Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

Y. G., l’appelant

Yves Poulin, représentant de l’appelant

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 5 février 2015. Suite à un réexamen de son dossier, le 27 janvier 2016 la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la Commission) a exclu le prestataire du bénéfice des prestations parce qu’il aurait quitté volontairement son emploi chez Saputo Boulangerie Inc. sans justification. La Commission a de plus décidé que l’appelant n’était pas disponible pour travailler contrairement à ce qu’il avait indiqué et lui a imposé une pénalité pour avoir fait 16 déclarations fausses ou trompeuses en toute connaissance de cause. Le 2 février 2016, la Commission a reçu la demande de révision de décision de l’appelant. Le 3 mars 2016, la Commission a maintenu sa décision initiale concernant le départ volontaire et la disponibilité de l’appelant, mais révisé sa position en faveur de l’appelant au sujet de la pénalité. L’appelant a interjeté appel de la décision de révision au Tribunal de la sécurité sociale (le Tribunal) le 15 mars 2016.

[2] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience Vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. La complexité de la ou des questions en litige.
  2. L’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires.
  3. La disponibilité de la vidéoconférence dans la localité où habite l’appelant.
  4. Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Questions en litige

[3] Le Tribunal doit déterminer s’il y a lieu d’imposer à l’appelant une exclusion en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi), du fait qu’il a quitté son emploi sans justification.

[4] Le Tribunal doit de plus déterminer s’il y a lieu d’imposer à l’appelant une inadmissibilité en vertu des articles 18 et 50 de la Loi et de l’article 9.001 du Règlement sur l’assurance-emploi (le Règlement) parce qu’il n’a pas prouvé sa disponibilité pour travailler.

Preuve

[5] Le Tribunal a révisé tous les documents au dossier d’appel. Voici un résumé des éléments de preuve que le Tribunal a jugé les plus pertinents pour rendre sa décision.

[6] Un document de la compagnie Saputo division boulangerie, daté du 18 décembre 2014 et intitulé modifications dossier employé indique que l’appelant a reçu une prime et que s dernière journée de travail était le 30 janvier 2015. (GD3-34)

[7] Une formulaire d’indemnité de départ de l’appelant signé par l’employeur et l’appelant confirme que l’appelant a accepté de quitter son emploi en se prévalant d’une indemnité de départ de 9 638.68$ (GD3-35)

[8] L’appelant a soumis une demande initiale de prestations régulières d’assurance-emploi le 27 décembre 2014. Il a indiqué dans sa demande qu’il a travaillé pour Clermont 141517 Canada Ltée du 29 janvier 2014 au 19 décembre 2014 et qu’il a cessé de travailler en raison de manque de travail.

[9] Le relevé d’emploi soumis par Saputo Boulangerie Inc. daté du 3 février 2015 indique que l’appelant a travaillé du 20 avril 1998 au 31 janvier 2015. Il y est de plus indiqué “abolition de poste”. (GD2-13)

[10] Le 5 janvier 2016, la Commission s’est entretenue avec l’employeur qui l’a informée que la compagnie a changé de propriétaire environ neuf mois plus tôt et qu’il y avait eu des changements tels que des abolitions de poste et départs à la retraite dues au fait que l’entreprise a été robotisée. La représentante de l’employeur a précisé que le poste de l’appelant qui travaillait en tant qu’opérateur de malaxeur a été aboli. (GD3-27)

[11] Le 5 janvier 2016, la Commission a contacté l’appelant. Ce dernier aurait déclaré avoir reçu 3 heures de formation la semaine du 27 septembre 2015 et travaillé la journée des élections le 18 octobre 2015. L’appelant a aussi indiqué que son poste sur un malaxeur de crème pour la Boulangerie Vachon Inc. a été aboli avant que l’entreprise soit vendue. Il a précisé avoir vu plusieurs abolitions de poste dans sa carrière et que cela n’était pas nouveau. Il est indiqué au rapport que l’enquêteur a demandé à l’appelant comment s’était passée l’abolition de son poste et ce dernier a répondu simplement que c’était la compagnie qui l’avait avisé, qu’ils avaient supprimé son poste et qu’il a pris sa retraite. Lorsqu’interrogé sur ses recherches d’emploi depuis le 14 juin 2015, l’appelant a répondu qu’à son âge c’était difficile de se trouver un emploi et qu’il n’avait eu qu’un seul emploi durant toute sa vie. Il ajoute avoir faite 2 recherches d’emploi depuis le 14 juin 2015, soit au Golf à X et à X, mais que les employeurs n’avaient pas de travail pour lui. L’appelant a dit ne pas avoir fait d’autre recherche. L’enquêteur a noté au rapport avoir dit à l’appelant que la Commission s’attendait à ce qu’il fasse des démarches actives de recherche d’emploi et de tenir un registre détaillé de ses recherches. L’appelant affirme être prêt à accepter n’importe quel emploi au salaire de 17$/heure. (GD3-28)

[12] Dans une conversation téléphonique de la Commission avec une représentante des ressources humaines de l’employeur (Mme. T. A.), aussi tenue le 5 janvier 2016, cette dernière explique la façon de faire dans les cas d’abolition de poste : « On a une façon de fonctionner quand on abolit un poste, à ce poste abolit est associé une prime d'abolition. Selon la convention, ce poste aboli est affiché à tous et selon la convention, un ancien seulement peut appliquer sur ce poste, l'obtenir, avoir la prime d'abolition qui lui est versée tout d'un coup, et cesser de travailler, comme il détient maintenant un poste aboli. » il est indiqué que Mme T. A. fera les vérifications au dossier de l’appelant afin de déterminer si son départ s’est fait de cette façon et ajoute que comme il travaillait à l’entreprise depuis longtemps, il était très plausible que ce soit ce qui s’est produit dans son cas, car normalement les postes abolis ne sont pas ceux des plus anciens employés. (GD3-30)

