Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions et questions préliminaires

La prestataire, madame L. D., a participé à l’audience par téléconférence en compagnie de son représentant, monsieur Raymond Evans; elle n’a cependant pas témoigné lors de cette audience.

La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) était représentée par monsieur Matthew Vens, et madame Tania Arreaga (parajuriste) a assisté à l’audience en qualité d’observatrice.

Les parties ont convenu qu’elles n’avaient ni l’une ni l’autre de nouveaux éléments de preuve à produire durant cette audience; chacune d’elles présentera néanmoins des observations et répondra aux observations écrites finales de l’autre partie d’ici au 20 février 2017.

Introduction

[1] Le 22 juillet 2014, la prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi, affirmant qu’elle touchait une somme mensuelle de 522,61 $ en prestations du Régime de pensions du Canada (RPC) depuis le 1er janvier 2003. Une enquête a cependant révélé que la prestataire touchait plutôt 805 $ par mois en prestations du RPC, et ce, depuis le 1er juillet 2014.

[2] Le 27 avril 2015, la Commission a réparti les prestations du RPC de la prestataire sur sa période de prestations et l’a avisée qu’elle devait déclarer 189 $ par semaine jusqu’à la fin de sa période de prestations conformément aux articles 35, 36 et 77.95 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement). La décision de la Commission a donné lieu à un trop-payé s’élevant à 3 736 $.

[3] Le 7 mai 2015, la prestataire a demandé que la Commission révise sa décision. Le 3 juin 2015, les parties ont confirmé que la prestataire touchait effectivement une pension de survivant du RPC d’une somme de 522,61 $ par mois depuis le 1er janvier 2003, et qu’elle recevait également, depuis le 1er juillet 2014, une pension de retraite du RPC de 460,945 $ par mois. La Commission a alors modifié sa décision d’après cette nouvelle information. Elle a conclu que la pension de survivant ne comptait pas comme rémunération et qu’elle n’allait donc pas être répartie sur sa période de prestations; par contre, sa pension de retraite du RPC avait valeur de rémunération et a été répartie sur sa période de prestations en application des articles 35, 36 et 77.95 du Règlement. Le trop-payé a donc été recalculé et établi à 2 174 $.

[4] Le 16 juin 2015, la prestataire a fait appel à la division générale du Tribunal, qui a statué, le 10 novembre 2015, que la répartition de la rémunération avait été bien calculée conformément aux articles 35, 36 et 77.95 du Règlement. La prestataire a interjeté appel de cette décision devant la division d’appel. Le 23 août 2016, la division d’appel a accueilli l’appel et renvoyé le dossier à la division générale pour qu’une nouvelle audience soit tenue afin de traiter des arguments toujours en suspens invoqués par les parties.

[5] L’audience a été tenue par téléconférence pour les raisons suivantes : a) la crédibilité ne devait pas faire partie des questions principales et b) ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[6] Le représentant de la prestataire, monsieur Evans, a signalé durant l’audience qu’il venait tout juste de recevoir les observations RGD4 de la Commission et a donc demandé d’avoir l’occasion d’y répondre. Monsieur Evans a convenu qu’il présenterait ses observations par écrit au plus tard le 30 janvier 2017.

[7] Les parties ont convenu d’accorder au représentant de la Commission, monsieur Vens, l’occasion de répondre aux nouvelles observations potentielles. Les parties se sont mises d’accord pour répondre aux observations finales de l’autre partie au plus tard le 20 février 2017. Les parties se sont exécutées comme entendu et ont présenté respectivement les pièces RGD5 et RGD6.

Question en litige

[8] Le membre doit déterminer si la pension de retraite du RPC de la prestataire a correctement été déduite de ses prestations en vertu des articles 35, 36 et 77.95 du Règlement et du paragraphe 19(2.1) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).

Preuve

[9] Le 22 juillet 2014, la prestataire a présenté une demande de prestations régulières d’assurance-emploi après avoir perdu son dernier emploi le 11 juillet 2014. Elle a déclaré qu’elle touchait 522,61 $ par mois en prestations du RPC depuis le 1er janvier 2003 (GD3-3 à GD3-14).

[10] La prestataire avait travaillé pour deux employeurs durant sa période de référence et elle habitait à X, en Ontario, qui se trouve dans la région économique du Centre de l’Ontario. Elle avait accumulé 600 heures d’emploi assurable auprès d’un des employeurs, et 1904 avec son deuxième employeur (GD3-15 et GD3-16). Une période de prestations commençant le 13 juillet 2014 a été établie et des prestations régulières lui ont été versées pendant 40 semaines, jusqu’au 25 avril 2015 (GD3-24 et GD3-25).

[11] Le 27 avril 2015, une enquête a révélé que la prestataire touchait 805 $ par mois et 186 $ par semaine en pension de retraite du RPC depuis le 1er juillet 2014. La Commission a réparti 186 $ par semaine du 13 juillet 2014 au 27 décembre 2014 et 187 $ par semaine du 28 décembre 2014 au 3 janvier 2015, puis a commencé à répartir une somme de 189 $ par semaine à compter du 4 janvier 2015 (GD3-17). La Commission a informé la prestataire qu’elle avait réparti ses prestations du RPC en fonction de cette information et qu’elle devait déclarer 189 $ par semaine à partir du 1er janvier 2015 et jusqu’à la fin de se période de prestations (GD3-26 et GD3-27). La décision de la Commission a entraîné un trop-payé totalisant 3 736 $ (GD3-28).

[12] Le 7 mai 2015, la prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision, précisant qu’elle recevait déjà 522,61 $ par mois lorsqu’elle avait présenté sa demande de prestations et qu’elle avait demandé une pension complète lorsqu’elle avait fêté ses 60 ans le 28 juin 2014, avant de se retrouver sans emploi. Elle a ajouté que sa pension représentait moins de 25 % des prestations (GD3-29 à GD3-30).

[13] La prestataire a précisé que (1) depuis le 1er janvier 2003, elle touchait mensuellement une pension de survivant d’une somme de 522,61 $ et que cette pension avait été majorée de 1,8 % ou 9,41 $ par mois en date du 1er janvier 2015, et que (2) depuis le 1er juillet 2014, elle recevait une pension de retraite du RPC de 460,95 $ par mois, qui avait elle aussi était majorée de 1,8 % ou 8,30 $ par mois en date du 1er janvier 2015. La prestataire a fait savoir à la Commission qu’elle a un problème auditif et qu’elle n’avait pas bien compris le processus de l’assurance-emploi, et qu’elle n’avait donc pas communiqué avec la Commission lorsqu’elle avait accepté la pension de retraite du RPC. La Commission a informé la prestataire et son représentant, monsieur Evans, que compte tenu de cette nouvelle information, sa pension de survivant n’était pas considérée comme une rémunération et ne serait donc pas répartie sur sa période de prestations. Elle a cependant été avisée que sa pension de retraite du RPC avait valeur de rémunération et qu’elle serait répartie sur sa période de prestations. Le représentant de la prestataire a affirmé que, même s’ils comprennent que sa pension de retraite du RPC a valeur de rémunération et doit être répartie aux taux de sa pension hebdomadaire, il conteste la façon dont la Loi et le Règlement permettent à la Commission d’établir le trop-payé (GD3-32).

