Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Le 27 mai 2016, la division générale du Tribunal a déterminé que l'appelant avait perdu son emploi en raison de son inconduite au sens des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

[3] L’appelant a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel le 4 juillet 2016, après avoir reçu la décision de la division générale le 7 juin 2016. L’appelant a reçu la permission d’interjeter appel le 12 juillet 2016.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience par téléphone pour les raisons suivantes :

  • La complexité de la ou des questions faisant l’objet de l’appel.
  • Le fait que l’on ne prévoit pas que la crédibilité des parties figure au nombre des questions principales.
  • Les renseignements figurant au dossier, y compris le besoin d’en obtenir davantage.
  • L’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[5] L’appelant était présent. L'intimée n'était pas présente, bien qu'elle ait été avisée de la date de l'audience.

Droit applicable

[6] Au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), il est indiqué que les seuls motifs d’appels sont les suivants :

  1. la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’appelant avait été congédié en raison de son inconduite aux termes des articles 29 et 30 de la Loi.

Observations

[8] L’appelant présente les arguments suivants à l’appui de son appel :

  • Les faits démontrent que le conseil scolaire a exercé une pression sur son employeur afin qu’il le congédie, sans quoi l’employeur n’aurait pas pris cette mesure;
  • La conduite était autorisée par l’employeur;
  • Ce que l’employeur autorise en sa présence influence directement le « code de conduite implicite »;
  • Il avait respecté le code de conduite précédent selon lequel il était interdit de dire des injures en la présence de clients, plus particulièrement des enseignants et des élèves, mais les injures étaient tolérées entre compagnons de travail;
  • Il n’a jamais dit d’injures à un moment où il aurait été raisonnable de s’attendre à ce que quelqu’un l’entente à l’extérieur de la conversation immédiate.

[9] L’intimé invoque les arguments suivants pour plaider sa cause :

  • Le critère permettant de déterminer s’il y a eu inconduite consiste à se demander si l’acte reproché était volontaire, ou du moins procédait d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur ses obligations envers son employeur. L’inconduite peut prendre la forme d’une infraction à la loi, à un règlement ou à une règle éthique, et elle peut signifier qu’une condition explicite ou implicite du contrat de travail n’est plus respectée.
  • Dans le cas présent, la division générale a tenu compte des éléments de preuve et a déterminé qu’il ne faut pas se concentrer sur la conduite de l’employeur, mais plutôt sur celle de l’appelant.
  • En appliquant les critères juridiques et la jurisprudence, la division générale a déterminé que les injures exprimées par l’appelant en compagnie de son collègue sur la propriété d’une école primaire ont mené au congédiement. Ses actes ont détérioré la relation de son employeur avec le conseil scolaire, et il s’agissait d’imprudence et de négligence telles que l’appelant aurait pu savoir qu’ils pourraient entraîner son congédiement.
  • La décision de la division générale fait partie des issues raisonnables, compte tenu de l’ensemble des faits présentés. Comme il est indiqué dans les observations à la division générale, les rapports médicaux et les conversations enregistrées n’influenceraient pas la décision.

Norme de contrôle

[10] L’Appelant n’a fait aucune représentation quant à la norme de contrôle applicable.

[11] L’intimée affirme que la division d’appel ne doit pas faire de déférence à l’égard de la décision de la division générale sur des questions de droit, que l’erreur apparaisse ou non au dossier. Cependant, pour les questions mixtes de droit et de fait et les questions de fait, la division d’appel doit faire preuve de déférence à l’égard de la division générale. Elle ne peut intervenir que si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose (Pathmanathan c. Bureau du juge-arbitre, 2015 CAF 50).

[12] Le Tribunal retient que la Cour d’appel fédérale a indiqué au paragraphe 19 de la décision rendue par rapport à Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242 que « Lorsqu’elle agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la Division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. »

[13] La Cour d’appel fédérale a également indiqué que :

[n]on seulement la division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la division générale du Tribunal de la sécurité sociale et n’est-elle donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[14] La Cour a conclu que, lorsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi.

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale comme il est décrit dans Jean a été confirmé ultérieurement par la Cour d'appel fédérale dans Maunder c. Canada (P.G.), 2015 CAF 274.

[16] Par conséquent, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

[17] Le Tribunal a tenu l’audience en l’absence de l’intimée étant donné qu’il était satisfait d’avoir reçu l’avis d’audience conformément à l’article 12 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[18] En rejetant l’appel de l’appelant, la division générale a tiré les conclusions suivantes :

[22] Il n’est pas pertinent de déterminer si le conseil scolaire a exercé une pression sur l’employeur afin qu’il congédie l’appelant. Dans le cas présent, les faits démontrent que l’employeur a pris la décision de congédier l’appelant.

[23] Les tribunaux doivent se concentrer sur le comportement de l'appelant, et non sur celui de l’employeur. La question à trancher ne consiste pas à savoir si l'employeur s’est rendu coupable d’inconduite en congédiant l’appelant de sorte que ce congédiement serait injustifié, mais bien à savoir si le demandeur s’est rendu coupable d’inconduite et si celle-ci a entraîné la perte de son emploi (McNamara 2007 CAF 107; Fleming 2006 CAF 16).

[24] L’employeur et la Commission doivent démontrer que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite, et la décision doit être prise selon la prépondérance des probabilités LARIVEE A-473-06, FALARDEAU A-396- 85.

