Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

[1] L’appelant a participé à l’audience par téléconférence. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a reçu un avis d’audience par voie électronique le 30 décembre 2016, mais n’a pas participé à l’audience. Le Tribunal est convaincu que la Commission a été avisée de la tenue de l’audience et a donc procédé en son absence en vertu du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Introduction

[2] L’appelant a établi une demande de prestations à compter du 17 mai 2013. Il a accepté un nouvel emploi le 11 mars 2014 qui consistait en des cycles de quatre semaines de travail suivies par deux semaines sans travail. Il rapporta ceci à la Commission comme étant un emploi permanent et à temps plein.

[3] Tôt en novembre 2014, l’appelant fit une demande de renouvellement de sa demande. Il réclama aussi d’antidater sa demande au 23 mars 2014, car en fin de compte, le poste était temporaire.

[4] Le 19 décembre 2014, la Commission détermina que l’appelant n’était pas admissible aux prestations pour la période allant du 11 mars au 29 octobre 2014, car il avait, durant cette période, un emploi comme défini au paragraphe 11(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi). La Commission détermina aussi que l’appelant n’avait pas démontré de « motif valable » en expliquant le motif de son retard à présenter sa demande antidatée.

[5] L’appelant a demandé une révision de cette décision le 18 février 2015. Le 17 mars 2015, la Commission informa l’appelant qu’elle avait maintenu ses décisions originales.

[6] L’appelant a interjeté appel devant le Tribunal, qui rendit une décision le 8 juillet 2015 sur la foi du dossier pendant que l’appelant était incapable s’assister à l’audience prévue, car sa mère était décédée.

[7] L’appelant interjeta appel à la division d’appel, qui a tenu une audience le 28 juillet 2016. La décision de la division d’appel du 28 octobre 2016 accueillit l’appel de l’appelant et renvoya l’affaire à la division générale pour qu’une nouvelle audience soit tenue.

[8] L’audience a été tenue par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. La complexité des questions en litige.
  2. Le fait que la crédibilité ne devrait pas être un enjeu déterminant.
  3. Le fait que l’appelant sera la seule partie présente.

Questions en litige

[9] L’appelant interjette appel des décisions de la Commission pour :

  1. avoir déterminé selon le paragraphe 11(4) de la Loi qu’il n’avait pas prouvé qu’il avait été des semaines sans emploi, et
  2. avoir refusé sa demande d’antidatation conformément au paragraphe 10(4) de la Loi.

Preuve

[10] L’appelant est un pâtissier qui réside au centre de Terre-Neuve-et-Labrador. L’appelant a établi une demande de prestations à compter du 22 décembre 2013.

[11] Il trouva un emploi comme pâtissier dans un camp de travail au Nunavut débutant le 11 mars 2014. Lorsqu’il accepta cet emploi, il comprit qu’un emploi permanent à temps plein lui avait été offert et il en avisa la Commission. Il comprit qu’il travaillerait sur des cycles de quatre semaines de travail et de deux semaines de congé. L’appelant déclara qu’une fois le travail commencé, il apprit que le poste était temporaire et non permanent.

[12] L’appelant travailla des cycles de quatre semaines de travail et de deux semaines de congé jusqu’au 29 octobre 2014. L’appelant fit une déclaration à la Commission le 17 mars 2015 indiquant que lorsqu’il quitta le camp de travail de son employeur le 29 octobre 2014, il s’attendait d’y retourner le 16 novembre 2014, mais il avait été appelé par son employeur le 11 novembre 2014 pour être informé de sa mise à pied. Un relevé d’emploi daté du 23 novembre 2014 a été émis et celui-ci indiquait que sa période de paie finale se terminait le 8 novembre 2014.

