Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

L’appelante – C. B.

Son époux – R. B. (représentant)

Introduction

[1] L’appelante interjette appel de la décision rendue par la Commission de l’assurance-emploi (intimée) de lui refuser une prolongation de la période de 30 jours prévue pour présenter une demande de révision en vertu de l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) et de l’article 1 du Règlement sur les demandes de révision (Règlement).

[2] L’appelante a présenté une demande de prestation le 23 juillet 2011, et le versement des prestations a commencé. Un nouveau calcul de son taux de prestations a entraîné un trop-payé. À la suite d’une demande de révision tardive, l’intimée a refusé de lui accorder une prolongation du délai pour présenter sa demande. Elle a interjeté appel de cette décision devant le Tribunal le 26 octobre 2016.

[3] L’audience a eu lieu par téléconférence en raison des facteurs suivants : la complexité de la ou des questions faisant l’objet de l’appel; le fait que l’appelante serait la seule partie à participer à l’audience; l’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires. Le mode d’audience respecte l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale de procéder de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent.

[4] Le Tribunal a ajourné la première audience, tenue le 28 mars 2017, parce que l’appelante était confuse et souhaitait prendre des dispositions pour que son époux parle en son nom. Elle a présenté une Autorisation de divulguer des renseignements le 3 avril 2017, et une nouvelle audience a été fixée au 5 mai 2017.

Question en litige

[5] Le Tribunal doit d’abord déterminer si l’intimée était en droit de refuser de prolonger la période de 30 jours prévue pour permettre à l’appelante de présenter une demande de révision, en vertu de la Loi et du Règlement.

Preuve

[6] Le 19 juillet 2011, durant un congé de maladie pour une blessure liée au travail, l’appelante a été congédiée en raison d’une allégation d’inconduite (GD3-9).

[7] L’employeur a émis un relevé d’emploi (RE), daté du 19 juillet 2011, qui indiquait que l’appelante était préposée au chenil et qu’elle avait accumulé 993 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence (PR) et une rémunération assurable de 25 224.97 $ (GD3-17 à GD3-18).

[8] Elle a présenté une demande de prestations le 23 juillet 2011(GD3-3 à GD3-16); une période de prestations a été établie, et elle a commencé à recevoir des prestations. Son taux de prestations a été calculé en fonction de l’information fournie sur son RE.

[9] Le 10 février 2012, l’employeur a émis un RE modifié, qui réitérait qu’elle avait été proposée au chenil, mais qui documentait un nombre plus élevé d’heures assurables –1 645 – et une rémunération assurable moindre de 15 487.13 $ (GD3-19).

[10] Le 15 février 2012, l’appelante a communiqué avec l’intimée pour signaler ce changement, au cas où ses prestations auraient été mal calculées, indiquant qu’elle soumettrait sa dernière déclaration de quinzaine le 17 février 2012 (GD3-21).

[11] Une attestation au dossier, datée du 26 octobre 2016, indique qu’un avis de dette a été envoyé à l’appelante le 6 avril 2012 (GD3-22). Il n’y a aucune lettre de décision de l’intimée au dossier, expliquant la décision qui a donné lieu à l’avis. L’avis lui-même résume les détails de la dette comme suit : des gains de 433 $ qui n’ont pas été déduits et deux trop-payés de 1 162 $ et de 2 988 $, pour un total de 4 583 $ en trop-payé de prestations.

[12] L’intimée a établi que l’appelante avait appelé le 11 mai 2012 pour [traduction] « discuter des retenues convenues » en ce qui concerne son trop-payé (note de recouvrement à la pièce GD3-23). Selon la demande de révision de l’appelante, datée du 27 juillet 2016, l’appelante a appelé en raison du RE modifié et dit que, comme [traduction] « il ne concordait pas, j’ai dû appeler [l’intimée] et lui demander de vérifier les anomalies » (GD3-26).

[13] L’intimée a reçu une lettre de sa part le 6 octobre 2014, dans laquelle elle déclarait que son employeur avait fourni de faux renseignements à son sujet sur son RE. Elle y notait également qu’elle est une aînée ayant une incapacité, qui ne peut gérer les remboursements à même son revenu limité (note de recouvrement à la pièce GD3-24).

