Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelant était présent lors de son audience par téléconférence. Le représentant de l’appelant, W. G., QC (monsieur W. G.), était également présent à l’audience par téléconférence. Monsieur W. G. s’est présenté comme étant le père de l’appelant.

Introduction

[1] Le 10 avril 2015, l’appelant a présenté une demande initiale de prestations régulières d’assurance-emploi (prestations d’AE). Le 17 avril 2015, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a rejeté la demande de l’appelant, car elle a déterminé qu’il avait accumulé 595 heures d’emploi assurable, mais qu’il avait besoin de 630 heures pour obtenir des prestations.

[2] Le 30 avril 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision, affirmant qu’un représentant de son bureau local de Service Canada l’avait assuré qu’il recevrait des prestations d’AE pendant sa formation en apprentissage. La Commission a interrogé l’appelant et a maintenu sa décision selon laquelle il n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice des prestations.

[3] Le 25 juin 2015, l’appelant a interjeté appel auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale (Tribunal), mais le Tribunal a rejeté l’appel de l’appelant le 19 novembre 2015. Ensuite, l’appelant a interjeté appel devant la division d’appel du Tribunal. Le 24 juin 2016, la division d’appel a rendu sa décision accueillant l’appel de l’appelant et ordonnant le renvoi de l’affaire à la division générale du Tribunal pour la tenue d’une nouvelle audience.

[4] La nouvelle audience a été tenue par téléconférence, car le mode d’audience respecte le besoin, en vertu du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[5] L’appelant avait-il accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice des prestations d’AE?

Preuve

[6] Le 10 avril 2015, l’appelant a présenté une demande de prestations régulières d’AE (GD3-3 à GD3-12). Dans sa demande, l’appelant a indiqué qu’il suivrait une formation en apprentissage du 13 avril 2015 au 26 mai 2015 au « NBCC X » [collège communautaire X du Nouveau-Brunswick] (GD3-3), et qu’il reprendrait son ancien emploi pour l’entreprise « liberty mechanical » le 1er juin 2015 (GD3-5). L’appelant a donné comme adresse postale le X, X X, X, Nouveau-Brunswick et a confirmé que son adresse domiciliaire était la même que son adresse postale (GD3-4).

[7] Un relevé d’emploi (RE) a été émis par l’entreprise « Shadow Creek Furniture & Supply Co Ltd/Dir » (désignée par l’appelant sous le nom de « Liberty Mechanical ») (Liberty), lequel révélait que l’appelant avait accumulé 595 heures d’emploi assurable comme technicien en climatisation du 5 janvier 2015 au 10 avril 2015 (GD3-13).

[8] La Commission a examiné la demande de l’appelant et, compte tenu de sa résidence dans la région économique de l’AE de X-X, et en fonction du taux régional de chômage à cet endroit (7,2 %), la Commission a déterminé que l’appelant avait besoin d’accumuler 630 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence, laquelle était du 27 juillet 2014 au 11 avril 2015 (GD3-14 à GD3-16).

[9] Puisque l’appelant avait seulement accumulé 595 heures d’emploi assurable selon le RE provenant de Liberty, la Commission a rejeté la demande de prestations de l’appelant, puisqu’il « n’avait pas accumulé suffisamment d’heures pour établir une réclamation (GD3-17 à GD3-18). Dans sa lettre de décision datée du 17 avril 2015, la Commission a précisément avisé l’appelant de ce qui suit :

[traduction]

Si vous avez accumulé d’autres heures d’emploi assurable du 27 juillet 2014 au 11 avril 2015 que vous n’avez pas fourni dans le cadre de votre demande de prestations, veuillez fournir un relevé d’emploi. Cet emploi pourrait vous aider à devenir admissible au bénéfice des prestations. (GD3-17)

[10] Le 30 avril 2015, l’appelant a demandé à la Commission de réviser sa décision (GD3-18 à GD3-21). L’appelant a donné le motif suivant pour justifier sa demande de révision :

[traduction]