[14] Le 3 juin 2015, la Commission a informé la prestataire qu’elle avait modifié sa décision, précisant que (1) sa pension de survivant ne comptait pas comme rémunération et que la somme de 121 $ par semaine qu’elle avait reçue du 13 juillet 2014 au 31 décembre 2014 n’avait pas été répartie sur sa période de prestations, et que (2) sa pension de retraite avait valeur de rémunération et avait donc été répartie sur sa période de prestations à raison de 107 $ par semaine du 13 juillet 2014 au 31 décembre 2014, et de 109 $ par semaine à compter du 1er janvier 2015 en raison d’une majoration de 1,8 % (GD3-33 et GD3-34). La Commission a établi un trop-payé de 2 174 $ (GD3-33 et GD3-34).

[15] La prestataire a soumis des copies des documents suivants :

  1. a) Une annonce faite par le ministre dans un communiqué de presse intitulé [traduction] « Le gouvernement du Canada annonce un nouveau projet pilote national intitulé Travail pendant une période de prestations : les Canadiens pourront conserver une plus grande partie de leur salaire tout en recevant des prestations grâce aux nouvelles améliorations de l’assurance-emploi ». La prestataire en présente un extrait où on peut lire ce qui suit (RGD5-7) :
    1. [traduction]
      Dans le Plan d’action économique de 2012, le gouvernement a lancé un nouveau projet pilote national, intitulé Travail pendant une période de prestations. Le projet pilote incite davantage les prestataires à accepter les emplois disponibles en leur permettant de conserver une plus grande partie de leur salaire tout en recevant des prestations de l’assurance-emploi. En effet, seulement 50 % de leur rémunération totale est déduite de leurs prestations lorsqu’ils travaillent tout en bénéficiant de l’assurance-emploi.
  2. b) L’extrait suivant d’une publication dans la Gazette du Canada (SOR/2012-128) (RGD4-44, RGD4-47 et RGD5-2) :
    1. Travail pendant une période de prestations : Les modifications apportées au Règlement sur l’AE présentent un nouveau projet pilote national de travail pendant une période de prestations, projet qui a d’une durée de trois ans, du 5 août 2012 au 1er août 2015. Le projet pilote no 18, Projet pilote visant à encourager le prestataire à travailler davantage pendant qu’il reçoit des prestations, réduit les prestations de 50 % de la rémunération reçue pendant la période de prestations dès le premier dollar gagné et a pour objectif de s’assurer que les prestataires bénéficient du fait de travailler davantage. [page 1455]
    2. Lancer un nouveau projet pilote de travail pendant une période de prestations, le projet pilote no 18, Projet pilote visant à encourager le prestataire à travailler davantage pendant qu’il reçoit des prestations, afin de vérifier une nouvelle approche créant des mesures incitatives à accepter davantage de travail disponible pendant une période de prestations d’AE. [page 1458]
  3. c) Un extrait d’une publication de recherche du 23 janvier 2013 de la Bibliothèque du Parlement, intitulée « L’assurance-emploi : dix changements apportés en 2012-2013 », tiré de la section Justification (RGD5-9) :
    1. Les prestataires d’assurance-emploi qui entretiennent des liens et une activité sur le marché du travail ont tendance à trouver un emploi permanent plus rapidement que les autres. Dans le cadre du projet pilote Travail pendant une période de prestations, les prestations d’assurance-emploi versées sont actuellement réduites d’un montant égal au revenu gagné, au-delà d’un seuil établi, ce qui décourage les prestataires d’accepter d’autres offres de travail. Le Plan d’action économique de 2012 propose un investissement de 74 millions de dollars sur deux ans pour mettre en place un nouveau projet pilote national d’assurance-emploi qui veillera à ce que les prestataires ne soient pas dissuadés d’accepter du travail pendant qu’ils reçoivent leurs prestations.

Observations

[16] La prestataire a soutenu ce qui suit (GD2, RGD3, RGD5) :

  1. Même si sa pension est considérée comme une rémunération et doit être répartie en application des articles 35 et 36 du Règlement, sa pension devrait être déduite de ses prestations conformément au paragraphe 19(2) de la Loi, et non au paragraphe 19(2.1).
  2. La Commission n’a pas le pouvoir en vertu de l’article 109 de la Loi de « modifier » la Loi; elle a seulement le pouvoir d’en « adapter » les dispositions en vigueur. La création du paragraphe 19(2.1) constitue une modification de la Loi qui n’est pas autorisée par l’article 109 de la Loi.
  3. L’application des dispositions d’une règle (article 77.95), créées pour faire entrer en vigueur un projet pilote visant à faire augmenter la rémunération des personnes travaillant davantage tout en touchant des prestations, à d’autres types de rémunérations, comme son revenu de pension, constituerait un déni de justice naturelle, et non l’intention du législateur.
  4. L’adoption de l’article 77.95 du Règlement n’a ni modifié ni suspendu le paragraphe 19(2). Celui-ci demeure donc inchangé malgré l’adjonction du paragraphe 19(2.1), et les deux sont en vigueur : on devrait avoir recours au paragraphe 19(2) de la Loi pour déduire sa pension pour qu’elle profite d’une prestation plus importante (GD2-2).
  5. Le paragraphe 19(3) est toujours en vigueur aujourd’hui et n’a pas été abrogé avec l’article 15 du Règlement; la précision « sous réserve des paragraphes (3) et (4) » figure au paragraphe 19(2), ce qui signifie que le paragraphe 19(3), utilisé conjointement au paragraphe 19(2) de la Loi, permet de calculer le trop-payé. Une fois sa pension réputée « rémunération non déclarée », elle aurait dû être déduite par application du sous-alinéa 19(2)a)(ii) de la Loi. La jurisprudence où la Commission a recouru au paragraphe 19(3) pour recouvrer un trop-payé découlant d’une rémunération non déclarée montre que le paragraphe 19(3) était toujours pertinent dans Fournier c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 138 et CUB 42966.