[13] Le 14 janvier 2015 lors d’une conversation subséquente avec l’enquêteur, Mme T. A. des ressources humaines de l’employeur confirme que l’appelant a appliqué sur le poste qui allait être aboli et qui était relié à une indemnité de départ de 11.3 semaines de salaire. La prime lui a été attribuée puisqu’il était le plus ancien et il est parti. L’enquêteur indique dans son rapport avoir demandé à Mme T. A. si des traces de son application à l'indemnité étaient disponibles et cette dernière a répondu qu’elle allait vérifier. Mme T. A. aurait ajouté que lorsqu’une indemnité de départ est offerte il n’y a pas toujours un poste aboli, mais que la personne qui quitte décide toujours de quitter de son propre chef. (GD3-31)

[14] Dans un courriel daté du 14 janvier 2016, Madame T. A. de l’employeur, confirme que l’appelant a été opérateur de malaxeur crème entre août 1969 et janvier 2015. Elle note que c’est le poste d’une autre employé qui avait été aboli, mais que la prime a été affichée à tous les employés et c’est l’appelant qui l’a obtenue en raison de son ancienneté. (GD3-33)

[15] Le 22 janvier 2016, la Commission a contacté l’appelant et lui a demandé s’il avait fait d’autres démarches de recherche d’emploi depuis leur dernière conversation. L’appelant a répondu en identifiant deux endroits avec les dates précises. Lorsque confronté par l’enquêteur sur le fait que son poste de malaxeur crème n’avait pas été aboli selon l’employeur, l’appelant aurait répondu que son relevé d’emploi indiquait bel et bien abolition de poste et que c’était pour cette raison qu’il avait affirmé être parti suite à l’abolition de son poste. L’enquêteur a répété plusieurs fois à l’appelant que ce n’était pas son poste qui avait été aboli et lui a demandé pourquoi il n’avait pas déclaré avoir quitté volontairement son emploi. L’appelant a répondu que c’était comme cela que les choses fonctionnaient chez Saputo et qu’il devait appliquer sur un autre poste pour quitter. L’appelant a ajouté qu’il ne voulait plus travailler. (GD3-39)

[16] Des extraits de la convention collective de travail entre Saputo Boulangerie Inc. et le syndicat des travailleurs et travailleuses de la boulangerie, confiserie, tabac et meunerie, local 480 (2013-2017) indique les dispositions en cas d’abolition définitive d’un poste:

14.3 Abolition définitive d’un poste sur une ligne

Lors de l’abolition définitive d’un poste sur une ligne, le salarié affecté peut renoncer à son droit à cette fonction et demeurer sur cette ligne comme général si son ancienneté lui permet. Un salarié ne se sentant plus capable de remplir une fonction pour des raisons acceptées par l’employeur peut également demander que cette clause lui soit appliquée.

14.4 Abolition définitive d’un poste ou d’une fonction

A) lors de l’abolition définitive d’un poste ou d'une fonction, l'Employeur avise le syndical au moins vingt (20) jours ouvrables à l'avance.

B) Le salarié affecté directement ou le premier salarié affecté indirectement (celui qui est réellement touché au moment même où le directement affecté se prévaut de son choix) a droit à une période d'adaptation (13.04) sur une fonction à salaire égal ou inférieur qu'il aura préalablement choisie. S'il ne réussit pas, il utilise ses droits à la fonction. Il doit reprioriser ses droits à la fonction. L'employé concerné doit déplacer l'employé planifié ou réputé l’être sur la fonction ayant le moins d'ancienneté.

N.B. Le salarié directement affecté est celui qui est planifié sur le poste ou réputé l'être en vertu de 14.01 C), la semaine de l’abolition définitive du poste. Pour une abolition pendant la période de vacances estivales, le salarié directement affecté est celui qui est planifié sur le poste ou réputé l'être en vertu de 14.01C) la deuxième semaine complète de juin.

C) Lors d'abolition définitive d'un poste ou d'une fonction, le salarié directement affecté qui a plus de vingt (20) ans d'ancienneté ou plus de cinquante-cinq (55) ans d'âge, pourra se prévaloir de l'indemnité de départ prévue à la clause 17.03.

Advenant que le salarié directement touché ne se prévale pas de l'indemnité de départ, l'employeur offre aux autres salariés par ordre d'ancienneté qui répondent aux pré-requis ci-haut mentionnés, l'indemnité de départ d'une semaine par année de service jusqu'à concurrence du nombre de semaines qu’aurait versé au salarié directement touché. (GD2-15)

17.2 Durant le terme de cette convention, l'Employeur informera le Syndical, par écrit au moins vingt (20) jours ouvrables à l'avance, de tout changement à la pratique actuelle qui a pour effet immédiat de diminuer de façon permanente le nombre de salariés dans un secteur donné, par l'attribution à contrat de travaux actuellement exécutés par des salariés de l'unité de négociation.

17.3 Dans les cas prévus à la clause 17.02, l'Employeur donnera la possibilité aux salariés qui occupaient la fonction de façon régulière, directement touchés par l’attribution d’un tel contrat, soit, d'une part de se prévaloir de l'article 14 de la présente convention collective, ou d'autre part, d'accepter une indemnité de départ équivalente à une semaine de salaire par année de service. L'acceptation d'une telle indemnité de départ entraine une cessation définitive d'emploi.

