Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelante, Madame L. S. a participé à l'audience. Son conjoint et témoin Monsieur G. S. était également présent. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») n’était pas présente.

Introduction

[1] L’appelante a fait une demande de prestations d’assurance-emploi le 3 mai 2016. Dans cette demande, l’appelante a déclaré qu’elle réside dans la région de X et que son adresse résidentielle n’était pas différente de son adresse postale.

[2] Le 2 juin 2016, la Commission a avisé l’appelante qu’elle ne pouvait lui verser des prestations d’assurance-emploi parce que l’appelante avait accumulé 618 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence alors qu’il lui en fallait 665 heures en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (la Loi).

[3] L’appelante a demandé le réexamen de la décision rendue le 2 juin 2016. Dans une décision en révision rendue, le 8 septembre 2016 a maintenu la décision rendue le 2 juin 2016.

[4] Le 10 octobre 2016, l’appelante a porté en appel, la décision en révision rendue à son endroit par la Commission le 8 septembre 2016.

[5] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience Téléconférence pour les raisons suivantes :

Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Questions en litige

  1. Est-ce que l’appelante a accumulé suffisamment d’heures assurables afin de répondre aux conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi en vertu de l’article 7 de la Loi?

Preuve

[6] L’appelante a fait une demande de prestations d’assurance-emploi le 3 mai 2016. Dans cette demande, l’appelante a déclaré qu’elle réside dans la région de X et que son adresse résidentielle n’était pas différente de son adresse postale. (GD3-1 à GD3-12)

[7] Un relevé d’emploi délivré le 9 mai 2016 indique que l’appelante a travaillé pour l’employeur Intria Items Inc. Payroll Deductions et a accumulé un total de 629 heures d’emploi assurable et que son adresse est située à X. (GD3-13)

[8] La demande de prestations fut refusée le 2 juin 2016, parce que l’appelante avait accumulé 618 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence (3 mai 2015 et 30 avril 2016) alors qu’il lui en fallait 665 heures en vertu de la Loi. (GD3-16)

[9] Le 6 juin 2016, lors d’une conversation téléphonique avec la Commission, l’appelante a déclaré qu’elle venait d’apprendre qu’elle ne répond pas aux critères d’admissibilité et elle affirme avoir inscrit l’adresse de son conjoint située à X, car elle y vit à X 50 % du temps. Sa résidence permanente est plutôt située à X Québec et que cette adresse l’aurait avantagée pour le nombre d’heures assurables requises pour sa demande. (GD3- 18)

[10] Le 10 juin 2016, selon les notes inscrites par un agent de la Commission : En modifiant l’adresse de l’appelante pour X, l’appelante pourrait se qualifier aux prestations, car selon le taux de chômage de la région de X, l’appelante aurait besoin de 595 heures d’emploi assurables. À noter que sur le relevé d'emploi émis par son dernier employeur son adresse est aussi à X donc un doute réel subsiste sur la déclaration de l’appelante à l'effet que son adresse de résidence serait réellement à X. (GD3-19)

[11] Le 13 juin 2016, l’appelante a réitéré qu’elle vit la moitié du temps chez son conjoint à X et qu’elle est propriétaire d’un condominium à la ville de X. Elle vit en union libre et elle passe autant de temps chez son conjoint à X qu’à son condominium situé à X. Elle dit que la représentante de la Commission l’ayant aidé à remplir sa demande lui avait dit que son adresse principale peut être indiquée comme son adresse secondaire. Elle a également mentionné qu’elle a complété sa demande de prestations rapidement et ne l’a pas lue et que c’est la première fois qu’elle fait une demande d’assurance-emploi. (GD3-21)

[12] Le 14 juin 2016, l’appelante a confirmé qu’elle est en union libre avec G. S. et que pour les fins du programme de la sécurité de la vieillesse elle utilise son adresse à X. Elle n'avait pas un horaire de travail à temps plein donc elle pouvait être quelques jours au condominium à X et quelques jours à X, elle effectuait la navette. Elle mentionne aussi être membre de l'association des copropriétaires de son condominium et il s'agit pratiquement du bénévolat à temps plein, car elle administre les soumissions et s'occupe des contrats (entretien, etc.). Elle mentionne avoir fait le changement d'adresse auprès de son employeur au mois de mars 2016 au cas où elle recevrait du courrier urgent, il serait envoyé à X, car elle savait qu'une mise à pied s'en venait. De plus, l’appelante a déclaré qu’elle vote aux élections à X, déclare l’adresse de X pour ses impôts, permis de conduire, assurance auto. Finalement, elle veut changer son adresse pour obtenir le chômage qu’elle a payé toute sa vie et n’en a jamais demandé. (GD30-GD3-31)

