Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] En date du 13 mai 2016, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu que l’appelant avait quitté volontairement son emploi sans justification aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

[3] L’appelant est présumé avoir déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel en date du 16 juin 2016 après avoir reçu communication de la décision de la division générale en date du 27 mai 2016. La permission d’en appeler a été accordée le 29 juillet 2016.

Mode d’audience

[4] Le Tribunal a déterminé que l’audience de cet appel procéderait par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la ou des questions en litige;
  • du fait que la crédibilité des parties ne figurait pas au nombre des questions principales;
  • du caractère économique et opportun du choix de l’audience;
  • de la nécessité de procéder de la façon la plus informelle et rapide possible tout en respectant les règles de justice naturelle.

[5] Lors de l’audience, l’appelant était présent en compagnie de sa fille, C. G. L’intimée était représentée par Manon Richardson.

La loi

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que l’appelant avait quitté volontairement son emploi sans justification aux termes des articles 29 et 30 de la Loi.

Observations

[8] L’appelant soumet les motifs suivants au soutien de son appel:

  • La division générale n’a pas tenu compte de son état de santé qui l’a obligé à cesser son travail;
  • La division générale a erré en lui reprochant de ne pas avoir de preuve médicale justifiant son départ volontaire au seul motif que son diagnostic a été confirmé par son médecin traitant qu’après son départ volontaire;
  • Le retard dans son diagnostic ne change pas le fait qu’il était incapable de travailler dans l’attente de voir son médecin.

[9] L’intimée soumet les motifs suivants à l’encontre de l’appel de l’appelant:

  • La division générale n’a ni erré en droit ni en fait et elle a correctement exercé sa compétence;
  • Pour savoir si un prestataire est fondé à quitter son emploi, il faut se demander si, compte tenu de toutes les circonstances, son départ constituait, selon la prépondérance des probabilités, la seule solution raisonnable dans son cas;
  • L’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi. Il aurait pu discuter de la situation qui lui causait du stress avec son employeur et en parler avec son syndicat. Il aurait pu prendre un congé de maladie s’il n’était pas apte à travailler et attendre le résultat des examens au lieu de quitter son emploi;
  • L’appelant a choisi de quitter son emploi pour prendre sa retraite au lieu de regarder les différentes possibilités qu’il avait;
  • Le Tribunal n’est pas habilité à juger de nouveau une affaire ni à substituer son pouvoir discrétionnaire à celui de la division générale. Les compétences du tribunal sont limitées par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. À moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance et que cette décision est déraisonnable, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Normes de contrôle

[10] L’appelant n’a fait aucune observation quant à la norme de contrôle applicable au présent appel.

[11] L’intimée soumet que la norme de contrôle applicable aux questions de droit est celle de la décision correcte et que la norme de contrôle applicable aux questions mixtes de fait et de droit est celle de la décision raisonnable - Pathmanathan c. Bureau du juge- arbitre, 2015 CAF 50.

[12] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne au paragraphe 19 de sa décision, que lorsque la division d’appel « agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la Division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. »

[13] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant que :

[N]on seulement la Division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale et [qu’elle] n’est […] donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[14] La Cour d’appel fédérale termine en soulignant que « lorsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social, la Division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi. »

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

[16] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

[17] Dans un premier temps, le Tribunal ne tiendra compte que de la preuve produite devant la division générale pour rendre la présente décision. Il n’appartient pas à la division d’appel d’accepter une preuve qui aurait pu être produite lors de l’audience devant la division générale puisque l’audience devant la division d’appel n’est pas une audience de novo. Les pouvoirs d’intervention de la division d’appel sont limités à ce qui est prévu au paragraphe au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.

[18] L’appelant plaide en appel qu’il ne se sentait pas bien au moment de quitter son emploi. Il se plaint de ne pas avoir reçu le support de son médecin familial qui ne lui a pas prescrit un arrêt de travail lors de son départ malgré son incapacité à travailler. Il s’interroge sur sa compétence. Il soutient également que le conflit avec sa superviseure ne l’a pas aidé au niveau de sa santé. Il a donc décidé de quitter son emploi afin de penser à lui.

[19] La division générale a rejeté l’appel de l’appelant en concluant notamment ce qui suit :

[24] L’appelant a fait valoir que les problèmes de santé qu’il avait éprouvés l’avaient contraint à prendre sa retraite.

[25] Le Tribunal considère qu’une solution raisonnable au départ volontaire de l’appelant aurait été que celui-ci obtienne un certificat médical lui recommandant un arrêt de travail, avant de quitter volontairement son emploi.

[26] L’appelant a déclaré à plusieurs reprises qu’il avait consulté un médecin, plusieurs fois, mais qu’il n’avait pas obtenu de recommandation médicale lui indiquant spécifiquement qu’il devait cesser de travailler ou prendre sa retraite (pièces GD3-3 à GD3-14, GD3-16, GD3-19 à GD3-21 et GD3-23).

