Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

L’appelante, Madame C. T., n’a pas assisté à l’audience. L’intimée, c’est-à-dire la Commission de l’assurance-emploi du Canada (« la Commission »), n’était pas présente.

Introduction

[1] L’appelante a déposé une demande de prestations le 23 janvier 2013, et une période de prestations a été établie.

[2] Une enquête entreprise par la Commission établissait qu'en décembre 2012, l’appelante avait fait une demande de numéro d’entreprise auprès de l’Agence du revenu du Canada. En outre, il s'avéra de cette enquête qu’entre le 22 avril et 21 juin 2013, l’appelante s'était adonnée au démarrage de cette entreprise pendant qu’elle était prestataire de l’assurance-emploi.

[3] L’appelante a été déclarée inadmissible au bénéfice des prestations pour la période du 22 avril au 21 juin 2013 aux motifs qu’elle n'était pas disponible pour travailler.

[4] L’appelante interjette appel de la décision de la Commission qui a maintenu son inadmissibilité aux prestations pour la période du 22 avril au 21 juin 2013, aux motifs qu’elle n’était pas disponible pour travailler.

[5] Une première date d’audience avait été fixée pour le 20 décembre 2016. Cependant, le Tribunal a accordé un ajournement de l’audience suite à la réception d’une lettre de l’appelante expliquant qu’une situation personnelle grave l’empêchait de se défendre adéquatement. Une nouvelle date d’audience a été fixée pour le 27 janvier 2017. Cet avis a été envoyé par la poste prioritaire et l’appelante en a accusé réception le 29 décembre 2016. (GD1 – GD7)

[6] Dans une lettre adressée au Tribunal en date du 10 janvier 2017, l’appelante a écrit ce qui suit « Je désire confirmer au Tribunal que je ne suis pas en mesure de prendre part une nouvelle date d’audience... Je demande donc au Tribunal de bien vouloir émettre une décision en établissant la part de responsabilité de chacune des parties et en diminuant la dette en conséquence, en tout ou en partie. Je me conformerai à la décision du Tribunal et demanderai de mettre en place les dispositions nécessaires afin de me faciliter le remboursement ... », tel qu’en fait foi la pièce GD8.

[7] Étant convaincu que l’appelante avait bien reçu l’avis d’audience, le Tribunal a tenu l’audience en son absence, conformément au paragraphe 12 (2) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[8] Malgré ce qui précède, le jour de l’audience, le Tribunal a attendu au téléphone pendant 30 minutes pour laisser le temps aux parties de se joindre à la téléconférence, mais en vain.

[9] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience Téléconférence pour les motifs énoncés dans l’avis d’audience.

Question en litige

[10] Est-ce que l’appelante était disponible pour travailler du 22 avril au 21 juin 2013 conformément à l’article 18 de la Loi sur l’assurance-emploi (« la Loi »)?

Preuve

[11] L’appelante a déposé une demande de prestations le 23 janvier 2013 et une période de prestations régulières a été établie. (GD3-3-GD3-11)

[12] En 2015, une enquête a révélé que l’appelante avait fait une demande de numéro d’entreprise alors qu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi. Ainsi, le 13 août 2015, la Commission a demandé à l’appelante de remplir un questionnaire sur son travail à titre de travailleur indépendant durant la période d’avril à juillet 2013. La Commission lui a également demandé de fournir une liste détaillée de ses recherches d’emploi. (GD3-12-GD3-20)

[13] L’appelante n’a pas rempli le questionnaire. Cependant, le 19 août 2015, dans une lettre adressée à la Commission, l’appelante a expliqué que son entreprise a été créée en décembre 2012, mais n’est devenue, opérationnelle que le 28 juin 2013. Elle a de plus mentionnée que pendant qu’elle recevait des prestations d’assurance-emploi elle a participé au programme Soutien travailleur autonome, parrainé par Emploi- Québec. Elle a fourni à la Commission les coordonnées des personnes à contacter pour obtenir plus de détails. Un article apparu dans un journal faisant la publicité de l’entreprise était aussi joint à la lettre (GD3-21 à GD3-25).

[14] Le 17 novembre 2015, lors d’une première conversation téléphonique avec la Commission, l’appelante a expliqué qu’à partir du 21 avril 2013, elle a investi tout son temps à l'aménagement de son entreprise. Elle a aussi déclaré que durant la période du 22 avril au 21 juin 2013, elle n’était pas en recherche active d'emploi et elle n'était pas disponible. Elle n’a pas eu d’entrevues d’emploi et n’a pas de registre de recherches d'emploi. (GD3-26).

[15] Le 17 novembre 2015, Emploi-Québec a confirmé que l’appelante a bel et bien reçu de l’aide du programme Soutien au travailleur autonome du 23 juin 2013 jusqu’en juillet 2013, et d’août 2013 jusqu’en juin 2014(GD3-27).

