Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparution

[1] L’appelant, monsieur T. R., était présent lors de l’audience tenue par vidéoconférence, le 11 mai 2017.

[2] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») était absente lors de l’audience.

Introduction

[3] Le 19 juillet 2016, l’appelant a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi ayant pris effet le 17 juillet 2016. Il a indiqué avoir travaillé à titre de « gérant/gérante des fruits et légumes – commerce de détail » pour l’employeur Provigo X M. B. (Alimentation M. B. inc.), du 20 novembre 2012 au 11 juillet 2016 inclusivement, après avoir effectué un départ volontaire (pièces GD3-3 à GD3-13).

[4] Le 30 août 2016, la Commission a avisé l’appelant qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations régulières d’assurance-emploi à partir du 10 juillet 2016, car il a volontairement arrêté de travailler chez l’employeur Alimentation M. B. inc., le 16 juillet 2016, sans motif valable au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »), (pièces GD3-21 et GD3-22).

[5] Le 7 septembre 2016, l’appelant a présenté une Demande de révision d’une décision d’assurance-emploi (pièces GD3-23 à GD3-31).

[6] Le 4 octobre 2016, la Commission a avisé l’appelant qu’elle maintenait la décision rendue à son endroit, en date du 30 août 2016, quant à son départ volontaire (pièces GD3-35 et GD3-36).

[7] Le 3 novembre 2016, l’appelant a présenté un Avis d’appel auprès de la Section de l’assurance-emploi de la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal »), (pièces GD2-1 à GD2-25).

[8] Le 21 février 2017, le Tribunal a informé l’employeur, Alimentation M. B.inc., que s’il voulait être ajouté à titre de « personne mise en cause » dans le présent dossier, il devait déposer une demande à cet effet, au plus tard le 8 mars 2017 (pièces GD5-1 et GD5-2). L’employeur n’a pas donné suite à cette lettre.

[9] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. La disponibilité de la vidéoconférence dans la localité où habite l’appelant ;
  2. Ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

Question en litige

[10] Le Tribunal doit déterminer si l’appelant était justifié de quitter volontairement son emploi en vertu des articles 29 et 30 de la Loi.

Preuve

[11] Les éléments de preuve contenus dans le dossier sont les suivants :

  1. Un relevé d’emploi, en date du 26 juillet 2016, indique que l’appelant a travaillé pour l’employeur Alimentation M. B. inc., du 20 novembre 2012 au 16 juillet 2016 inclusivement, et qu’il a cessé de travailler pour cet employeur après avoir effectué un départ volontaire (code E – départ volontaire), (pièce GD3-14) ;
  2. Le 19 août 2016, l’employeur (monsieur M. B., propriétaire) a expliqué que l’appelant a démissionné en lui donnant un préavis d’une semaine. Il a déclaré que les tâches d’assistant gérant effectuées par l’appelant étaient toujours demeurées les mêmes et que celles-ci n’avaient pas changé. L’employeur a expliqué que l’appelant était toujours en désaccord avec son supérieur relativement à la répartition (dispersion) des tâches ou à l’horaire de travail. Il a souligné que l’appelant pensait qu’il en faisait plus que les autres. L’employeur a indiqué que l’appelant ne s’entendait pas bien avec les autres. Il a précisé que l’appelant occupait un poste syndiqué et qu’il a déposé un grief après avoir reçu un avertissement écrit. L’employeur a affirmé que l’appelant ne lui a jamais parlé au sujet des tâches qu’il devait accomplir ou du harcèlement qu’il a dit avoir subi de la part de son superviseur. Il a indiqué qu’il allait transmettre à la Commission la description des tâches de l’appelant (pièce GD3-19) ;
  3. Le 29 septembre 2016, l’employeur (M. B.) a expliqué que l’appelant avait un problème de rendement au travail, qu’il semblait se désintéresser et qu’il a été rencontré à quelques reprises à cet effet. L’employeur a affirmé qu’il existait une mésentente entre l’appelant et un commis (monsieur B.) et que cette mésentente était comme de la jalousie. En réponse à une question relative à l’allégation de l’appelant voulant que l’autre employé ne faisait qu’un type de tâches, alors que l’appelant et les autres commis effectuaient toutes les tâches, l’employeur a expliqué que cette façon de voir était discutable. L’employeur a précisé que l’autre employé en question était un retraité qui travaillait trois jours par semaine à titre de commis, alors que l’appelant était assistant gérant et que ses tâches étaient différentes de celles d’un commis (pièce GD3-33) ;
  4. Le 29 septembre 2016, l’employeur a transmis à la Commission une copie de la lettre de démission que l’appelant lui a adressée, en date du 11 juillet 2016. Dans cette lettre, l’appelant a expliqué à l’employeur qu’une réorganisation l’obligeait à se séparer de lui et que sa dernière journée de travail allait être le 16 juillet 2016 (pièce GD3-34) ;
  5. Le 19 juillet 2016, le 7 septembre 2016 (Demande de révision), l’appelant a transmis à la Commission une copie des documents suivants :
    1. « formule de griefs », en date du 25 avril 2016, dans le but de contester un avis écrit que lui a remis l’employeur, en date du 20 avril 2016 (pièce GD3-17)  ; Lettre du syndicat des Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC – local 500), adressée à l’employeur, en date du 27 avril 2016, pour l’aviser qu’il n’avait pas obtenu un règlement satisfaisant relativement à l’avis écrit donné à l’appelant, en date du 20 avril 2016, et qu’il portait à la deuxième étape la procédure de griefs (pièce GD3-18) ;
    2. « formule de griefs », en date du 25 avril 2016, dans le but de contester un avis écrit que lui a remis l’employeur, en date du 20 avril 2016 (pièce GD3-17 ou GD3-27) ;
    3. Lettre de l’employeur (Provigo) adressée à l’appelant, en date du 20 avril 2016, relativement à son rendement insatisfaisant au travail. Dans cette lettre, l’employeur a indiqué à l’appelant qu’il était très préoccupé par son piètre rendement au travail. L’employeur a indiqué à l’appelant que son travail ne satisfaisait malheureusement pas aux attentes et que ses actions nuisaient au bon fonctionnement du département et du service à la clientèle du Provigo M. B.. L’employeur a précisé à l’appelant que sa prestation de travail était inacceptable et qu’elle ne pouvait être tolérée (pièces GD3-28 et GD3-29) ;
    4. Lettre de l’employeur (Provigo) adressée à l’appelant, en date du 2 juin 2016, relativement à son rôle d’assistant gérant fruits et légumes. Dans cette lettre, l’employeur a indiqué à l’appelant qu’à la suite de la rencontre qu’il a eue avec ce dernier, le mois précédent, il était dans l’obligation de lui remettre une liste des tâches quotidiennes à accomplir dans le cadre de son poste d’assistant gérant. L’employeur a indiqué à l’appelant que le non-respect de ses responsabilités en tant qu’assistant allait entraîner un suivi plus rigoureux sous la forme d’un plan d’encadrement (pièces GD3-30 et GD3-31).
  6. Dans son Avis d’appel présenté le 3 novembre 2016, l’appelant a transmis une copie des documents suivants :
    1. Lettre de démission de l’appelant, adressée à l’employeur, en date du 11 juillet 2016, lui expliquant qu’une réorganisation l’obligeait à se séparer de lui et que sa dernière journée de travail allait être le 16 juillet 2016 (pièce GD2-8 ou GD3-34) ;
    2. Lettre de l’employeur (Provigo) adressée à l’appelant, en date du 20 avril 2016, relativement à son rendement insatisfaisant au travail (pièces GD2-9 et GD2-10 ou pièces GD3-28 et GD3-29) ;
    3. Lettre de l’employeur (Provigo) adressée à l’appelant, en date du 2 juin 2016, relativement à son rôle d’assistant gérant fruits et légumes (pièces GD2-11 et GD2-12 ou pièces GD3-30 et GD3-31) ;
    4. Tableau intitulé « Rapp. [rapport] des ventes par rayon – 29 mai 2016 » indiquant les ventes, par département, au cours de la semaine du 22 mai 2016 au 28 mai 2016 inclusivement. Les calculs effectués par l’appelant, à partir de ce tableau, ont pour but de démontrer que le profit brut des ventes au département des fruits et légumes doit être établi à 15 733,00 $, pour la semaine, selon des ventes de 52 440,56 $, ce qui représente une moyenne de ventes de 312,00 $ l’heure (pièce GD2-13) ;
    5. Horaire hebdomadaire de travail des employés au cours de la semaine du 22 mai 2016 au 28 mai 2016 inclusivement, indiquant que l’appelant a travaillé 40 heures au département des fruits et légumes à titre d’assistant gérant/superviseur (pièce GD2-14) ;
    6. Lettre de l’appelant, en date du 19 juillet 2016, expliquant les motifs de son départ volontaire (pièces GD2-15 et GD2-16 ou pièces GD3-15 et GD3-16) ;
    7. Demande de révision d’une décision d’assurance-emploi (pièces GD2-17 à GD2-19 ou pièces GD3-23 à GD3-26) ;
    8. « formule de griefs », en date du 25 avril 2016, dans le but de contester un avis écrit que lui a remis l’employeur, en date du 20 avril 2016 (pièces GD2-20 et GD2-21 ou pièce GD3-17) ;
    9. Relevé d’emploi, en date du 26 juillet 2016, indiquant que l’appelant a travaillé pour l’employeur Alimentation M. B. inc., du 20 novembre 2012 au 16 juillet 2016 inclusivement (pièce GD2-22 ou pièce GD3-14) ;
    10. Lettre de la Commission (Service Canada), adressée à l’appelant, en date du 2 août 2016, lui indiquant que les documents qu’il lui avait demandés lui avaient été envoyés (pièce GD2-23) ;
    11. Lettre de la Commission (décision en révision), en date du 4 octobre 2016 (pièce GD2-24 ou pièces GD3-35 et GD3-36) ;
    12. Lettre de la Commission (décision initiale), en date du 30 août 2016 (pièce GD2-25 ou pièces GD3-21 et GD3-22).