[13] Dans le but de prouver que son lieu de résidence principale est à X et non à X, l’appelante a fourni à la Commission les documents suivants :

  1. Facture Hydro Québec, état de compte au 26 mai 2016 et les noms et l’adresse de l’appelante à X y sont indiqués (GD3-24);
  2. Avis d’évaluation foncière pour la ville de X avec les noms et adresse de l’appelante à X Québec; date de l’avis est le 22 février 2016(GD3-25);
  3. Document intitulé syndicat des copropriétaires du X X où apparait le nom de l’appelante comme trésorière et une autre personne qui s’appelle G. S. (GD3- 26 à GD3-29).

[14] Le 19 juillet 2016, dans une lettre adressée à l’appelante la Commission avise cette dernière que sa demande ne peut être réexaminée ayant déterminé que le lieu de résidence habituel de l’appelante est situé à X. Pour cette raison, l’appelante n’a pas droit aux prestations d’assurance-emploi puisqu’elle a accumulé 618 heures d’emploi assurables alors qu’il lui fallait 665 heures. Cette décision a été envoyée à l’adresse située à X. (GD3-58)

[15] Le 12 août 2016, l’appelante a demandé la révision de la décision rendue le 19 juillet 2016 en faisant remarquer que ladite décision a été envoyée à son adresse de résidence principale située à X Québec. Elle joint à sa demande de révision plusieurs documents indiquant que son adresse est à X, tels que : (GD3-59 à GD3-85)

  1. Des factures d’Hydro-Québec et de taxes de la ville de X,
  2. Facture de l’assurance Desjardins, mandataire pour le syndicat des copropriétaires du X X
  3. Preuve de sa police d’assurance pour son condominium;
  4. Correspondance de Lunetterie Sears;
  5. Certificat d’honnêteté émis par son employeur;
  6. Lettre de CIBC pour son compte bancaire et avantages « employés »;
  7. Bordereaux de paie de son ancien employeur ;
  8. Confirmation de son changement d’adresse auprès de son employeur CIBC changement d’adresse;
  9. Les relevés T4 pour les fins de déclarations de son revenu;
  10. Factures de sa carte crédit de la Banque Royale
  11. Lettre à la Commission dans laquelle elle exprime son indignation du fait que la Commission refuse de reconnaitre que son adresse résidence principale est bien située a X.

[16] Le 8 septembre 2106, l’appelante a déclaré qu’elle a inscrit l’adresse de X sur sa demande de prestations d’assurance-emploi, car elle a déposé sa demande à Ste-Agathe. Elle n’a pas pensé inscrire l’adresse de X. Comme elle reçoit du courrier à X et qu’elle vit aussi à cette adresse, elle n’a pas précisé que son adresse postale est différente de son adresse résidentielle. Son lieu de travail est dans la région de Montréal. Lorsqu’elle travaille, elle habite dans son condominium à X. Lorsqu’elle ne travaille pas, elle habite à X, mais il lui arrive parfois de demeurer à X même si elle ne travaille pas. Lorsqu’elle habite à X, son conjoint est avec elle. Elle ne peut pas dire à quelle fréquence elle va à X ou à X. Auparavant, elle recevait le courrier concernant son emploi à son adresse située à X, mais au mois de mars, elle a changé son adresse auprès de son employeur pour indiquer l’adresse située à X. Ce changement d’adresse a été fait parce que l’appelante voulait s’assurer son courrier important à X. De plus, son conjoint n’est pas toujours avec elle à X, alors lorsqu’il est à X, il peut lui dire si elle a reçu du courrier important. Elle confirme qu’elle vote aux élections à X et que cette adresse est celle utilisée pour son permis de conduire, car cela lui coûte moins cher pour ses immatriculations. Elle a complété l’avis de recensement 2016 à X. Lorsqu’elle a reçu le même avis de recensement à son adresse à X, elle a annulé cet avis et a demandé de le recevoir uniquement à X pour le futur. Finalement, la résidence à X est au nom de son conjoint de fait et non au sien. L’appelante considère que sa résidence principale est située à X. (GD3-86)