[17] La Commission a soutenu ce qui suit (RGD2, RGD4, RGD6) :

  1. Elle a correctement réparti la rémunération de la prestataire en ayant recours aux articles 35 et 36 du Règlement et correctement déduit cette rémunération conformément au paragraphe 19(2.1) de la Loi d’une manière qui est adaptée au paragraphe 77.95(3) du Règlement.
  2. L’article 109 de la Loi lui confère clairement l’autorité, avec l’approbation du gouverneur en conseil, de créer des règles afin de mettre à l’essai des modifications à la Loi. L’article 77.95 du Règlement a été correctement établi conformément à son pouvoir en vertu de l’article 109 de la Loi.
  3. L’article 77.95 du Règlement ne change pas la définition du mot « rémunération » applicable à l’article 19 de la Loi et il a pour but qu’une déduction soit appliquée à toute rémunération; il convient donc de l’appliquer à son revenu de pension et il ne s’agit pas là d’un manquement aux principes de justice naturelle.
  4. Les paragraphes 19(2) et 19(2.1) de la Loi doivent être pris en considération de façon conjointe en remplaçant le montant à déduire selon le paragraphe 19(2) par le nouveau montant prévu au paragraphe 19(2.1). La seule exception concerne l’article 13, pour lequel le montant à déduire conformément au paragraphe 19(2) demeure en vigueur.
  5. Le paragraphe 19(3) de la Loi traite de la rémunération non déclarée. Le revenu de pension de la prestataire a bien été réparti et déduit de ses prestations conformément aux dispositions transitoires prévues au paragraphe 14.1 du Règlement après l’abrogation de l’article 15 du Règlement, le 12 août 2001. À compter du 12 août 2011, toute rémunération déclarée ou non déclarée devait être répartie et déduite des prestations conformément au paragraphe 19(2) ou au paragraphe 19(2.1), après l’entrée en vigueur du projet pilote no 18. La jurisprudence invoquée par la prestataire porte sur une rémunération non déclarée pour des périodes d’emploi précédant l’abrogation de l’article 15 du Règlement.

Analyse

[18] Les dispositions législatives pertinentes figurent en annexe de la présente décision.

[19] La question que le Tribunal doit trancher est de savoir si la pension de retraite du RPC de la prestataire a bien été répartie sur sa période de prestations et déduite de celles-ci conformément aux articles 35, 36 et 77.95 du Règlement. Les parties conviennent que la pension de retraite du RPC de la prestataire a valeur de rémunération en application de l’article 35 du Règlement et qu’elle devrait être répartie conformément au paragraphe 36(14) du Règlement. Cependant, les parties ne s’entendent pas sur la façon dont la pension de retraite du RPC de la prestataire doit, une fois répartie, être déduite de ses prestations. Voilà la seule question sur laquelle le Tribunal doit statuer.

[20] La prestataire a soutenu que sa pension devrait être déduite de ses prestations conformément au paragraphe 19(2) de la Loi et que, si sa pension est réputée « rémunération non déclarée », elle devrait être déduite de ses prestations en application du sous-alinéa 19(3)a)(ii) de la Loi. La Commission, pour sa part, a soutenu qu’elle avait convenablement déduit cette rémunération conformément au paragraphe 19(2.1) de la Loi, tel qu’adapté au paragraphe 77.95(3) du Règlement.

[21] À l’appui de sa position, la prestataire avance ce qui suit : (a) la Commission n’est pas habilitée à « modifier » la Loi comme elle l’a fait en créant le paragraphe 19(2.1); (b) l’article 77.95 du Règlement a permis l’entrée en vigueur d’un projet pilote visant à encourager le prestataire à travailler davantage pendant qu’il reçoit des prestations et il n’avait pas comme but d’être appliqué à d’autres types de rémunérations, comme son revenu de pension; (c) le paragraphe 19(3) est toujours en vigueur aujourd’hui et n’a pas été abrogé avec l’article 15 du Règlement; et enfin, (d) le paragraphe 19(2) demeure inchangé malgré l’ajout du paragraphe 19(2.1); ces deux paragraphes sont donc en vigueur et c’est le paragraphe 19(2) de la Loi qui devrait être utilisé pour déduire sa pension de ses prestations.

[22] Le membre a examiné les arguments présentés par la prestataire et, pour les motifs qui suivent, il juge que la Commission a correctement déduit la pension de retraite du RPC de ses prestations, conformément à l’article 77.95 du Règlement et au paragraphe 19(2.1) de la Loi.

La Commission est-elle habilitée à modifier la Loi? Avait-elle l’autorité législative pour créer des projets pilotes (les projets pilotes no 17 et no 18)?

[23] Selon la prestataire, l’article 109 de la Loi ne confère pas à la Commission l’autorité pour la « modifier » mais seulement pour en « adapter » les dispositions existantes. Monsieur Evans a soutenu durant l’audience que la Commission avait utilisé l’autorité qui lui est conférée par l’alinéa 109d) de la Loi pour créer le paragraphe 19(2.1), et qu’elle avait ainsi apporté une modification à Loi qui n’est pas sanctionnée par l’article 109, au lieu d’en adapter des dispositions existantes.

[24] De son côté, la Commission a fait valoir que l’article 109 de la Loi lui confère clairement l’autorité, avec l’agrément du gouverneur en conseil, de prendre des règlements pour mettre à l’essai des modifications à la Loi. La Commission a souligné que l’emploi de l’expression « malgré les autres dispositions de la présente loi » l’autorise à prendre des règlements visant l’établissement de projets pilotes qui seraient contraires à la Loi, pourvu que ces règlements aient pour but de déterminer, après mise à l’essai, quelles modifications pourraient être apportées à la Loi ou à ses règlements. Elle a également soutenu que l’emploi du terme « notamment », avant l’énumération de règlements, révèle qu’il s’agit d’une liste non exhaustive des types de règlements que peut prendre la Commission. La Commission est donc d’avis qu’elle était en droit de créer l’article 77.95 du Règlement (le projet pilot no 18) en vertu de l’autorité que lui confère l’article 109 de la Loi.

[25] L’article 109 édicte que, malgré les autres dispositions la Loi, la Commission peut, avec l’agrément du gouverneur en conseil, prendre les règlements qu’elle juge nécessaires visant l’établissement et le fonctionnement de projets pilotes ayant pour but de déterminer, après mise à l’essai, quelles modifications pourraient être apportées à la Loi ou à ses règlements afin de les harmoniser avec les pratiques, les tendances et les modèles suivis par l’industrie en matière d’emploi ou d’améliorer les services offerts à la population, notamment dans les situations décrites aux alinéas a) et d).