L’un de vos employés m’a dit, à votre bureau de X, que les prestations liées au programme en apprentissage complété avec code n’ont rien à voir avec les prestations régulières, comme je le croyais. Elle m’a assuré que c’était séparé et que j’allais être correct! Si j’avais su que je n’allais pas être admissible, j’aurais continué à travailler et j’aurais fait ce dernier module à l’automne! J’ai commencé mon cours depuis 3 semaines, j’ai payé mes frais de scolarité, j’ai une fille et j’ai des factures à payer. Comme je l’ai déjà dit, il s’agit de mon dernier module, et d’apprendre que je n’aurai pas de financement me stresse beaucoup. Pourriez-vous, s’il vous plaît, examiner et réviser cela. Après cela, je n’aurai prob [sic] pas besoin de prestations d’AE pendant quelques années. J’aurai terminé tous mes modules, et j’ai une entreprise qui attend que je finisse et qui a beaucoup de travail. Je vous prie de prendre le temps d’examiner cela et vous remercie pour votre temps. (GD3-18 et GD3-21)

[11] Un représentant de la Commission a appelé l’appelant au sujet de sa demande de révision le 27 mai 2015 et a documenté leur discussion dans un formulaire de Renseignements supplémentaires concernant la demande de prestations (GD3-22). Le représentant a noté la déclaration de l’appelant au sujet de ses heures d’emploi assurable comme suit :

[traduction]

J’ai expliqué qu’afin qu’une demande de prestation soit accueillie, il a besoin de 630 heures d’emploi assurable alors qu’il en a 595.

Le prestataire a affirmé que depuis qu’il a commencé sa formation, il travaille une fois par semaine pour son employeur et qu’il a peut-être maintenant accumulé ces 35 heures ou qu’il les a presque accumulées. J’ai demandé au prestataire cela faisait combien de temps qu’il avait commencé son cours, et il m’a dit une semaine. J’ai avisé le prestataire que bien qu’il n’ait peut-être pas suffisamment d’heures pour l’instant, il n’est pas possible de payer de manière rétroactive les prestations.

[12] Par conséquent, la Commission a maintenu sa décision initiale (GD3-23 à GD3-24).

[13] L’appelant a interjeté appel de la décision découlant de la révision (GD2) et a donné les motifs suivants à l’appui de son appel :

[traduction]

Plan pour le printemps 2015 d’aller à l’école des métiers ‒ module final du programme de technicien en climatisation. Patron a dit de vérifier si j’ai suffisamment d’heures pour recevoir de l’AE pendant que je suis à l’école (j’ai été mis à pied de sept. à janv.). Je suis allé au bureau local d’AE – j’ai demandé à l’un des employés qui travaillent derrière le comptoir. Pas nouvelle employée – je lui ai déjà parlé auparavant. Lui ai dit que j’ai été mis à pied depuis plus de 4 mois, lui ai demandé si j’étais admissible - elle a dit OUI, que les prestations régulières et celles reçues lorsqu’on fréquente une école de métiers étaient COMPLÈTEMENT DIFFÉRENTS, une fois que l’on met le code d’apprentissage, cela serait traité différemment d’une prestation régulière. Puis, après quelques semaines de cours, j’ai reçu une lettre rejetant ma demande d’AE. Apparemment, il me manquait 35 heures, mais de quelle autre manière étais-je supposé trouver les règles? Je suis allé m’informer au bureau de l’AE, et j’ai été mal informé. J’aurais facilement pu aller à la session d’automne si l’on m’avait donné la bonne information. Je n’ai eu AUCUN REVENU pendant 7 SEMAINES, et j’ai donc dû emprunter de l’argent pour payer mon loyer, mon épicerie, pour faire mes paiements de soutien pour enfants, etc. tout en allant à l’école. (GD2-3)

[14] À la suite du rejet de son appel en première instance, l’appelant a demandé la permission d’interjeter appel auprès de la division d’appel du Tribunal. Dans sa demande de permission d’en appeler devant la division d’appel (AD1), la déclaration suivante a été faite dans la section Annexe A à cet égard :

[traduction]

Les faits sont les suivants.

Pendant une période de temps précédant et incluant le vendredi 10 avril 2015, le lieu de résidence habituel de l’appelant était leX, X X, X, N.-B. X, où il a vécu en tant qu’invité de son grand-père maternel, J. E., qui était le propriétaire de cette résidence.

