardeau, il appartiendra à l’appelant de démontrer qu’il était fondé à quitter son emploi (White, précité; Patel A-274-09).

[37] En l’espèce, il n’est pas contesté que l’appelant a quitté son emploi volontairement lorsqu’il a démissionné de son poste chez Vango Vapes le 14 août 2015.

[38] Le fardeau de la preuve se déplace alors vers l’appelant à qui il incombe de prouver qu’il n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi au moment où il l’a fait.

[39] Le Tribunal doit tenir compte du critère énoncé aux articles 29 et 30 de la Loi et des circonstances mentionnées à l’alinéa 29c) de la Loi, et déterminer si ces circonstances étaient présentes quand l’appelant a quitté son emploi. Ces circonstances doivent être évaluées en regard de ce moment (Lamonde A-566-04), soit la date de sa démission, le 14 août 2015.

[40] Il n’est pas essentiel que l’appelant s’inscrive avec précision dans l’un des facteurs énumérés à l’alinéa 29c) de la Loi pour que l’on conclue à l’existence d’une justification. Le critère approprié consiste à déterminer, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi, compte tenu de l’ensemble des circonstances, y compris celles qui sont énumérées aux sous-alinéas 29c)(i) à (xiv) de la Loi (Canada (Procureur général) c. Landry (1993) 2 C.C.E.L. (2d) 92 (CAF)).

Conflit salarial et autres considérations financières

[41] Le Tribunal a d’abord considéré la question de savoir si le changement survenu dans la compréhension par l’appelant de son salaire horaire constituait une « modification importante de ses conditions de rémunération » au sens du sous-alinéa 29c)(vii) de la Loi, qui prévoit qu’un employé a une justification lorsqu’il y a eu une modification importante de ses conditions de rémunération et qu’il n’a pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi.

[42] Il existe une jurisprudence abondante qui a conclu qu’un prestataire est fondé à agir comme il le fait lorsque l’employeur a agi unilatéralement de manière à modifier fondamentalement les modalités d’emploi telles qu’elles existaient avant la cessation d’emploi (comme la réduction des heures hebdomadaires d’un prestataire, l’augmentation de sa charge de travail ou la diminution de sa rémunération (CUB 18960, 18009, 17495, 26973 confirmés par Lapointe c. C.E.I.C. A-133-95 (C. A. Féd.). De même, il a été jugé que le refus d’un employeur de respecter les conditions d’emploi constitue une justification de quitter un emploi (CUB 17491), comme le fait de renier le salaire à verser (CUB 12252, 12402, 23480). Pour les motifs énoncés ci-après, le Tribunal conclut que le versement par l’employeur de 13 $ l’heure alors que l’appelant avait présumé que son salaire serait de 15 $ l’heure ne constituait pas une modification importante des conditions de son emploi chez Vango Vapes et ne représentait donc pas une justification pour quitter cet emploi.

[43] Le Tribunal a tenu compte du témoignage de l’appelant selon lequel il était censé être payé 15 $ l’heure. Lors de sa première conversation avec l’agent de la Commission (voir GD3-18), l’appelant a déclaré qu’il a discuté d’un salaire de 15 $ l’heure pendant son entrevue d’embauche, mais qu’il s’est fait dire que le salaire de départ n’était généralement pas si élevé et qu’il se situait dans les faits à 13 $ l’heure. Après le refus de sa demande de prestations d’assurance-emploi, l’appelant a informé la Commission qu’il a dit à l’employeur à l’entrevue qu’il ne travaillerait pas à moins de 15 $ l’heure, que l’employeur lui a indiqué que le salaire de départ était de 13 $ l’heure et que l’appelant a réitéré qu’il ne pouvait travailler à ce salaire. L’appelant a témoigné que l’employeur a dit qu’il devrait parler à ses autres employés et faire d’autres entrevues et qu’il donnerait des nouvelles à l’appelant par la suite. Lorsqu’il a reçu une offre d’emploi plus tard le même jour, l’appelant a présumé que l’employeur avait décidé de le payer comme il le demandait.