[27] Malgré les problèmes de santé qu’il a éprouvés et les symptômes qu’il a décrits, la preuve médicale soumise par l’appelant ne démontre pas que l’appelant était dans l’incapacité de travailler pour des raisons médicales avant de quitter volontairement son emploi.

[28] De plus, les certificats médicaux qu’il a fournis ont été présentés plusieurs mois après que l’appelant ait cessé de travailler, le 15 avril 2015, et plusieurs semaines avant que celui-ci ne prenne officiellement sa retraite le 8 juillet 2015.

[29] Dans un certificat médical émis le 22 septembre 2015, le médecin a indiqué que : « Bien que je n’ai pas mis Monsieur R. V. en arrêt de travail en avril 2015, sa décision de prendre sa retraite a été motivée par des problèmes de santé notés lors de sa consultation du 19-2-2015 et toujours présents le 01-09-2015. » (pièce GD3-21).

[30] Le certificat médical produit le 11 novembre 2015 indique que l’appelant est inapte à tout travail rémunérateur, pour des raisons médicales, pour la période du 12 juillet 2015 au 11 novembre 2015 (pièce GD3-26). Dans ce cas, l’incapacité de l’appelant à travailler a été établie pour une période au cours de laquelle l’appelant n’était déjà plus à l’emploi de son employeur.

[31] Dans sa demande de prestations, l’appelant a d’ailleurs répondu par la négative à la question lui demandant : « Avez-vous pris votre retraite parce que vous sentiez que vous n’étiez plus capable d’effectuer vos tâches? » (pièce GD3- 8).

[32] La preuve médicale soumise par l’appelant ne vient pas supporter, d’une manière objective, son incapacité à travailler, pour des raisons de santé, avant que celui-ci effectue son départ volontaire (Dietrich, A-640-93).

[20] Lors de sa demande d’assurance-emploi, l’appelant a indiqué au questionnaire relatif au départ volontaire qu’il avait volontairement démissionné afin de prendre sa retraite et que son médecin ne lui avait pas conseillé de prendre sa retraite. Il a déclaré avoir quitté son emploi avant de se rendre malade malgré le fait qu’il était capable d’effectuer ses tâches (GD3-7 et GD3-8).

[21] Lors d’une entrevue subséquente, l’appelant a déclaré qu'il a décidé « de prendre sa retraite chez [sic] l'employeur, parce qu'il ne se sentait plus bien là ». Il précise qu'il prenait son travail à cœur et qu'il n'était plus capable de voir sa supérieure ne pas respecter « sa séniorité [sic] » ainsi que celles des autres employés, ce qui le rendait « insécure [sic] ». Il a rajouté avoir consulté un médecin avant de quitter son emploi parce qu'il avait des problèmes d'estomac et de foie, mais que ce dernier ne lui avait pas recommandé d'arrêter de travailler ou même d'abandonner son travail. Il mentionne qu'il a pris la décision personnelle de quitter son emploi pour éviter que la situation qu'il vivait au travail n'affecte davantage sa santé (GD3-16).

[22] Le certificat médical déposé devant la division générale datée du 22 septembre 2015 confirme qu’il n’a pas été mis en arrêt de travail par son médecin et que l’appelant a décidé de lui-même de prendre sa retraite. Le certificat médical déposé devant la division générale datée du 11 novembre 2015 indique que l’appelant était inapte à tout travail, mais seulement pour une période de temps après son départ volontaire.

[23] Il ressort clairement de la preuve devant la division générale que ce n’est pas un médecin qui a recommandé à l’appelant d’arrêter de travailler ou de prendre sa retraite pour des raisons de santé. L’appelant a même déclaré avoir quitté son emploi avant de se rendre malade malgré le fait qu’il était capable d’effectuer ses tâches.

[24] Comme indiqué par la division générale, la preuve médicale soumise par l’appelant devant la division générale ne vient pas supporter, d’une manière objective, son incapacité à travailler pour des raisons de santé, avant que celui-ci n’effectue son départ volontaire. Au surplus, le Tribunal est d’avis que les déclarations initiales de l’appelant indiquent plutôt qu’il était capable de travailler au moment de son départ.

[25] Le Tribunal est également d’avis que la division générale n’a pas erré en concluant que les problèmes décrits par l’appelant concernant la relation conflictuelle qu’il avait avec sa supérieure ne démontrent pas que ses conditions de travail étaient devenues si intolérables qu’il n’avait d’autre choix que de quitter son emploi.

[26] Après révision du dossier et de la décision de la division générale, le Tribunal en vient à la conclusion que les motifs d’appel invoqués par l’appelant ne sont pas fondés. La décision de la division générale repose sur les éléments de preuve portés à sa connaissance, et il s’agit d’une décision qui est conforme aux dispositions législatives et à la jurisprudence.

[27] Rien ne justifie l’intervention du Tribunal.

Conclusion

[28] L’appel est rejeté.

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