Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Aperçu

[1] Madame J. M. (appelante) a perdu son emploi qu’elle occupait dans la région de X et elle a fait une demande de prestations d’assurance-emploi. Dans cette demande, l'appelante a déclaré que l’employeur a refusé sa demande de congé pour assister aux funérailles de sa grand-mère qui aurait lieu en Nouvelle –Écosse.

[2] La Commission de l’assurance-emploi (Commission) a déterminé que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. En vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi), les personnes qui perdent leur emploi en raison de leur conduite ne sont pas admissibles aux prestations. Ainsi l’appelante a été exclue du bénéfice des prestations. Cette décision a été maintenue en révision, d’où l’appel dont le Tribunal est saisi.

[3] Le Tribunal doit décider si l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite en vertu de l’article 30 de la Loi.

[4] Le Tribunal a informé l’employeur que s’il voulait être ajouté comme « personne mise en cause » dans le présent dossier, il devait déposer une demande à cet effet auprès du Tribunal. L’employeur n’a pas donné suite à cette demande. Conformément au paragraphe 10(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, le Tribunal a déterminé que la décision n’intéressait pas directement l’employeur, ainsi ce dernier n’a pas été ajouté à titre de « personne mise en cause »

[5] L’appelante a participé à l’audience accompagnée de son père, J. A. qui fut le témoin de l’appelante. Cette dernière était représentée par Maître Kim Bouchard.

[6] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience Téléconférence parce que ce mode d’audience est conforme à l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[7] Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas perdu son emploi en raison de son inconduite. Les motifs de cette décision sont énoncés ci-dessous.

Preuve

[8] Le Tribunal a examiné tous les éléments de preuve à sa disposition et a déterminé les éléments de preuve suivants comme étant pertinents à la question de déterminer si l’appelante a perdu son emploi à cause de son inconduite.

[9] D’entrée de jeu, un relevé d’emploi délivré par l’employeur indique que l’appelante a été congédiée le 20 juillet 2016. Selon ce relevé d’emploi, l’appelante a accumulé 539 heures d’emploi assurables (GD3-16). La Commission a également confirmé que l’appelante a accumulé 1158 au cours de sa période de référence. (GD7-1 à GD7-3)

[10] Lors de plusieurs conversations avec la Commission, l’employeur a expliqué qu’au mois de juillet 2016, l’appelante avait fait une demande de congé allant du 13 au 23 août 2016, car elle devait assister aux funérailles de sa grand-mère en Nouvelle-Écosse. L’employeur a accepté la demande de congé tout en exigeant que l’appelante soit de retour au travail le 22 août 2016 au lieu du 23 août 2016. L’appelante a expliqué qu’elle ne pouvait revenir le 22 août 2016. Ainsi, l’employeur a déclaré avoir proposé à l’appelante qu’elle prenne l’avion pour retourner à X, afin qu’elle soit de retour au travail pour le 22 août 2016 et l’appelante semblait être ouverte à cette proposition. De ce fait, l’employeur a aidé l’appelante dans sa recherche pour trouver un billet d’avion et ils ont trouvé un billet d’avion pour la somme de 200$. Cependant, alors que l’employeur et l’appelante étaient encore en train de trouver les mesures afin que l’appelante puisse revenir plus tôt de son voyage, le père de l’appelant s’est présenté chez l’employeur pour négocier la durée du congé de l’appelante. L’employeur a expliqué que lors de ses interactions avec le père de l’appelante, le père a crié sur lui, et que la conversation a été sévère et que le père de l’appelant a fait de l’intimidation. L’employeur a décidé de congédier l’appelante, car il n’a pas apprécié le fait que le père de l’appelante s’est impliqué dans la demande de congé de l’appelante. (GD3-24 à GD3-26)

[11] L’appelante pour sa part a expliqué à la Commission, que sa demande de congé fut du 13 août 2016 au 21 août 2016 et qu’elle serait de retour au travail le 22 août 2016. L’employeur voulait lui accorder un congé du 13 au 18 août 2016, mais il n'était pas prévu qu'elle travaille les 19, 20 ni le 21 août 2016. D’ailleurs, après avoir été congédiée, elle a assisté aux funérailles de sa grand-mère et était de retour à X le 21 août 2016. Elle n’était pas avec son père lorsque ce dernier est allé au magasin donc elle ne sait pas ce qui s’est passé lors de la discussion qui a eu lieu entre son père et son employeur que son père est allé au magasin. Le 20 juillet 2016, l’employeur lui a dit que son père a été « bête « avec lui et qu’on ne pouvait lui accorder son congé du 13 au 21 août 2016 et qu’elle était congédiée. (GD3-27 et GD3-28)