[26] Le membre juge donc que la Commission est habilitée à prendre des règlements pour mettre à l’essai des modifications possibles à la Loi et à ses règlements. Il va sans dire que la Commission doit, de façon à mettre à l’essai les modifications possibles, modifier la Loi ou les règlements. Le membre ne souscrit pas au point de vue de la prestataire, qui affirme que la Commission ne peut pas, conformément à l’alinéa 109d) de la Loi, modifier la Loi mais seulement en adapter des dispositions existantes. L’alinéa 109 de la Loi prévoit que la Commission peut rendre de tels règlements, y compris des règlements prévoyant selon quelles modalités et dans quelle mesure telles dispositions de la Loi ou de ses règlements s’appliquent à un projet pilote et adaptant ces dispositions à cette application. Autrement dit, la Commission peut prendre des règlements visant l’établissement de projets pilotes et ayant pour but de mettre à l’essai des modifications possibles à la Loi et à ses règlements, et elle peut prendre de tels règlements en adaptant des dispositions existantes de la Loi ou de ses règlements qui s’appliquent au projet pilote. Le membre juge donc que la Commission, avec l’agrément du gouverneur en conseil, peut modifier tout comme adapter des dispositions existantes de la Loi ou de ses règlements, aux fins de l’article 109 de la Loi.

[27] Le membre est également d’accord avec la position de la Commission, qui a avancé que l’expression « malgré les autres dispositions de la présente loi » l’autorise à prendre des règlements qui seraient contraires à la Loi, pourvu que ces règlements visent l’établissement de projets pilotes dans le cadre de cet article. Enfin, le membre souscrit à la position de la Commission voulant que l’emploi du terme « notamment » précédant l’énumération des types de règlements que peut prendre la Commission suppose que cette liste est non exhaustive.

[28] Par conséquent, le membre conclut que la Commission avait l’autorité législative de créer les projets pilotes no 17 et no 18. La Commission était en droit, avec l’agrément du gouverneur en conseil, de prendre/créer un règlement, en l’occurrence l’article 77.95 du Règlement, pour donner effet au projet pilote no 18, qui mettait à l’essai une modification à la Loi, soit le paragraphe 19(2.1) de la Loi.

Le projet pilote no 18 et l’article 77.95 du Règlement s’appliquent-ils à un revenu gagné pendant une période de prestations qui n’est pas un revenu d’emploi, ou doit-on appliquer à un tel revenu le paragraphe 19(2), tel que prévu par la Loi?

[29] La prestataire soutient que l’article 77.95 du Règlement a été adopté pour donner effet au projet pilote no 18 de « Travail pendant une période de prestations », qui devait viser uniquement la rémunération tirée du travail (comme un salaire). Le projet pilote ne s’applique donc pas dans son cas puisqu’elle n’avait pas travaillé durant la période où elle avait touché des prestations d’assurance-emploi et que sa rémunération provenait d’une pension. La prestataire a soutenu que le projet pilote no 18 vise strictement à encourager les prestataires à travailler davantage tout en touchant des prestations, et qu’il s’applique uniquement au revenu d’emploi. L’application de ce projet pilote à son revenu de pension est un déni de justice naturelle et ne représente pas l’intention du législateur. La prestataire a affirmé qu’il existe un écart entre l’intention du législateur et ce que la Commission a véritablement édicté à l’article 77.95 du Règlement, précisant qu’elle n’a pas rendu compte du fait que tous les documents font référence à une rémunération perçue « en travaillant ».

[30] En appui à sa position, la prestataire mentionne d’abord l’annonce qui a été faite au moment de son adoption. Elle invoque la déclaration du ministre selon laquelle l’objectif du projet pilote était d’encourager les prestataires à conserver une plus grande partie de la rémunération qu’ils touchent [traduction] « lorsqu’ils travaillent » (RGD5-7). De plus, la publication parue dans la Gazette du Canada et le communiqué de presse du gouvernement du Canada présentaient le même propos, à savoir que le projet pilote incite les prestataires à accepter davantage de travail disponible pendant une période de prestations d’assurance-emploi, et a pour objectif de s’assurer que les prestataires bénéficient du fait de travailler davantage (RGD4-47 et RGD5-2).

[31] De plus, la prestataire a fait référence aux publications de recherche de la Bibliothèque du Parlement, précisant que la justification à l’origine du projet pilote no 18 était d’encourager les prestataires à accepter d’autres offres de travail, et de ne pas les en dissuader comme le faisait parfois le projet pilote no 17 déjà en place (RGD5-9). Cependant, en adoptant le projet pilote no 18, la Commission a seulement permis aux prestataires de choisir s’ils étaient déjà en période de prestations avant le nouveau projet pilote no 18, soit avant le 5 août 2012, ce qui n’était pas l’intention du législateur. La prestataire a avancé que l’intention du législateur était de permettre à tous les prestataires de choisir entre l’ancienne disposition 19(2), et la nouvelle, 19(2.1), selon ce qui les avantagerait.

[32] Enfin, la prestataire a affirmé que le projet pilote no 18 ne s’applique pas à toute rémunération, comme le prétend la Commission, comme une exception avait été prévue pour les prestations de maternité et de maladie, qui n’étaient pas touchées par le projet pilote (Bibliothèque du Parlement, rubrique 5.2 à RGD5-9). Durant l’audience, monsieur Evans a ajouté que la rémunération dont il est question au paragraphe 47(2) du Règlement n’avait pas été incluse à l’article 77.95, ce qui contredit l’argument de la Commission voulant que l’article 77.95 (projet pilote no 18) s’applique à « toute rémunération ».

[33] En réponse à cela, la Commission a soutenu que l’article 77.95 du Règlement ne modifie pas la définition de la « rémunération » applicable à l’article 19 de la Loi et que son intention était que les déductions soient appliquées à toute rémunération. Il convient donc d’appliquer à son revenu de pension l’article 77.95 du Règlement et il ne s’agit pas d’un manquement aux principes de justice naturelle.

[34] Le membre convient que la pension de retraite du RPC que touche la prestataire est une « rémunération » au sens de l’alinéa 35(2)e) du Règlement et que, conformément au paragraphe 36(14) du Règlement, cette rémunération provenant de sa pension doit être répartie sur la période pour laquelle elle est payée ou payable. Le membre est d’accord avec la Commission qu’il est clair, d’après le paragraphe 77.95(1) du Règlement, que le projet pilote no 18 s’applique à toute rémunération telle que définie par le Règlement.