À compter du samedi 11 avril 2015 et de manière continue par la suite, pendant une période de huit semaines allant jusqu’au 6 juin 2015 inclusivement, le lieu de résidence habituel de l’appelant était le X, X X, X, N.-B., X, où il a vécu en tant qu’invité de ses parents, monsieur et madame W. G., qui sont les propriétaires de cette résidence. L’appelant a emménagé chez ses parents pour faciliter sa présence à son cours de formation « en alternance » au Campus de X du Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, à environ cinq kilomètres de la maison de ses parents, lequel a commencé le lundi 13 avril 2015.

L’appelant a présenté une demande initiale de prestations le vendredi 10 avril 2015. L’« arrêt de rémunération » de l’appelant s’est produit le lundi 13 avril 2015, c’est-à-dire la première journée où il n’a pas été en mesure de se présenter au travail puisque, simplement dit, il était à l’école. (AD1-5)

À la suite d’une analyse du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE), la déclaration se termine comme suit :

[traduction]

En fait, au cours de la semaine durant laquelle la période de prestations de l’appelant a commencé, son lieu de résidence habituel était à X, N.-B.; il s’agit de la « région économique de l’AE no 8 – X », où le taux de chômage était de 10,4 %. Le paragraphe 7(2) de la Loi prévoit que lorsque le taux régional de chômage est de « plus de 10 %, mais au plus 11 % », le nombre requis d’heures d’emploi assurable pour être admissible est de 525 heures. L’appelant a accumulé 595 heures d’emploi assurable. Il est admissible à des prestations. (AD1-6)

[15] Dans les observations supplémentaires de l’appelant avant la tenue de la nouvelle audience de son appel (RGD3), les renseignements supplémentaires suivants ont été fournis :

[traduction]

Le vendredi 10 avril 2015, le « lieu de résidence habituel » de l’appelant était à la maison de son grand-père maternel à X. Il vivait là en tant qu’invité. Il ne payait pas de loyer. Il n’avait pas de bail. Il n’avait pas le droit de rester dans cette maison une journée de plus que le permettait son grand-père. Le samedi 11 avril 2015, l’appelant a déménagé de la maison de son grand-père à X pour s’installer chez ses parents à X, N.-B., où il est devenu un invité de ses parents et où il y a établi son « lieu de résidence habituel ». Il ne conservait aucun « droit » de retour dans la résidence de son grand-père à X à une date ultérieure. Il a pris cette décision pour des raisons pratiques, sérieuses et légitimes; afin de faciliter sa présence au Collège communautaire du Nouveau-Brunswick, à X, N.-B., qui commençait le lundi 13 avril 2015. Il n’a pas [traduction] « [...] déménagé délibérément dans une région à chômage élevé où ses prestations seraient supérieures. » Il s’agissait d’une conséquence de son déménagement et non pas le but de son déménagement. (RGD3-1 à RGD3-2)

À l’audience :

[16] L’appelant a déclaré ce qui suit :