[13] Après sa mise à pied, l’appelant demanda des documents de son employeur expliquant l’entente. Ils lui fournirent une lettre sans date qui se lit en partie ainsi :

[traduction]

... Nous avons deux camps principaux et deux camps de construction. ...Tout le printemps et tout l’été passés, avec les prix du minerai de fer en chute, les camps étaient instables, nous amenions les employé [sic] pour quatre semaines à la fois et ensuite ils partaient. Il était incertain si nous en aurions encore besoin, mais après deux semaine [sic], si nous avions besoin d’eux, nous les ramenions, mais il leur était dit lorsqu’ils partaient qu’il se pourrait qu’ils ne reviennent pas et, que s’ils avaient besoin d’un RE, ils en recevraient un. Ceci se continua jusqu’au 29 octobre 2014, et rendus au 12 novembre 2014, nous savions que nous n’aurions plus besoin d’eux et nous leur avons émis des RE. Mais toutes les deux semaines que les employé [sic] partaient en congé, il leur était dit qu’ils pouvaient envoyer des CV partout, que nous ne les retenions pas, qu’ils étaient libres de faire ce qu’il voulait et que s’ils n’est [sic] pas là quand nous en avions besoin, c’était notre perte [sic].

[14] L’appelant affirma qu’il comprenait cette entente comme signifiant qu’à chaque fois qu’il quittait le camp, il n’était pas assuré d’y retourner et pour cette raison son emploi se terminait à chaque départ.

[15] Lors de son premier retour à la maison, l’appelant essaya de faire sa déclaration hebdomadaire, mais il a été incapable de le faire, car il avait avisé la Commission qu’il avait obtenu un emploi permanent à temps plein. Il indiqua qu’il devrait parler avec un agent de Service Canada pour corriger cette information. Il tenta de contacter Service Canada par téléphone pour s’occuper de cette situation. Il affirma qu’il passait de 45 à 60 minutes en attente pour qu’un agent devienne disponible sans jamais entrer en contact. Il décrit qu’à une occasion durant laquelle il avait attendu deux heures pour entrer en contact, la liaison avait été coupée avant qu’il puisse terminer son opération.

[16] L’appelant indiqua que le bureau de Service Canada le plus près de sa résidence est à X, Terre-Neuve-et-Labrador, à environ 60 kilomètres. Il estima le temps nécessaire pour s’y rendre à environ une heure. L’appelant affirma qu’il n’avait pas accès au seul véhicule familial durant les heures de travail pour faire le voyage à X, car sa femme en avait besoin pour son travail. Il indiqua aussi les coûts élevés d’un voyage par taxi de son domicile à X.

[17] Le dossier documentaire est quelque peu ambigu pour ce qui est des heures travaillées par l’appelant. Un document indiquait qu’il travaillait 21 heures par jour pour 21 jours consécutifs, une assertion qu’il répéta apparemment durant son audience devant la division d’appel. Dans un autre document, l’appelant indiqua qu’il travaillait 12 heures par jours durant cinq jours consécutifs. Dans son témoignage durant l’audience, l’appelant indiqua qu’il travaillait un cycle de quatre semaines suivi de deux semaines sans travail et qu’il travaillait 12 heures chaque jour qu’il était au camp de travail.

[18] L’appelant ajouta aussi que, selon les conditions météorologiques, deux ou trois jours pouvaient être nécessaires pour se revenir à la maison à Terre-Neuve-et-Labrador et une période de temps similaire pour retourner au travail. Il indiqua aussi qu’un voyage prit cinq jours. Ce temps était compris dans ses deux semaines sans travail.

[19] L’appelant affirma qu’à chaque fois qu’il retournait à Terre-Neuve-et-Labrador, il cherchait un autre emploi. Il indiqua qu’il avait posé sa candidature pour les projets de Muskrat Falls et Bull Arm. Il avait aussi cherché du travail à Fort McMurray, Alberta et à travers son syndicat. Il indiqua qu’il était prêt à travailler durant chacun de ses voyages à la maison.

