Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] En date du 1er septembre 2016, la division générale du Tribunal a conclu que la répartition de la rémunération avait été effectuée conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement).

[3] L’appelant a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel en date du 16 septembre 2016. La permission d’en appeler a été accordée par la division d’appel en date du 31 octobre 2016.

Mode d’audience

[4] Le Tribunal a conclu que l’audience relativement à l’appel serait instruite par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la ou des questions en litige;
  • la crédibilité des parties ne figurait pas au nombre des questions principales;
  • le caractère économique et opportun du choix de l’audience;
  • la nécessité de procéder de la façon la plus informelle et rapide possible tout en respectant les règles de justice naturelle.

[5] Lors de l’audience, l’appelant était absent, mais représenté par Me Mathieu Jacques. L’intimée était représentée par Manon Richardson.

Droit applicable

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que la répartition de la rémunération avait été effectuée conformément aux articles 35 et 36 du Règlement.

Observations

[8] L’appelant soumet les motifs suivants à l’appui de son appel:

  • Il a expliqué en détail le contexte difficile qu'il a subi sur le chantier sur lequel il était assigné comme agent de sécurité pour la compagnie Sécur-Québec, dont la faillite a été confirmée par la cour dans le dossier 760-22-005617-135, malgré son opposition.
  • Dans les faits, les représentants de Pergebec avaient accepté de reprendre la compagnie Sécur-Québec (GD3-21) et d'assumer les obligations financières passées de Sécur-Québec.
  • Le Tribunal n'a pas la preuve définitive que des sommes lui ont été versées; il s'agirait uniquement d'un remboursement de sommes qui lui était dû avant la période au centre de la contestation du présent litige, soit les semaines du 27 octobre 2013 au 19 janvier 2014.
  • Il a soumis à la division générale les renseignements concernant l'entente de rachat des contrats intervenue avec G. P. et madame S. L. comme témoin.
  • La division générale, étant la division possédant le pouvoir d'enquête, aurait dû explorer cette piste suite à ses indications. Cette négligence de la division générale dans la conduite dans son enquête constitue une erreur de fait et de droit susceptible d'apporter l'annulation la décision sur l'aspect de la répartition de la rémunération.
  • La division générale aurait dû contacter la personne en charge chez Pergebec, soit G. P., pour vérifier la version de celui-ci par rapport à sa version. C'est G. P. au sein de Pergebec qui possède le pouvoir décisionnel, et non M. O. de la paie.
  • Le rapport d'impôt qu’il a soumis est de nature à remettre en doute la crédibilité des renseignements qui furent fournis à l’intimée par l'employeur.
  • Sachant que Sécurité Quali-T a repris les activités de Sécur-Québec, l’intimée aurait dû contacter G. P. pour s'enquérir des modalités de transition de l'entreprise. L’intimée aurait ainsi pu connaitre les éléments de faits importants en lien avec la transition d'entreprise dans laquelle il a perdu énormément d'argent et subi un sérieux préjudice financier.
  • La division générale ne s'est pas acquittée de son fardeau dans son enquête, et, par conséquent, l'appel doit être accueilli sur la question de la répartition des revenus.

[9] L’intimée soumet les motifs suivants à l’encontre de l’appel :

  • L’appelant était présent et il a pu donner sa version des faits. La division générale a rendu une décision relevant de sa compétence et qui n’est manifestement pas déraisonnable à la lumière des éléments pertinents de la preuve.
  • Le litige en l’espèce est la rémunération reçue de Gestion Pergebec Inc., soit le nouvel employeur, et non son ex-employeur Sécur Québec inc., qui a fait faillite. La preuve soumise par l’employeur démontre que les sommes ont bien été versées à l’appelant (GD3-60 à GD3-66). Les montants correspondent au montant inscrit sur le relevé d’emploi à la pièce (GD3-12).
  • La division générale n’a pas erré en concluant que c’est la rémunération intégrale de l’appelant provenant de tout emploi qui doit être répartie aux termes des articles 35 et 36 du Règlement;
  • De plus, le T4 soumis par l’appelant avec sa demande de permission d’en appeler mentionne qu’il a gagné 727,69 $ pour l’année 2014, ce qui est exact, puisque le relevé d’emploi indique aux cases 1 à 3 un total de 727,69 $; cette période du relevé d’emploi concerne la période de paie du 15 décembre au 18 janvier 2014. Il a donc été payé au cours de l’année 2014.
  • Il est possible que son ex-employeur Sécur Québec inc. lui doive de l’argent et qu’il ait reçu 4 semaines du syndic pour récupérer des sommes qui lui étaient dues, mais cela n’a aucun rapport avec le litige qui concerne le nouvel employeur.
  • La décision de la division générale est conforme à la législation ainsi qu'à la jurisprudence en la matière et elle est raisonnablement compatible avec les faits au dossier. La division générale s'en est remise à l'ensemble de la preuve qui lui était présentée et elle a expliqué ses conclusions dans un raisonnement cohérent et logique.

