Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelante, Madame M. P., a participé à l’audience. Madame Catherine Frenette, un autre membre du Tribunal était également présent à titre d’observatrice. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») n’était pas présente.

Introduction

[1] L’appelante a présenté une demande de prestations de maladie le 21 juin 2016. L’appelante a déclaré avoir travaillé à titre d’« enseignant / enseignante au niveau secondaire » pour l’employeur Commission scolaire du X, du 15 août 2015 au 16 juin 2016.

[2] Le 19 juillet 2016, la Commission a déterminé que l’appelante exerçait un emploi dans l’enseignement et, par conséquent, n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance- emploi pendant la période de congé estivale. La Commission a donc imposé une inadmissibilité aux prestations d’assurance-emploi aux termes du paragraphe 33(2) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) du 29 juin 2016 au 12 août 2016.

[3] L’appelante a demandé la révision de la décision de la Commission rendue le 19 juillet 2016. Dans une décision communiquée verbalement le 16 août 2016 et datée le 14 septembre 2016, la Commission a maintenu la décision rendue le 19 juillet 2016.

[4] Le 9 septembre 2016, l’appelante interjette appel de la décision en révision qui a été communiquée le 16 août 2016 et datée le 14 septembre 2016.

[5] Le 14 septembre 2016, Tribunal a informé l’appelante que son avis d’appel était incomplet, car plusieurs renseignements obligatoires étaient manquants. Le Tribunal a indiqué que pour compléter son avis d’appel, l’appelante devait fournir une copie de la décision de révision qui fait l’objet de l’appel et une déclaration signée attestant que les renseignements sont véridiques. Le Tribunal a précisé à l’appelante que s’il recevait tous les renseignements manquants à son avis d’appel, au plus tard le 17 octobre 2016, il allait considérer avoir reçu cet avis d’appel comme étant complet, en date du 9 septembre 2016.

[6] Le 27 septembre 2016, l’appelante a fourni les renseignements demandés par le Tribunal.

[7] Le 8 mars 2017, à la suite de l’audience tenue le 7 mars 2017, l’appelante a transmis une copie de son contrat de travail signé le 21 septembre 2016 pour la période du 15 août 2016 au 23 décembre 2016.

[8] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience Téléconférence pour la raison suivante : Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[9] Est-ce que l’appelante était inadmissible, en tant qu’enseignante, aux prestations d’assurance-emploi aux termes de l’article 33 du Règlement?

Preuve

[10] L’appelante a présenté une demande de prestations de maladie le 21 juin 2016, dans laquelle elle a déclaré qu’elle est une enseignante au niveau secondaire. (GD3-2 à GD3-16)

[11] Deux relevés d’emploi ont été produits au soutien de la demande de prestations:

  • Un premier relevé d’emploi délivré le 23 juin 2016 indique que l’appelante a occupé un poste d’enseignante à la Commission scolaire du X du 17 août 2015 au 11 mars 2016, et qu’elle a cessé de travailler pour cause de maladie. (GD3-17)
  • Un deuxième relevé d’emploi délivré le 23 juin 2016 indique que l’appelante a occupé un poste d’enseignante à la Commission scolaire du X du 14 mars 2016 au 16 juin 2016, et que son contrat a pris fin en maladie, sa date de retour au travail est inconnue. (GD3-18)

[12] Le 8 juillet 2016, lors d’une conversation avec la Commission, l’appelante a déclaré que le 30 juin 2016, elle a reçu une offre de contrat d’enseignement pour la prochaine année scolaire. Elle a également affirmé qu’elle accumule l’ancienneté d’une année à l’autre, mais n’est pas au courant s’il y a report de ses cotisations de retraite. (GD3-19)

[13] Le 19 juillet 2016, la Commission a déterminé que l’appelante exerçait un emploi dans l’enseignement et, par conséquent, n’est pas admissible au bénéfice des prestations d’assurance- emploi pendant la période de congé estivale. La Commission a donc imposé une inadmissibilité aux prestations d’assurance-emploi aux termes du paragraphe 33(2) du Règlement du 29 juin 2016 au 12 août 2016. (GD3-20 et GD3-21).