[17]Dans son avis d’appel, l’appelante a précisé qu’elle est propriétaire de son condominium situé à X depuis 1996. De plus, elle s’est présentée au bureau de Service Canada situé à X pour faire sa demande de prestations, cependant, la file d’attente étant trop longue, son conjoint lui a suggéré de faire sa demande à Ste-Agathe. Lorsqu’elle est arrivée à Ste-Agathe, elle a été dirigée vers un ordinateur pour faire sa demande. Elle a de plus déclaré qu’il y eut confusion à répondre à la question portant sur la résidence : « Je n’ai pas porté attention que l’on me demandait « résidence principale », j’ai donné l’adresse de mon conjoint, lequel a une résidence dans le Nord ». (GD2-1-GD2-4)

Témoignages à l’audience

[18] L’appelante a précisé ce qui suit durant l’audience :

  1. Contrairement à ce qui est indiqué à la page GD3-21, personne ne lui a dit qu’elle pouvait indiquer son adresse secondaire comme adresse principale. Elle n’a pas fait attention à la question sur l’adresse de résidence. Sa résidence principale est son condominium situé à X, dont elle est l’unique propriétaire, mais elle n’a pas jugé opportun d’indiquer cette adresse lorsqu’elle a rempli sa demande de prestations. Elle a commis une erreur relative à son adresse et cette erreur fut modifiée. Donc, elle ne comprend pas la confusion concernant son adresse.
  2. La résidence à X est au nom de son conjoint et sa résidence principale est à X Québec. Elle est en union libre avec Monsieur G. S., et c’est l’adresse à X qui est utilisée pour le programme de la sécurité de la vieillesse. Ceci ne cause pas de problème, car son adresse principale peut demeurer à X. Toute sa correspondance concernant le programme de la sécurité de vieillesse est envoyée à son adresse à X. Dans ses rapports de revenus, elle déclare son adresse comme celle située dans la région de X. Ainsi, elle est inscrite sur la liste électorale pour la région de X.
  3. Elle a changé son adresse auprès de son employeur pour indiquer l’adresse située à X. Ainsi sa cessation d’emploi a été envoyée à l’adresse à X. Elle a changé son adresse pour ne pas être prise dans l’achalandage tout simplement. Dans le fond, son changement d’adresse auprès de son employeur n’a pas été fait pour une raison particulière.
  4. Elle travaillait sur appel, à raison de cinq à huit jours par mois. Lorsqu’elle travaillait, elle habitait dans son condominium situé à X. Elle ne peut préciser combien de temps qu’elle passait entre Montréal et X, car elle n’a pas tenu un calendrier de ses allées et venues entre les deux endroits.

[19] Le témoin et conjoint de l’appelante, Monsieur G. S. a témoigné de ce qui suit :

  1. Monsieur G. S. a construit sa maison à X en 1991 et y habite depuis 25 ans. Au début, il allait à X uniquement la fin de semaine. Depuis 2005, il est à la retraite et il demeure plus longtemps à X. Cependant, lorsque sa conjointe travaillait à Montréal durant les cinq à huit jours par mois, il habitait avec sa conjointe à X. Sa conjointe est l’unique propriétaire du condominium situé à X.
  2. C’est difficile de déterminer combien de temps il passait à X et à X.
  3. Sa résidence principale est à X, mais pour les fins de la vie commune il considère ses résidences comme étant X et X. Sa conjointe n’a pas commis de fraude. Cela fait 40 ans que sa conjointe paye son assurance-emploi et elle n’en a jamais fait une demande et elle devrait avoir droit.