  1. Il vivait en union de fait avec sa petite amie sur Aberdeen Street à X jusqu’en avril 2014. En avril 2014, il a mis fin à cette relation et a déménagé avec son grand-père veuf au X, X X, X.
  2. En date d’avril 2014, il était un apprenti technicien en Chauffage, ventilation et climatisation pour Liberty (identifié comme étant l’employeur qui a émis le RE à GD3-13).
  3. L’entreprise Liberty est située à X, N.-B. L’adresse de l’employeur sur le RE est « X », laquelle, selon l’appelant [traduction] « se trouve à X ».
  4. Son emploi pour l’entreprise Liberty était intermittent dans le sens qu’il travaillait pendant une période de temps, puis qu’il était mis à pied soit en raison d’un manque de travail ou pour participer à une formation en apprentissage.
  5. L’entreprise Liberty était le seul employeur pour lequel il a travaillé au cours de toute la durée de sa formation en apprentissage, laquelle a débuté en 2010-2011 et était en cours au moment où il a présenté une demande de prestations le 10 avril 2015.
  6. Il a vécu à X pendant toute la durée de sa formation en apprentissage, à l’exception des périodes de temps où il est allé à l’école à X pour ses cours [traduction] « par module ».
  7. Il participait à un cours de formation [traduction] « environ une fois par année », et chaque module de la formation était d’une durée de 7 à 10 semaines. En avril 2015, il participait à son quatrième [traduction] « module de formation en alternance » à X.
  8. Sa formation avait toujours lui au Collège communautaire du Nouveau-Brunswick à X, seul emplacement où sa formation en chauffage, ventilation et climatisation était donnée. Chaque fois qu’il suivait un cours de formation, il habitait avec ses parents au X, X X, X qui se situe dans la banlieue de X.
  9. X est à environ 160 km de X.
  10. Lorsqu’il vivait avec son grand-père à X, il n’était pas en mesure financièrement de louer un appartement ailleurs. Il avait le statut d’invité.
  11. Lorsqu’il vivait avec ses parents à X, il avait également le statut d’invité.
  12. Il ne payait pas de loyer ni à son grand-père ni à ses parents, et il n’y avait aucun bail, contrat ou entente écrite décrivant ses droits lorsqu’il vivait à ses deux emplacements.
  13. Lorsqu’il vivait avec son grand-père, il aidait à payer les dépenses suivantes : les impôts fonciers, les frais de condo et les factures de services publics.
  14. Lorsqu’il vivait chez ses parents, il ne payait rien.
  15. Il a toujours payé pour son épicerie et avait son propre réfrigérateur pour sa nourriture aux deux emplacements.
  16. Lorsqu’il allait à l’école, en plus de terminer ses cours, il devait aussi accumuler des heures de formation. Les 35 heures d’emploi assurable dont il avait parlé avec le représentant étaient des heures qu’il a faites dans le cadre du cours (voir GD3-23) et étaient des [traduction] « heures en salle de classe » et non pas des heures supplémentaires de travail.
  17. Lorsqu’il a mentionné le fait qu’il payait [traduction] « son loyer » dans son avis d’appel (voir GD2-3), il a utilisé [traduction] « une terminologie vague » pour traiter des sommes payées [traduction] « pour donner un coup de main ».
  18. Il [traduction] « donnait [encore] un coup de main à son grand-père pour payer les factures de services publics pendant son cours ».
  19. Il voyageait régulièrement la fin de semaine et retournait souvent à X pour chercher son courrier à la maison de son grand-père. Il a dit : [traduction] « J’ai apporté tous mes effets personnels lorsque j’ai déménagé chez mes parents, mais j’avais toujours accès à la maison de mon grand-père à X. »
  20. Il est retourné vivre avec son grand-père au X, X X, X au cours de la semaine qui a suivi la fin de son [traduction] « quatrième module de formation en alternance », soit le 29 mai 2015.

Observations

[17] L’appelant a fait valoir que lorsque sa période de prestations a commencé, son lieu de résidence habituel était à X, N.-B., dans la région économique de l’AE no 8 – X, où le taux de chômage était de 10,8 % à l’époque pertinente. Par conséquent, il avait besoin de 525 heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice de prestations. Il avait accumulé 595 heures assurables, et était donc admissible à des prestations.

[18] L’appelant a également affirmé que le critère relatif à la région économique d’AE applicable concerne uniquement le « lieu de résidence habituel » du prestataire et non un « lieu de résidence permanent » ou « courant ». Selon la Commission, « lieu de résidence habituel » équivaut à « résidence permanente », ce qui n’est pas juste et adéquat. Dans l’économie actuelle, où une mobilité est requise pour que les gens puissent profiter des possibilités d’emploi et d’instruction, le terme « lieu de résidence habituel » devrait avoir une définition moderne et devrait être identifié en déterminant [traduction] « où il est quand il le faut? ». L’appelant a fait valoir que lorsqu’il travaillait, il devait être à X et son lieu de résidence habituel était à X; lorsqu’il était à l’école pour sa formation, il devait être à X, et c’était son lieu de résidence habituel (à X). L’appelant a changé de lieu de résidence chaque fois qu’il devait suivre une formation, et son lieu de résidence habituelle était à X lorsqu’il allait à l’école. Lorsqu’il a eu terminé son cours, il est retourné à X, car c’était [traduction] « là où il y avait des emplois », mais il aurait été [traduction] « possible » qu’il se soit trouvé un emploi à X et qu’il soit resté là-bas.