[14] L’appelante a demandé la révision de la décision de la Commission rendue le 19 juillet 2016. À l’appui de sa demande de révision, l’appelante a expliqué bien qu’elle ait reçu une offre conditionnelle pour un contrat pour la prochaine année scolaire, ledit contrat n’a pas été signé. Ainsi, elle n’est pas liée à son employeur et demeure dans l’incertitude quant à un nouveau contrat pour la prochaine année scolaire. Considérant que son contrat d’enseignement a pris fin en juin 2016, elle devrait être admissible aux prestations. (GD3-22 à GD3-23)

[15] Dans un document intitulé « Note/Contrat », daté du 29 juin 2016, dont l’objet est : « Contrat de M. P. » (l’appelante) il est indiqué « la personne ci-dessus mentionnée devrait se voir attribuer un contrat d’enseignement pour l’année 2016-2017…La période couverte par le contrat serait du 15 août 2016 au 23 décembre 2016 ». Ce document a été envoyé par M. L. (Directrice) aux ressources humaines de la Commission scolaire. (GD3-24)

[16] Le 16 août 2016, l’employeur a confirmé ce qui suit (GD3-25 à 26):

  1. Les offres de contrat pour la prochaine année scolaire sont effectuées selon la liste de rappel. Pour être inscrit sur la liste de rappel, l’enseignant doit avoir enseigné au moins 216 heures par année pendant deux années consécutives. L’appelante est sur la liste de rappel;
  2. La période estivale se situe entre le 17 juin 2016 et le 12 août 2016;
  3. Les crédits de maladie résiduels sont versés à la fin du contrat;
  4. Les cotisations de retraite sont cumulées à chaque contrat.
  5. Concernant l’assurance collective, les enseignants ayant terminé leur contrat en mai ou juin sont couverts jusqu’au 31 août 2016. Les primes pour la période estivale sont payées par les enseignants. La prime se prélève à la fin du contrat, ce qu'il manque sera prélevé au retour au travail sinon une facture sera envoyée au domicile.

[17] L’employeur a également fourni un document intitulé « Précision concernant la liste de rappel pour formation professionnelle-Adultes au 30 juin 2016 ». Il est également indiqué que parmi les noms sur cette liste ceux surlignés en jaune ont reçu une offre de contrat. Le nom de l’appelante est surligné en jaune pour une tâche à 100% pour un contrat allant du 15 août 2016 au 23 décembre 2016. De plus il est indiqué que l’appelante a plus de 12 années d’expérience au sein de la Commission scolaire. De plus pour l’année scolaire 2015-2016, l’appelante a effectué 720 heures d’enseignement. (GD3-27-GD3-28)

[18] Le 18 août 2016, l’appelante confirme qu'elle est sur une liste de rappel, qui est établie par date d'embauche, elle est la deuxième personne sur la liste. C'est possible qu'elle n'ait pas le contrat qui lui a été offert le 29 juin 2016 si la personne qu'elle doit remplacer revient à son poste, elle n'a aucune garantie. L’appelante a déclaré que bien que son nom apparait sur la liste de rappel, ceci ne constitue pas un contrat, mais bien une prévision. Beaucoup de choses peuvent se passer d’ici le début de l’année scolaire, notamment, s’il n’y a pas assez d’inscriptions le contrat peut ne pas être signé. Le contrat dont il est question dans la note est une tâche à 100 %, mais pour une demi-année seulement, soit du 15 août 2016 au 23 décembre 2016. Pour l'année scolaire 2015-2016, elle avait commencé avec un demi-contrat également, il y a eu plusieurs modifications et elle a fini l'année avec une tâche à 100 %. Par contre, une personne qui est derrière elle sur la liste de rappel ne peut pas passer en avant d'elle, il faut que le poste lui soit offert avant. La Commission a avisé l’appelante verbalement que la décision initiale a été maintenue. (GD3-29)

[19] Le 14 septembre 2016, la Commission a maintenu la décision rendue le 19 juillet 2016. (GD3-31-GD3-32).