[20] L’appelant a aussi affirmé qu’avec le temps requis pour faire l’aller-retour au lieu de travail, il n’avait généralement qu’une semaine à la maison sur les six où il pouvait faire des efforts significatifs à chercher un emploi et à contacter Service Canada pour corriger ses déclarations en lien avec la nature de son emploi.

[21] L’appelant confirma que son relevé d’emploi montre qu’il était payé toutes les deux semaines. Il indiqua qu’un chèque sur trois était significativement plus gros que les deux autres. Il déclara que ça arrivait à cause de la manière dont ses périodes de paie étaient distribuées relativement à son temps passé au camp. Il déclara qu’un des deux plus petits chèques était payé durant la période de deux semaines où il n’était pas au camp.

[22] Après sa mise à pied, l’appelant reprit ses efforts pour demander des prestations pour la période de deux semaines où il n’était pas au camp de travail. Il identifia les périodes en question comme suit :

  1. du 6 au 19 avril 2014;
  2. du 18 au 31 mai 2014;
  3. du 29 juin au 12 juillet 2014;
  4. du 10 au 23 août 2014;
  5. du 21 septembre au 4 octobre 2014.

[23] L’appelant a présenté une demande d’antidatation le 12 novembre 2014. Entre le 12 novembre et le 19 décembre 2014, l’appelant communiqua avec la Commission, indiquant une fois de plus qu’il les avait incorrectement informés que l’emploi qu’il avait accepté en mars 2014 était un emploi permanent et à temps plein, et qu’il avait tenté de corriger cette information entre-temps. Il demanda aussi d’antidater la période indiquée précédemment. Durant cette série de discussions, l’appelant indiqua à un point qu’il espérait avoir l’occasion de montrer que les déclarations faites à la Commission indiquaient que son emploi était en fait à « temps partiel ». L’appelant dit plus tard à la Commission qu’il voulait décrire son emploi comme étant « temporaire ».

[24] L’appelant déclara qu’il avait finalement fait du progrès lorsqu’il avait été capable de se rendre au bureau de Service Canada à X en décembre 2014.

[25] L’appelant déclara aussi qu’il avait des collègues qui résidaient dans quatre provinces différentes, qui étaient dans la même situation que lui, et qui recevaient des prestations les deux semaines du cycle où ils ne travaillaient pas.

Observations

[26] L’appelant fit valoir que parce qu’il n’y avait pas de certitude qu’il serait rappelé au travail, chaque période de deux semaines du cycle de six semaines était une période de chômage. Il ajouta qu’il était incapable de demander des prestations à partir d’avril 2014, car il avait par erreur inscrit son emploi comme permanent quand il été réellement temporaire. Il déclara qu’il avait tenté de corriger cette situation avec la Commission durant chacune des périodes où il était à la maison, mais il ne pouvait pas le faire à cause de problèmes continus de communication téléphonique avec la Commission. Il indiqua qu’il n’avait pas été capable de commencer le processus de résolution de cette situation avant qu’il puisse visiter personnellement le bureau de Service Canada à X en décembre 2014.

[27] La Commission indiqua que le paragraphe 11(4) de la Loi prévoit que lorsque :

L’assuré qui travaille habituellement plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps et qui a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé est censé avoir travaillé une semaine entière de travail au cours de chaque semaine qui est comprise complètement ou partiellement dans cette dernière période.

[28] La Commission expliqua que la première condition est en lien avec le travail comme tel et que la seconde condition est reliée à un droit établi dans un contrat de travail. Lorsque ces deux conditions sont présentes, le prestataire n’est pas considéré au chômage durant la semaine durant laquelle cette période de congé survient.

[29] La Commission ajouta que si l’appelant souhaite demander des prestations d’assurance-emploi pour une période antérieure, il doit dans un premier temps être admissible à la date antérieure en question et doit ensuite démontrer qu’il avait un motif valable pendant toute la période du retard à présenter sa demande. Ils expliquent que l’appelant doit démontrer qu’il avait pris les mesures que toute autre personne raisonnable placée dans la même situation aurait prises pour vérifier ses droits et ses obligations prévus par la Loi.