[19] La Commission a fait valoir que le lieu de résidence habituel de l’appelant est à X, au Nouveau-Brunswick, et que son séjour à X, Nouveau-Brunswick, était seulement temporaire, durant le temps qu’il suivait une formation. Par conséquent, X ne peut pas être considéré comme étant le lieu de résidence habituel de l’appelant, et X-X est la bonne région économique d’AE, et c’est en fonction de cette région que sa capacité de se qualifier à des prestations d’AE doit être déterminée. La Commission a également fait valoir que la période de référence de l’appelant s’étendait du 27 juillet 2014 au 11 avril 2015 (GD4-3), et qu’il avait besoin d’avoir accumulé le nombre d’heures assurables prévu à l’alinéa 7(2)b) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE), soit 630 heures selon le taux de chômage de 7,2 % associé à la région où il demeure (X-X). Puisqu’il n’a accumulé que 595 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence, il n’a pas satisfait aux exigences nécessaires pour être admissible au bénéfice de prestations d’AE.

Analyse

[20] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites à l’annexe de cette décision.

[21] Pour recevoir des prestations d’AE, un prestataire doit satisfaire aux exigences prévues à l’article 7 de la Loi sur l’AE, c’est-à-dire qu’il doit avoir subi un arrêt de rémunération provenant de son emploi et il doit avoir accumulé un nombre minimal d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence. Le nombre minimal d’heures requis pour être admissible varie selon le taux régional de chômage associé au lieu de résidence habituel du prestataire.

[22] En l’espèce, il n’est pas contesté que l’appelant n’est pas une personne qui devient ou redevient membre de la population active, conformément au paragraphe 7(4) de la Loi sur l’AE (voir GD4-3). Par conséquent, le paragraphe 7(2) de la Loi sur l’AE s’applique à sa demande, et l’appelant doit se conformer aux exigences minimales relatives aux heures d’emploi assurables indiquées au tableau de l’alinéa 7(2)b) de la Loi sur l’AE.

[23] La Commission a estimé que le lieu de résidence habituel de l’appelant était à X, au Nouveau-Brunswick, ce qui correspond à la région économique d’AE de X-X, et dont le taux régional de chômage était de 7,2 % au cours de la semaine précédant sa période de prestations. Par conséquent, selon le tableau de l’alinéa 7(2)b) de la Loi sur l’AE, l’appelant avait besoin de 630 heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice des prestations d’AE. Puisque le fait qu’il a seulement accumulé 595 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence n’est pas contesté, la Commission a conclu que l’appelant n’avait pas satisfait aux exigences nécessaires pour être admissible au bénéfice des prestations.

[24] L’appelant a fait valoir que son lieu de résidence habituel était à X, au Nouveau-Brunswick, ce qui correspondant à la région économique d’AE de X, dont le taux régional de chômage était à 10,8 % au cours de la semaine précédant sa période de prestations. Par conséquent, selon le tableau de l’alinéa 7(2)b) de la Loi sur l’AE, l’appelant avait seulement besoin de 525 heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice de prestations d’AE, et il satisfait amplement aux exigences, car il a accumulé 595 heures.

[25] Aux termes du paragraphe 10(1) de la Loi sur l’AE, la période de prestations d’un prestataire débute, soit le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération; soit le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations d’AE. Conformément au paragraphe 14(1) du Règlement sur l’AE, un arrêt de rémunération se produit lorsqu’il y a eu une cessation d’emploi et le prestataire se trouve à ne pas travailler pour cet employeur durant une période d’au moins sept jours consécutifs à l’égard de laquelle aucune rémunération provenant de cet emploi ne lui est payable ni attribuée. Un congé sans solde constitue un arrêt de rémunération (CUB 23855). En l’espèce, l’arrêt de rémunération de l’appelant a commencé le 17 avril 2017, soit sept (7) jours suivant son dernier jour de travail pour l’entreprise Liberty. Le dimanche de la semaine du 17 avril 2015 était le 12 avril 2015. Il a présenté sa demande initiale de prestations d’AE le 10 avril 2015, et le dimanche de cette semaine-là était le 5 avril 2015. La période de prestations de l’appelant a par conséquent commencé à la date la plus tardive des deux dimanches, soit le 12 avril 2015.

[26] L’alinéa 17(1.1)a) du Règlement sur l’AE prévoit que le taux régional de chômage à considérer afin de déterminer si un prestataire est admissible au bénéfice des prestations d’AE en vertu de l’article 7 de la Loi sur l’AE est le taux de chômage de la région économique d’AE « où le prestataire avait, durant la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi, son lieu de résidence habituel. ».