Preuve produite après l’audience

[20] Pour donner suite à une demande du Tribunal, le 19 avril 2017, la Commission a fourni des captures d’écrans d’une demande de prestations d’assurance-emploi présentée en ligne. Ces documents indiquent les questions qui ont été posées par rapport à la résidence. (GD6-1 à GD6- 3)

[21] La Commission a également confirmé que bien que le relevé d’emploi de l’appelante indique qu’elle a accumulé 629 heures d’emploi assurable, la Commission a déterminé qu’au cours de sa période allant 3 mai 2015 au 30 avril 2016, l’appelante n’a accumulé que 618 heures d’emploi assurable. En effet, la case 6 dudit relevé d’emploi indique que la période de paye fut à la quinzaine. Ainsi, le nombre maximal de périodes de paie consécutives pendant la période d'emploi est de vingt-sept (27). Le nombre d’heures inclus à la case 15A, six cent vingt-neuf (629) heures, correspond donc au nombre d’heures accumulées entre le 19 avril 2015 et le 30 avril 2016. La période de référence utilisée pour faire le calcul de ses heures d’emploi assurable est la période de cinquante-deux (52) semaines qui précède le début de la période de prestations, soit du 3 mai 2015 au 30 avril 2016, l’appelante elle a accumulé six cent dix-huit (618) heures d'emploi assurable. (GD8-1)

Arguments des parties

[22] L’appelante soutient qu’elle a commis une erreur en indiquant l’adresse de X dans sa demande de prestations. Son adresse de résidence est située à X, car elle est propriétaire d’un condominium à X et cette région est là où se trouve sa résidence principale.

[23] La Commission est d’avis que selon les informations au dossier, l’adresse de résidence habituelle de l’appelante est bien située à X. Elle a d’ailleurs effectué son changement d’adresse auprès de son employeur avant de cesser de travailler et a déposé sa demande de prestations en indiquant qu’elle habitait à X. Même si elle dit être allée au bureau de Ste-Agathe pour déposer sa demande. (page GD3-86), il n’y avait aucune obligation d’inscrire l’adresse de X comme adresse résidentielle et postale. C’est l’adresse située à X que l’appelante inscrit dans plusieurs documents officiels, c’est aussi là qu’elle désire avoir son courrier pour pouvoir en prendre connaissance le plus rapidement possible.

[24] Selon la Commission, en utilisant l’adresse du condominium de l’appelante situé à X, l’appelante aurait fait partie de la région économique de Montréal. Au moment où l’appelante a présenté sa demande de prestations, le taux de chômage de la région de Montréal était de 8.6% et le nombre d’heures assurable pour cette région est de 595 heures. Ainsi, en changeant son adresse pour la région de X, l’appelante aurait pu se qualifier aux prestations d’assurance- emploi.

[25] Selon la Commission, l’appelante ne peut prétendre avoir son adresse principale à X en déposant sa demande et après avoir été informée qu’elle ne se qualifiait pas dans la région de X, changer les informations et donner son adresse à X pour pouvoir se qualifier. Tel que stipulé dans l’affaire Lévesque (A-557-96), une jurisprudence abondante et constante a clairement établi qu'un conseil arbitral doit accorder beaucoup plus de poids aux déclarations initiales et spontanées faites par les personnes intéressées avant la décision de la Commission qu'aux déclarations subséquentes offertes dans le but de justifier ou de bonifier la situation du prestataire face à une décision défavorable de la Commission.

Annexe

[26] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[27] Il se dégage de la preuve que l’appelante a présenté une demande de prestations le 3 mai 2016, dans laquelle l’appelante a indiqué qu’elle vivait dans la région de X. Ainsi, la Commission a déterminé qu’un taux de chômage de 6,7 % s’appliquait pour cette région au moment de la présentation de sa demande. En conformité avec le tableau du paragraphe 7(2) de la Loi, l’appelante avait besoin d’avoir accumulé 665 heures d’emploi assurable pour être admissible à des prestations régulières. L’appelante n’avait accumulé que 618 heures d’emploi assurables. L’appelante a donc été informée qu’elle n’était pas admissible à des prestations d’assurance-emploi conformément au paragraphe 7(2) de la Loi.

[28] En l’espèce, l’appelante conteste la région qui a été utilisée par la Commission pour déterminer le taux de chômage régional applicable, car l’appelante professe que bien qu’elle ait indiqué l’adresse située à X sur sa demande de prestations, sa véritable adresse est située à X et le taux de chômage de cette région devrait être utilisé pour déterminer son admissibilité aux prestations. Conséquemment, l’appelante conteste également le nombre d’heures qu’elle doit avoir accumulé pour remplir les conditions requises pour recevoir des prestations.