[30] La Commission fait valoir que l’appelant n’a pas a agi comme l’aurait fait une personne raisonnable dans sa situation pour s’enquérir de ses droits et de ses obligations prévus par la Loi.

Analyse

[31] Les dispositions législatives pertinentes sont présentées en annexe.

Semaine de chômage

[32] La première question à examiner dans cet appel est de savoir si l’appelant était réellement au chômage aux moments où il cherchait à faire sa demande comme prévu au paragraphe 11(4) de la Loi.

[33] La Cour fédérale d’appel apprécia une demande similaire à celle de l’appelant dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242. Les parties dans l’affaire Jean étaient conducteurs de camions parcourant de longues distances et ils travaillaient une semaine sur deux et pendant 55 à 60 heures durant cette semaine-là. La Cour fournit les directives suivantes :

La Loi prévoit à l’article 9 que des prestations d’assurance-emploi sont payables pour chaque semaine de chômage. Par ailleurs, une semaine de chômage est définie au paragraphe 11(1) de la Loi comme une semaine pendant laquelle le prestataire n’effectue pas une semaine entière de travail. Les paragraphes 11(2), (3) et (4) prévoient cependant des exceptions à cette définition. Le paragraphe 11(4) prévoit notamment qu’une période planifiée de congé doit être considérée comme une semaine entière de travail dans les cas où un contrat de travail prévoit des périodes de congé pour les personnes qui travaillent régulièrement un nombre d’heures plus élevé que la normale. L’objectif de cette disposition est clair : faire en sorte que seuls les travailleurs en situation d’interruption d’emploi puissent bénéficier d’indemnités temporaires, conformément à l’esprit d’un programme public d’assurance fondé sur la notion de risque social. Le travailleur qui est en congé en raison d’heures supplémentaires déjà travaillées ne subit pas une perte de revenu, peu importe qu’on lui verse ou non une rétribution durant ce congé; il ne se trouve pas en interruption d’emploi, mais conserve son lien avec son employeur : voir Canada (Procureur général) c. Foy, 2003 CAF 51 (CanLII), au para. 8 [Foy].

[mis en évidence par le soussigné]

[34] Le Tribunal indique que l’arrêt Jean a été rendu public par la Cour après que la division générale ait rendu sa décision initiale dans l’appel de l’appelant en juillet 2015. L’arrêt Jean est un précédent contraignant que le Tribunal doit suivre, pourvu que les faits de l’affaire de l’appelant soient substantiellement similaires à ceux dans l’affaire Jean.

[35] Appliqué en l’espèce, l’arrêt Jean exige que le Tribunal détermine si l’appelant était en congé compensatoire pour les heures supplémentaires déjà travaillées lorsqu’il était dans la période de deux semaines à la maison. S’il l’était, alors ces semaines ne sont pas des semaines de chômage comme défini au paragraphe 11(4). En déterminant si les deux semaines de congé de l’appelant étaient une compensation pour les heures supplémentaires travaillées durant le cycle de quatre semaines au camp, le Tribunal doit considérer la population en général et ne pas faire de « distinction fondée sur la catégorie ou le secteur d’emploi ».

[36] Les éléments de preuve de l’appelant relatifs à ses heures travaillées sont ambigus. Il a déclaré à plusieurs reprises que son travail exigeait qu’il travaille 12 heures par jour durant 21 jours, qu’il travaillait une semaine de 60 heures et, durant l’audience devant ce Tribunal, qu’il travaillait 12 heures par jour pour quatre semaines. La correspondance de l’employeur indique que l’appelant travaillait quatre semaines au camp de travail. Compte tenu de l’ensemble de la preuve, le Tribunal est par conséquent convaincu que l’appelant travaillait 12 heures par jour pour 28 jours et qu’il était ensuite deux semaines sans travailler. Le Tribunal conclut que l’appelant travaillait 336 heures durant le cycle de 4 semaines, ce qui correspond à 84 heures par semaine.