[16] Après l’audience du 27 janvier 2017, à la demande du Tribunal, la Commission a fourni un certificat d’attestation indiquant clairement que l’accord entre l’appelante et Emploi-Québec a débuté le 23 juin 2013. Des textes d’écrans des déclarations effectuées par l’appelante où cette dernière déclare ses activités à titre de travail indépendant à partir du 23 juin 2013, sont également fournis (GD12-1 à GD12-3)

[17] Le 31 mars 2016, lors d’une seconde conversation téléphonique avec la Commission, l’appelante a confirmé encore une fois qu’elle n’était pas disponible pour travailler, ayant consacré tout son temps à partir du 21 avril 2013 aux travaux de démarrage de son entreprise. (GD3-28).

[18] Le 13 avril 2016, la Commission a déclaré l’appelante inadmissible au bénéfice des prestations pour la période du 22 avril au 21 juin 2013 aux motifs qu’elle n'était pas disponible pour travailler. Conformément à la Loi, un trop-payé au montant de 3,095 $, fut établit. Il y a également eu l’imposition d'une pénalité en application de l'article 38 de la Loi pour avoir fait des déclarations fausses ou trompeuses et un avis de violation a été émis aux termes du paragraphe 7.1(4) de la Loi. (GD3-35)

[19] Le 26 avril 2016, l’appelante a déposé une demande de révision de la décision en déclarant ne pas avoir fait de fausses déclarations. L’appelante a déclaré également avoir été disponible pour travailler et que durant la période en question, elle travaillait de concert avec son agente d’aide à l’emploi afin de retourner sur le marché du travail et que la décision de se concentrer sur le démarrage de son entreprise a été prise de concert avec son agente d’aide à l’emploi. (GD3-31-GD3-33)

[20] Le 15 mai 2016, déclaration additionnelle de l’appelante où elle a affirmé avoir toujours été disponible à travailler car son commerce est saisonnier seulement, de juillet à septembre. De plus, elle n'a jamais cessé de faire des recherches d'emploi. Par contre, elle ne pouvait fournir la preuve de ses recherches d’emploi pour la période du 22 avril au 21 juin 2013. Elle a réitéré qu'elle consacrait plus de la moitié de son temps au démarrage de son commerce donc elle ne passait pas beaucoup d'heures à la recherche d'emploi. Elle a avoué qu'elle regardait les offres d'emploi, mais surtout pour l'automne, après la fermeture du commerce. (GD3-36)

[21] Dans une décision de révision datée du 17 mai 2016, la Commission a tranché en faveur de l’appelante en ce qui a trait à la pénalité et à la violation. Cependant, les conclusions quant à la disponibilité et le trop-payé furent maintenues. (GD3-37-GD3-38)

[22] Le 6 juin 2016, l’appelante a présenté un Avis d’appel auprès de la Section de l’assurance-emploi de la division générale du Tribunal, dans lequel elle déclare ne pas comprendre le fondement de la décision rendue par la Commission. (GD2-1 -GD2-3, et GD2A- 1-GDA-5)

Arguments des parties

[23] L’appelante a affirmé que durant la période du 22 avril au 21juin 2013, elle n’était pas disponible pour travailler. Cependant, son indisponibilité est justifiée par le fait qu’elle a participé au Programme soutien au travailleur autonome dirigé par Emploi-Québec, destiné aux entrepreneurs qui lancent leur propre entreprise.

[24] La Commission soutient qu’Emploi-Québec à confirmer que l’entente avec l’appelante a été signée le 23 juin 2013, soit après la période en litige. La Commission ajoute que l’appelante n’a effectué aucune recherche d’emploi durant la période en question. L’appelante prit la décision de démarrer son entreprise et s’y est consacrée à temps plein durant la période du 22 avril au 21 juin 2013. La Commission maintient que sa décision est conforme à la législation et est appuyée par la jurisprudence.

Analyse

[25] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[26] L'alinéa 18(1)a) de la Loi prévoit que le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là, capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable.

[27] Le paragraphe 32 du Règlement sur l’assurance-emploi définit un jour ouvrable comme chaque jour de la semaine sauf le samedi et le dimanche.

[28] Pour être admissible aux prestations, le prestataire doit démontrer qu’il était capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable (Bois A-31-00; Cornelissen-O’Neil A-652-93; Bertrand A-631-81).

[29] Dans l’affaire Faucher c. Canada (Procureur général) (A-56-96), la Cour d’appel fédérale à préciser les trois critères à prendre en considération afin de déterminer si un prestataire est disponible pour travailler, soit :

  1. 1) avoir le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable sera offert ;
  2. (2) exprimer ce désir par des efforts pour se trouver un emploi convenable ;
  3. (3) ne pas établir de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail.

[30] Dans le cas sous étude, la preuve démontre que l’appelante n’avait pas le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi sera offert.

[31] En effet, les 17 novembre 2015, 31 mars et 16 mai 2016, l’appelante a fait trois déclarations récurrentes et sans équivoque à l’effet que durant la période du 22 avril au 21 juin 2013, elle s’est consacrée à temps plein au lancement de son entreprise et qu’elle n’était pas disponible pour travailler. Elle ajoute que son indisponibilité est justifiée par le fait que le projet de démarrage de son entreprise était en accord avec Emploi-Québec.