[14] Le 27 juillet 2016, l’intimée a communiqué avec l’appelante, qui a déclaré qu’elle n’estimait pas devoir l’argent parce que le trop-payé était attribuable à une erreur commise par son ancien employeur sur son RE. Elle a dit qu’elle était une aînée à faible revenu, vivant uniquement des prestations du Régime de pensions du Canada et de la Sécurité de la vieillesse et qu’elle n’avait pas les moyens de rembourser le trop-payé. L’intimée lui avait conseillé de présenter une demande de révision (note de recouvrement à la pièce GD3-25).

[15] Le même jour, 27 juillet 2016, elle a présenté une demande de révision de la décision portant sur le trop-payé, dans laquelle elle a déclaré que la décision lui avait été communiquée de vive voix en avril 2012 (GD3-26 à GD3-27). Cette demande était estampillée comme ayant été reçue par l’intimée le 9 août 2016 (GD3-26).

[16] Dans la section 5 de sa demande de révision, elle a expliqué que sa demande avait été présentée en retard parce qu’elle n’avait jamais reçu de réponse à sa lettre du 6 octobre 2014 et qu’elle croyait donc que la question avait été réglée (GD3-27).

[17] Par correspondance datée du 27 septembre 2016, l’intimée l’a avisée qu’elle n’acceptait pas la raison pour laquelle elle avait tardé à présenter une demande de révision de sa décision du 2 avril 2012 et a refusé de lui accorder une prolongation du délai pour présenter sa demande (GD3-28).

[18] Son avis d’appel a été déposé au Tribunal le 17 octobre 2016 (GD2-1 à GD2- 4). Elle y a indiqué qu’elle interjetait appel parce qu’elle n’était pas responsable de l’erreur commise sur son RE et qu’elle s’était fiée au gouvernement pour établir le bon taux de prestations.

[19] À l’audience, l’appelante a manifesté sa confusion à propos de ce qui lui était arrivé; elle ne comprenait pas la position dans laquelle la mettait le RE modifié. L’information sur son travail figurant dans le RE était fausse. Elle n’avait pas été proposée au chenil durant les quatre dernières années de son emploi; elle dirigeait plutôt le bureau. Elle avait reçu les « factures » de l’intimée contenant le montant dû, mais ne comprenait pas comment la décision avait été prise. Elle n’avait reçu aucune information sur la gestion de la dette.

Observations

[20] L’appelante a présenté les observations suivantes :

  1. Le trop-payé était attribuable aux erreurs que son ancien employeur avait commises sur le RE, et elle ne devrait pas être tenue responsable de la dette en résultant. Lorsqu’elle a été informée de la dette, elle a demandé à l’intimée de vérifier les « anomalies » sur le RE et présumait qu’elle le ferait.
  2. Elle a écrit une lettre d’explication en octobre 2014, mais n’a jamais reçu de réponse. Elle pensait donc que le problème avait été résolu.
  3. Elle a présenté une demande de révision dès que l’intimée lui a signalé de le faire.
  4. L’appel constituait sa [traduction] « première occasion » de [traduction] « régler véritablement le problème » puisqu’elle [traduction] « n’avait aucune information » sur la décision initiale.
  5. Son époux et elle sont [traduction] « sur la corde raide » compte tenu de très grandes difficultés financières et ne disposent d’aucun moyen de rembourser l’argent. Elle se dit même prête à abandonner son appel si cela permet de régler le problème.

[21] L’intimée a présenté les observations suivantes :

  1. L’appelante n’a pas fourni suffisamment de raisons en ce qui concerne sa demande de révision tardive.
  2. Elle était au courant de la décision, qui datait du 2 avril 2012, mais a attendu jusqu’au 9 août 2016 pour présenter une demande de révision.
  3. Elle a envoyé une lettre, qui a été reçue le 6 octobre 2014, dans laquelle elle a écrit [traduction] « et il n’y a eu aucun autre [contact] de la prestataire avant le 27 juillet 2016 », date à laquelle elle a été appelée au sujet de son trop-payé.
  4. L’intimée [traduction] « n’était pas convaincue que sa demande aurait eu des chances raisonnables de succès compte tenu de la structure de la Loi ».
  5. Elle [traduction] « n’était pas convaincue que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porterait pas préjudice ».

Analyse

[22] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites à l’annexe de la présente décision.

[23] Le Tribunal est uniquement appelé à se prononcer sur la décision de l’intimée de refuser à l’appelante une prolongation de la période de 30 jours prévue pour présenter une demande de révision. Le Tribunal ne rend pas une décision sur les questions de fond de sa demande.

[24] Selon l’alinéa 112(1)a) de la Loi, une demande de révision doit être présentée dans les 30 jours suivant la date où le prestataire en reçoit communication ou selon l’alinéa 112(1)b), « dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder ».