[37] La Cour dans l’arrêt Jean est claire en indiquant que le Tribunal ne « [...] souhaitait pas faire de distinction selon les catégories d’emploi ou de secteur pour les fins de l’exclusion prévue au paragraphe 11(4) de la Loi »; le Tribunal peut seulement considérer si les conditions définies au paragraphe 11(4) sont présentes, plus précisément si l’appelant :

  1. a) travaillait plus d’heures que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps, et
  2. b) avait droit à une période de congé aux termes de son contrat de travail pour compenser pour les heures supplémentaires travaillées.

[38] L’arrêt Jean n’indique pas un nombre spécifique d’heures pour guider le Tribunal à déterminer quand un prestataire a travaillé plus d’heures « que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps ». En l’espèce, le Tribunal indique que plusieurs personnes occupant un emploi à temps plein travaillent significativement moins que 84 heures par semaine, bien que ça puisse être la norme dans le secteur dans lequel l’appelant était employé. Le Tribunal est par conséquent convaincu que l’appelant travaillait plus d’heures « que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps » aux titres du paragraphe 11(4) de la Loi.

[39] Si l’emploi de l’appelant avait fait l’objet d’un contrat écrit, celui-ci n’a pas été fourni au Tribunal. L’appelant fait valoir par sa preuve qu’il avait été embauché pour travailler sur un cycle de quatre semaines de travail au camp et de deux semaines sans travail. Ceci est confirmé par la correspondance de son employeur qui est au dossier, et c’est aussi corroboré par le fait qu’il était payé sur un cycle de six semaines jusqu’à ce qu’il soit mis à pied le 11 novembre 2014.

[40] La déclaration de l’appelant à la Commission le 17 mars 2014 indique qu’il s’attendait à retourner au travail le 16 novembre 2014, mais qu’il avait été avisé le 11 novembre 2014 qu’il serait mis à pied. Son relevé d’emploi montre que la période de paie finale de l’appelant se termina le 8 novembre 2014. Ces faits sont aussi cohérents avec un cycle de quatre de semaines de travail suivies de deux semaines sans travail.

[41] L’appelant déclara que la correspondance de son employeur montrait que son emploi se terminait à chacun de ses départs du camp de travail. À cet égard, le langage utilisé dans la correspondance semble suggérer autrement. Sur ce point, la correspondance se lit comme suit :

[traduction]

... Nous avons deux camps principaux et deux camps de construction. ... Tout le printemps et tout l’été passés, avec les prix du minerai de fer en chute, les camps étaient instables, nous amenions les employé [sic] pour quatre semaines à la fois et ensuite ils partaient. Il était incertain si nous en aurions encore besoin, mais après deux semaine [sic], si nous avions besoin d’eux, nous les ramenions, mais il leur était dit lorsqu’ils partaient qu’il se pourrait qu’ils ne reviennent pas et que s’ils avaient besoin d’un RE ils en recevraient un. Ceci se continua jusqu’au 29 octobre 2014, et rendus au 12 novembre 2014, nous savions que nous n’aurions plus besoin d’eux et nous leur avons émis des RE. Mais chaque deux semaines que les employé [sic] partaient en congé, il leur était dit qu’ils pouvaient envoyer des CV partout que nous ne les retenions pas, qu’ils étaient libres de faire ce qu’il voulait et que s’ils n’est [sic] pas là quand nous en avons besoin, c’était notre perte [sic].

[42] Ceci semble plutôt être une reconnaissance par l’employeur, qu’à cause de l’incertitude de leurs perspectives à long terme, ils acceptaient le risque que des employés puissent chercher du travail lorsqu’ils n’étaient pas au camp.