[12] Les éléments de preuve présentés à l’audience sont les suivants :

  1. L’appelant a rappelé les circonstances l’ayant amené à quitter volontairement l’emploi qu’il avait chez l’employeur Alimentation M. B. inc., le 16 juillet 2016, dans le but de démontrer que son départ volontaire était justifié au sens de la Loi. Il a précisé avoir envoyé un avis à l’employeur, en date du 11 juillet 2016, pour lui signifier qu’il allait cesser de travailler pour lui le 16 juillet 2016 (pièces GD2-8, GD3-3 à GD3-14 et GD3-34) ;
  2. Il a expliqué que lorsqu’il a commencé à travailler pour l’employeur, en novembre 2012, il était assistant gérant. L’appelant a précisé avoir été embauché par monsieur M. B., le propriétaire actuel du magasin d’alimentation Provigo X M. B. (Alimentation M. B. inc.). Il a spécifié que son embauche s’est faite au même moment où M. B. est devenu propriétaire du marché d’alimentation Provigo X M. B. (Alimentation M. B. inc.). L’appelant a expliqué avoir d’abord fait une demande d’emploi auprès de la maison mère de l’entreprise Provigo à X. Il a indiqué qu’après avoir participé à un entretien d’embauche chez l’employeur Provigo, il a ensuite été contacté par le magasin Provigo X (X) où M. B. occupait alors un poste de directeur. Il a précisé avoir ensuite participé à un entretien d’embauche avec M. B.. L’appelant a expliqué qu’environ deux mois après avoir participé à son entretien d’embauche avec M. B., le gérant du magasin Provigo X l’a informé que M. B. voulait qu’il communique avec lui, car celui-ci venait de faire l’acquisition d’un magasin d’alimentation (Provigo X M. B. – Alimentation M. B. inc.). Il a précisé qu’après avoir communiqué avec M. B., celui-ci lui a dit qu’il voulait absolument qu’il vienne travailler à son nouveau magasin (pièces GD2-1 à GD2-25).

Arguments des parties

[13] L’appelant a présenté les observations et les arguments suivants :