[25] Les critères qui doivent être pris en considération au moment de déterminer s’il y a lieu d’accorder un délai supplémentaire figurent dans le Règlement. Le paragraphe 1(1) porte que l’intimée peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, « si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai » et, d’autre part, que l’intéressé a « manifesté l’intention constante de demander la révision ».

[26] Lorsque la demande de révision est présentée après l’expiration du délai de trois cent soixante-cinq jours suivant le jour où l’intéressé a reçu communication de la décision, il y a deux autres exigences, selon le paragraphe 1(2) du Règlement : l’intimée « doit aussi être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès » et que « l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partie ».

[27] En premier lieu, le Tribunal doit déterminer si la demande de révision de l’appelante a bien été présentée hors délai. L’appelante aurait dû présenter sa demande dans les 30 jours suivant la date où elle a reçu communication de la décision; l’intimée signale que la décision date du 2 avril 2012 et confirme qu’elle a été communiquée verbalement à l’appelante au cours du même mois. L’appelante a présenté sa demande le 27 juillet 2016, plus de quatre ans plus tard. La demande a donc bien été présentée hors délai.

[28] Compte tenu de la durée du retard, le Tribunal estime que, comme l’intimée l’a fait valoir à juste titre, les exigences des paragraphes 1(1) et 1(2) du Règlement devaient être respectées au moment de déterminer si un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision devrait être accordé.

[29] La jurisprudence récente a confirmé que la décision de la Commission d’accorder une « prorogation du délai pour la demande de réexamen » est discrétionnaire (Daley c. Procureur général du Canada, 2017 CF 297). Les tribunaux ont conclu que les décisions discrétionnaires de l’intimée ne devraient pas être infirmées sauf s’il peut être démontré qu’elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire, c’est-à-dire, agir de bonne foi, prendre en compte tous les facteurs pertinents et ne pas tenir compte des facteurs non pertinents (Procureur général du Canada c. Uppal, 2008 CAF 388; Procureur général du Canada c. Tong, 2003 CAF 281; Procureur général du Canada c. Dunham, A-708-9).

L’intimée a-t-elle exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire?

[30] La première étape pour le Tribunal consiste à déterminer si l’intimée a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé à l’appelante une prolongation de la période de 30 jours prévue pour présenter une demande de révision, conformément à la Loi et au Règlement. Le Tribunal fait observer que, bien qu’il incombe à l’appelante de démontrer qu’elle satisfait aux critères énoncés dans le Règlement, l’intimée a le fardeau de démontrer qu’elle a agi de manière judiciaire en exerçant son pouvoir discrétionnaire, en prenant en compte toutes les circonstances particulières (Procureur général du Canada c. Gagnon, 2004 CAF 351; Procureur général du Canada c. Schembri, 2003 CAF 463; Procureur général du Canada c. Purcell A-694- 94).

[31] Le Tribunal estime que l’intimée ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait. Peu d’éléments de preuve démontrent que l’intimée a sérieusement pris en considération le motif pour lequel l’appelante a présenté sa demande hors délai avant de la rejeter. Elle s’est reposée sur le fait que l’appelante avait rédigé une lettre d’explication (dont l’intimée confirme la réception le 6 octobre 2012), à laquelle elle n’avait jamais reçu de réponse. Compte tenu de l’information limitée qui lui est présentée, le Tribunal ne peut pas évaluer comment l’intimée a soupesé ce motif avant d’en arriver à la conclusion qu’il ne s’agissait pas d’une « explication raisonnable ». Le Tribunal ne peut donc pas établir avec certitude que l’intimée a tenu compte de toutes ses circonstances particulières.

[32] En outre, le Tribunal ne peut pas conclure que l’intimée a bien évalué si l’appelante avait « manifesté l’intention constante » d’interjeter appel, lorsque rien ne prouve que le droit d’appel lui a été expliqué.

[33] De même, le Tribunal est d’avis que la preuve de l’intimée n’établit pas comment elle en était arrivée à la conclusion que l’appelante n’avait pas réussi à démontrer que sa demande de révision avait des « chances raisonnables de succès ». Par conséquent, il ne peut pas évaluer non plus si l’intimée a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire pour la détermination de ce facteur. Le Tribunal juge également que l’intimée n’a apporté aucun éclaircissement sur cette question avec sa brève observation selon laquelle, elle n’était pas « convaincue que la demande […] a des chances raisonnables de succès compte tenu de la structure de la Loi (GD4-2) ».