[12] Dans une lettre explicative jointe à sa demande de révision, l’appelante a expliqué que son horaire de travail était le mardi et mercredi, mais qu’elle demeurait sur appel pour remplacer d’autres employés au besoin. Sa grand-mère est décédée au mois de mars 2016 et ses funérailles furent fixées pour le 17 août 2016 en Nouvelle-Écosse. Au mois de mars, l’appelante a demandé à son employeur congé durant la semaine du 17 août 2016 et sa demande de congé a été acceptée par l’employeur. Cependant au mois de juillet 2016, l’appelante a remarqué qu’il était prévu qu'elle travaille durant sa semaine de congé (semaine du 17 août 2016). Après vérification avec l’employeur, ce dernier a accepté que l’appelante s’absente du travail le 16 et 17 août 2016, cependant, l’employeur a exigé qu’elle soit de retour à X le 18 août 2016 afin d’être disponible au besoin. L’appelante a expliqué à l’employeur qu’elle ne pouvait être de retour à X le 18 août 2016, car elle voyage en automobile et la durée du trajet est de deux jours. Ne sachant plus quoi faire l’appelante a demandé à son père d’aller plaider sa cause auprès de l’employeur. Son père aurait tenté de faire comprendre à l’employeur que l’appelante ne serait absente que pendant deux jours, et qu’elle pourrait revenir au plus tard le 20 août 2016. L’employeur l’a avisé qu’elle était congédiée, car son père s’en est mêlé pour discuter à sa place avec la direction. (GD3-22)

[13] Lors de l’audience, l’appelante a fait valoir ce qui suit :

  1. Les propriétaires de l’entreprise pour laquelle elle travaillait sont Madame G. et Monsieur B.. L’appelante travaillait habituellement le mardi et le mercredi en soirée, mais il arrivait parfois qu’on l’appelle au travail alors qu’elle n’était pas cédulée pour travailler.
  2. Au mois de mars 2016, Madame G. lui a accordé son congé pour la période du 13 au 21 août 2016. Malgré ce fait, l’appelante a remarqué au mois de juillet 2016 que l'horaire de travail prévoyait qu’elle travaille le 16 et 17 août 2016. Devant ce constat, l’appelante a reformulé sa demande de congé auprès de Madame G.. Après discussion avec, Monsieur B., Madame G. a expliqué à l’appelante que Monsieur B. n’était pas d’accord pour que l’appelante prenne congé. Cependant, Madame G. a suggéré à l’appelante que cette dernière prenne l’avion pour qu’elle soit de retour de son voyage le 18 août 2016.
  3. Ne sachant pas quoi faire, l’appelante a expliqué la situation à son père et ce dernier a proposé de lui venir en aide en discutant avec l’employeur. Le mercredi 20 juillet 2016, alors que l’appelante devait travailler le soir, son père est allé au magasin pour discuter avec l’employeur. Durant la même journée, l’appelante a reçu un appel de Monsieur B.. Ce dernier était colérique parce que le père de l’appelant s’est présenté au magasin, et il lui a dit que son emploi avait pris fin.

[14] Le père de l’appelante, J. A. a témoigné de ce qui suit :

  1. Il est le père de l’appelante, et il aide l’appelante lors des situations difficiles, car l’appelante a des difficultés à s’exprimer. Cependant, c’est la première fois que J. A a dû intervenir dans la vie professionnelle de l’appelante.
  2. J. A. a témoigné que contrairement aux allégations de l’employeur, J. A. n’a nullement intimidé l’employeur en se présentant au magasin le 20 juillet 2016. Au contraire, il a eu une discussion courtoise avec Madame G.. Durant cette conversation, J. A. a fait remarquer que l’appelante ne travaille que le mardi et mercredi et que ces deux jours de congé lui ont été accordés. En ce qui a trait à l’exigence de l’employeur que l’appelante soit de retour le 18 août 2016, J. A. a expliqué à Madame G. que les coûts associés à cette exigence sont disproportionnés. En effet, pour que l’appelante prenne l’avion pour revenir le 18 août 2016, J. A. va devoir conduire pendant trois heures pour déposer l’appelante à l’aéroport d’Halifax, sans compter les coûts du billet d’avion. De plus, selon l'horaire de travail l'appelante ne travaille pas le 18 août 2016, donc elle reviendrait plus tôt uniquement pour qu'elle soit disponible au besoin. L’employeur a alors confirmé à J. A. que l’appelante et l’employeur étaient sur le point de s’entendre pour que l’appelante prenne l’avion pour revenir le 18 août 2016. J. A. a expliqué à Madame G. qu’ils peuvent revenir de leur voyage le 19 ou le 20 août 2016. Ainsi, l’appelante serait de retour à temps pour son prochain quart de travail qui était prévu pour le 22 août 2016. Ne pouvant prendre une décision, Madame G. a dit qu’elle discuterait avec Monsieur B. et qu’il leur ferait part de leur décision.
  3. Plus tard durant la journée du 20 juillet 2016, l’appelante a reçu un appel de Monsieur B. et l’appelante a passé le téléphone à son père. J. A. a témoigné que lors de cette conversation, Monsieur B., lui a dit « qu’il n’avait pas d’affaire à venir au magasin pour agresser sa femme (Madame G.) comme il l’a fait »