[27] Par conséquent, le Tribunal doit tirer une conclusion relative au lieu de résidence habituel de l’appelant au cours de la semaine du 12 avril 2015. Pour les motifs présentés précédemment, le Tribunal conclut que le lieu de résidence habituel de l’appelant à cette époque était à X, au Nouveau-Brunswick.

[28] Bien que l’appelant n’ait pas témoigné au cours de l’audience en ce qui a trait aux dates exactes où il a habité avec ses parents pendant sa formation par intermittence débutant en avril 2015, le Tribunal accepte les dates fournies par l’appelant dans sa demande de permission d’en appeler à la division d’appel à AD1-5 :

[traduction]

À compter du samedi 11 avril 2015 et de manière continue par la suite, pendant une période de huit semaines allant jusqu’au 6 juin 2015 inclusivement, le lieu de résidence habituel de l’appelant était le X, X X, X, N.-B.,X, où il a vécu en tant qu’invité de ses parents, monsieur et madame W. G., qui sont les propriétaires de cette résidence. (AD1-5)

[29] Le Tribunal note que le cours de l’appelant avait duré sept (7) semaines, mais qu’il semblerait qu’il ait resté avec ses parents pendant une semaine supplémentaire suivant la date d’achèvement de son cours, avant de retourner vivre et travailler à X. Bien qu’il ne fait aucun doute que l’appelant restait dans la demeure de ses parents au cours de la semaine du 12 avril 2015, ce fait, à lui seul, ne permet pas de déterminer son lieu de résidence habituel. Le Tribunal a également tenu compte des faits suivants :