[35] Le membre prend acte des observations de la prestataire et des références qu’elle a faites aux publications datant de l’entrée en vigueur du projet pilote no 18. Cela dit, le membre estime que telles références ne peuvent faire autorité et être considérées indépendamment de la législation comparable adoptée pour donner effet au projet pilote no 18. Le membre estime qu’il faut tenir compte du contexte global de la législation en matière d’assurance-emploi, de son objectif et du libellé de l’article 77.95 adopté dans le Règlement.

[36] En l’espèce, le membre juge que l’intention du législateur est évidente compte tenu du langage clair utilisé à l’article 77.95 du Règlement, qui édicte clairement que l’objectif du projet pilote no 18 est de vérifier si « […] le fait de déduire des prestations payables à tout prestataire qui reçoit une rémunération pendant une semaine de chômage […] encouragerait les prestataires à travailler davantage tout en recevant des prestations. » L’objectif de ce règlement et projet pilote ne change aucunement la définition du terme « rémunération » prévue à l’alinéa 35(2)e) du Règlement. Par conséquent, il ne fait aucun doute que toute somme versée à titre de pension a valeur de rémunération. De plus, le paragraphe 35(2) du Règlement prévoit que « […] la rémunération qu’il faut prendre en compte pour […] fixer le montant à déduire des prestations à payer en vertu de l’article 19 […] ». Le membre juge donc que, comme le projet pilote no 18 a créé le paragraphe 19(2.1) et qu’il se rattache donc à l’article 19 de la Loi, la définition du terme « rémunération » qui englobe une pension de retraite du RPC s’applique également au paragraphe 19(2.1).

[37] Le membre constate que le projet pilote no 18 avait donc pour but de vérifier si la déduction de la rémunération (au sens du Règlement) des prestations payables au prestataire encouragerait celui-ci à travailler davantage tout en recevant des prestations. Si le législateur souhaitait vérifier uniquement, dans le cadre du projet no 18, l’effet de la déduction des sommes payables à un prestataire pour un travail effectué, c’est-à-dire des salaires, il l’aurait expressément indiqué. Ainsi, si le législateur avait eu l’intention d’inclure strictement la rémunération tirée du travail, le projet pilote no 18 aurait également modifié la définition de la rémunération figurant à l’article  35 du Règlement. Enfin, le membre estime que l’interprétation voulant que le terme « rémunération » à l’article 77.95 du Règlement s’entend de toute rémunération au sens de l’article 35 du Règlement ne donne pas lieu à un résultat absurde. En effet, il n’est pas déraisonnable de vérifier si le fait de déduire des prestations payables à un prestataire toute rémunération, y compris des revenus de pensions, encouragerait le prestataire à travailler davantage comme il peut travailler et toucher des prestations du RPC en même temps.

[38] Le membre ne souscrit pas non plus à la position de la prestataire, qui croit que le législateur voulait que les prestataires puissent choisir entre les projets pilotes no 17 et no 18 (et donc, entre les paragraphes 19(2) et 19(2.1)), en fonction de celui qui les avantage et indépendamment du moment où ils ont demandé des prestations. Cependant, tous les prestataires ne disposent pas d’un tel choix. Le membre constate que seuls les prestataires visés par le projet pilote no 17 ayant eu une rémunération entre le 7 août 2011 et le 4 août 2012 pouvaient choisir entre les projets pilotes no 17 et 18. Leur choix, une fois communiqué à la Commission, était irrévocable. De plus, le paragraphe 77.95(2) du Règlement prévoit que le projet pilote no 18 vise le prestataire qui présente une demande de prestations pour toute semaine au cours de la période commençant le 5 août 2012 et se terminant le 1er août 2015 et qui réside habituellement dans une région définie à l’annexe I. Le membre n’est pas d’accord que le langage clair et non équivoque choisi à l’adoption du paragraphe 77.95(2) du Règlement ne reflète pas l’intention du législateur.

[39] Quant à l’exception pour les prestations de maternité et de maladie à laquelle la prestataire a fait référence, le membre s’entend avec la Commission pour dire qu’elle n’est pas pertinente à son argumentaire. L’exception se rapporte au fait que les prestations de maternité et de maladie ne sont pas visées par le projet pilote no 18 et que « toute rémunération gagnée pendant qu’elles reçoivent ces prestations réduit celles-ci de 100 % du montant de la rémunération, ce qui a toujours été le cas » (Bibliothèque du Parlement, rubrique 5.1 à RGD5-9). Cela signifie simplement que le projet pilote no 18 ne s’applique pas dans le cas de certains « types de prestations » qui n’autorisent pas un prestataire à travailler ni à recevoir une rémunération lorsqu’ils touchent de telles prestations. Cette exception n’a rien à voir avec le « type de rémunération » que reçoit le prestataire, comme elle le disait dans son argument. Un prestataire qui reçoit des prestations de maternité ou de maladie n’est pas autorisé à recevoir concurremment « une rémunération » et il est donc logique, de ce fait, que le projet pilote no 18 ne s’applique pas dans ces cas. De plus, les paragraphes 21(3) et 22(5) de la Loi édictent que le paragraphe 19(2) de la Loi ne s’applique pas aux prestations de maternité et de maladie.

[40] Dans le même ordre d’idées, le paragraphe 47(2) du Règlement auquel la prestataire a fait référence ne soutient pas son argument voulant que le projet pilote no 18 s’applique uniquement à la rémunération reçue du travail ou, inversement, qu’il réfute la position de la Commission selon laquelle il s’applique à toute rémunération. L’article 47 du Règlement fait expressément référence à la rémunération reçue d’un emploi en travail partagé. Conformément au paragraphe 47(2) du Règlement, lorsque le prestataire reçoit, pour une semaine donnée, une rémunération d’une source autre que son emploi en travail partagé, le montant établi aux termes du paragraphe 19(2) de la Loi est déduit des prestations pour travail partagé qui lui sont payables pour cette semaine. La prestataire avance donc que cette disposition du Règlement montre que la « rémunération » à laquelle fait référence l’article 77.95 du Règlement ne comprend pas tous les « types » de rémunérations. Le membre constate cependant, pour les raisons qui suivent, que la rémunération reçue d’un emploi partagé durant la période où le projet pilote no 18 était en vigueur était, comme n’importe quelle rémunération, déduite des prestations payables au prestataire conformément aux paragraphes 19(2) et 19(2.1) de la Loi et aux modifications apportées par ce dernier. Le membre conclut donc que le paragraphe 47(2) du Règlement ne réfute pas la position de la Commission selon laquelle l’article 77.95 du Règlement s’applique à toute rémunération au sens du Règlement.

La réduction des prestations de la prestataire doit-elle être calculée conformément au paragraphe 19(2) de la Loi ou du paragraphe 19(2.1) de la Loi tel qu’adapté par le paragraphe 77.95(3) du Règlement, comme les deux dispositions étaient en vigueur au moment de sa demande?

