Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Les prestations de grossesse prévues dans la Loi sur l’assurance‑emploi (la Loi) peuvent seulement être payées pendant une période définie telle qu’établie au paragraphe 22(2) de la Loi.

[2] Les prestations de grossesse sont couramment appelées prestations de maternité, et les parties utilisent ce terme dans leurs éléments de preuve et leurs observations. Toutefois, pour assurer l’uniformité avec la Loi, le Tribunal utilisera le terme « prestations de grossesse ».

[3] L’appelante a présenté une demande de prestations de grossesse en septembre 2016 et une période de prestations a été établie en date du 4 septembre 2016.

[4] La Commission de l’assurance‑emploi du Canada (la Commission) a déterminé que la période de prestations de l’appelante ne tombait pas dans la période définie où les prestations de grossesse pouvaient être payées, et l’a déclarée inadmissible au bénéfice des prestations de grossesse.

[5] L’appelante a demandé une révision de la décision de la Commission. La Commission a maintenu sa décision et l’appelante fait maintenant appel de la décision de révision auprès du Tribunal.

[6] Il a été décidé qu’une audience se tiendrait par téléconférence après l’examen des éléments suivants :

  1. la complexité de la question en litige;
  2. le fait qu’on prévoyait que la crédibilité ne ferait pas partie des questions principales;
  3. le fait qu’on prévoyait que l’appelante serait la seule partie à assister à l’audience;
  4. la nécessité de respecter l’exigence, selon le Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, de veiller à ce que l’instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[7] Personne ne s’est présenté à l’audience.

[8] L’article 12 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale autorise le Tribunal à procéder en l’absence d’une partie s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience.

[9] Après l’examen du dossier, le Tribunal est convaincu de ce qui suit :

  1. l’intimée a reçu l’avis d’audience par voie électronique;
  2. l’appelante et son représentant, Joseph Goulet, ont été avisés de l’audience dans une lettre qui a été envoyée à chacun d’eux au moyen du service « ExpressPost » de Postes Canada, étant donné que des signatures attestent la réception des lettres.

[10] Le Tribunal tient donc l’audience même si les parties sont absentes.

Question en litige

[11] Le Tribunal doit établir si l’appelante a droit aux prestations de grossesse selon la Loi, ce qui implique de déterminer ce qui suit :

  1. les semaines pendant lesquelles les prestations de grossesse peuvent être payées;
  2. la période de prestations de l’appelante.

Preuve

[12] L’appelante a donné naissance à un garçon, E. B., le 4 décembre 2015.

[13] Le bébé est né avant terme; la date prévue pour la naissance était le 10 février 2016.

[14] Après sa naissance, E. B. a été hospitalisé aux soins intensifs. Dans l’élément de preuve GD3-24, l’appelante a indiqué qu’E. B. est resté aux soins intensifs pendant dix semaines. Dans l’élément de preuve GD2-5, l’appelante a indiqué qu’il y avait passé huit semaines. Selon les notes de l’intimée (GD3-20), l’appelante a déclaré qu’E. B. avait été hospitalisé jusqu’au 28 janvier 2016.

[15] À la date de la naissance d’E. B., l’appelante travaillait, mais n’avait pas accumulé 600 heures assurables.

[16] L’appelante a déclaré qu’elle était en train d’accumuler les 600 heures d’emploi assurable requises et aurait obtenu ce nombre d’heures si son bébé n’était pas né si prématurément.

[17] L’appelante a déclaré qu’elle n’avait pas travaillé pendant qu’elle terminait sa maîtrise entre 2013 et 2015. Elle a réintégré le marché du travail en juillet 2015, après l’obtention de son diplôme (GD3-24, GD3-9 et GD3-19).

[18] L’appelante a repris le travail en mars 2016 et a travaillé jusqu’au 2 septembre 2016. Elle a demandé des prestations de grossesse et parentales le 12 septembre 2016. Elle a précisé qu’elle recommencerait à travailler en février 2017 (GD3-8), lorsque son fils atteindrait un an selon sa date d’anniversaire corrigée (GD2-5).

[19] D’après les relevés d’emploi au dossier, l’appelante a accumulé 343 heures d’emploi assurable du 10 juillet au 15 décembre 2015. Du 14 mars au 2 septembre 2016, elle comptait 513 heures d’emploi assurable.

Observations

[20] L’appelante a affirmé qu’elle devrait avoir droit aux prestations de grossesse parce qu’elle avait repris le travail aussi rapidement que possible après la naissance d’E. B. pour qu’elle puisse accumuler le nombre d’heures requis. Elle n’avait pas accumulé le nombre requis avant d’accoucher parce que son fils était né prématurément, ce sur quoi elle n’avait eu aucun contrôle.