[29] Avant de déterminer si l’appelante a accumulé suffisamment d’heures assurables afin de répondre aux conditions requises pour recevoir des prestations d’assurance-emploi en vertu de l’article 7 de la Loi, le Tribunal doit tout d’abord déterminer la région économique applicable selon le lieu de résidence habituel de l’appelante au moment que cette dernière a présenté sa demande de prestations.

[30] L’alinéa 17(1.1)a) du Règlement prévoit que le taux régional de chômage visé au paragraphe 1 est le suivant : a) pour l’application des articles 7, 7.1 12 et 14 et de la partie VIII de la Loi, celui qui a été produit à l’égard de la région où le prestataire avait, durant la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi, son lieu de résidence habituel.

[31] Aux termes du paragraphe 10(1) de la Loi, la période de prestations débute, selon le cas : a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération; b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations.

[32] Il n'existe dans la Loi aucune définition du terme « résidence habituelle ». Ainsi le Tribunal estime qu’on doit donner à ce terme le sens que leur attribue l'usage courant. Comme l'indique le dictionnaire Robert de la langue française, le mot "résidence" désigne « Le lieu où réside une personne; son habitation; la demeure d'une personne », et le mot « habituel » signifie « couramment, ordinairement, régulièrement, ordinairement ». De ce fait, le Tribunal détermine que la résidence habituelle d'une personne est l'endroit où elle vit régulièrement, normalement, ordinairement.

[33] Dans l’affaire J. R. c. Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2016 103368 (TSS), 2016 TSSDAAE 137, la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale a précisé ce qui suit :

« Le terme « résidence habituelle » a été employé par le législateur manifestement pour distinguer une résidence coutumière d’une résidence temporaire. Le Tribunal est d’avis qu’un prestataire peut avoir plus d’un lieu de résidence, mais qu’un seul lieu de résidence habituelle. De plus, le critère servant à établir le « lieu de résidence habituel » implique la considération de faits tant subjectifs qu'objectifs et doit être appliqué à la situation qui existait au cours de la semaine pertinente. »

[34] La question de la « résidence habituelle » est donc une question de fait. Le Tribunal estime que pour déterminer le lieu de « résidence habituelle », il faut examiner le mode général de vie de l’appelante. De plus, une détermination quant au lieu de «  résidence habituelle » doit également reposer sur l'importance des liens qui rattachent l’appelante à sa « résidence habituelle » au moment où la demande de prestations est présentée. Dans les pages qui suivent, le Tribunal analysera les critères subjectifs et objectifs afin de déterminer quel fut le lieu de « résidence habituelle » de l’appelante.

[35] Dans sa demande de prestations, l’appelante a indiqué que son adresse est située à X. Dans cette demande, l’appelante a également déclaré que son adresse résidentielle n’était pas différente de son adresse postale. Dans ses déclarations antérieures à la Commission, l’appelante a déclaré que l’agent qui l’a aidé à compléter sa demande de prestations lui avait dit qu’elle pouvait indiquer sa résidence secondaire comme son adresse principale (GD3-21), à l’audience l’appelante a confirmé que cette déclaration était fausse, car personne ne l’a aidé à remplir sa demande de prestations. Elle affirme également avoir fait une erreur quant à l’adresse qu’elle aurait dû inscrire sur sa demande de prestations, en effet, son adresse de résidence habituelle est bien au condominium dont elle est propriétaire à X et non pas à X. Elle a inscrit son adresse située à X parce qu’elle avait fait sa demande à Ste-Agathe.

[36] De plus, le relevé d’emploi déposé au soutien de la demande indique que l’appelante a travaillé pour l’employeur Intria Items Inc. Payroll Deductions et a accumulé un total de 629 heures d’emploi assurable et que son adresse de résidence est située à X (GD3-13). Dans toutes ses déclarations à la Commission l’appelante à expliquer que son adresse auprès de son employeur fut son adresse située à X, mais qu’elle a changé cette adresse au mois de mars 2016, car l’employeur venait d’annoncer la mise à pied et elle voulait s’assurer de recevoir tout courrier urgent à l’adresse située à X. À l’audience, l’appelante a déclaré que son changement d’adresse auprès de son employeur n’a été fait pour aucune raison particulière. Mais ce fut à cette adresse qu’elle a reçu sa cessation d’emploi.