[41] La période de prestations de la prestataire a débuté le 13 juillet 2014 et des prestations régulières d’assurance-emploi lui ont été versées jusqu’au 25 avril 2015. À compter du 1er juillet 2014, la prestataire recevait aussi une pension de retraite du RPC. Il n’est pas contesté que la pension de retraite du RPC touchée par la prestataire a valeur de « rémunération » au sens de l’alinéa 35(2)e) du Règlement. Il est aussi entendu que cette rémunération doit être répartie sur la période pour laquelle elle est payée ou payable, soit à partir du 1er juillet 2014, en application du paragraphe du paragraphe 36(14) du Règlement.

[42] Le membre constate que l’article 77.94 du Règlement, qui donne effet au projet pilote no 17 et auquel la prestataire avait initialement fait référence, ne s’applique pas en l’espèce puisqu’il est uniquement applicable à la rémunération reçue entre le 7 août 2011 et le 4 août 2012. Comme la prestataire n’a pas reçu de rémunération durant cette période, l’article 77.96 du Règlemente ne s’applique pas à cette affaire non plus. La prestataire ne pouvait donc pas choisir entre le projet pilot no 17 et le projet pilote no 18. Pour la période durant laquelle la prestataire touchait une pension de retraite du RPC, l’article 77.95 avait été adopté pour donner effet au projet pilote no 18, qui s’appliquait à tout « prestataire qui présente une demande de prestations pour toute semaine au cours de la période commençant le 5 août 2012 et se terminant le 1er août 2015 ». Le membre juge donc que le projet pilote no 18 s’applique au cas de la prestataire.

[43] Le paragraphe  77.95(3) du Règlement prévoit que, pour les besoins du projet pilote no 18, l’article 19 de la Loi est adapté par adjonction du paragraphe 19(2.1) après le paragraphe 19(2) de la Loi. Le paragraphe 19(2.1) précise le montant de la rémunération à déduire en vertu du paragraphe 19(2) de la Loi (sauf pour l’application de l’article 13).

[44] La prestataire a soutenu que l’adoption de l’article 77.95 du Règlement n’a ni modifié ni suspendu le paragraphe19(2) et que celui-ci demeurait donc inchangé malgré l’adjonction du paragraphe 19(2.1) et que les deux paragraphes étaient concurremment en vigueur. Elle a aussi soutenu que ce n’est pas le paragraphe 19(2.1) mais le paragraphe 19(2) qui devrait être utilisé pour déduire sa pension de ses prestations comme celui-ci est plus avantageux pour elle.

[45] Le membre convient que le paragraphe 19(2) n’a pas été « suspendu » ni rendu inopérant durant le projet pilote no 18 puisque, pour l’application de l’article 13, la rémunération devait être déduite des prestations conformément au paragraphe 19(2). Cependant, le membre n’est pas d’accord avec la prestataire, quand elle affirme que le montant de sa pension devrait être déduit de ses prestations conformément au paragraphe 19(2) du fait que celui-ci est plus avantageux pour elle. Le Règlement ne prévoit aucunement cette façon de déduire la rémunération. Le membre estime qu’il est clair, au paragraphe 77.95(3), que l’article 19 de la Loi a été modifié pour la durée du projet pilote par l’adjonction du paragraphe 19(2.1), qui est la disposition conformément à laquelle la rémunération doit être déduite des prestations payables, sauf pour l’application de l’article 13 de la Loi. Ainsi, pour la durée du projet pilote no 18, la rémunération doit être déduite des prestations en conformité avec le paragraphe 19(2.1) et non avec le paragraphe 19(2) de la Loi. 

S’il est conclu que la réduction des prestations de la prestataire est effectivement calculée par application du paragraphe 19(2.1), la calcul du trop-payé peut-il seulement s’effectuer par application du sous-alinéa 19(3)a)(ii) en vertu de la Loi?

[46] Il n’est pas contesté que, même si la prestataire avait déclaré qu’elle touchait une pension de survivant depuis plusieurs années quand elle a présenté sa demande de prestations régulières d’assurance-emploi, elle n’avait pas informé la Commission lorsqu’elle avait commencé à recevoir sa pension de retraite du RPC à compter du 1er juillet 2014 (GD3-32). Le membre constate donc que la pension de retraite de la prestataire était une rémunération non déclarée qui avait dû être répartie et déduite de façon rétroactive des prestations qui lui avaient déjà été versées.

[47] La prestataire est d’avis que sa pension de retraite, une fois réputée rémunération non déclarée, aurait dû être déduite de ses prestations conformément au sous-alinéa 19(3)a)(ii) de la Loi. La prestataire a aussi soutenu que le paragraphe 19(3) demeurait en vigueur et n’avait pas été remplacé par l’article 15 du Règlement, comme l’avait soutenu la Commission. La prestataire a noté que d’autres dispositions le montrent, comme le paragraphe 19(2) où figure l’expression « [s]ous réserve des paragraphes (3) et (4) », ainsi que le paragraphe 39(1) du Règlement et les paragraphes 22(5) et 38(2) de Loi. La prestataire a noté que c’était donc le paragraphe 19(3), jumelé au paragraphe 19(2) de la Loi, qui devait être utilisé pour calculer un trop-payé. Enfin, la prestataire a affirmé que le fait que la Commission a utilisé le paragraphe 19(3) pour recouvrer un trop-payé de prestations découlant d’une rémunération non déclarée dans des causes comme Fournier c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 138 et CUB  42966, montre que le paragraphe 19(3) de la Loi est toujours pertinent.

[48] Bien que le membre comprenne les arguments avancés par la prestataire, il n’est d’accord avec aucun d’eux. D’abord, le paragraphe 19(3) prévoit que, si un prestataire a omis de déclarer à la Commission tout ou partie de la rémunération qu’il a reçue à l’égard d’une période, « déterminée conformément aux règlements, pour laquelle il a demandé des prestations »… La période de la rémunération non déclarée est définie à l’article 14.1 du Règlement qui, à son tour, a été abrogé par l’article 15 du Règlement en date du 15 août 2001. Le membre constate donc que le paragraphe 19(3) du Règlement est inopérant depuis le 15 août 2001 puisque le Règlement ne définit plus cette période. Ensuite, le fait que d’autres dispositions de la Loi fassent référence au paragraphe 19(3) ne signifie pas que celui-ci avait un effet après le 15 août 2001. Le membre est d’accord avec la Commission pour dire que ces autres dispositions ne sont pas pertinentes à l’espèce, et qu’elles n’étayent pas son avis selon lequel le paragraphe 19(3) de la Loi, jumelé au paragraphe 19(2), devrait être utilisé pour déduire sa rémunération non déclarée de ses prestations. Enfin, le membre n’est pas d’accord avec la prestataire pour dire que la jurisprudence remontant à l’époque où le paragraphe 19(3) de la Loi était opérant appuie son argument voulant qu’il est toujours pertinent aujourd’hui. Les deux causes qu’elle a mentionnées (Fournier c. Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2002 CAF 138 et CUB  42966) examinaient la rémunération non déclarée de prestataires avant l’abrogation de l’article 15 du Règlement, lorsque le paragraphe 19(3) était toujours oprérant. Le membre juge donc que le paragraphe 19(3) de la Loi ne s’applique pas en l’espèce.