[17] Lors d’une conversation téléphonique entre l’appelant et la Commission, survenue le 3 mars 2016, l’appelant a indiqué qu’il revenait d’un voyage d’un mois. Il a réitéré que son poste avait été aboli et qu’après plus de 40 ans au même emploi, il espérait travailler ailleurs, faire un changement de carrière. Il reconnait avoir bénéficié des options prévues à sa convention collective afin de bénéficier des indemnités de départ. L’appelant indique qu’il n’a jamais été prestataire d’assurance-emploi et qu’il ne savait pas qu’il devait continuer ses recherches d’emploi et que ce n’est pas évident de se trouver du travail à son âge et avec son expérience limitée. Il affirme avoir fait ses déclarations en croyant sincèrement être correct. Il est indiqué au relevé de conversation que chez Saputo, il existait un programme de compression de personnel entre le 30 janvier 2014 et le 30 juin 2014, mais qu’il ne figure pas parmi les employés visés par cette mesure de compression. L’appelant ajoute qu’il croyait être admissible étant donné sa longue carrière chez le même employeur et le fait qu’il cédait son poste afin de permettre à un autre employé de poursuivre. (GD3-49)

Témoignage de l’appelant

[18] L’appelant indique qu’il travaillait depuis 46 ans à la même usine. Il explique que lorsqu’un poste est aboli et que le travailleur affecté à ce poste ne veut pas quitter, l’employeur offre un départ par ancienneté avec des primes s’y rattachant. C’est ce qui s’est produit dans le cas de l’appelant. Il note que la personne normalement affectée au poste qui a été aboli ne voulait pas quitter. Il a signifié son intérêt et eu des rencontres avec son employeur et les ressources humaines environ un mois avant de quitter pour discuter des termes et signer les papiers pour la fin d’emploi. L’appelant affirme qu’il a ensuite fait sa demande d’assurance-emploi au local syndical. Il a commencé à retirer des prestations en juillet 2015 seulement, car il avait reçu une indemnité de départ qui avait été répartie par la Commission.

[19] L’appelant indique qu’il a été au centre local d’emploi en mars 2015, car c’était la première fois de toute sa vie qu’il était prestataire d’assurance-emploi et ne connait pas très bien son fonctionnement. Il affirme avoir fait des demandes d’emploi et qu’il était constamment à la recherche d’un autre emploi. Il indique avoir travaillé pour la journée des élections fédérales en novembre 2015. Il dit avoir déclaré ses gains à ce moment-là et en discutant avec un agent, on lui a demandé d’attendre et de déclarer le montant reçu seulement plus tard au moment où il le recevrait.

[20] L’appelant indique qu’à son retour de vacances, vers le mois de février-mars 2016, il avait plusieurs messages à la maison d’enquêteurs qui voulaient lui poser des questions. Il affirme avoir rappelé et avoir répondu à plusieurs questions pour expliquer sa situation sans trop comprendre ce qui se passait.

[21] L’appelant affirme qu’il n’a pas pris sa retraite, mais bien qu’il était tanné de travailler à cet endroit et il qu’il a saisi l’occasion lorsqu’elle s’est présentée en espérant se trouver autre chose. L’appelant dit qu’il était très tanné et qu’il voulait recommencer à travailler suite à son départ de chez Saputo. Il affirme qu’il n’a pas assez de revenus pour vivre. Il indique que sa pension de l’employeur est de 1115.58$ par mois et qu’il reçoit également 440$ des Rentes du Québec, ce qui lui donne environ 1600$ par mois. Lorsqu’il travaillait, il gagnait environ 550$ net par semaine.

[22] L’appelant affirme que le poste qui a été supprimé était un poste sur une ligne de production et a été coupé pour toujours.

[23] L’appelant indique que la clause 14.04 de la convention collective est en place depuis longtemps et que plusieurs employés s’en servent lorsqu’il y a des coupures de poste. Il ajoute que le syndicat lui a d’ailleurs confirmé que cette façon de faire était conforme à recevoir des prestations d’assurance-emploi. L’appelant affirme que s’il avait su qu’il n’aurait pas droit aux prestations d’assurance emploi, il n’aurait pas quitté et serait resté un peu plus longtemps. Le syndicat lui a dit que depuis l’existence de cette clause (15-20 ans), de nombreux employés se sont prévalurent de l’indemnité de départ prévue à la convention collective et qu’il était le premier employé à s’en être prévalue pour qui les prestations lui sont refusées.

[24] Lorsqu’interrogé sur ses recherches d’emploi, l’appelant a donné la liste de compagnie suivante : Usine Isolofoam, A. L. compagnie d’électricité, S. C., maitre nettoyeur à X, X (nettoyage dans le bureau), golf à X, compagnie funéraire à X, IGA, etc. Il affirme avoir appliqué à une vingtaine d’emplois. Il affirme qu’il est toujours disponible à travailler et qu’il n’a pas de métier, mais que ses seules restrictions seraient de ne pas se chercher d’emploi de nuit. Autrement, il affirme être disponible tous les jours. Pour ce qui est de ses attentes au niveau salarial, l’appelant affirme qu’il aimerait avoir 14$-15$ de l’heure.

Arguments des parties

[25] L’appelant a fait valoir qu’il ne doit pas être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour les raisons suivantes :