[20] Le 9 septembre 2016, l’appelante en appelle au Tribunal de la décision de révision rendue par la Commission. L’appelante soutient que la note datée du 29 juin 2016 n’est pas un contrat. Il s’agit plutôt d’un document de travail permettant aux ressources humaines de prévoir les besoins pour l’année 2016-2017. De plus la note sur laquelle la Commission s’est basée pour rendre sa décision ne lui était pas adressée personnellement et il est bien inscrit en bas de la note « Les heures indiquées sont à titre prévisionnel et peuvent être modifiées en fonction des inscriptions et des départs des cours ». (GD2-1 à GD2-9)

[21] Durant l’audience l’appelante a réitéré essentiellement les mêmes motifs exprimés lors de la révision administrative et elle a confirmé avoir signé un contrat formel d’enseignement le 21 septembre 2016 et est rétroactif au 15 août 2016. Elle a de plus ajouté ce qui suit :

  1. Son assurance salaire n’a pas continué après le 16 juin 2016 bien qu’elle fut encore en maladie à cette date.
  2. La Commission ne semble pas interpréter les provisions de la Loi de manière stable, car l’année dernière elle était dans la même situation et elle a eu droit à des prestations.

Preuve produite après l’audience

[22] Pour donner suite à la demande du Tribunal, le 8 mars 2017, l’appelante a fourni une copie de son contrat d’enseignement signé le 21 septembre 2016. La durée du contrat est du 15 août 2016 au 23 décembre 2016. (GD6-1 à GD6-3)

[23] À la demande du Tribunal, la Commission a fourni des détails sur la demande de prestations déposée par l’appelante en juin 2015. La Commission a vérifié la demande d’assurance-emploi pour l’année 2015, demande déposée le 08 juin 2015. Contrairement à cette année où l’appelante a indiqué, dans la section «Renseignements sur le titre d’emploi», qu’elle travaillait comme enseignante au niveau secondaire (GD3-6), dans la demande déposée le 08 juin 2015, pour la même section, l’appelante a indiqué qu’elle était infirmière-enseignante, de sorte que le questionnaire sur les enseignants (GD3-7 à GD3-8) n’a pas été présenté à l’appelante à ce moment. Par la suite, selon les informations au dossier, la demande de prestations d’assurance- emploi a été finalisée de façon automatisée, c’est-à-dire qu’elle n’a pas été évaluée par un agent. Par conséquent, aucune clarification de son statut n’a été effectuée de telle sorte qu’elle a pu bénéficier de prestations d’assurance-emploi pour l’été 2015. (GD8-1 à GD8-4)

Arguments des parties

[24] L’appelante a fait valoir que selon le Guide de détermination de l’admissibilité qui se trouve sur le site web de la Commission le chapitre 14 section 3, intitulé Fin de Contrat indique : « Le premier facteur est de déterminer si l'enseignant, avant la fin de son contrat actuel, a un nouveau contrat ou s'il y a accord verbal qu'il sera de retour pour enseigner à la fin de la période de congé. S'il n'y a pas de nouveau contrat ou d'accord ou verbal de retour, on doit alors conclure qu'il y a une rupture absolue dans l'emploi de l'enseignant à la fin du contrat. Le prestataire sera alors admissible aux prestations à partir du jour suivant le dernier jour visé par le contrat ». Dans son cas, au moment où elle a présenté sa demande de prestations le 19 juin 2016, elle n’avait pas un nouveau contrat ni une offre verbale de contrat.

[25] Son assurance collective a continué, mais celle-ci est conventionnée. Ainsi les primes ne sont pas payées par l’employeur, mais par les enseignants. Ceci fait preuve qu’il n’y a pas eu continuité de son contrat, car selon le Guide d’admissibilité « Il se peut qu'en vertu de la convention collective, l'employé continue, après la cessation d'emploi, de jouir de certains avantages sociaux comme les remboursements des frais dentaires ou médicaux. Certains enseignants bénéficient d'assurances couvrant les frais dentaires et médicaux en vertu d'une entente prise par leur syndicat, dont les primes sont payées par les employés ou le syndicat après la cessation d'emploi. Ces avantages sociaux n'indiquent pas, de ce seul fait, que le lien se poursuit. Cependant, si ces assurances médicales ou dentaires se continuent par l'entremise de l'employeur, ces avantages constituent un lien. »

[26] L’appelante maintient qu’elle a signé son contrat le 21 septembre 2016 et il était rétroactif au 15 août 2016, ainsi il y a eu rupture du lien d’emploi le 16 juin 2016 et elle a droit aux prestations parce qu’elle était en chômage durant la période estivale.