[21] L’appelante a fait valoir que, même avec les prestations pour un enfant gravement malade, sa famille avait reçu des prestations pendant 35 semaines en tout, alors qu’une famille plus typique en toucherait pendant 52 semaines. Elle a dit qu’ils se sentaient punis en quelque sorte, en raison des circonstances liées exclusivement à la naissance prématurée d’E. B., qui s’est avérée une expérience très éprouvante pour eux.

[22] Selon l’appelante, le fait qu’on lui refuse des prestations de grossesse ne cadre pas avec la manière dont devraient fonctionner les programmes de prestations de grossesse et pour enfants gravement malades. Elle a affirmé que sa demande de prestations n’était pas déraisonnable et que sa situation justifiait réellement une révision.

[23] L’intimée a fait valoir que la période de maternité de l’appelante allait du 7 février au 11 juin 2016, et que, puisque cette période se situait à l’extérieur de la période de prestations de l’appelante, qui a débuté le 4 septembre 2016, l’appelante ne pouvait pas toucher de prestations de grossesse comme elle le demandait.

[24] Les éléments de preuve n’indiquent pas que l’appelante a demandé que sa demande initiale soit antidatée. Toutefois, l’intimée a fait savoir qu’elle avait envisagé d’établir une période de prestations plus tôt, compatible avec les paramètres de ce qu’elle considérait comme la période de maternité, mais que l’appelante n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi.

Analyse

[25] Les dispositions législatives applicables sont reproduites dans l’annexe de cette décision.

[26] Aux termes des articles 6 et 22 de la Loi, une prestataire comptant au moins 600 heures d’emploi assurable pendant sa période de référence et qui fait la preuve de sa grossesse est admissible aux prestations de grossesse pendant chaque semaine de chômage pendant une certaine période de temps, appelée ici « fenêtre ».

[27] Le paragraphe 22(1) de la Loi précise quelle est cette fenêtre pour une prestataire. La Loi prévoit qu’elle commence :

  1. soit huit semaines avant la semaine présumée de son accouchement,
  2. soit, si elle est antérieure, la semaine de son accouchement.

[28] La fenêtre se termine dix‑sept semaines après :

  1. soit la semaine présumée de son accouchement,
  2. soit, si elle est postérieure, la semaine de son accouchement.

[29] La fenêtre est prolongée du nombre de semaines d’hospitalisation du bébé conformément au paragraphe 22(6) de la Loi.

[30] Au paragraphe 2(1) de la Loi, une semaine est définie comme une période de sept jours consécutifs commençant le dimanche.

[31] Les prestations de grossesse sont payables uniquement pendant cette fenêtre. Si la période de prestations d’une prestataire ne se situe pas dans cette fenêtre, elle n’aura pas droit à des prestations de grossesse.

[32] Par conséquent, le Tribunal doit établir quelle était cette fenêtre pour l’appelante et à quoi correspond sa période de prestations.

Période de prestations

[33] L’appelante a présenté une demande de prestations le 12 septembre 2016. Selon la Commission, une période de prestations a été établie en date du 4 septembre 2016, ce que l’appelante n’a pas contesté. Le Tribunal accepte donc que la période de prestations de l’appelante a commencé le 4 septembre 2016.

[34] Le Tribunal souligne que la Commission a envisagé la possibilité d’une antidatation et que l’appelante n’avait pas accumulé suffisamment d’heures pour remplir les conditions requises à une date antérieure. La Commission n’a pas précisé sur quelles dates elle s’était fondée. Toutefois, étant donné les éléments de preuve soumis par l’appelante, le Tribunal convient que l’appelante n’avait pas accumulé 600 heures d’emploi assurable à la naissance d’E. B. en décembre 2015.

[35] L’appelante n’ayant pas demandé une antidatation, le Tribunal ne s’est pas penché sur la possibilité qu’elle réponde aux conditions pour obtenir une antidatation.

[36] Le Tribunal conclut que la période de prestations de l’appelante a commencé le 4 septembre 2016.

Période constituant la fenêtre

[37] Dans le cas de l’appelante, la fenêtre commence : 

  1. huit semaines avant le 10 février 2016, soit le 20 décembre 2015,
  2. ou, si elle est antérieure, la semaine de son accouchement, qui a eu lieu le 4 décembre 2015.

[38] Le dimanche de la semaine du 4 décembre 2015 était le dimanche 29 novembre 2015.

[39] Dans le cas de l’appelante, la fenêtre commence donc le 29 novembre 2015.

[40] Si l’on ne tient pas compte d’une prolongation en raison de l’hospitalisation d’E. B., la fenêtre se termine dix‑sept semaines après :

  1. soit la semaine présumée de l’accouchement de l’appelante (la semaine du dimanche 7 février 2016),
  2. soit, si elle est postérieure, la semaine de son accouchement (la semaine du dimanche 29 novembre 2015).