  1. Il a bénéficié du programme de compression de personnel prévu aux articles 14.04 et 17.03 de sa convention collective, et ce, en conformité avec l’article 51(1) du règlement sur l’assurance-emploi afin de permettre à l’employeur de réduire en permanence son effectif global. Ainsi, il a accepté de quitter son poste afin de protéger celui d’un autre salarié. Un poste aurait été aboli de toute façon puisque cette abolition de poste a fait l’objet d’un affichage chez l’employeur.
  2. Le scénario qui s’est produit dans le cas de l’appelant découle exactement de l’esprit de l’article 51 du Règlement. Cet article existe précisément pour les cas de compression de personnel tel que dans le cas du départ de l’appelant. Son départ était certainement volontaire, ce qui est cohérent avec les dispositions de l’article 51 du Règlement. De plus, tel que noté par le juge Marin dans CUB 27011, on ne peut reprocher à l’appelant de faire ce choix personnel lorsqu’il a suivi les procédures prévues à la convention collective.
  3. Cette façon de faire fonctionne chez l’employeur depuis les années 1980 et jamais un salarié ne s’est vu privé des prestations d’assurance-emploi en bénéficiant de ce programme prévu à la convention collective. Chez cet employeur, il n’y a jamais eu d’autres types de mesures de compression de personnel que celui dont l’appelant s’est prévalu. C’est vraiment l’employeur qui met ses dispositions en place.
  4. La Commission est venue à la conclusion qu’il avait fait seulement 4 applications, mais c’est en partie parce qu’elle exigeait de l’appelant des dates précises d’application et l’appelant ne pouvait pas fournir de renseignements aussi précis à la Commission.
  5. L’enquête de façon générale était faite vraiment sur la question du départ et non de la question de la disponibilité. Les vrais questionnements sur la disponibilité s’est fait aujourd’hui à l’audience, mais l’appelant n’a pas été beaucoup questionné au sujet de son départ plutôt. Il n’a pas eu la chance de prouver sa disponibilité auprès de la Commission.
  6. Subsidiairement, si l’appel n’est pas accordé, l’appelant demande de défalquer la dette de l’appelant puisque son pouvoir d’achat est déjà très limité.

[26] L’intimée a soutenu que l’appelant doit être exclu des prestations d’assurance-emploi pour les raisons suivantes :

  1. Le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit une exclusion indéfinie lorsque le prestataire quitte volontairement son emploi sans justification. Le test à appliquer, en tenant compte de toutes les circonstances, est de savoir si le prestataire avait une autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi au moment où il l’a fait. Cependant, une disposition réglementaire permet à une personne qui accepte de quitter son emploi afin de préserver les emplois de ses collègues dans le cadre d'une mesure de compression du personnel, de recevoir des prestations. La mesure de compression du personnel dans le contexte de l’article 51 du Règlement doit être instituée par l’employeur, elle vise à réduire de façon permanente l’effectif global. La mesure doit offrir l’option aux employés de quitter volontairement leurs emplois et cette option doit être documentée par l’employeur.
  2. Cependant, l’employeur qui fonctionne par attrition pour réduire ses effectifs ne rencontre pas la disposition réglementaire de la compression du personnel. Les employés quittant leur emploi lorsque l’employeur réduit l’effectif au moyen d’attrition ne peuvent se soustraire à l’exclusion. En l’espèce le prestataire a quitté volontairement son emploi pour bénéficier de la prime associée à l’abolition d’un poste et il n’a pas démontré qu’il rencontrait les exigences de l’article 51 du Règlement parce que dans le présent dossier, l’employeur doit faire l’abolition d’un poste, toutefois la personne détentrice du poste refuse de quitter l’entreprise. Selon la convention collective, l’employeur doit afficher le poste avec la prime d’abolition associée au poste. Les personnes désirant se prévaloir de la prime d’abolition de poste doivent signifier leur intérêt à l’employeur et c’est ce que le prestataire a fait. Ce faisant, le prestataire devient le détenteur du poste à abolir, donc il doit quitter l’entreprise. Comme l’a mentionné la Commission à la page GD3-50, l’employeur a déjà bénéficié du programme de Compression du personnel du 30 janvier 2014 au 30 juin 2014. Durant cette période, le prestataire n’a pas été touché par ce programme, il ne figurait pas parmi les employés visés. Cependant, au moment où le prestataire quitte son emploi, le programme n’existe plus chez l’employeur.
  3. Le prestataire a mentionné à la Commission qu’il désirait quitter son emploi parce qu’il ne voulait plus travailler du tout (page GD3-40). Quitter son emploi parce qu’il ne désire plus travailler, ne constitue pas un motif valable pour justifier le départ volontaire.
  4. Bien que le geste posé par l’appelant est louable, la Commission maintient qu’il ne rencontre pas l’article 51 du Règlement, mais bien qu’il a quitté son emploi sans motif valable.
  5. La Commission a conclu que le prestataire n’a pas épuisé toutes les solutions raisonnables avant de quitter son emploi le 30 janvier 2015. À la suite de l’étude de toute la preuve, la Commission est d’avis qu’une solution raisonnable au départ aurait été de garder son poste d’opérateur-malaxeur crème. Le prestataire avait le choix de garder son poste. Le prestataire dit qu’il n’a jamais eu l’intention de prendre sa retraite, il a toujours été désireux de se retrouver un emploi le plus rapidement possible. Le prestataire pouvait s’assurer d’un autre emploi avant de quitter, ce qu’il n’a pas fait. Conséquemment le prestataire n’a pas réussi à prouver qu’il était justifié de quitter son emploi au sens de la Loi.
  6. La Commission soumet que la jurisprudence appuie sa position. La Cour d’appel fédérale a confirmé le principe selon lequel il n’y a pas de programme de compression de personnel et le prestataire doit prouver qu’il était justifié de quitter son emploi en vertu du paragraphe 29(c) de la Loi, à moins que le départ du prestataire rencontre toutes les exigences de l’article 51 du Règlement (Canada (PG) c. Williams, 2010 CAF 271). La Cour d’appel fédérale a confirmé qu’il incombe au prestataire ayant volontairement quitté son emploi de prouver qu’il n’existait aucune autre solution raisonnable que de quitter son emploi à ce moment-là (Canada (PG) c. White, 2011 CAF 190).
  7. Lors de sa déclaration avec la Commission, le prestataire a mentionné qu’il avait quitté l’emploi afin de ne plus travailler du tout. Du 14 juin 2015 au 9 janvier 2016, le prestataire a fait 4 démarches d’emploi seulement. Ces faits ne démontrent pas que le prestataire désire retourner rapidement sur le marché du travail ni que son objectif était de se trouver un emploi convenable. Le prestataire avait un emploi permanent à temps plein, il le quitte afin de bénéficier d’une prime d’abolition de poste et ne plus avoir à travailler. Devant ces faits, la Commission ne peut considérer que le prestataire est disponible à travailler comme l’entend l’article 18 de la Loi.
  8. La cour a énuméré les critères à analyser lors de l’évaluation de la disponibilité d’un prestataire et a réitéré le principe selon lequel le prestataire doit faire la démonstration de son désir de retourner sur le marché du travail dès qu’un emploi convenable lui est offert grâce à des démarches pour trouver un emploi convenable (Canada (PG) c. Bois, 2001 CAF 175)
  9. De plus, la Cour a établi que le fardeau du prestataire de prouver sa disponibilité est une exigence de la Loi qui ne peut être ignorée. Afin d'obtenir des prestations d’assurance- emploi, un prestataire doit chercher activement un emploi convenable, même s'il lui semble raisonnable de ne pas le faire (Canada (PG) c. Cornelissen-O’Neil, A-652-93; Lamirande c. Canada (PG), 2004 CAF 311)