[27] La Commission a soutenu que l’appelante n'a pas démontré que son contrat de travail dans l'enseignement a pris fin le 16 juin 2016 et qu'elle ne retournera pas à l’emploi de son employeur suite à la période de congé scolaire. Elle a conclu un autre contrat dans l'enseignement avec la même Commission scolaire le 29 juin 2016 (GD3-24) au cours de la période de congé scolaire du 17 juin 2016 au 12 août 2016 et l’offre reçue lui a été faite en fonction de son ancienneté au sein de la Commission scolaire. (GD3-27 à GD3-28) La Commission soutient que le lien d’emploi s’est poursuivi lorsque l’appelante a conclu une entente avec son employeur pour la prochaine période d’enseignement. Conséquemment, l’appelante ne rencontre pas l'exception prévue à l'alinéa 33(2)a)du Règlement.

Analyse

[28] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[29] Tout d’abord, le Tribunal retient, dans son analyse, le contrat de l’appelante soumis, après la tenue de l’audience, parce que cet élément de preuve contient des renseignements susceptibles d’influencer la décision du Tribunal. De plus, ce document a été produit suite à la demande du Tribunal exprimée durant l’audience. (McEwing c. Canada (Procureur général), 2013 CF 183)

[30] Le paragraphe 33 (1) du Règlement, définit un enseignant comme étant une personne qui enseigne dans une école maternelle, primaire, intermédiaire ou secondaire, y compris une école de formation technique ou professionnelle. Le Tribunal détermine que dans le cas qui nous occupe, l’appelante est une enseignante qui exerçait un emploi dans l’enseignement au sens du paragraphe 33(1) du Règlement. En effet, la preuve au dossier démontre que l’appelante travaille pour la Commission scolaire du X où elle enseigne au niveau secondaire.

[31] Le Tribunal détermine également que l’appelante avait présenté une demande de prestations pour une « période de congé » au sens du paragraphe 33(1) du Règlement parce que « la période survient annuellement, à des intervalles réguliers ou irréguliers, durant laquelle aucun travail n’est exécuté par un nombre important de personnes exerçant un emploi dans l’enseignement. » Dans le cas qui nous occupe, l’appelante interjette appel de la décision qui l’a déclaré inadmissible au bénéfice des prestations pendant la période de congé estivale, soit du mois de juin au mois d’août 2016.

[32] Tel que défini au paragraphe 33(1) du Règlement, un enseignant n’est pas admissible au bénéfice des prestations, autres que celles prévues aux articles 22, 23, 23.1, 23.2 de la Loi ‒ pendant une période de congé, à moins qu’il ne rencontre les conditions décrites au paragraphe 33(2) du Règlement.

[33] Le paragraphe 33(2) du Règlement définit trois exceptions à l’inadmissibilité des enseignants aux prestations :

  1. a) le contrat de travail dans l’enseignement a pris fin;
  2. b) l’emploi dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance;
  3. c) l’enseignant remplit les conditions requises pour recevoir des prestations à l’égard d’un emploi dans une profession autre que l’enseignement.

[34] Le Tribunal doit déterminer si l’appelante rencontre les exceptions prévues au paragraphe 33 (2) du Règlement. La Cour a confirmé que l’intention du législateur en ce qui a trait à l’article 33 du Règlement est fondée, entre autres, sur la prémisse qu’à moins qu’il y ait une véritable rupture dans la continuité de l’emploi d’un enseignant, celui-ci n’aura pas droit aux prestations pour la période de congé scolaire (Oliver et al, 2003 CAF 98, Stone, 2006 CAF 27, Robin, 2006 CAF 175).