[43] Considérant dans son ensemble, la semaine de travail de 84 heures de l’appelant, son cycle de six semaines, le relevé d’emploi, la correspondance de son employeur, [sic] et la prépondérance des probabilités, le Tribunal conclut que la période de deux semaines durant laquelle l’appelant n’était pas au camp de travail de l’employeur était une période de congé à laquelle il avait droit aux termes de son contrat de travail pour compenser les heures supplémentaires travaillées comme décrit au paragraphe 11(4) de la Loi.

[44] Étant donné ce qui précède, le Tribunal conclut, conformément au paragraphe 11(4), que l’appelant n’était pas au chômage durant la période de deux semaines lorsqu’il n’était pas au camp de l’employeur entre le 11 mars et le 8 novembre 2014, le dernier jour de sa période de paie finale.

Antidatation

[45] Le Tribunal constate que la Commission se référa au paragraphe 10(4) de la Loi dans ses observations en lien avec la demande de l’appelant. Le paragraphe 10(4) s’applique à des demandes de prestations initiales. Les documents déposés par la Commission au Tribunal indiquent qu’ils avaient évalué la demande de l’appelant comme étant un renouvellement de la demande qu’il avait présenté le 31 décembre 2013. À l’examen de la preuve, le Tribunal est convaincu que la demande de l’appelant était une demande de renouvellement et devrait par conséquent être examinée au titre du paragraphe 10(5) de la Loi.

[46] L’article 50 de la Loi indique les obligations d’un prestataire de satisfaire à certaines exigences procédurales lorsqu’il présente une demande de prestations. Cet article donne aussi le pouvoir discrétionnaire à la Commission d’annuler ou de modifier ces exigences procédurales si les circonstances le justifient.

[47] L’article 26 du Règlement indique qu’une demande de prestations, pour une semaine de chômage durant une période de prestations, doit être présentée dans les trois semaines suivant la semaine pour laquelle les bénéfices sont réclamés. Toutefois, si une demande n’a pas été faite pendant quatre semaines consécutives ou plus, alors la demande doit être faite dans la semaine qui suit celle pour laquelle les prestations sont réclamées.

[48] Dans certaines circonstances, le paragraphe 10(5) de la Loi permet à la Commission de considérer la demande de prestations tardive de l’appelant comme si elle avait été faite antérieurement. Il est alors souvent mention d’antidatation de la demande. Le paragraphe exige que l’appelant démontre un « motif valable » pour le retard durant la période, commençant la journée où l’antidatation a été demandée et se terminant lorsque la demande a été faite.

[49] L’appelant a le fardeau de prouver ces conditions (Albrecht, A-172-85). Il doit [sic] un « motif valable » pour avoir tardé à faire la demande en prouvant qu’il a agi de la même façon qu’aurait agi une personne raisonnable et prudente dans des circonstances similaires, durant la période entière du retard (Canada (Procureur général) c. Burke, 2012 CAF 139; Smith, A-549-92).

[50] La preuve montre que l’appelant n’a pas fait ses déclarations hebdomadaires durant les périodes suivantes :

  1. du 6 au 19 avril 2014;
  2. du 18 au 31 mai 2014;
  3. du 29 juin au 12 juillet 2014;
  4. du 10 au 23 août 2014;
  5. du 21 septembre au 4 octobre 2014.

[51] Le Tribunal remarque que l’appelant demande une antidatation en date du 23 mars 2014. Considérant les périodes de chômage qui ont été identifiées comme faisant l’objet de sa demande d’antidatation, le Tribunal est convaincu que le 6 avril 2014 est la date la plus hâtive à laquelle il réclama une antidatation. L’appelant a présenté une demande d’antidatation le 12 novembre 2014. Le Tribunal conclut, par conséquent, que la période de retard pour laquelle l’appelant doit fournir des explications s’étend du 6 avril 2014 au 12 novembre 2014.