Analyse

[27] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

Première question en litige : Départ volontaire

[28] Dans ce dossier, il est admis d’emblée que l’appelant a lui-même quitté son emploi. Généralement, dans les cas de départ volontaire, le Tribunal doit décider si l’appelant était fondé à quitter son emploi et s’il doit être exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi selon l’article 30 de la Loi. Cependant, dans ce cas-ci, l’appelant soulève l’argument spécifique que l’appelant ne devrait pas être exclu du bénéfice des prestations puisqu’il a quitté son emploi suite à des compressions de personnel et que l’article 51(1) du Règlement devrait s’appliquer. Le Tribunal doit déterminer si l’appelant rencontre les exigences de l’article 51(1) du Règlement lui permettant d’être éligible aux prestations d’assurance-emploi malgré son départ volontaire.

[29] L’article 51(1) du règlement prévoit qu’un prestataire qui a quitté un emploi dans le cadre d’une compression de personnel effectuée par l’employeur et ayant pour effet de protéger l’emploi d’autres employés peut recevoir des prestations.

[30] La première question que le Tribunal doit se poser est si le départ était volontaire. Dans le cas qui nous occupe, tel que mentionné ci-haut, les deux parties ont admis le caractère volontaire du départ de l’appelant et le Tribunal adhère également à cette conclusion. En effet, la preuve documentaire et orale démontre que l’appelant a fait le choix de quitter son emploi alors que son employeur devait abolir un poste. Il a été démontré et reconnu que selon son ancienneté, l’appelant aurait pu continuer de travailler, mais il a choisi de se prévaloir d’une prime de départ associé à l’abolition d’un poste.

[31] L’article 51(1)b) exige que l’employeur ait confirmé que le départ de l’appelant a effectivement eu pour effet de protéger l’emploi d’un autre employé, lequel aurait autrement cessé dans le cadre de la compression de personnel. Le Tribunal est d’avis que l’employeur a bel et bien confirmé ce fait. Dans les relevés de conversation entre la Commission et l’employeur, ce dernier confirme que l’appelant a quitté suite à une abolition de poste. L’appelant a indiqué que le poste d’un autre employé était aboli et qu’en quittant, il prévenait que cette personne se retrouve sans emploi. Cette version est cohérente avec la version de l’employeur. Le Tribunal est satisfait que le départ de l’appelant a eu pour effet de protéger l’emploi d’un autre employé qui aurait vu son poste aboli.

[32] L’article 51 du Règlement, à son alinéa (2) prévoit de plus qu’une compression de personnel doit être une mesure a) qui est instituée par l’employeur; b) qui vise à réduire de façon permanente l’effectif global; c) qui offre aux employés le choix de quitter volontairement leur emploi et d) dont les caractéristiques, y compris celles visées aux alinéas a) à c) figurent dans des documents établis par l’employeur.

[33] La Commission soutient que l’appelant ne rencontre pas les exigences de l’article 51 du Règlement. Elle soutient précisément que l’employeur qui fonctionne par attrition pour réduire ses effectifs ne rencontre pas la disposition réglementaire de la compression du personnel et que les employés quittant leur emploi lorsque l’employeur réduit l’effectif au moyen d’attrition ne peuvent se soustraire à l’exclusion. La Commission n’a fourni aucune disposition législative ou jurisprudentielle afin de supporter sa prétention. Le Tribunal s’explique mal comment motiver la conclusion qu’une mesure de réduction d’effectif par attrition disqualifie automatiquement un prestataire de l’application de l’article 51 du Règlement. Le Tribunal est d’avis contraire à la Commission sur ce point et estime que de limiter l’application de l’article 51 du Règlement tel que le suggère la Commission est injustifié et non fondé. Le Tribunal estime que le test à appliquer est de savoir si le départ a eu pour effet de protéger l’emploi d’un autre employé ou non. Que ce soit par attrition, coupure de poste ou suite à une autre méthode de compression de personnel est non pertinente au litige. Le raisonnement du Tribunal aurait peut-être été différent en présence d’une attrition de poste suite au départ à la retraite d’un employé, mais ce n’est pas le cas ici. Chaque cas étant un cas d’espèce, il ne faut pas s’arrêter au terme « attrition » utilisé par la Commission, mais plutôt analyser l’ensemble des circonstances entourant le départ de l’appelant. Dans ce cas-ci, le Tribunal estime que la preuve est claire, tant celle de l’appelant que celle de l’employeur à l’effet qu’un employé aurait perdu son emploi n’eut été du départ volontaire de l’appelant. Le Tribunal conclue donc que l’appelant rencontre l’exigence de l’alinéa 51(1)b) du Règlement.