[35] L’article 33 s’applique aux enseignants qui présentent une demande de prestations de maladie, nonobstant le fait que ceux-ci pourraient être autrement admissibles, qu’ils pourraient recevoir des prestations de maladie pendant la période d’enseignement, et que le paiement pendant des périodes de congé ne constituerait pas une deuxième source de revenus pour le prestataire (ou cumul de prestations et de traitement). Les tribunaux ont fait remarquer que ce résultat pourrait être regrettable pour les prestataires, mais que poursuivre les prestations ou les rendre payables pendant les périodes de congé exigerait une modification de la loi. (Taylor [1991] A.C.F. Nº 508, 126 N.R. 345 (CAF) (St-Coeur [1996] A.C.F. Nº 514, 199 N.R. 45 (CAF)

[36] Il incombe à l’appelante de prouver selon la prépondérance des probabilités que son contrat de travail dans l’enseignement a pris fin et qu’il y a eu une véritable rupture du lien d’emploi lorsqu’elle a cessé de travailler le 16 juin 2016 au sens de l’article 33 (2) a) du Règlement. (Stone 2006 CAF 27)

[37] La Cour a constamment répété dans ses arrêts que, lorsque leurs contrats se terminent à la fin de juin et qu'ils sont réengagés pour l'année scolaire suivante, les enseignants n'ont pas droit à l'assurance-emploi durant la période de congé estivale, car il n’y a pas eu de véritable rupture du lien d’emploi. (Bishop c. Canada (Commission de l'assurance-emploi), 2002 CAF 276; Canada (Procureur général) c. Partidge (1999), 245 N.R. 163 (C.A.F.); Gauthier c. Canada (Commission de l'emploi et de l'immigration), [1995] A.C.F. no 1350 (C.A.); et Canada (Procureur général) c. Hann, [1997] A.C.F. no 1641 (C.A.).

[38] Selon les faits non contestés, l’appelante est à l'emploi de la Commission scolaire depuis le 2 décembre 2012. Pour l'année scolaire 2015-2016 elle avait un contrat allant du 15 août 2015 au 16 juin 2016. L’appelante n’a pu exécuter une partie de son contrat à partir du 11 mars au 16 juin 2016 en raison d’une absence pour cause de maladie, tel qu’il appert de son dernier relevé d’emploi qui indique que son contrat a pris fin en maladie. L’appelante a déposé une demande de prestations de maladie, car elle ne bénéficiait plus du régime d’assurance salaire offert par l’employeur, son contrat ayant pris fin.

[39] Dans le présent dossier, le Tribunal estime que le contrat de travail dans l’enseignement de l’appelante a pris fin le 16 juin 2016. Il y a eu une véritable rupture dans la continuité de l’emploi de l’appelante, et que celle-ci est admissible au bénéfice des prestations d’assurance- emploi pendant la période de congé scolaire.

[40] Dans la cause Stone (2006 CAF 27), la Cour a énoncé neuf facteurs dont « il conviendra de tenir compte pour savoir s’il y a eu rupture claire dans la continuité de l’emploi », en vertu de l’alinéa 33(2)a) du Règlement. Ces neufs facteurs sont les suivants : l’ancienneté de la relation d’emploi, la durée de la période de congé, les usages et pratiques du domaine d’enseignement en cause, le versement d’une rémunération durant la période de congé, les conditions du contrat de travail écrit, s’il y en a un, la méthode à laquelle recourt l’employeur pour rappeler le prestataire, le formulaire de relevé d’emploi rempli par l’employeur, les autres éléments attestant une reconnaissance de départ de la part de l’employeur ainsi que l’arrangement conclu entre le prestataire et l’employeur, et la conduite respective de chacun.

[41] La Cour mentionne que cette liste n’est pas limitative, que les facteurs ne doivent pas être évalués d’une manière mécanique et qu’il faut plutôt examiner l’ensemble des circonstances de chaque cas.

[42] En s’appuyant sur la jurisprudence, le Tribunal analysera les facteurs suivants : 1) le versement d’une rémunération durant la période de congé, 2) les conditions du contrat de travail écrit.

1) Versement d’une rémunération durant la période de congé

[43] L’appelante a fait valoir que son contrat a pris fin alors qu’elle était en congé de maladie. Lorsque son contrat a pris fin le 16 juin 2016, les prestations d’assurance salaire dont elle bénéficiait ont cessé à cette date. Ainsi, elle n’a pas été rémunérée durant la période de congé estivale.