[52] L’appelant a fait valoir qu’il ne pouvait pas présenter sa demande par le processus régulier, car il était inscrit comme ayant un travail à temps plein lorsqu’il a été embauché le 11 mars 2014. Il déclara qu’une fois qu’il avait découvert qu’il pouvait ne pas être rappelé au travail, il apprit qu’il devait parler à un agent de la Commission pour corriger ceci avant de pouvoir faire une demande. Il tenta de contacter la Commission par téléphone sans succès et à cause des longs temps d’attente, à chaque fois qu’il n’était pas au camp de travail. Il affirma aussi qu’il était incapable de se rendre au bureau de Service Canada à X, car sa femme avait besoin du véhicule familial pour son travail.

[53] L’appelant a aussi affirmé qu’avec le temps passé en transit entre sa demeure à Terre-Neuve-et-Labrador et son lieu de travail en Alberta, seulement une semaine de son cycle de deux semaines sans travail au camp était libre pour qu’il puisse s’occuper de ce problème. Une étape raisonnable à prendre pour une personne dans la situation de l’appelant dans ces circonstances aurait été de trouver un moyen de se rendre à X et de s’occuper du problème en personne. Il pourrait avoir été difficile ou dispendieux de le faire, considérant les défis décrits par l’appelant, mais surmonter ces obstacles était, néanmoins, une étape raisonnable à franchir.

[54] À défaut de circonstances exceptionnelles, il est attendu qu’une personne raisonnable prendrait des mesures rapidement pour comprendre ses droits et ses obligations reconnus par la Loi (Canada (Procureur général) c. Somwaru, 2010 CAF 336).

[55] Le Tribunal reconnaît que le fait que l’appelant avait seulement une semaine sur six durant laquelle il pouvait tenter de contacter la Commission pour solutionner les problèmes avec sa demande représentait une situation difficile. Les défis de communication posés par sa difficulté à avoir un lien téléphonique et les entraves n’étaient pas insurmontables. L’étape raisonnable de se rendre à X était possible pour lui, même s’il n’était pas facile pour lui de le faire. Le Tribunal juge que les défis qu’il avait de communiquer avec la Commission n’étaient pas si grands pour constituer une circonstance exceptionnelle comme expliqué dans Somwaru.

[56] Compte tenu de toutes ces circonstances, l’appelant ne s’est pas acquitté de sa responsabilité de prendre les mesures qu’une personne raisonnable dans ses circonstances aurait prises pour surmonter les obstacles de communication qu’il a identifiés de manière à présenter sa demande dans les délais requis. Par conséquent, il ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de prouver qu’il avait agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans des circonstances similaires pendant tout le délai de présentation sa demande.

Conclusion

[57] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

  1. 9 Lorsqu’un assuré qui remplit les conditions requises aux termes de l’article 7 ou 7,1 formule une demande initiale de prestations, on doit établir à son profit une période de prestations et des prestations lui sont dès lors payables, en conformité avec la présente partie, pour chaque semaine de chômage comprise dans la période de prestations.
  2. 10 (4) Lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.
  3. 11 (1) Une semaine de chômage, pour un prestataire, est une semaine pendant laquelle il n’effectue pas une semaine entière de travail.
  4. (2) Une semaine durant laquelle se poursuit un contrat de louage de services d’un prestataire et pour laquelle celui-ci reçoit ou recevra sa rétribution habituelle pour une semaine entière de travail n’est pas une semaine de chômage, même si le prestataire peut être dispensé de l’exercice de ses fonctions normales ou n’a en fait aucune fonction à exercer à ce moment-là.
  5. (3) Une semaine, totale ou partielle, qui, en conformité avec une entente entre un employeur et un employé, fait partie d’une période de congé durant laquelle l’employé demeure employé de cet employeur et pour laquelle il reçoit, indépendamment du moment du versement, la partie de sa rétribution qui a été mise de côté n’est pas une semaine de chômage.
  6. (4) L’assuré qui travaille habituellement plus d’heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d’une semaine des personnes employées à plein temps et qui a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé est censé avoir travaillé une semaine entière de travail au cours de chaque semaine qui est comprise complètement ou partiellement dans cette dernière période.
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