[34] La Commission soutient de plus que l’employeur a déjà bénéficié du programme de compression du personnel du 30 janvier 2014 au 30 juin 2014 et que l’appelant n’a pas été touché par ce programme durant cette période. Il est possible que l’employeur ait eu un programme de compression de personnel entre le 30 janvier 2014 et le 30 juin 2014, mais aucune preuve n’a été soumise à propos dudit programme. De plus, l’existence d’un tel programme n’empêche pas que d’autres compressions de personnel puissent avoir eu lieu ultérieurement. Le Tribunal saisi mal l’argument de la Commission qui plus est n’est pas supporté par la preuve. Le Tribunal accepte plutôt la version donnée à la fois par l’employeur et l’appelant à l’effet que la pratique chez Saputo lors d’abolition de poste est en place est standard et mise en place depuis longtemps. Cette pratique est confirmée à l’article 14.04 de la convention collective qui stipule que lors d’abolition définitive d’un poste ou d’une fonction, le salarié affecté directement pourra se prévaloir d’une indemnité de départ et que si ne s’en prévaut pas, l’employeur offrira aux autres salariés par ordre d’ancienneté une indemnité de départ. Le Tribunal conclut que c’est exactement ce qui est survenu dans le cas de l’appelant; dans un premier temps, un poste a été aboli, dans un deuxième temps, la personne directement affectée ne s’est pas prévalue de l’indemnité de départ. L’employeur a ensuite offert aux salariés éligibles l’indemnité de départ et c’est dans ces circonstances que l’appelant a volontairement quitté et obtenu la prime. Cette conclusion de fait permet par le fait même au Tribunal de conclure que a) La compression de personnel a bel et bien été instituée par l’employeur puisque ce dernier a reconnu avoir aboli un poste; b) la compression de personnel visait à réduire de façon permanente l’effectif global puisque le poste a été aboli de façon permanente, tel que démontré par l’employeur, l’appelant et l’article de la convention collective qui a été appliquée de par son titre (abolition définitive); et que c) l’abolition de poste a été une mesure qui offrait aux employés le choix de quitter volontairement leur emploi, tel que stipulé à l’article 14.04 de la convention.

[35] Le Tribunal est satisfait que les caractéristiques nécessaires à l’application du paragraphe (1) de l’article 51 du Règlement figurent dans des documents établis par l’employeur. En effet, tel que mentionné ci-haut, la convention collective fait état d’un processus clair en cas d’abolition de poste que le Tribunal assimile à une compression du personnel et qui est à la fois initiée par l’employeur et qui vise à réduire de façon permanente l’effectif global. L’employeur a également soumis le formulaire d’indemnité de départ confirmant que l’appelant avait bel et bien quitté volontairement ainsi que de ses notes au dossier de l’employé. Le Tribunal est d’avis que les documents fournis par l’employeur, les actes et les gestes posés confirment une compression de personnel par l’abolition d’un poste conformément à la jurisprudence en vigueur (Garley, 2004 FCA 24). Bien que l’employeur n’ait pas produit de lettre décrivant exactement les conditions de l’article 51(2) du Règlement, la confirmation des exigences est implicite à la lumière des documents au dossier. Tel que souligné par le juge Marin : « il ne faut surtout pas que les prestataires soient punis pour un jeu de circonstances qui est au-delà de leur portée » (Garley).

[36] Bien que non lié par les décisions de juge-arbitre, le Tribunal trouve convaincantes les conclusions du juge Cullen dans CUB 24993. Il note que l’article 51 du Règlement réfère aux cas pour lesquels des employés plus anciens acceptent une retraite anticipée afin que des employés plus juniors puissent conserver leur emploi suite à une restructuration d’entreprise/compressions d’emploi. Dans CUB 27011, le juge Marin appuie les propos du juge Cullen et réitère que le but visé de l’article du Règlement est de s’appliquer aux cas de sociétés qui procèdent à des compressions d’emploi. Le Tribunal partage cet avis et estime que c’est exactement le cas du présent litige et que c’est l’esprit du règlement qui est affirmé dans le présent appel.

[37] Basé sur la totalité de la preuve et sur la balance des probabilités, le Tribunal estime que l’appelant rencontre les exigences de l’article 51(1) du Règlement et par conséquent qu’il ‘y a pas lieu de lui imposer l’exclusion des prestations d’assurance-emploi prévue à l’article 30 de la Loi.

Deuxième question en litige : disponibilité

[38] Le prestataire qui réussit à établir qu’il répond aux exigences de l’article 51 du Règlement n’est pas exclu du bénéfice des prestations suite à son départ volontaire, mais s’il veut en recevoir, il doit prouver qu’il était disponible pour travailler pour tout jour ouvrable d’une période de prestations (Maughan, 2012 CAF 35; Leblanc, 2010 CAF 60). Le terme disponibilité n’est pas défini dans la Loi. Il s’agit qu’une question de fait qui exige que le décideur tienne compte de certains critères. Dans son analyse, le Tribunal se penchera donc sur les trois critères à prendre en compte tels qu’établi par la jurisprudence sur cette question (Faucher, A-56-96 (Faucher), Boland, 2004 CAF 251; Primard, 2003 CAF 349; Bois, 2001 CAF 175). Les trois critères sont les suivants:

  1. un désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable est offert;
  2. une manifestation de ce désir par des efforts pour trouver cet emploi convenable;
  3. l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail.

[39] Le fardeau de preuve repose sur le prestataire; ce dernier ne doit pas se contenter de dire qu’il est disponible, il doit également le prouver à l’aide de tous les documents nécessaires (Renaud, 2007 CAF 328; Stolniuk, 1993CAF 686 93; Floyd, 1993 CAF 168). Ainsi, l’appelant doit répondre aux trois critères énumérés ci-haut pour satisfaire à l’exigence de disponibilité.