[44] L’alinéa 33(2)a) du Règlement a également pour but d’empêcher que les enseignants, soient rémunérés de deux sources différentes pour le même rôle (ce qu’on appelle le cumul de prestations et de traitement. (Lafrenière 2013 CAF 175) (Stone 2006 CAF 27)

[45] Dans le cas de l’appelante, cette dernière avait un contrat de travail dans l'enseignement jusqu’au 16 juin 2016. À partir du 17 juin 2016 et durant le mois de juillet et la première moitié d'août, elle n'avait aucun contrat avec la Commission scolaire, ainsi elle ne recevait pour ces mois aucune rémunération. Le Tribunal considère que ceci constitue une indication parmi tant d’autres qu’il y eut une véritable rupture du lien d’emploi.

[46] Bien que l’appelante n’ait pas été rémunérée durant la période de congé estivale, la jurisprudence enseigne que le non-versement d'une rémunération par l'employeur ne constitue pas l'unique facteur à prendre en compte pour savoir si la situation d'un prestataire relève de l'alinéa 33(2)a) du Règlement. À plusieurs reprises, la Cour a d'ailleurs jugé que, même si un prestataire n'était pas rémunéré, son contrat n'avait pas pour autant pris fin et le prestataire n'avait donc pas droit aux prestations. (Canada (Procureur général) c. Donachey, [1997] A.C.F. n ° 579 (C.A.); Canada (Procureur général) c. St-Coeur, [1996] A.C.F. n ° 514 (C.A.); Canada (Procureur général) c. Taylor, [1991] A.C.F. n ° 508 (C.A

[47] Le Tribunal a donc considéré le fait que l’appelante a bénéficié d’une couverture de l’assurance collective durant la période congé.

[48] L'examen attentif de la preuve à cet égard révèle que, les primes associées à la couverture de l’assurance collective étaient payées par l’appelante durant la période de congé estivale et non pas par l’employeur. Cette couverture est prévue dans la convention collective et est liée au contrat de l’année précédente, indépendamment de tout contrat de travail futur.

[49] Le Tribunal considère que ceci milite en faveur de la démonstration qu’il y a eu rupture du lien d’emploi, car le maintien de l’assurance collective ne constitue aucunement une garantie d’un emploi pour l’année scolaire 2016-2017.

2) Les conditions du contrat écrit : Est-ce qu’un contrat a réellement été conclu le 29 juin 2016?

[50] La Commission soutient que le lien d’emploi s’est poursuivi lorsque l’appelante a conclu une entente avec son employeur pour la prochaine période d’enseignement. Cette conclusion de la Commission est basée sur le document intitulé note/contrat que la Directrice a transmis aux ressources humaines de la Commission scolaire. Cette même note/contrat a été acheminée à l’appelante le 29 juin 2016. Le Tribunal est d’avis que le document daté du 29 juin 2016 ne constitue pas une véritable offre d’emploi.

[51] En effet, on peut lire que cette note/contrat est adressée à « Monsieur J. C., Services des ressources humaines » la rubrique objet indique « Contrat de M. P.… » et il est mentionné ce qui suit « la personne ci-dessus mentionnée devrait se voir attribuer un contrat d’enseignement pour l’année 2016-2017…La période couverte par le contrat serait du 15 août 2016 au 23 décembre 2016…Total 336 heures». À la toute fin de cette note/contrat, il est écrit en gras « Les heures indiquées sont à titre prévisionnel et peuvent être modifiées en fonction des inscriptions et départs de cours »

[52] Le Tribunal estime que bien que le mot contrat soit indiqué sur cette note, le document daté du 29 juin 2016 n’est pas un contrat, mais reflète plutôt le fait que les parties se sont placées dans une situation de condition suspensive. Cette condition suspensive est démontrée par le fait que la note précise que « Les heures indiquées sont à titre prévisionnel et peuvent être modifiées en fonction des inscriptions et départs de cours ». L’utilisation des mots comme « …devrait se voir attribuer un contrat…le contrat serait du 15 août 2016 au 23 décembre 2016 », fait également preuve du fait que cette note/contrat fut conditionnelle à la réalisation d'un autre événement.