  1. Lorsque l’appelant a rempli sa demande initiale de prestations d’AE le 10 avril 2015, il a fourni le X, X X, X comme adresse aux fins d’envoi postal et il a confirmé que cette adresse était son adresse domiciliaire (GD3-4). L’appelant savait qu’il commençait le module 4 de sa formation de sept (7) semaines, à peine trois (3) jours plus tard à un collège communautaire de X (voir GD3-3), et pourtant, il a quand même indiqué que son adresse domiciliaire était à X.
  2. Lorsque l’appelant a rempli sa demande de révision le jeudi 30 avril 2015, il l’a soumise à un bureau de Service Canada à X au cours de la même journée (voir GD3-18) et a confirmé que son adresse était le X, X X, X. À ce moment-là, l’appelant suivait son cours depuis trois (3) semaines à X, et pourtant, il utilisait encore son adresse à X.
  3. À l’époque de sa demande de révision (30 avril 2015), l’appelant savait très bien qu’il allait retourner travailler pour l’entreprise Liberty à X. L’appelant a écrit ce qui suit :
    [traduction]
    Après cela, je n’aurai prob [ sic] pas besoin de prestations d’ AE pendant quelques années. J’aurai terminé tous mes blocs, et j’ai une entreprise qui attend que je finisse et qui a beaucoup de travail. (GD3- 21).
    Il n’y a aucun élément de preuve de la recherche d’emploi pouvant appuyer l’observation selon laquelle l’appelant aurait vraisemblablement pu trouver un emploi à X et rester là-bas après avoir terminé sa formation en mai 2015, et l’observation est non seulement improbable, mais ne concorde également pas du tout avec les plans évidents de l’appelant.
  4. Lorsque l’appelant a parlé avec le représentant de la Commission en ce qui concerne sa demande de révision le 27 mai 2015, il ne lui restait qu’ [traduction] « une semaine » de cours. L’appelant a avisé le représentant que puisqu’il avait commencé sa formation (environ six [6] semaines auparavant), il travaillait une journée par semaine pour son employeur et qu’il avait peut-être accumulé les 35 heures qu’il lui manquait pour être admissible au bénéfice des prestations d’AE (GD3-22). Ce n’est pas la première fois que l’appelant aurait reçu des prestations d’AE (voir GD4-3 en ce qui a trait à sa demande antérieure) et il aurait dû savoir qu’un RE était requis afin de prouver toutes heures d’emploi assurables supplémentaires. Il est peu probable que l’appelant aurait même mentionné le fait qu’il travaille une journée par semaine pour son employeur au représentant de la Commission si ces heures étaient, comme il l’a témoigné, des [traduction] « heures en salle de classe ». Il est plus probable que l’appelant ait réellement travaillé pour l’entreprise Liberty de manière occasionnelle au cours des sept (7) semaines où il suivait sa formation par intermittence.
  5. Dans l’avis d’appel soumis par l’appelant le 25 juin 2015, il a affirmé qu’il a dû emprunter de l’argent [traduction] « pour payer son loyer » pendant les sept (7) semaines où il était à l’école (GD2-3). La seule adresse qu’il avait fournie en lien avec sa demande était le X, X X, X. Selon son témoignage, l’appelant aidait à payer les impôts fonciers, les frais de condo et les factures de services publics de son grand-père lorsqu’il vivait au X, X X, X — et il a continué à le faire pendant qu’il suivait sa formation —, mais il ne payait rien à ses parents. Le « loyer » auquel l’appelant a fait référence ne pouvait être que celui du X, X X, X. Le fait que l’appelant a tenté de se rétracter au cours de l’audience, après avoir employé le terme « loyer » et qu’il a suggéré qu’il s’agissait d’une [traduction] « terminologie vague » pour des paiements qu’il faisait pour [traduction] « donner un coup de main » ne change pas la nature des paiements.
  6. L’appelant a ensuite affirmé qu’il était un invité à la fois chez son grand-père (à X) et chez ses parents (à X). Un invité pourrait contribuer à l’épicerie ou envoyer une note de remerciement, mais un invité n’effectuerait pas de paiements à l’égard des impôts fonciers, des frais de condo et des factures de services publics du propriétaire de la résidence. Même si l’appelant pourrait certainement être considéré comme invité lorsqu’il habitait chez ses parents, la preuve ne permet pas de conclure qu’il était un simple invité lorsqu’il habitait avec son grand-père.
  7. Il est indéniable que l’appelant a emménagé chez ses parents afin de faciliter sa présence à son cours de formation de sept semaines, lequel avait lieu à X (AD1-5 et RGD3-1).
  8. L’appelant n’a pas contesté la conclusion de la Commission selon laquelle son lieu de résidence habituel était à X lorsqu’il a interjeté appel initialement de la décision découlant de la révision (voir GD2).
  9. L’appelant n’a contesté cette conclusion qu’en décembre 2015, lorsqu’il a présenté une demande de permission d’en appeler de la décision d’origine du Tribunal en l’espèce et, à l’aide d’un représentant, a affirmé que son lieu de résidence habituel n’était pas à X, mais bien à X, et que par conséquent, il était admissible à des prestations d’AE. Conformément à la décision Bellefleur c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 13 de la Cour d’appel fédérale, le Tribunal accorde davantage de poids aux déclarations initiales et spontanées de l’appelant, lesquelles identifiaient sa résidence comme étant le X, X X, X plutôt qu’à ses déclarations ultérieures faites à la suite d’une décision défavorable au sujet de sa demande.
  10. Selon son témoignage, l’appelant vivait et travaillait à X dès le début de sa formation en apprentissage en 2010-2011. Selon ses antécédents, l’appelant a vécu et travaillé pendant cinq ans à X, ce qui a été interrompu uniquement par une période de 7-10 semaines où il a suivi sa formation à X.
  11. L’appelant est souvent retourné à X au cours de sept (7) semaines de formation et avait accès à la maison de son grand-père au X, X X pendant cette période.
  12. Au cours de la semaine qui a suivi la fin de sa formation, l’appelant est retourné vivre au X, X X, X et a repris son emploi pour l’entreprise Liberty.

[30] Bien que la Loi sur l’AE ne fournisse pas une définition de « lieu de résidence habituel », il est instructif de tenir compte de la définition de « lieu de résidence habituel » qui se trouve dans le Duhaime’s Law Dictionary [dictionnaire juridique Duhaime] :

[traduction]

L’endroit où, selon le mode de vie ordinaire d’une personne, celle-ci demeure régulièrement, normalement et habituellement.