[37] L’appelante a confirmé que pour ses déclarations de revenus à l’Agence du revenu du Canada, elle se déclare en union libre avec G. S. et l’adresse indiquée est celle de la résidence de son conjoint située à X. Ainsi, elle exerce son droit de vote aux élections municipales, provinciales et fédérales dans la région de X.

[38] De plus, l’appelante a confirmé que l’adresse située à X est celle qui est indiquée sur son permis de conduire, car cela lui coûte moins cher pour l’immatriculation de son véhicule.

[39] De surcroit, l’appelante a déclaré avoir reçu l’avis de recensement pour l’année 2016 à X et elle l’a rempli. Lorsqu’elle a reçu le même avis à son adresse située à X, elle a annulé cet avis tout en requérant que tout avis futur soit envoyé à son adresse située à X.

[40] De plus, pour les fins du programme de la sécurité de vieillesse, l’appelante utilise l’adresse localisée à X.

[41] Finalement, selon les notes inscrites par un agent de la Commission : En modifiant l’adresse de l’appelante pour X, l’appelante pourrait se qualifier aux prestations, car selon le taux de chômage de la région de X, l’appelante aurait besoin de 595 heures d’emploi assurables.

[42] Dans la conclusion de sa décision CUB 21968, le juge Strayer affirme ce qui suit :

« J’ajouterais simplement qu’il est clair, lorsqu’il s’agit de déterminer le « lieu de résidence habituel », qu’il faut accorder extrêmement d’importance à la situation d’un prestataire au moment où il est devenu admissible à des prestations. Autrement, il serait tentant pour des prestataires qui reçoivent des prestations depuis peu de temps et qui habitent une région où le chômage est relativement faible, de déménager délibérément dans une région à chômage élevé où leurs prestations seraient supérieures. Cela n’est sûrement pas l’intention ni de la Loi ni du Règlement. »

[43] L’appelante a fait valoir qu’elle a fait une simple erreur en indiquant l’adresse de X sur sa demande prestations et que cette erreur a été corrigée et qu’elle ne comprend pas la confusion concernant son adresse. Le Tribunal considère que l’appelante a grandement participé à cette confusion, car ses déclarations concernant cette erreur sont incohérentes et truffées de contradictions.

[44] En effet, l’appelante a fait valoir qu’elle est l’unique propriétaire de son condominium situé à X et bien qu’elle ait indiquée l’adresse située à X, cette propriété appartient à son conjoint. De plus, dans plusieurs déclarations à la Commission l’appelante a fait valoir qu’elle passait autant de temps à X qu’à X. En effet, le 13 juin 2016, l’appelante a déclaré vivre 50% du temps à X. À l’audience, l’appelante a déclaré qu’il est faux de prétendre qu’elle passe 50% de son temps à X, car elle ne tient pas un calendrier du temps qu’elle passe à chaque endroit.

[45] À l’audience, l’appelante a fait valoir qu’elle travaillait sur appel dans la région de Montréal. Elle pouvait travailler entre cinq et huit jours par mois. Lorsqu’elle travaillait dans la région de Montréal, elle habitait dans son condominium situé à X, mais qu’après son travail, elle demeurait à X parfois une ou deux semaines de plus dépendamment de ce qu’elle avait à faire à Montréal. Ce fait fut corroboré par le témoin et conjoint de l’appelante, Monsieur G. S.

[46] De plus, l’appelante a fait valoir qu’elle a inscrit l’adresse de X sur sa demande de prestations, car elle a déposé sa demande à Ste-Agathe, et qu’un agent à Ste-Agathe lui aurait expliqué qu’elle pouvait inscrire son adresse secondaire comme adresse principale. Toutefois à l’audience, l’appelante a expliqué que personne ne lui a dit qu’elle pouvait inscrire son adresse secondaire comme adresse principale, elle a rempli sa demande seule sur un ordinateur au bureau de Service Canada situé à Ste-Agathe. De plus, au mois de mars 2016, elle a changé son adresse auprès de son employeur pour indiquer l’adresse de X et elle n’aurait fait cela pour aucune raison particulière. Le 15 juin 2016, l’appelant a confirmé que toute sa correspondance est reçue à l’adresse située à X, sauf la correspondance pour ses médicaments, les factures de taxe foncière et service d’Hydro-Québec qu’elle reçoit à X.