  1. Il a soutenu qu’il était justifié, au sens de la Loi, de quitter l’emploi qu’il occupait chez l’employeur. L’appelant a expliqué avoir travaillé pendant trois ans et demi pour cet employeur à titre d’assistant gérant aux fruits et légumes. Il a indiqué qu’entre le moment de son embauche, en novembre 2012, et le moment où des problèmes sont survenus avec un employé, le 16 avril 2016, il n’a pas rencontré de problème particulier dans l’accomplissement de son travail. L’appelant a expliqué qu’avant le 16 avril 2016, il n’a jamais reçu d’avertissement écrit de la part de l’employeur et n’a reçu aucun reproche de sa part. Il a précisé que dans le cadre de ses fonctions d’assistant gérant au département de fruits et des légumes, il devait distribuer les tâches (ex. : dépiler et entreposer la marchandise, faire de l’emballage, enregistrer les quantités et les pertes, etc.) et donner des directives aux commis lorsque le gérant est absent. L’appelant a spécifié que le deuxième étage du magasin d’alimentation est utilisé pour les fonctions suivantes : entreposage des fruits et des légumes, emballage, coupe, réfrigération. Il a souligné qu’il s’agit d’un endroit sombre à partir duquel on ne voir pas l’extérieur. L’appelant a résumé qu’il ne s’agit pas d’un endroit où il est agréable de se trouver. Il a affirmé avoir toujours bien fait son travail. L’appelant a précisé que le gérant du magasin, monsieur Jean Galette, qui était en poste au moment de son embauche, s’est toujours montré satisfait des ventes réalisées au département des fruits et légumes (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-15, GD3-16 et GD3-32) ;
  2. L’appelant a expliqué que ses problèmes chez l’employeur ont débuté le 16 avril 2016 lorsqu’un commis, monsieur B., a refusé de répondre à la directive qu’il lui avait donnée d’aller travailler à la production, au deuxième étage de l’établissement. L’appelant a expliqué que devant le refus d’obtempérer de l’employé en question, il lui a alors dit qu’il allait régler ce problème à l’arrivée de M. B.. Il a souligné que l’employé avait été très négatif dans sa réception, lorsqu’il lui a parlé (pièces GD2-1 à GD2-25) ;
  3. L’appelant a expliqué avoir discuté de cette situation avec le propriétaire, la journée même où l’événement s’est produit avec le commis en question. Il a expliqué que le propriétaire avait donné raison au commis en question. L’appelant a indiqué que lors de sa discussion avec le propriétaire, celui-ci lui a dit que même si le gérant n’était pas présent, c’était ce que ce dernier voulait que l’employé en question fasse (continuer de travailler au premier étage). L’appelant a indiqué avoir expliqué au propriétaire qu’il ne trouvait pas que c’était une façon de faire puisqu’en l’absence du gérant, il pouvait donner des directives.  L’appelant a expliqué avoir constaté que le propriétaire avait pris position en faveur du gérant et qu’il protégeait le commis en question. L’appelant a alors demandé au propriétaire s’il voulait que ce soit lui (l’appelant) qui fasse la production (au deuxième étage) et le propriétaire lui a répondu par l’affirmative. Il a indiqué être ensuite allé travailler à la production au deuxième étage comme le lui avait demandé le propriétaire. L’appelant a souligné que le propriétaire a été surpris de sa réaction. Selon lui, sa crédibilité comme assistant gérant a ainsi été abaissée en raison de la décision prise par la propriétaire à son endroit relativement à l’employé en question. Il a souligné que cet employé est une connaissance du patron, qu’il avait une entente confidentielle avec ce dernier et qu’il le protégeait. L’appelant a affirmé que cet employé ne faisait que placer de la marchandise (étalage) dans le commerce et qu’il avait toujours une tâche légère à accomplir. Il a indiqué que ce commis n’était jamais cédulé lorsque le magasin effectuait la réception de la marchandise. L’appelant a expliqué que même si cet employé était sous sa supervision, il faisait ce qu’il décidait de faire et ne venait jamais le voir pour connaître les directives du patron. Il a affirmé que cet employé n’écoutait pas les directives qu’il lui donnait, en l’absence du gérant. L’appelant a précisé que cet employé n’accomplissait qu’une seule tâche, alors que les autres commis effectuaient toutes les tâches, ce qui rendait leurs tâches plus lourdes (pièces GD2-1 à GD2-25)GD3-15, GD3-16, GD3-20) ;
  4. L’appelant a expliqué avoir discuté avec le représentant du syndicat des employés des propriétaires marchands (TUAC), monsieur N. L., relativement à la situation vécue avec l’employé en question et le propriétaire. Il a soutenu que c’est à partir du moment où il a parlé de cette situation avec le syndicat qu’il a commencé à avoir des problèmes chez l’employeur. L’appelant a précisé que lorsqu’il a expliqué la situation au représentant syndical, celui-ci lui a dit qu’il avait raison et que l’employé en question aurait dû aller faire le travail de production demandé. Il a précisé que le représentant syndical lui a indiqué que le fait qu’il soit allé faire de la production avait fait en sorte de diminuer sa crédibilité comme assistant gérant (pièces GD3-15, GD3-16 et GD3-32) ;
  5. Il a expliqué que quelques jours après l’événement survenu le samedi 16 avril 2016, le représentant syndical est intervenu auprès du propriétaire pour lui signifier que le commis en question devait obéir aux directives qui lui étaient données, en l’absence du gérant, et lui demander de faire en sorte que la situation vécue par l’appelant avec ce commis ne se reproduise plus. L’appelant a affirmé que le propriétaire a acquiescé à la demande du syndicat et a aussi indiqué qu’il allait dire au gérant qu’une telle situation ne se reproduirait plus. L’appelant a expliqué que le propriétaire a été très surpris de l’intervention faite par le représentant syndical. Il a souligné que le propriétaire n’avait pas été à l’aise d’avoir eu à changer sa décision devant le représentant syndical et qu’il l’avait fait à contrecœur (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-15 et GD3-16) ;
  6. L’appelant a affirmé qu’à la suite de l’intervention faite par le syndicat, le propriétaire avait voulu se venger en lui remettant une lettre selon laquelle son rendement était insatisfaisant (lettre du 20 avril 2016 – pièces GD2-9 et GD2-10 ou pièces GD3-28 et GD3-29). Il a relaté avoir été convoqué par l’employeur à une réunion le 20 avril 2016. L’appelant a précisé s’être présenté à cette réunion à laquelle son représentant syndical, N. L., le propriétaire et le gérant assistaient. L’appelant a expliqué qu’au cours de cette réunion, le propriétaire lui a fait des reproches relativement à son rendement au travail. Il a soutenu que les reproches qui lui ont alors été formulés n’avaient aucun rapport avec le travail qu’il effectuait puisque celui-ci était toujours bien fait. L’appelant a souligné qu’au cours de cette réunion, l’employeur n’a rien précisé quant aux reproches qu’il lui a formulés dans la lettre, en date du 20 avril 2016. Selon l’appelant, cette lettre avait déjà été pré établie. Il a également soutenu que le patron a aussi commencé à le harceler en lui donnant des tâches plus lourdes à accomplir (ex. : dépiler des palettes de marchandise tout seul, faire beaucoup de production d’emballage au deuxième étage, s’occuper des poubelles accumulées par le commis en question), (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-15, GD3-16 et GD3-23 à GD3-26, GD3-28 et GD3-29) ;
  7. Il a expliqué qu’après avoir reçu cet avis, un grief a été déposé par son syndicat, en date du 25 avril 2016 (pièces GD2-20 et GD2-21 ou pièce GD3-17). L’appelant a affirmé que cet avis était non mérité. Il a souligné que le grief spécifie que l’avertissement qui lui a été donné par l’employeur était déraisonnable et sans cause juste. L’appelant a expliqué que le syndicat a demandé à l’employeur de retirer l’avertissement écrit qu’il lui avait donné, mais que l’employeur avait refusé de le faire. Il a mentionné que ce grief n’avait pas été entendu ;
  8. L’appelant a relaté qu’à la suite du dépôt de son grief en avril 2016, lors d’une discussion informelle qu’il a eu avec le propriétaire concernant l’accomplissement de son travail, celui-ci lui a dit : « Si t’es pas content, va-t’en. [...] Pourquoi tu restes? ». L’appelant a indiqué qu’il avait demandé au propriétaire s’il serait content qu’une personne fasse la production au deuxième étage à longueur de journée ;
  9. Il a expliqué avoir été convoqué une seconde fois par l’employeur, en date du 3 juin 2016. L’appelant a indiqué avoir participé à cette rencontre, au cours de laquelle le propriétaire, le gérant et la représentante syndicale des employés du magasin, madame  V. S., étaient présents. Il a précisé que lors de cette rencontre, l’employeur lui a remis un avis relatif à son rendement au travail (lettre en date du 2 juin 2016 – pièces GD2-11 et GD2-12 ou pièces GD3-30 et GD3-31). L’appelant a expliqué que l’employeur ne lui a pas mentionné quelles étaient les lacunes qui lui ont été reprochées dans la lettre que celui-ci lui a adressée en date du 2 juin 2016. Il a expliqué être en désaccord avec le contenu de cette lettre. L’appelant a souligné que même si dans cette lettre, l’employeur fait référence à une rencontre ayant eu lieu le mois précédent, il n’y a pas eu de rencontre avec celui-ci en mai 2016 (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-23 à GD3-26 et GD3-30 à GD3-32) ;
  10. L’appelant a indiqué que lors de la rencontre du 3 juin 2016, l’employeur lui a reproché que ses tâches n’étaient pas bien faites, que son travail présentait des lacunes et que son rendement était pauvre. Il a expliqué que la seule façon de faire comprendre à l’employeur que les reproches que celui-ci lui a formulés au sujet de son rendement n’étaient pas justifiés avait été de lui présenter des calculs relatifs aux ventes effectuées par le département où il travaillait. L’appelant a précisé que le propriétaire lui a indiqué qu’il voulait avoir des ventes représentant 250,00 $ par employé, par heure. Il a expliqué avoir calculé que son rendement au cours de la semaine du 22 mai 2016 au 28 mai 2016 avait été de 312,00 $ l’heure (pièces GD2-13 et GD2-14). À l’aide d’un tableau (« Rapp. [rapport] des ventes par rayon – 29 mai 2016 » – pièce GD2-13), l’appelant a expliqué qu’en fonction des calculs qu’il a effectués, il avait été en mesure de démontrer au propriétaire que ce rendement dépassait ce qu’il demandait. L’appelant a aussi précisé que globalement, au cours de la semaine du 22 mai 2016 au 28 mai 2016, les ventes au département de fruits et légumes s’étaient élevées à 52 440,16 $, ce qui représentait un profit qu’il a estimé à 15 733,00 $ soit, environ 30 % des ventes. Il a souligné qu’avec un total de 168 heures (sept jours) personne, cela représentait des ventes d’environ 312,00 $ par heure. L’appelant a demandé comment le propriétaire pouvait affirmer que son rendement était pauvre, alors que les chiffres démontrent le contraire. Il a expliqué avoir expliqué cette situation à son syndicat et que celui-ci lui a répondu que la direction était « dans les patates ». L’appelant a soutenu que le propriétaire ne savait pas ce qu’il lui reprochait et que le but de la rencontre pour laquelle il avait été convoqué avait pour objectif de le harceler, une autre fois. Il a expliqué que le propriétaire et le gérant lui ont aussi dit que « les fleurs et la commande » n’étaient pas bien faites. Sur ce point, l’appelant a précisé que chaque semaine, l’employeur recevait des fleurs livrées sur des chariots (« racks ») sur roulettes. Il a expliqué avoir reçu des reproches de la part de l’employeur parce que les fleurs présentées aux clients étaient sèches ou endommagées au cours d’une fin de semaine où il n’avait pas travaillé. L’appelant a souligné que son rôle consistait à sortir les fleurs du magasin pour les présenter à l’extérieur et qu’il a assumé correctement cette responsabilité. Il a affirmé que lors de la rencontre tenue le 3 juin 2016, les gestes du gérant avaient été intimidants. L’appelant a expliqué qu’il avait trouvé agressive l’attitude de ce dernier, car il gesticulait beaucoup avec ses mains lorsqu’il lui a fait des reproches relativement à son travail. Il a dit avoir signalé à la représentante syndicale la façon de réagir du gérant, mais que par la suite, le gérant s’était calmé. L’appelant a souligné avoir demandé l’avis de la représentante syndicale du magasin (V. S. qui avait assisté à la rencontre du 3 juin 2016, et que celle-ci lui a dit que l’employeur s’acharnait sur lui (pièces GD2-1 à GD2-25) ;