[25] Il doit y avoir un lien de causalité entre l’inconduite reprochée au prestataire et la perte d’emploi. Il faut que l’inconduite cause la perte d’emploi et qu’elle en soit une cause opérante. En plus du lien de causalité, l’inconduite doit être commise par le prestataire pendant qu’il est embauché par l’employeur, et elle doit constituer un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Cartier 2001 CAF 274; Smith A-875-96; Brissette A-1342-92; Nolet A-517- 91).

[26] Le fait que le prestataire a agi de manière impulsive n’est pas pertinent afin de déterminer si ses actes constituent une inconduite. En agissant comme il l’a fait, le prestataire aurait dû savoir que sa conduite était de nature à mener à son congédiement (Kaba 2013 CAF 208; Hastings 2007 CAF 372).

[27] La question qui a mené au congédiement est l’implication de l’appelant dans une altercation verbale avec un compagnon de travail qui comprenait des injures et qui s’est déroulée sur la propriété d’une école primaire.

[28] L’incident a immédiatement détérioré la relation entre l’appelant et l’employeur, ainsi que celle entre l’employeur et le conseil scolaire.

[29] Je conclus que, même en l’absence d’un code de conduite écrit, l’appelant savait que l’utilisation d’injures sur la propriété d’une école représentait une transgression au comportement acceptable comme il a reconnu lorsqu’il a fait valoir qu’un tel comportement ne serait jamais adopté à proximité d’élèves ou d’enseignants.

[30] Lorsque le ton de la confrontation en question a monté et que des propos grossiers ont été exprimés, il était impossible de déterminer si des élèves ou des membres du personnel se trouvaient assez près pour entendre.

[31] Je conclus que la Commission et l’employeur ont démontré, comme ils étaient chargés de le faire, que les actes de l’appelant étaient suffisamment imprudents et négligents pour qu’il présume qu’ils entraîneraient son congédiement.

[19] Lors d’une entrevue avec un agent de l’assurance-emploi qui s’est déroulée le 25 novembre 2015, l’appelant a confirmé avoir utilisé un langage vulgaire (le mot anglais qui commence par « F » sur le terrain de l’école), et il a affirmé que son collègue et lui avaient haussé le ton, mais qu’il ne savait pas si les enseignants l’avaient entendu prononcer ce mot. Il a affirmé qu’il savait qu’il était mal d’utiliser ce mot sur le terrain de l’école, mais que les enfants n’étaient pas près d’eux lorsqu’il a utilisé un langage inapproprié, et qu’il ne croyait pas que les enseignants pouvaient l’entendre, mais que s’ils l’avaient entendu, ils auraient dû être en mesure de tolérer ce type de langage en tant qu’adultes.

[20] Au cours d’une entrevue qui s’est déroulée le même jour, l’employeur a déclaré qu’il y avait eu des témoins (des enseignants qui travaillaient à l’école) de la dispute verbale entre l’appelant et un autre entrepreneur. Les témoins ont affirmé que les deux employés criaient, mais que l’appelant est celui qui a utilisé un langage vulgaire.

[21] La preuve incontestée devant la division générale démontre donc que l’appelant était impliqué dans une altercation verbale qui comprenait des injures avec un collègue sur la propriété d’une école primaire, et que cette altercation a mené à son congédiement.

[22] L’appelant fait valoir qu’il ne s’attendait pas à être congédié pour avoir utilisé un langage vulgaire étant donné que ce comportement était toléré par l’employeur. Cependant, en examinant les déclarations de l’appelant au dossier, le Tribunal conclut que l’appelant a confirmé à plusieurs occasions qu’il savait qu’il était mal d’utiliser un langage vulgaire sur le terrain d’une école.

[23] L’appelant soutient qu’il était stressé au travail et qu’il ne savait pas que des enseignants ou des étudiants étaient présents ou qu’ils pouvaient l’entendre, et qu’il n’avait donc pas agi intentionnellement ou volontairement.

[24] Le Tribunal conclut que l’appelant a montré un manque de diligence tel que l’on pourrait dire qu’il a volontairement ignoré les conséquences que ses gestes auraient sur ses obligations envers son employeur lorsqu’il a utilisé un langage vulgaire pendant qu’il était stressé sans avoir la certitude qu’aucun élève ou enseignant ne se trouvait sur les lieux.

[25] L’appelant a également soutenu que le conseil scolaire avait exercé une pression sur l’employeur afin qu’il le congédie. Il a déposé un enregistrement de la déclaration de l’employeur en affirmant que c’était juste. Cet argument n’aide pas la cause de l’appelant étant donné que, comme il a été mentionné par la division générale, c’est l’employeur qui, ultimement, a pris la décision de le congédier. De plus, c’est à la division générale d’évaluer les éléments de preuve et de rendre une décision concernant la question de l’inconduite – Canada (P.G.) c. Boulton, A-45-96.

[26] D’autre part, la jurisprudence a constamment statué que le caractère raisonnable de la sanction imposée par un employeur à un employé n’est pas un facteur déterminant dans la question de savoir si le comportement d’un prestataire constitue une inconduite au sens de la Loi– Canada (PG) c. Marion, 2002 CAF 185.

[27] Comme il a été expliqué lors de l'audience, la division d’appel n’est pas habilitée à juger de nouveau une affaire ni à substituer son pouvoir discrétionnaire à celui de la division générale. La compétence du Tribunal est limitée par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. À moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

[28] Le Tribunal conclut qu’il n’existe aucun élément de preuve permettant d’étayer l’un des moyens d’appel invoqués par l'appelant ni aucun autre moyen d’appel possible. La décision de la division générale est appuyée par les faits et conforme à la loi et à la jurisprudence.

Conclusion

[29] L’appel est rejeté.

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