Cette définition a été adoptée par la Cour suprême du Canada (affaire Thomson v. MRN, [1946] RCS 209) et par la Cour canadienne de l’impôt (affaire McFadyen c. La Reine, [2000] 4 CTC 2573). Dans l’affaire McFadyen, supra, le juge Garron a adopté l’analyse prévue dans l’affaire Thomson, supra, dans laquelle le juge Rand a examiné le terme « lieu de résidence habituel » et a écrit ce qui suit :

Il a été statué que le fait d’être « résident habituel » d’un lieu s’inscrit dans le mode de vie habituel de la personne concernée et est différent du fait de résider exceptionnellement ou occasionnellement à un endroit.

et

La meilleure façon de déterminer la résidence habituelle est de la comparer avec une résidence occasionnelle ou fortuite. Dans ce dernier cas, il semble nettement s’agir d’une résidence temporaire et exceptionnelle, ayant également une connotation transitoire avant le retour.

[31] Dans un langage clair, l’expression « lieu de résidence habituel » nécessite une analyse de la question suivante : À quel endroit est-ce que l’appelant avait établi sa demeure en date du 12 avril 2015? En tenant compte de tous les facteurs énumérés aux paragraphes 29 et 30 ci-dessus, le Tribunal conclut que la demeure de l’appelant au cours de la semaine du 12 avril 2015 était à X et non à X. Bien qu’il était peut-être présent physiquement à X au cours de cette semaine, les signes de résidence pointent clairement vers X. De plus, les deux emplacements sont faciles à distinguer en utilisant l’analyse prévue dans l’affaire Thomson, supra : le mode de vie habituel de l’appelant était à X, et son séjour à X n’était que temporaire (8 semaines), il s’agissait d’une situation exceptionnelle (pour faire son dernier module de son programme de formation) et transitoire (il a toujours eu l’intention de reprendre sa vie à X et, en fait, c’est ce qu’il a fait immédiatement après la fin de sa formation).

[32] Même si le représentant de l’appelant a plaidé de manière éloquente en faveur d’une interprétation « moderne » de l’expression « lieu de résidence habituel », l’utilisation explicite de ce terme à l’alinéa 17(1.1)a) du Règlement sur l’AE nécessite que le prestataire ait un lien tangible avec une région économique d’AE. Le but de cette exigence est de reconnaitre les taux de chômage différents selon les régions du Canada et d’empêcher les prestataires de choisir la région qui leur est favorable. L’on ne peut tout simplement pas dire que la participation brève et annuelle de l’appelant à son cours de formation à X au cours duquel il a vécu avec ses parents à X établi le lien nécessaire pour que cet endroit soit considéré comme le « lieu de résidence habituel ».

[33] Le Tribunal conclut donc que le lieu de résidence habituel de l’appel était à X, au Nouveau-Brunswick, pendant la semaine au cours de laquelle sa période de prestations a commencé. Le Tribunal conclut également que l’appelant ne satisfait pas aux exigences prévues à l’alinéa 7(2)b) de la Loi sur l’AE, car il avait besoin de 630 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence afin d’être admissible au bénéfice de prestations d’AE, et il en a accumulées seulement 595.

Conclusion

[34] Le Tribunal conclut que l’appelant ne satisfait pas aux exigences prévues au paragraphe 7(2) de la Loi sur l’AE afin de devenir admissible au bénéfice de prestations d’AE, et que par conséquent, il ne peut pas établir le bien-fondé de sa demande de prestations.

[35] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

7(1) Les prestations de chômage sont payables, ainsi que le prévoit la présente partie, à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.

(2) L’assuré remplit les conditions requises si, à la fois :

  1. a) il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;
  2. b) il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins le nombre d’heures indiqué au tableau qui suit en fonction du taux régional de chômage qui lui est applicable.
Tableau
Taux régional de chômage Nombre d’heures d’emploi assurable requis au cours de la période de référence
6 % et moins 700
plus de 6 %, mais au plus 7 % 665
plus de 7 %, mais au plus 8 % 630
plus de 8 %, mais au plus 9 % 595
plus de 9 %, mais au plus 10 % 560
plus de 10 %, mais au plus 11 % 525
plus de 11 %, mais au plus 12 % 490
plus de 12 %, mais au plus 13 % 455
plus de 13 % 420

(3) à (5) [Abrogés, 2016, ch. 7, art. 209]

(6) L’assuré ne remplit pas les conditions requises s’il est convenu, au titre de l’Article VI de l’Accord entre le Canada et les États-Unis d’Amérique concernant l’assurance-chômage signé les 6 et 12 mars 1942, qu’il doit d’abord épuiser ses droits de recevoir des prestations, ou y mettre fin, aux termes des lois de l’autre juridiction.

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