  11. Il a précisé qu’à la suite de la rencontre tenue avec l’employeur, en date du 3 juin 2016, il n’y a pas eu de contestation, par voie de grief, du deuxième avis (deuxième avertissement) qu’il avait reçu au sujet de son rendement. Il n’y a pas eu de suivi de la part du syndicat à cet effet. L’appelant a expliqué avoir perdu confiance en son syndicat ainsi qu’à l’endroit de son employeur (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-20, GD3-32) ;   
  12. L’appelant a expliqué qu’à la suite de la rencontre du 3 juin 2016, il a effectué des démarches auprès de son syndicat afin de pouvoir être transféré dans un autre magasin, mais qu’il n’était pas possible d’obtenir ce transfert. Il a expliqué que le représentant lui a indiqué que son transfert dans un autre magasin ne pouvait pas se faire. L’appelant a souligné qu’il n’y avait pas eu d’initiative de la part du représentant syndical et que celui-ci n’était plus d’attaque. Il a souligné que dans d’autres cas, des transferts avaient été possibles, mais que le représentant ne lui avait pas indiqué pourquoi cela n’était pas possible dans son cas (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-20, GD3-32) ;
  13. Il a relaté qu’un autre événement est survenu le 23 juin 2016, lorsque le gérant lui a donné avertissement verbal pour ne pas avoir programmé les spéciaux du magasin (programmation des spéciaux à l’ordinateur – SPLAN), alors qu’il n’a jamais reçu la directive à cet effet. L’appelant a expliqué que dans l’après-midi du 23 juin 2016, vers 15 h 00, alors que la commande de fruits et de légumes était en retard, le gérant lui a dit qu’il avait oublié de programmer les spéciaux (SPLAN) et qu’en guise de punition pour avoir fait cet oubli, il allait devoir dépiler les palettes de marchandise (fruits et légumes) qui allaient être livrées dans l’après-midi, cette journée-là. Il a indiqué avoir été abasourdi par cette demande, à laquelle il a acquiescé, puisque cette responsabilité de programmer les spéciaux incombe au gérant. L’appelant a expliqué qu’il a la responsabilité de programmer les spéciaux en l’absence du gérant, mais que celui-ci était présent lorsqu’il lui a fait ce reproche. Il a soutenu que la personne qui devait programmer les spéciaux avait dû avoir oublié de le faire et le gérant voulait lui faire passer cet oubli sur son dos. Selon l’appelant, le gérant avait eu l’intention de le surcharger de travail et cela était une autre façon de l’intimider. Il a précisé que c’était pour cette raison qu’il avait parlé d’intimidation de la part du gérant (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-20, GD3-23 à GD3-26) ;
  14. En ce qui concerne l’affirmation qu’il a faite selon laquelle le gérant n’arrêtait pas de changer d’idée quant aux directives, l’appelant a précisé qu’il s’agissait d'un événement s’étant produit dans les jours qui ont suivi l’événement survenu le 23 juin 2016, et non la veille, comme indiqué dans une déclaration en date du 22 août 2016 (pièce GD3-20). Il a précisé que le lors de cet événement, le gérant lui avait d’abord demandé de travailler au premier étage pour placer la marchandise sur les tablettes et avait demandé à un autre employé d’aller dépiler la commande au deuxième étage. L’appelant a expliqué que lorsque la commande a été livrée, le gérant a alors changé sa directive pour lui demander d’aller dépiler la commande reçue, pendant que l’autre employé à qui cette tâche avait d’abord été assignée plaçait la marchandise sur les tablettes. Il a souligné qu’il s’agissait d’un autre événement qui avait eu pour conséquence d’aggraver la situation et de mettre de l’huile sur le feu (pièce GD3-20) ;
  15. Il a expliqué avoir rencontré les représentants syndicaux (V. S. et N. L.), en date du 5 juillet 2016, pour leur demander de discuter avec le propriétaire afin d’établir une rotation des tâches avec le commis qui ne voulait pas suivre les directives (monsieur B.) qu’il lui donnait à titre d’assistant gérant. L’appelant a expliqué que les représentants syndicaux lui ont indiqué que l’employeur avait refusé cette demande de rotation des tâches. Les représentants lui ont alors dit que l’employeur considérait qu’il travaillait mieux au deuxième étage (production), au dépilage de la marchandise, qu’au niveau du plancher ou de l’aire des ventes. Il a précisé que les représentants lui ont indiqué que le commis en question allait demeurer dans l’aire de travail du premier étage. Selon l’appelant, il s’agissait de discrimination faite à son endroit par l’employeur. Il a souligné que l’affirmation du propriétaire était complètement fausse et démontrait une absence de collaboration de sa part. Selon l’appelant, la décision du propriétaire à son endroit faisait en sorte de diminuer davantage sa crédibilité à titre d’assistant gérant, comparativement à un commis, ami du patron. Il a fait valoir qu’il a acquis une expérience de 25 ans à titre de gérant des fruits et des légumes et qu’il sait en quoi consiste ce travail. L’appelant a précisé avoir déjà été commis et assistant gérant dans le passé et que jamais on ne lui avait dit qu’il travaillait mieux à faire du travail de production comme celui que l’employeur voulait qu’il fasse au deuxième étage. Il a soutenu que cela aurait été à l’avantage de l’employeur s’il avait travaillé au premier étage et que celui-ci aurait vu les profits s’améliorer. L’appelant a expliqué que dans le magasin où il a travaillé, les ventes se faisaient facilement, car il rejoint une clientèle généralement bien nantie. Il a affirmé qu’avec l’expérience qu’il a acquise au fil du temps et à titre d’assistant gérant, il aurait été en mesure de réduire les pertes du magasin en faisant moins d’erreurs dans les achats, ce qui aurait permis d’augmenter ainsi les profits. L’appelant a expliqué qu’à titre d’assistant gérant, il doit travailler dans l’aire de vente (plancher) afin de voir comment les choses se passent et faire en sorte d’améliorer la situation et déterminer quels produits mettre en valeur ou en priorité pour améliorer les profits de l’entreprise. Il a expliqué qu’il ne travaillait presque jamais sur le plancher et qu’il avait surtout pour tâches de couper des fruits et de préparer des salades. L’appelant a souligné qu’en trois ans et demi, il a toujours effectué le travail demandé et qu’il était plus souvent que d’autres employés, à travailler au deuxième étage. Il a souligné que depuis son embauche à titre d’assistant gérant, il n’a jamais reçu de description de tâches de la part de l’employeur (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-32) ;
  16. L’appelant a soutenu que le propriétaire lui avait fait perdre sa crédibilité devant un commis, qu’il avait contrevenu à la convention collective, qu’il ne respectait pas les normes du travail, qu’il n’avait pas collaboré et qu’il avait utilisé des tactiques de harcèlement physique et psychologique à son endroit. Il a expliqué que lors d’une conversation téléphonique avec un agent de la Commission (Service Canada), le propriétaire avait porté atteinte à sa réputation et avait fait de la discrimination à son endroit en affirmant qu’il ne s’entendait pas bien avec les gens. Selon l’appelant, il s’agit d’un abus de pouvoir de la part du propriétaire et que celui-ci a agi par vengeance (pièces GD2-1 à GD2-25) ;
  17. Il a soutenu que le propriétaire et le gérant s’acharnaient sur lui et que la situation vécue au travail était intolérable. L’appelant a expliqué que dans ce contexte de travail hostile, il a pris la décision de quitter son emploi. Il a expliqué que son expérience à titre d’assistant gérant n’a jamais été prise en considération par l’employeur. L’appelant a souligné que d’avoir à dépiler plusieurs palettes de marchandise chaque jour l’épuisait et affectait sa santé. Il a fait valoir qu’il a effectué son travail dans un lieu malsain. Selon lui, personne ne travaillerait dans un endroit où l’employeur lui remettrait des griefs (avertissements) non mérités, comme cela a été son cas. L’appelant a affirmé avoir travaillé avec un patron qui ne suivait pas les normes et lui a fait des reproches intimidants. Il a demandé comment une personne pourrait continuer d’occuper son emploi dans ces conditions. L’appelant a soutenu qu’il n’y avait aucune chance que la situation s’améliore chez cet employeur et qu’elle n’avait fait que se dégrader. Il a affirmé qu’il n’avait aucun autre choix que de s’en aller (pièces GD3-15, GD3-16 et GD3-32) ;
  18. L’appelant a expliqué avoir remis une lettre à l’employeur, en date du 11 juillet 2016, pour lui annoncer qu’il allait mettre fin à ses fonctions d’assistant gérant aux fruits et légumes, en date du 16 juillet 2016 (pièce GD3-34). Il a affirmé qu’après avoir remis cette lettre au propriétaire, celui-ci est demeuré muet et est ensuite parti. L’appelant a affirmé que le 13 juillet 2016, un livreur est venu le voir pour lui dire que le propriétaire l’avait envoyé le rencontrer pour lui dire « bye ». Il a fait valoir qu’il s’agissait d’un autre geste irresponsable de la part du propriétaire démontrant que celui-ci voulait son départ, ce qui n’est pas comme un départ volontaire (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-15, GD3-16 et GD3-32) ;
  19. Il a expliqué avoir quitté son emploi, en raison de harcèlement subi au travail de la part de son employeur. L’appelant a fait valoir que le harcèlement est un acte discriminatoire, en vertu de l’alinéa 14(1)c) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (partie I – motifs de distinction illicite – harcèlement) qui prévoit les dispositions suivantes : « [...] Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de harceler un individu : [...] c) en matière d’emploi » (pièces GD3-23 à GD3-26). Il a soutenu qu’en fonction des preuves de harcèlement qu’il a présentées, démontrant la discrimination dont il a été victime, et en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission a l’obligation de lui verser des prestations, d’autant plus qu’il a versé des cotisations à l’assurance-emploi (pièces GD2-1 à GD2-25, GD3-15, GD3-16, GD3-20 et GD3-23 à GD3-26) ;
  20. L’appelant a expliqué ne pas avoir attendu d’avoir trouvé un autre emploi, avant de quitter celui qu’il occupait. Il a indiqué avoir effectué des recherches d’emploi, visuellement, et qu’il recherchait un poste de gérant de magasin. Il a précisé avoir postulé auprès d’un employeur potentiel, mais que sa candidature n’a pas été retenue. L’appelant a aussi indiqué qu’il voulait essayer de travailler dans un autre domaine et s’être inscrit à un cours pour être agent de sécurité (pièces GD3-20 et GD3-32).