[44] Le Tribunal a ensuite pris en compte le témoignage de l’employeur selon lequel il était précisé que l’appelant serait payé 13 $ l’heure (déclarations documentées à GD3-19 et GD3- 28). Le Tribunal privilégie le témoignage de l’employeur, car celui-ci avait manifestement intérêt à se montrer parfaitement clair quant au salaire de départ compte tenu du fait que l’appelant avait demandé davantage que l’offre, et que le directeur du site gagnait ce que l’appelant demandait comme salaire de départ pour un poste d’ouvrier non qualifié. Le Tribunal constate aussi les incohérences de l’appelant quant au moment où il s’est rendu compte qu’il était payé 13 $ l’heure et non les 15 $ l’heure qu’il présumait avoir obtenu. Au départ, l’appelant a informé la Commission qu’il avait découvert qu’il n’était pas payé 15 $ l’heure lorsqu’il s’est entretenu avec l’employeur après avoir appris à combien s’élèveraient les prestations de maternité de sa femme et déterminé ses exigences salariales (GD3-18). Il a ensuite avisé la Commission qu’il s’est rendu compte qu’il n’aurait pas 15 $ l’heure le jour de sa démission (GD3-26), mais lorsqu’il a été confronté aux déclarations de l’employeur (à GD3-19 – selon lesquelles l’appelant n’a pas soulevé la question des 15 $ l’heure tant qu’il n’a pas reçu son chèque de paie après sa démission), l’appelant s’est rétracté et a dit que ce devait être plus tard, soit à un moment donné après qu’il ait reçu son chèque de paie après sa démission, et il a reconnu que même à 15 $ l’heure, il ne valait pas la peine pour lui de travailler chez Vango Vapes parce qu’il gagnerait à peine plus que ses prestations d’assurance-emploi (GD3-26). Ce dernier aveu est cohérent avec les déclarations de l’employeur à la Commission selon lesquelles le motif de démission énoncé par l’appelant était la quête d’un emploi plus payant dans la construction (GD3-19 et GD3-28). En outre, l’employeur n’a pas eu de nouvelles de l’appelant jusqu’à ce qu’il reçoive son chèque et l’appelant a fait valoir qu’il pensait recevoir 15 $ l’heure mais n’a pu répondre à la question de l’employeur sur le motif pour lequel il a démissionné après deux jours, avant de recevoir son chèque, si c’est ce qu’il pensait (GD3-28).

[45] La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe général selon lequel lorsque les conditions d’emploi sont modifiées de façon importante, un prestataire est fondé à quitter son emploi : Lapointe (précité). Les changements doivent provenir de l’employeur (CUB 51057) et le mot « important » a été interprété comme « de grande portée, supérieur à la normale ».

[46] De plus, la « justification » doit être déterminée en fonction du critère permettant d’établir si une personne raisonnable considérerait qu’elle n’avait d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi (CUB 75146B, 75719); et lorsqu’il existe un désaccord quant aux conditions d’emploi, un prestataire est tenu de donner à l’employeur une possibilité raisonnable de rectifier la situation (CUB 57605, 57628).

[47] En l’espèce, le Tribunal conclut qu’il n’existe pas de preuve digne de foi établissant que l’employeur est revenu sur le salaire de départ de l’appelant ou a diminué unilatéralement le salaire de départ de l’appelant de $15 à 13 $ l’heure. Le fait que l’appelant a présumé que son salaire de départ serait de 15 $ l’heure n’était pas fondé et était au mieux illusoire. Pour les motifs énoncés au paragraphe 44 qui précède, le Tribunal accorde plus de valeur probante au témoignage de l’employeur et conclut que l’appelant savait qu’il serait payé 13 $ l’heure dès le début et que, comme l’a reconnu l’appelant à la Commission, à un moment donné pendant la période de deux (2) jours de travail de l’appelant chez Vango Vapes, il a décidé qu’il préférerait continuer à recevoir des prestations d’assurance-emploi tout en poursuivant sa recherche d’un emploi. Le Tribunal conclut en outre que la différence de 2 $ l’heure entre les attentes de l’appelant (15 $ l’heure) et le salaire réel (13 $ l’heure) ne serait pas considérée importante pour l’application du sous-alinéa 29c)(vii) de la Loi, notamment à la lumière des difficultés déclarées de l’appelant à trouver un emploi après 3 mois de période de prestations. Enfin, le Tribunal juge qu’il n’existe pas de preuve que l’appelant a fourni à l’employeur des occasions d’apaiser ses préoccupations au sujet de ses perspectives salariales avant de quitter son emploi. L’appelant a travaillé chez Vango Vapes pendant deux (2) jours avant de démissionner et n’avait même pas reçu de chèque de paie avant de quitter son emploi. Même s’il y a eu un malentendu entre l’appelant et l’employeur au sujet de son salaire horaire (le Tribunal a conclu qu’il n’y en a pas eu), il faut établir une « justification » d’après le critère qui consiste à déterminer si une personne raisonnable dans la situation de l’appelant jugerait qu’il n’avait d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi après deux (2) jours. Le Tribunal conclut qu’une personne raisonnable aurait eu d’autres discussions avec l’employeur sur les possibilités de hausses salariales au fil du temps ou aurait continué à travailler jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi.

[48] Le Tribunal conclut donc que l’appelant n’a pas prouvé qu’il y a eu une modification importante des conditions salariales qui constituerait une justification au sens du sous-alinéa 29c)(vii) de la Loi.