[40] En ce qui a trait au désir de l’appelante de retourner sur le marché du travail, le Tribunal note que le désir de retourner sur le marché du travail doit être sincère, démontré par l’attitude et la conduite du prestataire (Whiffen, A-1472-92). Dans ce cas-ci, le Tribunal est arrivé à la conclusion, sur la balance des probabilités, que l’appelant souhaitait réintégrer le marché du travail dès qu’il se trouverait un emploi. Il a témoigné à propos de sa situation financière limitée du fait qu’il avait besoin d’un revenu d’appoint pour vivre. La Commission soutient que l’appelant ne voulait plus travailler du tout tel que rapporté dans un rapport de conversation survenue le 22 janvier 2016 lors de l’enquête de la Commission. Le Tribunal estime que la Commission a interprété cette réponse comme faisant foi des intentions de l’appelant à ne plus vouloir être sur le marché du travail. Le Tribunal est d’avis que l’appelant a répondu à cette question parmi une série d’autres questions alors qu’on enquêtait sur lui sans qu’il connaisse le contexte. À la lecture du rapport de conversation, le Tribunal constate que les réponses de l’appelant étaient courtes, plus ou moins cohérentes et qu’il voulait connaître les motivations de l’enquêteur. Il a d’ailleurs mis fin à la conversation de façon soudaine, ce qui laisse présager qu’il s’est senti coincé. Le Tribunal accorde plus de poids à son témoignage lors de l’audience alors que l’appelant a pu répondre clairement à plusieurs questions précises sur ses intentions lors de son départ de Saputo et en ayant la connaissance des enjeux et litiges le concernant. Par son témoignage, l’appelant a su convaincre le Tribunal que ses intentions étaient de se trouver du travail suite à son départ volontaire de chez Saputo et non d’arrêter complètement de travailler.

[41] Pour ce qui est de la manifestation du désir de l’appelant de retourner sur le marché du travail, le Tribunal est d’accord avec la Commission que l’appelant avait la responsabilité de chercher activement un emploi convenable afin de pouvoir obtenir des prestations d’assurance- emploi (Cornelissen-O’Neil, A-652-93, De Lamirande, 2004 CAF 311). Il appert au dossier et il a été reconnu par l’appelant que son inexpérience avec le système d’assurance-emploi a fait en sorte qu’il ne connaissait pas initialement cette obligation de recherche d’emploi, mais que suite à ses discussions avec le centre local d’emploi, il a bien compris et a procédé à une recherche sérieuse. Le Tribunal retient l’argument de l’appelant selon lequel la question des démarches d’emploi n’a été que brièvement explorée lors de l’enquête de la Commission, l’emphase étant beaucoup plus sur la question du départ volontaire. Le Tribunal estime que la preuve contenue au dossier démontre que la Commission n’a que très brièvement interrogé l’appelant à propos de son historique de recherche d’emploi et n’a donc pas pu apprécier suffisamment cette question. La Commission soutient entre autres que l’appelant a fait seulement 4 démarches d’emploi entre le 14 juin 2015 et le 9 janvier 2016. Cependant, le Tribunal accepte le témoignage de l’appelant expliquant que s’il n’a été en mesure de fournir seulement 4 exemples de recherches d’emploi, c’est que la Commission lui exigeait les détails précis de chaque application incluant les dates et heures. Or, le Tribunal accepte que l’appelant, à son âge et selon son profil, n’avait pas l’habitude ni la pratique de tout noter dans les détails. Bien que l’appelant n’ait pas fourni une liste écrite concrète de ses démarches de recherche d’emploi, il a tout de même présenté verbalement le nom d’une dizaine d’employeurs qu’il avait approché. Ayant eu le bénéfice de l’audience et du témoignage de l’appelant, le Tribunal est satisfait qu’il cherchât activement du travail afin de subvenir à ses besoins et avait les meilleures intentions de retourner sur le marché du travail. Le Tribunal accorde un poids significatif au témoignage de l’appelant, indiquant qu’il a approché plusieurs employeurs, pour conclure sur la balance des probabilités qu’il entreprenait des démarches raisonnables pour se trouver un emploi (Whiffen, A-1472-92).

[42] Le dernier critère qui doit être analysé par le Tribunal est l’absence de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail. Dans le cas qui nous intéresse, le Tribunal ne soulève aucune condition personnelle qui limiterait les chances de l’appelant de se trouver un emploi. Certes, le Tribunal reconnait que l’expérience de travail de l’appelant limité au même secteur d’activité durant toute sa vie et son âge peut amener des difficultés supplémentaires dans l’obtention d’un emploi. Cependant, ce ne sont pas des conditions personnelles qui le limitent indûment. L’appelant a témoigné avec sincérité qu’il était prêt à accepter un emploi dans divers domaines et que ses seules restrictions étaient de ne pas travailler de nuit. Il a également mentionné qu’il accepterait un emploi à moindre salaire que son dernier emploi, soit à 14$ ou 154 de l’heure. Le tribunal estime que les attentes de l’appelant sont raisonnables dans ses circonstances et répondent positivement au troisième critère de la cour d’appel Fédérale (Faucher).

[43] Le Tribunal estime que la disponibilité doit être évaluée en fonction de l’attitude et de la conduite du prestataire en tenant compte des circonstances propres à chaque affaire (Carpentier, 1997 CAF 474; Whiffen, A-1472-92; Rondeau, 1977 CAF 133). Ainsi, à la lumière des circonstances spécifiques de l’appelant dans le présent litige, le Tribunal estime que ce dernier satisfait les exigences de Faucher et a réussi à démontrer sa disponibilité selon la Loi.