[14] La Commission a présenté les observations et arguments suivants :

  1. Elle a expliqué que le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit une exclusion lorsque le prestataire quitte volontairement son emploi sans motif valable. La Commission a précisé que le test à appliquer, en tenant compte de toutes les circonstances, est de savoir si l’appelant avait une autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi au moment où il l’a fait (pièce GD4-6) ;
  2. La Commission a précisé que puisque l’appelant a pris l’initiative de son départ, la situation était considérée comme un cas de départ volontaire (pièce GD4-6) ;
  3. Elle a évalué que l’appelant n’a pas tenté de résoudre les conflits de travail qu’il avait avec un commis (monsieur B.). La Commission a dit concéder que l’appelant soit allé voir son employeur pour rapporter les refus du commis d’obéir à ses directives, mais que devant le manque de collaboration de son employeur, il avait eu recours à son syndicat pour tenter de désamorcer la mésentente. Elle a indiqué que l’appelant a communiqué avec son syndicat, mais qu’il a pris la décision de ne pas pousser plus loin (pièces GD2-3 et GD4-6) ;
  4. La Commission a émis l’avis qu’aucun événement particulier n’était survenu qui avait fait en sorte que l’appelant avait dû quitter son emploi sur-le-champ. Elle a expliqué que bien qu’elle pouvait comprendre que l’appelant était insatisfait de la façon dont il était traité, il n’avait aucune urgence à quitter son emploi et aurait pu le conserver en attendant de trouver un autre emploi lui apportant meilleure satisfaction. Selon la Commission, malgré tous les faits allégués, l’appelant n’a pas démontré que les circonstances au travail étaient à ce point difficiles, qu’il ne pouvait attendre et qu’il devait quitter son emploi sur-le-champ. Elle a émis l’avis qu’une solution raisonnable, plutôt que le départ volontaire, aurait été que l’appelant s’assure d’obtenir un autre emploi avant de quitter celui qu’il avait. La Commission a fait valoir que la personne qui quitte volontairement son emploi doit démontrer que son départ constituait la seule solution raisonnable en raison des circonstances. Elle a soutenu que malgré qu’il existait une situation de mésentente entre le l’appelant et un commis ainsi qu’avec le gérant, elle ne justifie pas à elle seule d’avoir quitté l’emploi (pièces GD4-6 et GD4-7) ;
  5. Elle a émis l’avis que l’appelant n’a pas démontré avoir usé de toutes les solutions raisonnables qui s’offraient à lui avant de prendre la décision finale de quitter son emploi. Selon la Commission, bien que les motifs invoqués soient louables, ils démontrent de l’insatisfaction vécue par l’appelant plutôt que du harcèlement. Elle a soutenu que rien n’indique qu’il y avait urgence pour lui de quitter son emploi sans s’assurer d’un autre emploi au préalable (pièce GD4-7)  ;
  6. La Commission a conclu que malgré toutes les raisons invoquées par l’appelant, celui-ci n’a pas démontré qu’il était justifié de quitter son emploi au moment où il l’a fait. La Commission a soutenu que sa décision est conforme à la législation et appuyée par la jurisprudence (White, 2011 CAF 190), (pièce GD4-7).