[32] La Commission fait valoir que l’entente avec Emploi-Québec n’a été entérinée qu’après la période en litige. L’appelante n’a produit aucun élément de preuve pour prouver le contraire, donc ce fait n’est pas contesté.

[33] De plus, lors de sa conversation du 16 mai 2016 avec la Commission l’appelante fait valoir qu’elle n’a effectué aucune recherche d’emploi pendant la période du 22 avril au 21 juin 2013. Cependant, elle surveillait les offres d’emploi pour l’automne 2013, période pendant laquelle son entreprise serait fermée.

[34] Sur le point des déclarations de l’appelante a l’effet qu’elle n’était pas disponible, le Tribunal fait sien les propos du juge-arbitre dans l'affaire CUB 25057 : « … Il va sans dire qu'une personne ne peut être considérée comme étant disponible lorsqu'elle avoue ne pas l'être ou lorsqu'elle se trouve dans une situation qui l'empêche de l'être. Le versement des prestations est subordonné à la disponibilité d'une personne, non à la justification de son indisponibilité… »

[35] Le Tribunal estime que l’appelante n’a pas démontré le désir de retourner sur le marché du travail aussitôt qu’un emploi convenable sera offert pendant la période en litige, car son principal objectif était la mise sur pied de son entreprise.

[36] Sur le deuxième critère, l’appelante admet avoir consacré tout son temps à son entreprise, n'a pas fait de recherche d'emploi et a clairement maintenu qu'elle n'était pas disponible pour travailler durant la période en litige.

[37] La disponibilité est une question de fait qu’il faut examiner en tenant compte de toutes les circonstances propres au cas en question. Pour prouver sa disponibilité, il faut avoir entrepris des démarches raisonnables et habituelles pour trouver un emploi convenable. (Canada (Procureur général) c. Whiffen, A-1472-92)

[38] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas fait des efforts pour trouver un emploi convenable pendant la période au 22 avril au 21 juin 2013.

[39] Enfin, sur le troisième critère relatif au non –établissement de conditions personnelles pouvant limiter indûment les chances de retour sur le marché du travail, la Commission fait valoir qu’en consacrant tout son temps au démarrage de son entreprise l’appelante à limiter excessivement ses chances de réintégrer le marché du travail.

[40] Il ressort de la preuve présentée que l’intention clairement exprimée par l’appelante est à l’effet qu’elle voulait avant tout démarrer son entreprise et que son objectif premier n’était pas de retourner sur le marché du travail. Elle a ainsi établi des conditions personnelles ayant eu pour effet de limiter de manière excessive ses chances de réintégrer le marché du travail.

[41] Le Tribunal établit qu’aucun élément de preuve n’étaye le fait que l’appelante aurait accepté un autre emploi plutôt que de lancer son entreprise durant la période en litige. Le Tribunal conclut que l’appelante s’était posé des conditions personnelles pouvant limiter ses chances de retour sur le marché du travail lorsqu’elle prit la décision de dévouer tout son temps au démarrage de son entreprise.

[42] Le Tribunal estime qu’en consacrant tous ses efforts au lancement de son entreprise, l’appelante ne s’est pas déchargée du fardeau de prouver qu’elle était disponible pour travailler. En l'espèce, il est manifeste que l’appelante n'était pas disponible pour travailler durant la période du 22 avril au 21 juin 2013.

[43] Compte tenu de tout ce qui précède, le Tribunal détermine que l’appelante n’a pas satisfait aux trois critères énoncés par la jurisprudence pour établir sa disponibilité pour travailler tel qu’exigé par la Loi. Le fait que l’appelante ait réussi à se créer un emploi, est très louable en soi. Toutefois, pour avoir droit aux prestations, un prestataire doit démontrer qu’il était disponible et qu’il effectuait des recherches actives d’emploi pour tous les jours disponibles, tel que le prescrit la Loi et la jurisprudence. Le Tribunal estime que le cas de l’appelante ne fait pas exception à cette règle.

Conclusion

[44] Le Tribunal conclut que l’appelante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait de prouver sa disponibilité pour travailler pour tout jour ouvrable durant la période du 22 avril au 21 juin 2013. La décision de révision rendue par la Commission le 17 mai 2016 est donc maintenue.

[45] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

18 (1) Le prestataire n’est pas admissible au bénéfice des prestations pour tout jour ouvrable d’une période de prestations pour lequel il ne peut prouver qu’il était, ce jour-là:

  1. (a) soit capable de travailler et disponible à cette fin et incapable d’obtenir un emploi convenable;
  2. (b) soit incapable de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine prévue par règlement et aurait été sans cela disponible pour travailler;
  3. (c) soit en train d’exercer les fonctions de juré.

(2) Le prestataire à qui des prestations doivent être payées en vertu de l’un des articles 23 à 23.2 n’est pas inadmissible au titre de l’alinéa (1)b) parce qu’il ne peut prouver qu’il aurait été disponible pour travailler n’eût été la maladie, la blessure ou la mise en quarantaine.

Règlement sur l’assurance-emploi

32 Pour l’application des articles 18 et 152.19 de la Loi, est un jour ouvrable chaque jour de la semaine sauf le samedi et le dimanche.

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