[49] En ce qui a trait aux autres considérations financières soulevées par l’appelant, soit les difficultés de faire vivre sa famille avec un salaire de 13 $ ou 15 $ l’heure et le fait que même à 15 $ l’heure, il n’aurait pas valu la peine qu’il continue à travailler chez Vango Vapes compte tenu du montant qu’il recevait en prestations d’assurance-emploi, le Tribunal fait observer que la Loi n’a pas pour objet de verser des prestations aux gens qui quittent leurs emplois pour chercher un meilleur emploi, plus rémunérateur (Canada (Procureur général) c. Sacrey, 2003 CAF 377, CIB 67900); et la justification n’est pas présente quand une personne choisit de quitter volontairement son emploi parce qu’elle ne le juge pas assez rémunérateur et qu’il ne lui permet pas de faire face à ses dépenses (Canada (Procureur général) c. Tremblay, 1994 CAF 50). Le Tribunal reconnaît les difficultés financières de l’appelant et sympathise avec celui-ci, mais l’appelant n’a pas établi de circonstances relatives à la réduction alléguée de son salaire de départ qui étayeraient une conclusion selon laquelle il n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi chez Vango Vapes le 14 août 2015. Le Tribunal conclut qu’il aurait été raisonnable que l’appelant continue à travailler jusqu’à ce qu’il ait trouvé un autre emploi.

Préoccupations de santé

[50] Le Tribunal s’est ensuite penché sur l’observation de l’appelant selon laquelle son emploi nuisait à sa santé et à son bien-être. Le sous-alinéa 29c)(iv) prévoit qu’un employé possède une justification si il existe des « conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité » et s’il n’a pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi.

[51] L’appelant a témoigné qu’il est très grand et que par conséquent, il devait se pencher constamment pour faire son travail sur les bancs au travail chez Vango Vapes, ce qui lui a causé des problèmes de dos, qu’il a décrit à l’agent de la Commission dans les termes suivants : [traduction] « Il a déclaré que les bancs étaient trop bas pour sa grandeur. Il a ajouté que le fait de se pencher de cette façon lui causait des nœuds dans le dos d’ici la fin de la journée. » (GD3-26 à GD3-27).

[52] La jurisprudence a établi que lorsque l’effet préjudiciable sur la santé d’une personne est invoqué comme justification, un prestataire doit : (a) fournir des preuves médicales (CUB 11045); (b) tenter de régler le problème avec l’employeur (CUB 21817); et (c) tenter de trouver un autre emploi avant de quitter son emploi (CUB 18965, 27787).

[53] Rien ne prouve que l’appelant a déjà consulté un médecin relativement aux problèmes de dos qu’il éprouvait lorsqu’il travaillait chez Vango Vapes, ni, surtout, qu’il a soumis des preuves médicales établissant que la hauteur des bancs était telle qu’elle constituait un danger pour sa santé. Le Tribunal constate également que l’appelant n’a pas mentionné ses problèmes de santé dans son questionnaire sur le départ volontaire (GD3-15 à GD3-16) ou dans ses discussions avec les agents de la Commission au sujet du motif de cessation d’emploi chez Vango Vapes (GD3-13, GD3-14 et GD3-18). De fait, l’appelant n’a pas soulevé de problèmes de santé comme motif de quitter Vango Vapes tant qu’il n’a pas été avisé du refus de sa demande de prestations d’assurance-emploi. Le Tribunal préfère les déclarations initiales spontanées de l’appelant selon lesquelles il a démissionné en raison d’un conflit au sujet du salaire horaire qu’il devait recevoir (GD3-13, GD3-14, GD3-15 et GD3-18). Bien que l’appelant a témoigné qu’il a abordé ces problèmes avec l’employeur, il aurait pu continuer à chercher des solutions en discutant avec l’employeur (notamment du fait que l’employeur était ouvert à des mesures d’adaptation comme l’indique le fait qu’il fournissait déjà des tabourets de laboratoire à des employés pour qu’ils s’en servent au travail – voir GD3-30). Il aurait certes pu attendre davantage que deux (2) jours pour trouver une solution ou pour déterminer le choix du moment de l’installation prévue par l’employeur d’un système de traitement automatisé. Enfin, rien ne prouve que l’appelant a tenté de trouver un autre emploi avant de quitter son travail.

[54] Le Tribunal conclut donc que l’appelant ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de prouver que ses conditions de travail chez Vango Vapes nuisaient à sa santé à un point tel qu’il n’avait d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi le 14 août 2015 et conclut qu’il aurait été raisonnable de continuer à travailler chez Vango Vapes jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi plus convenable ou de demander d’autres mesures d’adaptation à l’employeur.