Analyse

[15] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[16] Dans la cause Rena-Astronomo (A-141-97), qui a confirmé le principe établi dans l’affaire Tanguay (A-1458-84) à l’effet qu’il incombe au prestataire ayant volontairement quitté son emploi, de prouver qu’il n’existait aucune autre solution raisonnable de quitter son emploi à ce moment-là, la Cour d’appel fédérale (la « Cour ») a fait le rappel suivant : « Compte tenu de toutes les circonstances, le critère à appliquer se rapporte à la question de savoir si, selon la prépondérance des probabilités, le départ du prestataire constitue la seule solution raisonnable. ».

[17] Ce principe a été confirmé dans d’autres décisions de la Cour (Peace, 2004 CAF 56, Landry, A-1210-92).

[18] De plus, le mot « justification », tel qu’il est utilisé aux paragraphes 29c) et 30(1) de la Loi, a été interprété par la Cour dans la cause Tanguay c. C.A-C.(A-1458-84 (2 octobre 1985); 68 N.R. 154) de la manière suivante :

En effet, le mot [justification], dans le contexte où il est employé, n’est pas synonyme de « raison » ou « motif ». L’employé qui a gagné le gros lot ou hérité d’une fortune peut avoir une excellente raison de quitter son emploi; il n’est pourtant pas justifié de le faire au sens du paragraphe 41(1). Ce paragraphe est une disposition importante d’une loi qui établit un système d’assurance contre le chômage et ses termes doivent être interprétés en ayant égard à l’obligation qui pèse normalement sur tout assuré de ne pas provoquer délibérément la réalisation du risque. Pour être plus précis, je dirais que l’employé qui a volontairement quitté son emploi et n’en a pas trouvé un autre s’est placé délibérément dans une situation lui permettant de forcer des tiers à lui payer tes (sic) [des] prestations d’assurance-chômage. Il n’est justifié d’avoir agi ainsi que s’il existait, au moment où il a quitté, des circonstances qui l’excusent d’avoir ainsi pris le risque de faire supporter par d’autres le fardeau de son chômage.

[19] La Cour a réaffirmé le principe selon lequel lorsque le prestataire s’est acquitté du fardeau de prouver qu’il n’avait pas d’autres solutions raisonnables que celle de quitter son emploi au moment où il l’a fait, le critère du motif valable en vertu du paragraphe 29c) de la Loi a été rencontré (White, 2011 CAF 190, Taiga Works c. Lau, 2008 CAF 275).

[20] Dans l’affaire Smith (A-875-96), la Cour a apporté la précision suivante :

Le paragraphe 28(4) de la Loi permet de comprendre dans une certaine mesure le sens du mot « justification » lorsqu’un employé quitte volontairement son emploi. Cette disposition prévoit l’examen de « toutes les circonstances », notamment celles qui y sont énumérées, de façon qu’il soit possible de déterminer si « son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas ». L’examen des circonstances énumérées montre qu’il s’agit de situations indépendantes de la volonté du prestataire ou de situations auxquelles le prestataire n’y est pour rien. Cela s’applique à toutes les catégories de circonstances, mais il importe de noter en particulier l’alinéa j) qui se lit comme suit : j) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur ; […]

[21] Un prestataire est justifié de quitter volontairement son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, dont celles énumérées au paragraphe 29c) de la Loi, son départ constitue la seule solution raisonnable dans son cas.

[22] Dans le cas présent, le Tribunal considère que la décision prise par l’appelant de quitter l’emploi qu’il occupait chez l’employeur Alimentation M. B. inc. doit être considérée, compte tenu de toutes les circonstances, comme la seule solution raisonnable dans cette situation (White, 2011 CAF 190, Rena-Astronomo, A-141-97, Tanguay, A-1458-84, Peace, 2004 CAF 56, Landry, A-1210-92, Smith, A-875-96).

[23] Le Tribunal estime que le départ volontaire de l’appelant était justifié par l’existence de « relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur », tel que le précise l’alinéa 29c)(x) de la Loi, et en raison d’une « incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi », en vertu de l’alinéa 29c)(xiii) de la Loi.

[24] Les alinéas 29c)(x) et 29c)(xiii) prévoient spécifiquement que :

[…] le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas : […] (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur […] (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi [...].

[25] Le Tribunal accorde davantage de crédibilité au témoignage de l’appelant qu’aux déclarations de l’employeur.

[26] Le Tribunal considère que le témoignage rendu par l’appelant au cours de l’audience a permis d’avoir un portrait complet et très bien circonstancié quant aux raisons ayant mené à son départ volontaire. Son témoignage était très détaillé et exempt de contradictions.

Déclarations contradictoires de l’employeur

[27] Le Tribunal trouve contradictoires les explications données par l’employeur quant aux circonstances ayant mené au départ volontaire de l’appelant.

[28] Dans une déclaration faite en date du 19 août 2016, l’employeur a à la fois affirmé que l’appelant ne lui a jamais parlé au sujet des tâches qu’il devait accomplir, tout en indiquant dans cette même déclaration, que celui-ci pensait qu’il en faisait plus que les autres et qu’il était toujours en désaccord avec son supérieur relativement à la répartition des tâches ou à l’horaire de travail. L’employeur a aussi précisé que l’appelant ne s’entendait pas bien avec les autres (pièce GD3-19).

[29] Dans la déclaration faite en date du 29 septembre 2016, l’employeur a indiqué qu’il y avait une mésentente entre l’appelant et un commis (pièce GD3-33). L’employeur n’a pas fait état de ce problème dans la déclaration qu’il a faite le 19 septembre 2016.

[30] L’employeur a également indiqué dans sa déclaration du 29 septembre 2016 que l’appelant avait un problème de rendement, qu’il semblait se désintéresser de son travail et qu’il avait été rencontré à quelques reprises à cet effet (pièce GD3-33). L’employeur n’a pas fait état de cette situation dans sa déclaration en date du 19 août 2016.

[31] Le Tribunal souligne qu’aucune des déclarations de l’employeur ne fait référence aux deux avertissements écrits qu’il a remis à l’appelant relativement à son rendement insatisfaisant au travail, l’un en date du 20 avril 2016 (pièces GD2-9 et GD2-10 ou pièces GD3-28 et GD3-29) et l’autre, en date du 2 juin 2016 (pièces GD2-11 et GD2-12 ou pièces GD3-30 et GD3-31).

[32] L’employeur n’a donné aucun exemple concret quant aux reproches qu’il a formulés dans les deux lettres en question. Aucune de ces lettres ne fait mention de la mésentente existant entre l’appelant et un employé, une situation qu’a pourtant évoquée l’employeur pour expliquer le départ volontaire de l’appelant (pièce GD3-33).