[34] Enfin, le Tribunal détermine que le dossier ne contient aucun élément de preuve quant à la façon dont l’intimée a tiré sa conclusion sur la question de savoir s’il y aurait « un préjudice à la Commission ou à une autre partie ». Elle n’a présenté aucun argument pour étayer cette conclusion, notamment comment le fait d’accorder un délai supplémentaire à l’appelante pourrait avoir des répercussions négatives sur l’administration des prestations.

[35] À la lumière de ces observations, le Tribunal estime que l’intimée n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé d’accorder à l’appelante un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision. Le Tribunal doit donc établir si l’appelante s’est acquittée du fardeau qui lui incombait de démontrer qu’elle avait respecté les critères énoncés dans le Règlement afin de déterminer si elle a droit à une prolongation du délai de 30 jours.

Retard raisonnablement expliqué et intention constante de poursuivre l’appel

[36] Le Tribunal est d’avis que les questions de savoir si l’appelante avait raisonnablement expliqué son retard et une intention constante de poursuivre l’appel sont étroitement liées. À l’audience, il était évident qu’elle avait du mal à comprendre le processus et les recours qui s’offraient à elle. Dans son esprit, elle avait répondu de façon appropriée et, en fait, le Tribunal juge qu’elle a agi avec intégrité dès le début. Dès qu’elle a eu connaissance du RE modifié, elle a pris l’initiative d’en faire part à l’intimée, au cas où elle aurait reçu plus de prestations que ce à quoi elle avait droit; cela est confirmé par la preuve de sa lettre du 15 février 2012 (GD3-21).

[37] À l’audience, l’appelante a convenu que la décision initiale lui avait été communiquée de vive voix en avril 2012. Elle ne se souvient pas avoir reçu une lettre de décision qui l’aurait informée de son droit de présenter une demande de révision ni du délai de 30 jours. Rien ne prouve non plus que l’intimée lui ait envoyé une telle lettre. À l’audience, lorsque la question de la gestion de la dette a été soulevée, il était évident que l’appelante ignorait tout de l’avis sur cette question qui figure dans les lettres de décision portant sur un trop-payé. Il n’y a pas non plus de compte rendu de la conversation au cours de laquelle elle a été avisée de la décision liée au trop-payé. Cela veut dire que le Tribunal ne peut pas être certain que son droit à une demande de révision lui a été expliqué et qu’elle comprenait qu’elle pouvait contester une décision rendue.

[38] La preuve démontre qu’après que l’appelante a été avisée du trop-payé, elle a appelé l’intimée pour en discuter le 11 mai 2012, c’est-à-dire un peu plus d’un mois après l’émission de l’avis de dette le 6 avril 2016. À ce stade, les témoignages divergent. Selon l’intimée, la conversation visait simplement à « discuter des retenues convenues » en ce qui concerne son trop-payé (GD3-23). Selon l’appelante, elle a appelé en raison du RE modifié et dit que, comme « il ne concordait pas, j’ai dû appeler [l’intimée] et lui demander de vérifier les anomalies (GD3-26) ». Ainsi, dans son esprit, elle avait demandé une enquête portant sur les différences entre le RE initial et le RE modifié et présumait que l’intimée ferait enquête.

[39] Le Tribunal accorde ici plus de poids au témoignage de l’appelante sur cette conversation qu’aux notes de recouvrement abrégées et à l’unique phrase explicative dans la preuve de l’intimée. Les différences entre les deux RE étaient marquées; même l’emploi de l’appelante avait été consigné incorrectement. Le Tribunal juge donc très probable qu’elle ait demandé à l’intimée de faire enquête, ce qui équivaut à demander une révision, bien que de manière informelle. En conséquence, le Tribunal ne constate aucun retard important dans les mesures que l’appelante a prises pour contester la décision portant sur le trop-payé ni aucune interruption de son intention constante d’interjeter appel de la décision du mieux qu’elle le pouvait.

[40] Tout compte fait, le Tribunal établit qu’il était raisonnable que l’appelante pense que la question avait été réglée par l’appel qu’elle avait fait le 11 mai 2012. Cela explique le retard qu’elle a pris avant de passer à l’étape suivante, plus de deux ans plus tard, lorsque les états sur la dette ont continué d’arriver : rédiger la lettre que l’intimée a reçue le 6 octobre 2014 (GD3-24). Dans cette lettre, elle a affirmé que son employeur avait fourni de faux renseignements à son sujet sur son RE et qu’elle pensait que la question avait été réglée puisqu’elle n’avait reçu aucune réponse à sa lettre. Le Tribunal juge que sa lettre est la preuve d’une intention constante de contester la décision relative au trop-payé.