Conclusion

[49] Le membre conclut que la pension de la prestataire a correctement été déduite de sa période de prestations conformément au paragraphe 19(2.1) de la Loi, tel qu’adapté par le paragraphe 77.95(3) et en vertu des articles 35 et 36 du Règlement.

[50] La Commission a eu raison de déduire de sa période de prestations 107 $ par semaine du 13 juillet 2014 au 31 décembre 2014 et 109 $ par semaine à partir du 1er janvier 2015. La prestataire doit rembourser une somme de 2 174 $ à la Commission.

[51] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

  1. Le paragraphe 19(2) de la Loi prévoit que, sous réserve des paragraphes (3) et (4), si le prestataire reçoit une rémunération durant toute autre semaine de chômage, il est déduit des prestations qui lui sont payables un montant correspondant à la fraction de la rémunération reçue au cours de cette semaine qui dépasse 50 $, ou vingt-cinq pour cent de son taux de prestations hebdomadaires si celui-ci est de 200 $ ou plus.
  2. Le paragraphe 19(3) de la Loi prévoit que, lorsque le prestataire a omis de déclarer à la Commission tout ou partie de la rémunération qu’il a reçue à l’égard d’une période, déterminée conformément aux règlements, pour laquelle il a demandé des prestations :
    1. a) la Commission déduit des prestations versées à l’égard de cette période un montant correspondant :
      1. (i) à la rémunération non déclarée pour cette période, si elle estime que le prestataire a sciemment omis de déclarer tout ou partie de cette rémunération,
      2. (ii) dans tout autre cas, à celui obtenu par soustraction, du total de la rémunération non déclarée qu’il a reçue pour cette période, de la différence entre l’exemption à laquelle il a droit, pour cette période, au titre du paragraphe (2) et celle dont il a bénéficié;
    2. b) ce montant est déduit des prestations versées à l’égard des semaines commençant par la première semaine à l’égard de laquelle la rémunération n’a pas été déclarée, de sorte que le montant de la déduction pour chaque semaine consécutive soit égal au montant des prestations versées au prestataire pour chacune de ces semaines.
  3. Le paragraphe 109 de la Loi prévoit que, malgré les autres dispositions de la présente loi, la Commission peut, avec l’agrément du gouverneur en conseil, prendre les règlements qu’elle juge nécessaires visant l’établissement et le fonctionnement de projets pilotes ayant pour but de déterminer, après mise à l’essai, quelles modifications pourraient être apportées à la présente loi ou à ses règlements afin de les harmoniser avec les pratiques, les tendances et les modèles suivis par l’industrie en matière d’emploi ou d’améliorer les services offerts à la population, notamment :
    1. a) concernant les modalités de temps ou autre selon lesquelles un employeur remet à ses employés, actuels ou anciens, ou à la Commission l’information relative à leurs services;
    2. b) prévoyant, dans le cadre d’un projet pilote, la prise en compte, selon le cas :
      1. (i) d’une rémunération brute, au sens prévu par règlement, ou de montants prévus par règlement en fonction de celle-ci, dans tous les cas où la présente loi prend en compte une rémunération assurable, un maximum de la rémunération assurable ou une rémunération hebdomadaire assurable,
      2. (ii) de périodes autres que la semaine dans tous les cas où la présente loi prend en compte celle-ci ou ses multiples;
    3. c) prévoyant l’application d’un projet pilote à l’égard de l’une ou plusieurs des catégories suivantes :
      1. (i) des employeurs ou des groupes ou catégories d’employeurs, notamment des groupes ou catégories d’employeurs choisis au hasard, visés par règlement,
      2. (ii) des régions visées par règlement,
      3. (iii) des prestataires, des employés, actuels ou anciens, ou des groupes ou catégories de prestataires ou d’employés, actuels ou anciens, notamment ceux choisis au hasard, visés par règlement;
    4. d) prévoyant selon quelles modalités et dans quelle mesure telles dispositions de la présente loi ou de ses règlements s’appliquent à un projet pilote et adaptant ces dispositions à cette application.
  4. Le paragraphe 35 (1) du Règlement prévoit que les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.
  5. emploi
    1. a) Tout emploi, assurable, non assurable ou exclu, faisant l’objet d’un contrat de louage de services exprès ou tacite ou de tout autre contrat de travail, abstraction faite des considérations suivantes :
      1. (i) des services sont ou seront fournis ou non par le prestataire à une autre personne,
      2. (ii) le revenu du prestataire provient ou non d’une personne autre que celle à laquelle il fournit ou doit fournir des services;
    2. b) tout emploi à titre de travailleur indépendant, exercé soit à son compte, soit à titre d’associé ou de coïntéressé;
    3. c) l’occupation d’une fonction ou charge au sens du paragraphe 2(1) du Régime de pensions du Canada. (employment)
  6. pension Pension de retraite provenant de l’une des sources suivantes :
    1. a) un emploi ou un emploi à titre de membre des forces armées ou de toute force policière;
    2. b) le Régime de pensions du Canada;
    3. c) un régime de pension provincial. (pension)
  7. revenu Tout revenu en espèces ou non que le prestataire reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne, notamment un syndic de faillite. (income)
  8. Le paragraphe 35(2) du Règlement prévoit que, sous réserve des autres dispositions du présent article, la rémunération qu’il faut prendre en compte pour vérifier s’il y a eu l’arrêt de rémunération visé à l’article 14 et fixer le montant à déduire des prestations à payer en vertu de l’article 19, des paragraphes 21(3), 22(5), 152.03(3) ou 152.04(4), ou de l’article 152.18 de la Loi, ainsi que pour l’application des articles 45 et 46 de la Loi, est le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi, notamment :
    1. a) les montants payables au prestataire, à titre de salaire, d’avantages ou autre rétribution, sur les montants réalisés provenant des biens de son employeur failli;
    2. b) les indemnités que le prestataire a reçues ou recevra pour un accident du travail ou une maladie professionnelle, autres qu’une somme forfaitaire ou une pension versées par suite du règlement définitif d’une réclamation;