[33] Alors que l’employeur a affirmé dans sa déclaration, en date du 19 août 2016, que l’appelant ne lui a jamais parlé au sujet des tâches qu’il devait accomplir, un grief a été déposé par le syndicat représentant l’appelant plusieurs mois auparavant soit, le 25 avril 2016, relativement à la lettre d’avertissement du 20 avril 2016. L’employeur n’a fourni aucun commentaire à cet effet.

[34] Dans sa déclaration du 19 août 2016, l’employeur a aussi « promis » à la Commission qu’il allait lui transmettre la description de tâches de l’appelant, mais aucun document de cette nature n’apparaît au dossier (pièce GD3-19).

Relations conflictuelles et incitation indue auprès de l’appelant pour qu’il quitte son emploi

[35] Le Tribunal considère que l’appelant a démontré, à l’aide de plusieurs exemples concrets et détaillés, l’existence d’une relation antagoniste entre celui-ci et l’employeur, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable.

[36] L’appelant a également démontré que l’employeur l’a indûment incité à quitter volontairement son emploi en lui formulant de commentaires à cet effet.

[37] Le Tribunal est d’avis que la situation vécue par l’appelant dans le cadre de son travail d’assistant gérant s’est envenimée au point où celui-ci n’avait plus d’autre choix que de quitter volontairement son emploi.

[38] Sans que l’employeur ne présente d’exemples concrets à cet effet, il a critiqué très sévèrement la qualité du travail accompli par l’appelant dans deux lettres qu’il lui a transmises le 20 avril 2016 et le 3 juin 2016. Ces deux lettres ne font référence à aucun fait précis ayant pu mettre en cause la qualité du travail accompli par l’appelant.

[39] Lors de l’audience, l’appelant a précisé avoir travaillé pendant trois ans et demi comme assistant gérant aux fruits et légumes et n’avoir rencontré aucun problème particulier dans l’accomplissement de son travail jusqu’au 16 avril 2016, soit au moment où un employé avait refusé d’obtempérer à la directive qu’il lui avait donnée d’aller faire du travail de production au deuxième étage du magasin. L’appelant a indiqué n’avoir jamais reçu d’avertissements écrits de la part de son employeur au sujet de la qualité de son travail avant cet événement.

[40] La preuve au dossier et le témoignage de l’appelant indiquent que c’est à la suite de l’intervention de ce dernier auprès du syndicat des employés, relativement à l’événement survenu avec un employé le 16 avril 2016, que la situation s’est par la suite irrémédiablement détériorée avec l’employeur.

[41] L’intervention faite par le syndicat auprès du propriétaire, à la suite de l’événement du 16 avril 2016, avait pour but de lui signifier que l’appelant, à titre d’assistant gérant, avait l’autorité requise de donner des directives à un employé, en l’absence du gérant.

[42] Quelques jours après cette intervention soit, le 20 avril 2016, l’employeur a rencontré l’appelant pour lui signifier que son rendement au travail était insatisfaisant et lui a remis une lettre à cet effet (pièces GD2-9 et GD2-10 ou pièces GD3-28 et GD3-29).

[43] Dans cette lettre, en date du 20 avril 2016, et dont l’objet est « rendement insatisfaisant au travail », l’employeur a écrit :

[...] Depuis quelques temps, nous sommes très préoccupés de votre piètre rendement au travail. [...] Votre travail ne satisfait malheureusement pas aux attentes et vos actions nuisent au bon fonctionnement du département et du service à la clientèle [...] Votre prestation de travail est inacceptable et ne peut être tolérée. Cette lettre constitue un avertissement écrit à l’effet qu’il est nécessaire pour vous d’améliorer votre rendement [...] (pièces GD2-9 et GD2-10 ou pièces GD3-28 et GD3-29).

[44] Cette lettre mentionne aussi que l’appelant aurait été irrespectueux avec les clients, qu’il prenait ses périodes de pause et de dîners tardivement et qu’il n’aurait pas respecté les tâches qui lui étaient assignées. Toutefois, l’employeur n’a précisé aucun fait ou événement spécifique (ex. : dates, personnes impliquées, témoignages) en regard des reproches formulés à l’appelant relativement à son rendement.

[45] Le 25 avril 2016, après avoir reçu la lettre de l’employeur, en date du 20 avril 2016, l’appelant a contesté, par voie de grief, l’avertissement qu’il a reçu de l’employeur (pièces GD2-20 et GD2-21 ou pièce GD3-17).

[46] L’appelant a aussi affirmé qu’à la suite de son intervention auprès de l’employeur, le 16 avril 2016, celui-ci a commencé à le harceler en lui donnant des tâches plus lourdes (ex. : dépiler seul des palettes de marchandise, faire beaucoup de production d’emballage au deuxième étage).

[47] Le Tribunal tient également pour avéré le témoignage de l’appelant selon lequel, à la suite de la rencontre tenue le 20 avril 2016, lors d’une discussion qu’il a eue avec le propriétaire, au sujet de l’accomplissement du travail, ce dernier lui a dit : « Si t’es pas content, va-t’en. [...] Pourquoi tu restes? ».

[48] Dans une autre lettre adressée à l’appelant, en date du 2 juin 2016, l’employeur lui a donné les commentaires suivants :

[...] nous sommes dans l’obligation de vous remettre à nouveau une liste des tâches quotidiennes à accomplir dans le cadre de votre poste d’assistant-gérant. [...] nous constatons que les lacunes dans la réalisation de votre travail persistent. Nous vous rappelons que votre devoir en tant qu’assistant gérant est de remplacer le gérant en exécutant l’ensemble de ses tâches en son absence ou non [...] (pièces GD2-11 et GD2-12 ou pièces GD3-30 et GD3-31).

[49] Outre le fait de donner une liste des tâches et des responsabilités qui incombent à l’appelant, cette lettre ne fait aucunement mention de lacunes spécifiques de la part de ce dernier.

[50] Aucune comparaison ne peut en outre être effectuée entre les tâches que devait accomplir l’appelant, tel qu’énumérées dans la lettre de l’employeur, en date du 2 juin 2016, et celles qui lui incombaient en vertu de la description des tâches de ce dernier.

[51] L’appelant a précisé n’avoir jamais reçu de description de tâches au moment de son embauche. Malgré l’indication donnée en ce sens par l’employeur, celui-ci n’a pas transmis à la Commission un document tenant lieu de « description de tâches » (pièce GD3-19).

[52] Le témoignage de l’appelant, lequel n’a pas été contredit, indique aussi que le 23 juin 2016, l’appelant s’est faussement fait reproché de ne pas avoir programmé les spéciaux et qu’en guise de mesure disciplinaire (punition), il avait été assigné à dépiler seul, plusieurs palettes de marchandise (fruits et légumes).

[53] L’appelant a aussi indiqué que dans les jours qui ont suivi l’événement du 23 juin 2016, il a dû répondre à des directives contradictoires de la part de son patron. Celui-ci lui a en effet demandé d’aller travailler à la production au deuxième étage, alors qu’il venait de l’assigner à faire du travail sur le plancher (au premier étage).

Recherche de solutions

[54] Le Tribunal considère que l’appelant a tenté, par plusieurs moyens, et ce, pendant plusieurs mois à partir du 16 avril 2016, de trouver une solution relativement aux problèmes rencontrés dans l’accomplissement de son travail, mais que ses efforts se sont révélés infructueux.

[55] Lorsqu’un problème est survenu avec un employé, le 16 avril 2016, l’appelant est d’abord intervenu auprès du propriétaire afin que son autorité soit rétablie auprès de l’employé en question, mais sans succès. Le témoignage de l’appelant indique plutôt que l’appelant a été désavoué par le propriétaire et qu’il a dû, en outre, aller faire du travail de production au deuxième étage du magasin soit, le travail que l’employé en question avait refusé de faire.