[53] En effet, selon l’appelante à quelques mois de la fin de chaque année scolaire, la direction dresse ses prévisions de fréquentation pour l’année suivante en vue de déterminer ses besoins en effectifs. Ceux-ci sont ensuite communiqués au service des ressources humaines qui se charge de faire part aux enseignants qu’ils pourraient peut-être retourner travailler durant la prochaine année scolaire.

[54] Le Tribunal détermine que cette condition suspensive a retardé la création d'un lien juridique entre les parties en suspendant la formation du contrat. Autrement dit, au moment où l’appelante a reçu cette note/contrat, soit le 29 juin 2016, il n'y avait pas de droits contractuels ni d'obligations contractuelles entre l’appelante et la Commission scolaire pendant la période de congé estivale.

[55] L’appelante a témoigné qu’en recevant cette note/contrat, elle avait l’espoir qu’elle puisse reprendre son travail d’enseignante à l’automne 2016, mais elle savait que malgré le fait qu’elle ait reçu cette note/contrat, la Commission scolaire pouvait décider, pour quelque raison, de ne pas lui offrir un emploi et elle ne pourrait utiliser la note/contrat pour faire valoir ses droits de faire exécuter la note/contrat. Ainsi, la note/contrat qu’elle a reçue le 29 juin 2016 ne constitue pas un contrat concernant son emploi futur.

[56] Tel qu’il appert de la preuve au dossier, le véritable contrat de travail a été conclu le 21 septembre 2016, une fois que la Commission scolaire a pu confirmer qu’il y a avait le nombre d’inscriptions requises pour embaucher l’appelante.

[57] Compte tenu de tout ce qui précède, le Tribunal conclut que la note/contrat datée du 29 juin 2016 ne constitue pas un contrat. Ainsi, au moment de la réception de ladite note/contrat, l’appelante n’avait pas l’assurance d’un poste pour l’année scolaire 2016-2017. Par conséquemment, le contrat de l’appelante avait pris fin le 16 juin 2016 et il y eut dès lors rupture véritable du lien d’emploi.

[58] Par ailleurs, bien que l’appelante a bénéficié d’une couverture d’assurance collective durant la période de congé estivale, cette couverture ne constitue pas la garantie d’un emploi futur, les primes de cette couverture ayant été payées par l’appelante durant la période de congé. Finalement, l’appelante n’a pas été rémunérée par la Commission scolaire durant la période de congé estivale.

Conclusion

[59] Le Tribunal conclut que l’appelante a démontré que son contrat de travail dans l’enseignement a pris fin le 16 juin 2016, date à la laquelle qu’il y eut une rupture claire dans la continuité de l’emploi.

[60] En raison de cette rupture de la relation avec son employeur, le Tribunal conclut que l’appelante était véritablement en chômage du 17 juin 2016 au 14 août 2016, son nouveau contrat étant rétroactif au 15 août 2016.

[61] L’appel est accueilli.

Annexe

Droit applicable

Règlement sur l’assurance-emploi
  1. 33 (1) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.
  2. enseignement La profession d’enseignant dans une école maternelle, primaire, intermédiaire ou secondaire, y compris une école de formation technique ou professionnelle.
  3. période de congé La période qui survient annuellement, à des intervalles réguliers ou irréguliers, durant laquelle aucun travail n’est exécuté par un nombre important de personnes exerçant un emploi dans l’enseignement.
  4. (2) Le prestataire qui exerçait un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence n’est pas admissible au bénéfice des prestations — sauf celles prévues aux articles 22, 23, 23.1 ou 23.2 de la Loi — pour les semaines de chômage comprises dans toute période de congé de celui-ci, sauf si, selon le cas :
    1. (a) son contrat de travail dans l’enseignement a pris fin ;
    2. (b) son emploi dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance;
    3. (c) il remplit les conditions requises pour recevoir des prestations à l’égard d’un emploi dans une profession autre que l’enseignement.
  5. (3) Lorsque le prestataire qui exerçait un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence remplit les conditions requises pour recevoir des prestations à l’égard d’un emploi autre que l’enseignement, les prestations payables pour une semaine de chômage comprise dans toute période de congé de celui-ci se limitent au montant payable à l’égard de l’emploi dans cette autre profession.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.