[47] Dans plusieurs déclarations à la Commission l’appelante a fait valoir qu’elle a rempli sa demande trop rapidement et qu’elle n’a pas porté attention à la question sur l’adresse de sa résidence et si cette adresse était différente de son adresse postale. Toutefois, elle est propriétaire de son condominium situé à X depuis 1996, mais elle a témoigné qu’elle n’a « pas jugé opportun de déclarer son adresse située à X » dans sa demande de prestations.

[48] Mais il y a plus, dans son avis d’appel l’appelante a déclaré qu’elle a été confuse par la question posée sur l’adresse, car elle n’a pas porté attention au fait que la question demandait son adresse de « résidence principale ». Or, selon un rapport produit par la Commission après l’audience (GD6-2), aucune question n’a été posée concernant une adresse de « résidence principale » ou de « résidence secondaire  ». En effet, au champ « adresse » de la demande de prestations, tout ce qui est demandé est l’adresse résidentielle et si cette adresse résidentielle est différente de l’adresse postale. Ainsi l’argument de l’appelante voulant qu’elle ait été confuse par la question posée relativement à son adresse ne peut être retenu, car lorsqu’elle a rempli sa demande de prestations, aucune question n’a été posée quant à son lieu de résidence principale ou secondaire.

[49] L’appelante a maintenu qu’elle a fait une simple erreur en déclarant son adresse à X. Le Tribunal est d’avis qu’il est assez inhabituel qu’une personne fasse des erreurs sur son adresse de résidence, là où cette personne se rattache par sa régularité et sa constance de choisir cette résidence comme la plus importante. De plus, comme le fait remarquer la Commission ce fut après avoir été avisé de son admissibilité aux prestations que l’appelante a jugé bon de divulguer cette erreur.

[50] Tel qu’il appert de la preuve, le lieu de résidence habituelle de l’appelante nous ramène inévitablement à X. Bien que l’appelante soit propriétaire d’un condominium à X, l’appelante demeurait dans la région de X quand son emploi l'exigeait. La preuve démontre que c’est à X que se trouvait la résidence la plus importante pour l’appelante. Si tel n’avait pas été le cas, elle n’aurait pas indiqué l’adresse de X sur sa demande d’assurance-emploi, cette même adresse ne se retrouverait pas sur son relevé d’emploi, et l’appelante n’aurait pas demandé que d’autres paliers gouvernementaux tels que l’Agence du revenu du Canada, Élections Canada, Statistique Canada (recensement), la Société de l’assurance automobile du Québec (permis de conduire et immatriculation) lui fasse parvenir des documents importants a son adresse à X.

[51] Le Tribunal estime que le lieu de « résidence habituelle » est l'endroit où une personne vit régulièrement, normalement, ordinairement. Ce lieu sera toujours celui avec lequel cette personne a les liens les plus forts et les plus récents. Dans le cas de l’appelante, c’est l’adresse de X qui figure sur les documents officiels et importants de celle-ci. Ceci démontre que les liens et les signes importants de la vie quotidienne de l’appelante à X étaient si forts que son lieu de « résidence habituelle » était à X et très certainement pas à X.

[52] Le Tribunal conclut qu’au moment de déposer sa demande de prestations, le lieu de résidence habituel de l’appelante était dans la région de X parce qu’elle exerce son droit de vote dans cette région, elle déclare résider à X dans ses déclarations de revenus, et l’appelante a déclaré utiliser cette adresse pour recevoir son courrier important. La région économique de X ne pouvait donc pas être considérée comme le lieu de résidence habituelle de l’appelante au moment pertinent à la détermination du nombre d'heures d'emploi qu'elle devait avoir accumulé.

Conclusion

[53] Le Tribunal détermine que le lieu de « résidence habituelle » de l’appelante est à X parce que la preuve démontre que la résidence à X est la plus importante du fait que l’appelante la choisit habituellement, régulièrement et de façon constante.

[54] Ainsi, l’appelante n’est pas admissible aux prestations régulières d’assurance-emploi puisqu’elle ne remplit pas les conditions requises pour recevoir des prestations en vertu de l’article 7 de la Loi. En effet, l’appelante a accumulé 618 heures au cours de sa période de référence alors que selon le tableau de l’alinéa 7(2) de la Loi il lui fallait 665 heures.

[55] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

7 (1) Les prestations de chômage sont payables, ainsi que le prévoit la présente partie, à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.