[41] Le Tribunal a relevé le commentaire de l’intimée selon lequel, après la lettre, « il n’y a eu aucun autre [contact] de la prestataire avant le 27 juillet 2016 », date à laquelle l’intimée l’avait appelée à propos de sa créance due (GD4-1). Toutefois, bien qu’il semble, d’après l’audience, que l’appelante ait perdu tout espoir et qu’elle était même prête à abandonner cet appel, lorsque l’intimée l’a avisée, le 27 juillet 2017, qu’elle pouvait demander une révision, elle a immédiatement signé et daté sa demande le jour même. Le Tribunal voit cela comme la preuve d’une intention constante de poursuivre toute contestation qui s’offrait à elle.

[42] À cet égard, le Tribunal accorde peu de poids à l’observation de l’intimée selon laquelle l’appelante a attendu jusqu’au 9 août 2016 pour présenter sa demande parce que la demande était estampillée comme ayant été reçue à une date ultérieure. Le Tribunal ne dispose d’aucune information voulant que le dernier retard de deux semaines avant la présentation de la demande puisse être attribué uniquement à l’appelante; un tel retard n’est pas inhabituel pour la livraison du courrier et le traitement des documents.

Chances raisonnables de succès

[43] Le Tribunal est au fait de la brève observation de l’intimée selon laquelle la demande de l’appelante n’avait pas de chances raisonnables de succès « compte tenu de la structure de la Loi (GD4-2) ». Toutefois, il y avait des différences marquées entre ses deux RE, une anomalie dont elle a fait part à l’intimée plus d’une fois, et rien ne prouve qu’elle ait eu la possibilité d’expliquer entièrement sa situation. Si sa cause était révisée, il est possible que de l’information soit communiquée et que des conclusions soient tirées, susceptibles d’influer directement sur la prise de décision en ce qui a trait à son taux de prestations. Le Tribunal est donc convaincu que sa cause a des chances raisonnables de succès.

Préjudice à la Commission ou à une autre partie

[44] Quant à la question de savoir si le fait d’accorder à l’appelante un délai plus long pour présenter sa demande de révision lui porterait préjudice, le Tribunal estime que le seul commentaire de l’intimée, c’est-à-dire qu’elle « n’était pas convaincue que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porterait pas préjudice », est équivoque. Par conséquent, aucun élément de preuve présenté au Tribunal n’indique que le fait d’accorder un délai supplémentaire à l’appelante pourrait nuire à l’intimée.

[45] En conclusion, le Tribunal juge que l’intimée n’a pas démontré qu’elle avait exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu’elle a refusé à l’appelante une prolongation du délai pour présenter une demande de révision. Le Tribunal, exerçant son propre pouvoir discrétionnaire, conclut que l’appelante s’est conformée aux dispositions de l’article 112 de la Loi et à l’article 1 du Règlement et qu’elle a donc droit à une prolongation du délai.

Conclusion

[46] L’appel est accueilli.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi
  1. 112 (1) Quiconque fait l’objet d’une décision de la Commission, de même que tout employeur d’un prestataire faisant l’objet d’une telle décision, peut, dans les trente jours suivant la date où il en reçoit communication, ou dans le délai supplémentaire que la Commission peut accorder, et selon les modalités prévues par règlement, demander à la Commission de réviser sa décision.
  2. (2) La Commission est tenue d’examiner de nouveau sa décision si une telle demande lui est présentée.
  3. (3) Le gouverneur en conseil peut, par règlement, préciser les cas où la Commission peut accorder un délai plus long pour présenter la demande visée au paragraphe (1).
  4. Règlement sur les demandes de révision
  5. 1 (1) Pour l’application du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi et sous réserve du paragraphe (2), la Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que l’intéressé a manifesté l’intention constante de demander la révision.
  6. (2) Dans les cas ci-après, la Commission doit aussi être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès et que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partie :
    1. a) la demande de révision est présentée après l’expiration du délai de trois cent soixante-cinq jours suivant le jour où l’intéressé a reçu communication de la décision;
    2. b) elle est présentée par une personne qui a fait une autre demande de prestations après que la décision lui a été communiquée;
    3. c) elle est présentée par une personne qui a demandé à la Commission d’annuler ou de modifier la décision en vertu de l’article 111 de la Loi sur l’assurance-emploi.
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