Normes de contrôle

[10] L’appelant n’a fait aucune observation quant à la norme de contrôle applicable.

[11] L’intimée soutient que la norme de contrôle applicable aux questions de droit est celle de la décision correcte et que la norme de contrôle applicable aux questions mixtes de fait et de droit est celle de la décision raisonnable – Pathmanathan c. Bureau du juge- arbitre, 2015 CAF 50.

[12] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale, dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne, au paragraphe 19 de sa décision, que, lorsque la division d’appel « agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale, la Division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. »

[13] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant ce qui suit :

Non seulement la Division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale et [qu’elle] n’est […] donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale.

[14] La Cour d’appel fédérale termine en soulignant que « [l]orsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la Division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi ».

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

[16] En conséquence, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait commis une erreur de droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Analyse

[17] À l’appui de son appel, l’appelant fait valoir que l’enquête de l’intimée et de la division générale était inadéquate et insuffisante. Il soutient que les représentants de Pergebec avaient accepté de reprendre la compagnie Sécur-Québec (GD3-21) et d'assumer les obligations financières passées de Sécur-Québec. Si des sommes lui ont été versées, il s'agirait uniquement d'un remboursement de sommes qui lui était dû avant la période au centre de la contestation du litige, soit les semaines du 27 octobre 2013 au 19 janvier 2014. Il considère que l’intimée et la division générale ne se sont pas acquittées de leur fardeau, et, par conséquent, l'appel doit être accueilli sur la question de la répartition des revenus.

[18] Lorsqu’elle a rejeté l’appel de l’appelant, la division générale a exprimé ce qui suit :

[29] Le rôle du Tribunal au sens de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, n’est malheureusement pas de faire enquête en lieu et place de la Commission. Tout en comprenant parfaitement l’intention du prestataire de fournir les coordonnées d’un contact auprès duquel il aurait voulu que le Tribunal puisse puiser de l’information après l’audience, ce privilège d’enquête n’est pas celui du Tribunal. Il revient la seule charge à la Commission le privilège de faire enquête et à un appelant de fournir les pièces justificatives et les témoignages nécessaires, écrits ou oraux, lors de l’audience et même au-delà si le Tribunal l’y consent, pour prouver ce qu’il avance.

(soulignement du soussigné)

[19] Il apparait manifeste que la division générale a repris, en ces propres termes, les enseignements de la Cour d’appel fédérale, qui a affirmé que le fardeau de la preuve pour contester les renseignements sur la paie de l’employeur revient au prestataire et que de simples allégations visant à semer un doute sont insuffisantes – Dery c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 291.

[20] La preuve produite devant la division générale se fonde sur les déclarations de l’employeur qui a confirmé les montants payables à l’appelant pour chaque semaine en cause (GD3-13 et GD3-59). L’employeur a également fourni une copie des talons de paie pour la période du 6 octobre 2013 au 25 janvier 2014 (GD3-60 à GD3-66). Les montants correspondent au montant inscrit sur le relevé d’emploi (GD3-12).

[21] L’appelant, quant à lui, a demandé à la division générale de faire enquête pour s'enquérir des modalités d’acquisition par son nouvel employeur. Il a également soumis un relevé T4-2014 de son nouvel employeur qui confirme qu’il a effectivement reçu des sommes en 2014.

[22] Dans une entrevue téléphonique en date du 19 juin 2016, lorsqu’il a été confronté sur le fait qu’il n’a déclaré aucun gain pendant la période pertinente, l’appelant déclare qu’il avait besoin de sous et qu’il ne savait plus quoi faire pour s’en sortir (GD3-24).

[23] Le Tribunal en vient à la conclusion que rien dans la preuve de l’appelant ne contredit la preuve apportée par l’employeur pour les semaines pertinentes au dossier. Que l’ancien employeur ait fait faillite et que le nouvel employeur ait assumé s’est obligation financière ne change rien au fait que, selon la preuve devant la division générale, l’appelant a travaillé pour le nouvel employeur pendant la période pertinente.

[24] L’appelant ne pouvait, par une demande d’enquête, mettre en doute la véracité des propos de l’employeur. Il lui appartenait de faire preuve du contraire devant la division générale. Devant la preuve dont elle disposait, la division générale ne pouvait tout simplement pas arriver à une conclusion différente de celle à laquelle elle est parvenue.

[25] Pour les motifs susmentionnés, l’appel sera rejeté.

Conclusion

[26] L’appel est rejeté.

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