[41] Si on avance de dix‑sept semaines suivant le dimanche 7 février 2016, on arrive au samedi 4 juin 2016.

[42] La fenêtre à utiliser pour l’appelante, avant de tenir compte d’une prolongation en raison de l’hospitalisation, va du dimanche 29 novembre 2015 au samedi 4 juin 2016.

[43] Différentes dates figurent dans la preuve pour la sortie d’hôpital du bébé. Le Tribunal n’a pas été en mesure d’établir clairement la date de sortie puisque l’appelante n’a pas assisté à l’audience. Par conséquent, en se fondant sur la preuve qui lui a été présentée, le Tribunal conclut qu’E. B. a été hospitalisé jusqu’au 28 janvier 2016, parce que cet élément de preuve est plus précis que les déclarations écrites contradictoires fournies par l’appelante, où il est indiqué dans un cas qu’E. B. a été hospitalisé pendant huit semaines, et dans l’autre cas, dix semaines.

[44] Le Tribunal établit qu’E. B. a été hospitalisé pendant neuf semaines.

[45] La fenêtre à utiliser pour l’appelante est donc prolongée de neuf semaines, jusqu’au samedi 6 août 2016. La fenêtre va du 29 novembre 2015 au 6 août 2016.

Conclusion

[46] Étant donné que la période de prestations de l’appelante a commencé en septembre 2016 et que la période de temps ou fenêtre pendant laquelle elle avait le droit de recevoir des prestations de grossesse s’est terminée le 6 août 2016, le Tribunal conclut que l’appelante n’est pas admissible aux prestations de grossesse.

[47] Le Tribunal comprend l’observation de l’appelante selon laquelle elle devrait avoir droit à des prestations de grossesse maintenant qu’elle a accumulé 600 heures d’emploi assurable. Elle estime être pénalisée parce que son fils E. B. est né prématurément; sa famille ne peut pas bénéficier du même nombre de semaines de prestations que d’autres familles. Toutefois, les prestations de grossesse sont destinées à être versées à une mère pendant une période de temps entourant la naissance du bébé. Dans le cas de l’appelante, il est malheureux qu’elle n’ait pas rempli les conditions établies pour recevoir des prestations lorsque son fils est né, mais le Tribunal ne peut pas modifier la loi. La période de prestations de l’appelante ne tombe pas pendant la fenêtre dans laquelle les prestations de grossesse peuvent être payées, et donc elle ne remplit tout simplement pas les conditions requises pour recevoir des prestations de grossesse. Le Tribunal doit interpréter et appliquer la loi telle qu’elle est rédigée. Il ne peut pas modifier la loi pour permettre à l’appelante de recevoir des prestations auxquelles elle n’a pas droit.

[48] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance‑emploi

22 (1) Malgré l’article 18, mais sous réserve des autres dispositions du présent article, des prestations sont payables à la prestataire de la première catégorie qui fait la preuve de sa grossesse.

(2) Sous réserve de l’article 12, les prestations prévues au présent article sont payables à une prestataire de la première catégorie pour chaque semaine de chômage comprise dans la période qui :

  1. a) commence :
    1. (i) soit huit semaines avant la semaine présumée de son accouchement,
    2. (ii) soit, si elle est antérieure, la semaine de son accouchement;
  2. b) se termine dix-sept semaines après :
    1. (i) soit la semaine présumée de son accouchement,
    2. (ii) soit, si elle est postérieure, la semaine de son accouchement.

(3) Lorsque des prestations sont payables à une prestataire en raison de chômage causé par sa grossesse et que des allocations, prestations ou autres sommes lui sont payables pour cette grossesse en vertu d’une loi provinciale, les prestations qui lui sont payables en vertu de la présente loi sont réduites ou supprimées tel qu’il est prévu par règlement.

(4) Pour l’application de l’article 13, l’article 18 ne s’applique pas à la période de deux semaines qui précède la période visée au paragraphe (2).

(5) Si des prestations sont payables à une prestataire de la première catégorie en vertu du présent article et que celle-ci reçoit une rémunération pour une période tombant dans une semaine comprise dans la période visée au paragraphe (2), le paragraphe 19(2) ne s’applique pas et, sous réserve du paragraphe 19(3), cette rémunération est déduite des prestations afférentes à cette semaine.

(6) La période durant laquelle des prestations sont payables en vertu du paragraphe (2) est prolongée du nombre de semaines d’hospitalisation de l’enfant dont la naissance est à l’origine du versement des prestations.

(7) La période prolongée en vertu du paragraphe (6) ne peut excéder les cinquante-deux semaines qui suivent la semaine de l’accouchement.

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