[56] L’appelant est ensuite intervenu auprès de son syndicat, quelques jours après l’événement survenu le16 avril 2016, dans le but de rétablir son autorité auprès de l’employé qui avait refusé d’obtempérer à la directive qu’il lui avait donnée d’aller travailler à la production au deuxième étage du magasin. Tout indique que cette intervention n’a pas été d’un grand secours pour l’appelant afin que son autorité soit rétablie. L’appelant a reçu une lettre d’avertissement de la part de l’employeur quelques jours après cette intervention.

[57] À la suite de la lettre d’avertissement qu’il a reçue, en date du 20 avril 2016, l’appelant a également eu recours à son syndicat afin qu’un grief soit déposé pour contester la mesure prise par l’employeur (pièces GD2-20 et GD2-21 ou pièce GD3-17).

[58] Dans ce contexte, le Tribunal ne retient pas l’argumentation de la Commission selon laquelle l’appelant n’a pas tenté de résoudre les conflits de travail qu’il avait avec un commis, qu’il avait eu recours à son syndicat pour tenter de désamorcer la mésentente, mais qu’il avait pris la décision de ne pas pousser plus loin (pièce GD4-6). L’appelant a pris plusieurs mesures auprès de l’employeur et auprès du syndicat pour trouver une solution au problème rencontré avec l’employé en question.

[59] Il ressort de la preuve au dossier et du témoignage de l’appelant que les démarches qu’il a effectuées auprès de l’employeur et de son syndicat se sont plutôt retournées contre lui par la suite. La Commission n’a pas démontré, à partir de la preuve recueillie auprès de l’employeur, qu’il y avait une mésentente entre le commis en question et l’appelant.

[60] La Commission a toutefois reconnu qu’il y avait une mésentente entre l’appelant et le gérant (pièce GD4-7).

[61] L’appelant a également tenté de trouver une solution à la suite de la rencontre à laquelle il a participé, le 3 juin 2016, au cours de laquelle l’employeur lui a remis une lettre l’avisant qu’il y avait des lacunes dans la réalisation de son travail. Lors de cette rencontre, l’appelant était accompagné par la représentante syndicale des employés du magasin.

[62] Même si dans ce cas, le syndicat n’a pas déposé un autre grief à la suite de cette rencontre et de la remise d’une deuxième lettre d’avertissement à l’appelant, celui-ci a donné une suite aux allégations de l’employeur selon lesquelles son rendement était insatisfaisant.

[63] L’appelant a ainsi effectué une autre démarche afin de trouver une solution relativement aux reproches qui lui ont à nouveau été formulés par l’employeur au sujet de son rendement au travail. L’appelant a souligné, au cours de l’audience, que c’était le moyen qu’il avait trouvé afin de démontrer que les reproches de l’employeur n’étaient pas justifiés à son endroit.

[64] À l’aide d’un tableau « Rapp. [rapport] des ventes par rayon – 29 mai 2016 » et des calculs qu’il a effectués, l’appelant a pu réfuter les conclusions de l’employeur voulant que les ventes qu’il réalisait étaient insatisfaisantes. Sur ce point, l’appelant a souligné que les calculs qu’il a effectués démontrent qu’il a réalisé des ventes représentant 312,00 $ l’heure dans son département (fruits et légumes), alors que l’employeur lui a indiqué que son objectif était d’effectuer des ventes totalisant 250,00 $ (pièce GD2-13).

[65] Au début de juillet 2016, l’appelant a également fait une demande de transfert à l’employeur pour aller travailler dans un autre magasin d’alimentation. Il a de nouveau fait appel à son syndicat dans cette démarche, mais n’a pas été en mesure d’obtenir le transfert demandé.

[66] Le Tribunal ne peut souscrire à l’analyse de la Commission voulant qu’aucun événement particulier n’était survenu qui avait fait en sorte que l’appelant avait dû quitter son emploi sur-le-champ (pièces GD4-6 et GD4-7).

[67] Le Tribunal est d’avis que plusieurs événements se sont succédé à la suite de l’intervention faite par l’appelant auprès de l’employeur et celle effectuée par son syndicat, relativement au problème survenu avec un employé, le 16 avril 2016.

[68] Le Tribunal considère que l’appelant n’a pas quitté volontairement son emploi, « sur-le-champ », comme l’a affirmé la Commission.

[69] Le Tribunal est d’avis qu’avant d’en arriver à prendre la décision de quitter son emploi, l’appelant a tenté à de multiples reprises, au cours de la période d’avril 2016 à juillet 2016, de trouver une solution face aux problèmes auxquels il était confronté dans l’accomplissement de son travail. L’appelant a avisé l’employeur, en date du 11 juillet 2016, qu’il allait cesser de travailler le 16 juillet 2016 (pièce GD2-8 ou GD3-34).

[70] Le Tribunal ne retient pas l’argument de l’appelant voulant qu’il ait subi du harcèlement, en vertu de l’alinéa 14(1)c) de la Loi canadienne sur les droits de la personne. L’appelant n’a pas démontré que la situation vécue dans le cadre de son travail pouvait représenter un acte discriminatoire fondé sur un motif de distinction illicite, en matière d’emploi, tel que prévu à l’alinéa 14(1)c) de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[71] Le Tribunal considère que l’existence de relations conflictuelles entre l’employeur et l’appelant, dont la cause n’est pas essentiellement imputable à ce dernier, démontre que le départ volontaire de celui-ci était devenu la seule solution raisonnable dans cette situation (White, 2011 CAF 190, Peace, 2004 CAF 56, Landry, A-1210-92, Smith, A-875-96).

[72] L’appelant ne peut être considéré comme l’unique responsable de la relation antagoniste qui s’est manifestée entre lui et son employeur (Smith, A-875-96).

[73] Le Tribunal est également d’avis que le départ volontaire de l’appelant s’explique aussi par une incitation indue exercée par l’employeur afin que l’appelant quitte son emploi (White, 2011 CAF 190, Peace, 2004 CAF 56, Landry, A-1210-92).

[74] L’appelant a tenté de trouver une solution afin de remédier aux problèmes rencontrés relativement à l’accomplissement de son travail chez l’employeur Alimentation M. B. inc., mais ses efforts se sont avérés infructueux.

[75] En regard des circonstances particulières portées à son attention dans ce dossier, le Tribunal considère que le départ volontaire de l’appelant constituait la seule solution raisonnable dans cette situation.

[76] S’appuyant sur la jurisprudence ci-haut mentionnée, le Tribunal estime que l’appelant a démontré qu’il n’existait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi chez cet employeur (White, 2011 CAF 190, Rena-Astronomo, A-141-97, Tanguay, A-1458-84, Peace, 2004 CAF 56, Landry, A-1210-92, Smith, A-875-96).

[77] Le Tribunal considère que, compte tenu de toutes les circonstances, l’appelant était justifié de quitter volontairement son emploi, aux termes des articles 29 et 30 de la Loi.

[78] L’appel est fondé sur la question en litige.

Conclusion

[79] L’appel est accueilli

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

29 Pour l’application des articles 30 à 33 :

  1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
  2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
  3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
    1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
    2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
    3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
  4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
    1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
    2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
    3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
    4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
    5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
    6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
    7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
    8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
    9. (ix) modification importante des fonctions,
    10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
    11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
    12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
    13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
    14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas  :

  1. (a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. (b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

(3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.

(4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.

(5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.

(6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.

(7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.

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