Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est accueilli, la décision de la division générale du 21 juillet 2016 est annulée, et l'appel interjeté par l'intimé devant la division générale est rejeté.

Introduction

[2] Le 21 juillet 2016, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a conclu que l'intimé avait accumulé suffisamment d’heures pour être admissible à des prestations régulières aux termes de l’article 7 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

[3] L’appelante a demandé la permission d’en appeler devant la division d’appel le 11 août 2016. La permission d’en appeler lui a été accordée le 24 août 2016.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience par téléphone pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la question en litige;
  • le fait que l’on ne prévoit pas que la crédibilité des parties figure au nombre des questions principales;
  • les renseignements figurant au dossier, y compris le besoin d’en obtenir davantage;
  • l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[5] L’appelante, représentée par Carol Robillard, et l’intimé étaient présents à l’audience.

Droit applicable

[6] Au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), il est indiqué que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit déterminer si la division générale a commis une erreur en concluant que l’intimé avait accumulé suffisamment d’heures pour avoir droit aux prestations régulières en application de l’article 7 de la Loi.

Arguments

[8] L’appelante soumet les motifs suivants au soutien de son appel :

  • La division générale a outrepassé sa compétence en déterminant l’assurabilité de l’emploi de l’intimé auprès d’un employeur ainsi que le nombre d’heures accumulées;
  • En vertu du paragraphe 64(3) de la Loi sur le MEDS (antérieurement l'article 122 de la Loi), la compétence pour rendre des décisions sur les questions d'assurabilité et du nombre d'heures assurées et de revenus aux termes de l'article 90 de la Loi relève de l'Agence du revenu du Canada (ARC);
  • La solution convenable aurait été que la division générale renvoie l'affaire à l'appelante aux termes de l'article 32 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale pour enquête et rapport;
  • Une conclusion raisonnable fondée sur les éléments de preuve est que l’ARC est responsable de déterminer l’assurabilité de l’emploi et le nombre d’heures accumulées.

[9] L’intimé invoque les arguments suivants pour plaider sa cause :

  • L'appelante n'a pas tenu compte de la période durant laquelle il travaillait pour un employeur, de septembre 2013 à décembre 2014.
  • L'employeur en question ne lui a pas fourni de T4 ou de relevés d'emploi pour la période durant laquelle il travaillait pour lui, de septembre 2013 à décembre 2014.
  • Il a accumulé un nombre d'heures suffisant pour être admissible aux prestations.

Norme de contrôle

[10] L'appelante soutient que la division d'appel ne doit aucune déférence à l'égard des conclusions de la division générale en ce qui a trait aux questions de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier. Toutefois, pour les questions mixtes de fait et de droit, la division d’appel doit déférence à la division générale. Elle ne peut intervenir que si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance - Pathmanathan c. Bureau du Juge-arbitre, (2015) CAF 50.

[11] L’intimé n’a présenté aucune observation concernant la norme de contrôle applicable.

[12] Le Tribunal souligne que, dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Jean, (2015) CAF 242, la Cour d'appel fédérale a indiqué au paragraphe 19 de sa décision que « [L]orsqu’elle agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure ».

[13] La Cour d’appel fédérale a également indiqué que :

[N]on seulement la Division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la division générale du Tribunal de la sécurité sociale et [qu’elle] n’est […] donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale ».

[14] La Cour a conclu que, lorsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi.

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale décrit dans la décision Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder c. Canada (Procureur général) (2015) CAF 274.

[16] Par conséquent, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Analyse

[17] En vertu du paragraphe 90(1) de la Loi, seul un agent de l'ARC autorisé par le ministre peut rendre une décision au sujet du nombre d’heures exercées dans le cadre d’un emploi assurable.

[18] Il est bien établi dans la jurisprudence que l’ARC a la compétence exclusive pour déterminer combien d’heures d’emploi assurable un prestataire possède en application de la Loi - Canada (Procureur général) c. Romano, (2008) CAF 117; Canada (Procureur Général) c. Didiodato, (2002) CAF 345; Canada (Procureur Général) c. Haberman, (2000) CAF 150.

[19] Malheureusement pour l’intimé, la division générale a outrepassé sa compétence en déterminant l’assurabilité de son emploi et le nombre d’heures accumulées.

[20] Une demande de rendre une décision doit être présentée à l'ARC, qui déterminera ensuite le nombre d’heures d’emploi assurable de l'intimé.

[21] Pour les motifs susmentionnés, l’appel sera accueilli.

Conclusion

[22] L’appel est accueilli, la décision de la division générale du 21 juillet 2016 est annulée, et l'appel interjeté par l'intimé devant la division générale est rejeté.

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