[55] Le Tribunal conclut également qu’aucune des circonstances décrites par l’appelant ne l’aide à établir qu’il n’avait d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi chez Vango Vapes le 14 août 2015 et par conséquent qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Des conditions de travail insatisfaisantes ne seront une justification de quitter un emploi seulement que si elles sont si manifestement intolérables que le prestataire n’avait d’autre choix que de démissionner (CUB 74765). Le Tribunal conclut que de telles conditions n’existaient pas dans le cas de l’appelant chez Vango Vapes lorsqu’il a quitté son emploi le 14 août 2015.

Temps passé en déplacement

[56] L’appelant a déclaré qu’il a quitté son emploi notamment en raison du temps qu’il lui fallait pour faire l’aller-retour de son domicile à son travail chaque jour. D’après l’appelant, le trajet lui prenait 2 heures à l’aller et 2 heures au retour, ce qui ajoutait 4 heures à sa journée de travail. Il n’avait donc pas de temps pour chercher du travail lorsqu’il arrivait à la maison (GD3-26). L’appelant a témoigné que le fait de travailler et d’être en déplacement de 10 à 12 heures par jour limitait sérieusement sa capacité de trouver un autre emploi et le désavantageait dans sa recherche d’emploi parce qu’il ne pouvait se rendre dans les salons de l’emploi (qui, selon ses dires, se tiennent pendant les heures de travail régulières) et ni se porter candidat à des postes au cours des heures d’affaires régulières. Le trajet, combiné à ses responsabilités additionnelles de préparation parentale, signifiait qu’il restait peu de temps à l’appelant pour chercher un autre emploi.

[57] La Commission a confirmé l’adresse du domicile de l’appelant et de Vango Vapes et a établi que son trajet matinal de la maison au travail durait 57 minutes, soit la moitié de ce qu’a dit l’appelant, d’après les transports en commun disponibles (que l’appelant a dit avoir utilisé).

[58] En général, les problèmes de transport ne constituent pas une justification pour quitter un emploi (CUB 16658A, 11351, 10176, 20964) et encore moins lorsque qu’il n’existe [traduction] « pas de facteur de nécessité, d’urgence ou d’obligation » pour le prestataire de quitter son emploi avant d’avoir obtenu un emploi plus convenable (L.M. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2014 TSSDGAE 72). En l’espèce, l’appelant s’est rendu au travail pendant seulement deux (2) jours avant de quitter son emploi, mais n’a pas fourni de raison impérieuse justifiant pourquoi il ne pourrait pas continuer à le faire pendant une certaine période tout en cherchant un autre emploi. Dans sa situation, l’appelant n’a pas à conduire sur une longue distance peu sécuritaire ni à effectuer un transfert à un endroit éloigné du lieu de travail initial. Il n’est pas non plus confronté à un conflit avec un autre emploi à temps partiel ou un autre débouché professionnel. Quant à l’inconvénient du trajet causé à l’appelant dans sa recherche d’emploi, ce ne sont pas seulement deux (2) jours en poste qui ont porté préjudice à l’appelant au point où n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi.

[59] Le Tribunal reconnaît que des motifs personnels, comme la volonté d’avoir un plus court trajet à parcourir, et du temps à consacrer à des questions familiales (préparer la naissance d’un enfant) pourraient justifier de quitter un emploi. Toutefois, la Cour d’appel fédérale a jugé clairement qu’une bonne cause de quitter un emploi n’équivaut pas à une justification (Laughland 203 CAF 129), et qu’il est possible qu’un prestataire ait une bonne cause de quitter son emploi sans avoir de « justification » au sens de l’article 29 de la Loi (Vairumuthu 2009 CAF 277). Le Tribunal conclut que malgré la volonté déclarée de l’appelant d’écourter son trajet pour consacrer plus de temps à chercher un emploi et à s’occuper de ses responsabilités familiales, la décision de l’appelant de quitter son emploi sur cette base était précipitée alors que du travail était encore disponible.

[60] Le Tribunal conclut également qu’il aurait été raisonnable pour l’appelant de continuer à travailler jusqu’à ce qu’il trouve un autre emploi dans le secteur voulu. L’appelant a cherché un emploi pendant les trois mois qu’il recevait des prestations avant d’entrer en fonctions chez Vango Vapes, mais rien ne prouve que l’appelant s’est livré à une recherche d’emploi de bonne foi ou a cherché un autre emploi avant de quitter son poste chez Vango Vapes le 14 août 2015. Bien que l’appelant ait pu avoir l’intention de reprendre sa recherche d’emploi après avoir quitté son poste, il n’a pas envisagé ce choix raisonnable autre qu’un départ volontaire et par conséquent, il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi.

Conclusion

[61] Compte tenu de l’ensemble des circonstances mentionnées précédemment, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé qu’il n’avait pas d’autre choix raisonnable que de quitter son emploi chez Vango Vapes le 14 août 2015. Le Tribunal conclut par conséquent que l’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi et que par conséquent, il est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi en date du 9 août 2015 en vertu des articles 29 et 30 de la Loi

[62] L’appel est rejeté.

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