(2) L’assuré remplit les conditions requises si, à la fois :

  1. (a) il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;
  2. (b) il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins le nombre d’heures indiqué au tableau qui suit en fonction du taux régional de chômage qui lui est applicable.
Tableau
Taux régional de chômage Nombre d’heures d’emploi assurable requis au cours de la période de référence
6 % et moins 700
plus de 6 %, mais au plus 7 % 665
plus de 7 %, mais au plus 8 % 630
plus de 8 %, mais au plus 9 % 595
plus de 9 %, mais au plus 10 % 560
plus de 10 %, mais au plus 11 % 525
plus de 11 %, mais au plus 12 % 490
plus de 12 %, mais au plus 13 % 455
plus de 13 % 420

(3) à (5) [Abrogés, 2016, ch. 7, art. 209]

(6) L’assuré ne remplit pas les conditions requises s’il est convenu, au titre de l’Article VI de l’Accord entre le Canada et les États-Unis d’Amérique concernant l’assurance-chômage signé les 6 et 12 mars 1942, qu’il doit d’abord épuiser ses droits de recevoir des prestations, ou y mettre fin, aux termes des lois de l’autre juridiction.

Règlement sur l’assurance-emploi Taux de chômage

17 (1) Le taux régional de chômage applicable au prestataire correspond à la moyenne suivante :

  1. a) s’agissant des régions délimitées aux articles 2 à 11 de l’annexe I, soit la moyenne des taux de chômage mensuels désaisonnalisés de la dernière période de trois mois pour laquelle des statistiques ont été produites par Statistique Canada qui précède la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi, soit, si cet organisme ne publie pas le taux applicable à une région pour des motifs de confidentialité, la moyenne qu’il a établie en se fondant sur le nombre minimal de chômeurs qui lui aurait permis de le publier;
  2. b) s’agissant des régions délimitées aux articles 12 à 14 de l’annexe I, la plus élevée de la moyenne découlant de l’application du sous-alinéa (i) et de celle découlant de l’application du sous-alinéa (ii) :
    1. (i) la moyenne des taux de chômage mensuels désaisonnalisés de la dernière période de trois mois pour laquelle des statistiques ont été produites par Statistique Canada qui précède la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi ou, si cet organisme ne publie pas le taux applicable à une région pour des motifs de confidentialité, la moyenne qu’il a établie en se fondant sur le nombre minimal de chômeurs qui lui aurait permis de le publier,
    2. (ii) la moyenne des taux de chômage mensuels désaisonnalisés de la dernière période de douze mois pour laquelle des statistiques ont été produites par Statistique Canada qui précède cette semaine ou, si cet organisme ne publie pas le taux applicable à une région pour des motifs de confidentialité, la moyenne qu’il a établie en se fondant sur le nombre minimal de chômeurs qui lui aurait permis de le publier.

(1.1) Le taux régional de chômage visé au paragraphe (1) est le suivant :

  1. a) pour l’application des articles 7, 7.1, 12 et 14 et de la partie VIII de la Loi, celui qui a été produit à l’égard de la région où le prestataire avait, durant la semaine visée au paragraphe 10(1) de la Loi, son lieu de résidence habituel;
  2. b) pour l’application des articles 7, 7.1 et 14 et de la partie VIII de la Loi, s’il avait son lieu de résidence habituel à l’étranger durant cette semaine, celui qui a été produit à l’égard de la région où il a exercé son dernier emploi assurable au Canada.

(2) Lorsque le prestataire visé à l’alinéa (1.1)a) a son lieu de résidence habituel si près des limites d’au moins deux régions qu’il ne peut être déterminé avec certitude dans quelle région il habite, le taux régional de chômage qui lui est applicable est le plus élevé des taux des régions en cause.

(3) Lorsque le prestataire visé à l’alinéa (1.1)b) a exercé son dernier emploi assurable au Canada si près des limites d’au moins deux régions qu’il ne peut être déterminé avec certitude dans quelle région il a travaillé, le taux régional de chômage qui lui est applicable est le plus élevé des taux des régions en cause.

(4) Les taux de chômage mensuels désaisonnalisés visés au paragraphe (1) sont fondés sur les taux régionaux de chômage produits par Statistique Canada, lesquels tiennent compte d’une estimation des taux de chômage des Indiens inscrits vivant dans les réserves indiennes.

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