Défalcation

[44] Le Tribunal note que l’appelant a aussi fait la demande de lui accorder une défalcation étant donné sa situation financière restreinte. L’article 56 du Règlement précise que c’est la Commission qui détient le pouvoir discrétionnaire de défalquer une somme qui lui est due par un débiteur. Le Tribunal estime qu’il n’est pas de sa compétence de rendre une décision en matière de défalcation et que cette demande doit être adressée directement à la Commission.

Conclusion

[45] L’appel sur la question du départ volontaire est accueilli.

[46] L’appel sur la question de la disponibilité est accueilli.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi
  1. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. (a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. (b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  2. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  3. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  4. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  5. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  6. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  7. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
  8. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci- après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  9. 18 (1) Le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là:
    1. (a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable;
    2. (b) soit incapable de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine prévue par règlement et aurait été sans cela disponible pour travailler;
    3. (c) soit en train d’exercer les fonctions de juré.
  10. (2) Le prestataire à qui des prestations doivent être payées en vertu de l’un des articles 23 à 23.2 n’est pas inadmissible au titre de l’alinéa (1)b) parce qu’il ne peut prouver qu’il aurait été disponible pour travailler n’eût été la maladie, la blessure ou la mise en quarantaine.
  11. 50 (1) Tout prestataire qui ne remplit pas une condition ou ne satisfait pas à une exigence prévue par le présent article n’est pas admissible au bénéfice des prestations tant qu’il n’a pas rempli cette condition ou satisfait à cette exigence.
  12. (2) Toute demande de prestations est présentée de la manière ordonnée au bureau de la Commission qui dessert le territoire où réside le prestataire ou à tout autre endroit prévu par règlement ou ordonné par la Commission.
  13. (3) Toute demande de prestations est présentée sur un formulaire fourni ou approuvé par la Commission et rempli conformément aux instructions de celle-ci.
  14. (4) Toute demande de prestations pour une semaine de chômage comprise dans une période de prestations est présentée dans le délai prévu par règlement.
  15. (5) La Commission peut exiger d’autres renseignements du prestataire relativement à toute demande de prestations.
  16. (6) La Commission peut demander à tout prestataire ou à tout groupe ou catégorie de prestataires de se rendre à une heure raisonnable à un endroit convenable pour présenter en personne une demande de prestations ou fournir des renseignements exigés en vertu du paragraphe (5).
  17. (7) Pour obtenir d’un prestataire la preuve de sa disponibilité pour le travail, la Commission peut exiger qu’il s’inscrive comme demandeur d’emploi à un organisme de placement fédéral ou provincial et qu’il communique avec cet organisme à des moments raisonnables que la Commission ou l’organisme lui fixera.
  18. (8) Pour obtenir d’un prestataire la preuve de sa disponibilité pour le travail et de son incapacité d’obtenir un emploi convenable, la Commission peut exiger qu’il prouve qu’il fait des démarches habituelles et raisonnables pour trouver un emploi convenable.
  19. (8.1) Pour obtenir d’un prestataire la preuve que les conditions prévues au paragraphe 23.1(2) ou 152.06(1) sont remplies, la Commission peut exiger du prestataire qu’il lui fournisse un autre certificat délivré par un médecin.
  20. (9) Tout prestataire est tenu, sauf autorisation contraire de la Commission, de fournir l’adresse postale de sa résidence habituelle.
  21. (10) La Commission peut suspendre ou modifier les conditions ou exigences du présent article ou des règlements chaque fois que, à son avis, les circonstances le justifient pour le bien du prestataire ou un groupe ou une catégorie de prestataires.
Règlement sur l’assurance-emploi
  1. 9.1 Pour l’application du paragraphe 50(8) de la Loi, les critères servant à déterminer si les démarches que fait un prestataire pour trouver un emploi convenable constituent des démarches habituelles et raisonnables sont les suivants :
    1. (a) les démarches du prestataire sont soutenues;
    2. (b) elles consistent en :
      1. (i) l’évaluation des possibilités d’emploi,
      2. (ii) la rédaction d’un curriculum vitae ou d’une lettre de présentation,
      3. (iii) l’inscription à des outils de recherche d’emploi ou auprès de banques d’emplois électroniques ou d’agences de placement,
      4. (iv) la participation à des ateliers sur la recherche d’emploi ou à des salons de l’emploi,
      5. (v) le réseautage,
      6. (vi) la communication avec des employeurs éventuels,
      7. (vii) la présentation de demandes d’emploi,
      8. (viii) la participation à des entrevues,
      9. (ix) la participation à des évaluations des compétences;
    3. (c) elles sont orientées vers l’obtention d’un emploi convenable.
  2. Compression de personnel
  3. 51 (1) Sous réserve de la Loi et des autres dispositions du présent règlement et malgré l'article 30 de la Loi, le prestataire qui a quitté son emploi dans le cadre d'une compression du personnel effectuée par l'employeur et ayant pour effet de protéger l'emploi d'autres employés peut recevoir des prestations si :
    1. a) d'une part, il a accepté l'offre de quitter volontairement cet emploi;
    2. b) d'autre part, l'employeur a confirmé que ce départ a effectivement eu pour effet de protéger l'emploi d'un autre employé, lequel emploi aurait autrement cessé dans le cadre de la compression du personnel.
  4. (2) Pour l'application du paragraphe (1), une compression du personnel est une mesure :
    1. a) qui est instituée par l'employeur;
    2. b) qui vise à réduire de façon permanente l'effectif global;
    3. c) qui offre aux employés le choix de quitter volontairement leur emploi;
    4. d) dont les caractéristiques, y compris celles visées aux alinéas a) à c), figurent dans des pages établis par l'employeur.
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