    3. c) les indemnités que le prestataire a reçues ou a le droit de recevoir, sur demande, aux termes :
      1. (i) soit d’un régime collectif d’assurance-salaire,
      2. (ii) soit d’un régime de congés payés de maladie, de maternité ou d’adoption,
      3. (iii) soit d’un régime de congés payés pour soins à donner à un ou plusieurs enfants visés aux paragraphes 23(1) ou 152.05(1) de la Loi,
      4. (iv) soit d’un régime de congés payés pour soins ou soutien à donner à un membre de la famille visé aux paragraphes 23.1(2) ou 152.06(1) de la Loi,
      5. (v) soit d’un régime de congés payés pour soins ou soutien à donner à un enfant gravement malade,
      6. (vi) soit d’un régime de congés payés pour soins ou soutien à donner à un adulte gravement malade;
    4. d) malgré l’alinéa (7)b) et sous réserve des paragraphes (3) et (3.1), les indemnités que le prestataire a reçues ou a le droit de recevoir, sur demande, dans le cadre d’un régime d’assurance-automobile prévu par une loi provinciale pour la perte réelle ou présumée du revenu d’un emploi par suite de blessures corporelles, si les prestations payées ou payables en vertu de la Loi ne sont pas prises en compte dans l’établissement du montant que le prestataire a reçu ou a le droit de recevoir dans le cadre de ce régime;
    5. e) les sommes payées ou payables au prestataire, par versements périodiques ou sous forme de montant forfaitaire, au titre ou au lieu d’une pension;
    6. f) dans les cas où les prestations payées ou payables en vertu de la Loi ne sont pas prises en compte dans l’établissement du montant que le prestataire a reçu ou a le droit de recevoir en vertu d’une loi provinciale pour la perte réelle ou présumée du revenu d’un emploi, les indemnités que le prestataire a reçues ou a le droit de recevoir, sur demande, en vertu de cette loi provinciale du fait qu’il a cessé de travailler parce que la continuation de son travail mettait en danger l’une des personnes suivantes :
      1. (i) le prestataire,
      2. (ii) l’enfant à naître de la prestataire,
      3. (iii) l’enfant qu’allaite la prestataire.
  9. Le paragraphe 36 (1) du Règlement prévoit que, sous réserve du paragraphe (2), la rémunération du prestataire, déterminée conformément à l’article 35, est répartie sur un nombre donné de semaines de la manière prévue au présent article et elle constitue, aux fins mentionnées au paragraphe 35(2), la rémunération du prestataire pour ces semaines.
  10. Le paragraphe 36(14) du Règlement prévoit que les sommes visées à l’alinéa 35(2)e) qui sont payées ou payables au prestataire par versements périodiques sont réparties sur la période pour laquelle elles sont payées ou payables.
  11. Dans le cadre du projet pilote no 17, le paragraphe 77.94(1) prévoit qu’est établi le projet pilote no 17 en vue de vérifier si l’augmentation de la rémunération admissible provenant d’un emploi, pendant que le prestataire reçoit des prestations, encouragerait plus de prestataires à accepter un emploi tout en recevant des prestations.
  12. Dans le cadre du projet pilote no 17, le paragraphe 77.94(2) prévoit que le projet pilote no 17 vise le prestataire dont la période de prestations est établie ou se termine au cours de la période commençant le 7 août 2011 et se terminant le 4 août 2012 et qui réside habituellement dans une région définie à l’annexe I.
  13. Dans le cadre du projet pilote no 17, le paragraphe 77.94(3) prévoit que, pour les besoins du projet pilote no 17, le paragraphe 19(2) de la Loi est adapté afin que le montant maximal de rémunération admissible soit de :
    1. a) 75 $, si le taux de prestations hebdomadaires est de moins de 188 $;
    2. b) 40 % du taux de prestations hebdomadaires, si celui-ci est de 188 $ ou plus.
  14. Dans le cadre du projet pilote no 17, le paragraphe 77.94(4) prévoit que le présent article cesse d’avoir effet le 4 août 2012.
  15. Dans le cadre du projet pilote no 18, le paragraphe 77.95(1) prévoit qu’est établi le projet pilote no 18 en vue de vérifier si le fait de déduire des prestations payables à tout prestataire qui reçoit une rémunération pendant une semaine de chômage 50 % de cette rémunération, jusqu’à concurrence de 90 % de la rémunération hebdomadaire assurable du prestataire, encouragerait les prestataires à travailler davantage tout en recevant des prestations.
  16. Dans le cadre du projet pilote no 18, le paragraphe 77.95 (2) prévoit que le projet pilote no 18 vise le prestataire qui présente une demande de prestations pour toute semaine au cours de la période commençant le 5 août 2012 et se terminant le 1er août 2015 et qui réside habituellement dans une région définie à l’annexe I.
  17. Dans le cadre du projet pilote no 18, le paragraphe 77.95(3) prévoit que, pour les besoins du projet pilote no 18, l’article 19 de la Loi est adapté par adjonction, après le paragraphe (2), de ce qui suit :
    1. (2.1) Le montant à déduire en vertu du paragraphe (2) correspond, sauf pour l’application de l’article 13, à :
      1. a) 50 % de la rémunération, jusqu’à concurrence de 90 % de la rémunération assurable hebdomadaire du prestataire qui a été prise en compte pour établir son taux de prestations hebdomadaires;
      2. b) 100 % de la rémunération qui est supérieure à 90 % de la rémunération assurable hebdomadaire du prestataire qui a été prise en compte pour établir son taux de prestations hebdomadaires.
  18. Dans le cadre du projet pilote no 18, le paragraphe 77.95(5) prévoit que le présent article cesse d’avoir effet le 1er août 2015.
  19. Le paragraphe 77.96(1) du Règlement prévoit que le projet pilote no 18 est en outre établi en vue de vérifier laquelle des méthodes prévues aux paragraphes 77.94(3) et 77.95(3) est la plus efficace pour encourager les prestataires à travailler davantage tout en recevant des prestations.
  20. Le paragraphe 77.96(2) du Règlement prévoit que le prestataire qui a reçu une rémunération soumise au paragraphe 77.94(3) au cours de la période commençant le 7 août 2011 et se terminant le 4 août 2012 peut choisir de voir soumise à ce paragraphe, plutôt qu’au paragraphe 77.95(3), celle reçue pendant toutes les semaines de chômage comprises dans une période de prestations ou dans la partie d’une période de prestations qui tombe dans la période commençant le 5 août 2012 et se terminant le 1er août 2015. Le choix est irrévocable.
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