Arguments des parties

[15] L’avocate de l’appelante a fait valoir que la position soutenue par la Commission n’est pas soutenue par la preuve au dossier pour les raisons suivantes :

  1. Premièrement, selon la Commission, l’appelante a pris congé sans autorisation, or selon les faits au dossier, l’appelante a été congédiée le 20 juillet 2016 et sa demande de congé était pour une période postérieure à son congédiement. Plus particulièrement, l’appelante a demandé de s’absenter du 13 au 21 août 2016;
  2. Deuxièmement, contrairement aux prétentions de la Commission, l’appelante n’a pas maintenu une demande de congé qui lui a été refusée, car tel qu’il appert de la pièce GD3-25, l’employeur a déclaré que la demande de congé était encore en négociation;
  3. Troisièmement, selon l’arrêt Brissette, l’inconduite doit être la cause opérante de l’emploi, or; les faits au dossier démontrent que l’appelante a été congédiée parce que son père est intervenu dans la négociation de sa période de congé. Ce geste ne peut constituer de l’inconduite, car l’appelante ne pouvait savoir qu’en demandant à son père d’intervenir, elle courait le risque de perdre son emploi.
  4. Finalement, ce dossier ne devrait pas être analysé sous l’angle d’un départ volontaire, car il est manifeste que l’appelante a été congédiée.

[16] Pour toutes ces raisons, l’avocate de l’appelante a soutenu que la Commission ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite.

[17] De son côté, la Commission a fait valoir que le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit l’imposition d’une exclusion d’une durée indéterminée s’il est établi que la prestataire a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Pour que le geste reproché constitue de l’inconduite au sens de l’article 30 de la Loi, il faut qu’il ait un caractère volontaire ou délibéré ou qu’il résulte d’une insouciance ou d’une négligence telle qu’il frôle le caractère délibéré. Il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l’inconduite et le congédiement.

[18] La Commission a conclu que le geste de l’appelante qui consiste à prendre un congé pour une période qui ne lui était pas accordée constitue un geste d’inconduite au sens de la Loi parce qu’en ne respectant pas la décision de son employeur, l’appelante a provoqué la perte de son emploi. De ce fait, l’appelante a cessé de rencontrer un des critères de l’emploi en maintenant une demande pour un congé qui lui a été refusée.

[19] La Commission propose également que le dossier soit évalué sous l’angle du départ volontaire. En effet, selon la Commission, si l’appelante avait accepté les vacances que son employeur lui offrait, elle aurait toujours son emploi. En refusant de se conformer à une demande raisonnable de son employeur, l’appelante devient responsable de sa fin d’emploi et a créé une situation de chômage en laissant un tiers intervenir. Bien que le congédiement ait été provoqué par l’intervention du père de l’appelante, il n’en demeure pas moins que l’appelante n’a rien fait pour tenter de sauver son emploi après la discussion entre son père et l’employeur. De plus, l'appelante a affirmé que cela ne la dérangeait pas de perdre son emploi. La Commission est donc d’avis que l’appelante a fait le choix personnel de ne pas régler le différend avec son employeur et de laisser un tiers s’occuper de le régler à sa place. En agissant ainsi, l’appelante ne s’est pas comportée comme l’aurait fait une personne raisonnable dans ce cas. Dans le cas d’un départ volontaire, l’appelante ne serait donc pas justifiée de quitter son emploi pour une demande de congé qui lui a été refusée puisque ce n’est pas la seule solution raisonnable. Une solution raisonnable aurait été de trouver un terrain d’entente avec son employeur plutôt que de laisser un tiers régler l’affaire.

[20] La Commission maintient que la décision est conforme à la Loi et confirmée par la jurisprudence. En conséquence, la Commission demande au Tribunal de rejeter l’appel.

Analyse

[21] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe à la présente décision.

[22] De prime abord, la Commission a déterminé que l’appelante avait perdu son emploi en raison de son inconduite. Toutefois, dans son argumentation en appui du rejet de cet appel, la Commission soumet que l’appelante a abandonné son emploi en refusant d’accepter le refus de sa demande de congé. Ainsi, si le dossier est analysé sous l’angle d’un départ volontaire, l’appelante n’était pas justifiée à quitter volontairement son emploi, car l’appelante n’a pas épuisé toutes les solutions raisonnables pour maintenir son emploi.

[23] Le Tribunal note que la Cour d’appel fédérale a statué que même si les concepts « d’inconduite » et de « départ volontaire sans justification » sont deux notions distinctes, les deux sont traités ensemble par une exclusion en vertu du même article de la Loi qui est raisonnable, car les deux réfèrent à des situations où la perte de l’emploi est le résultat de l’action délibérée de la part de l’employé. (Borden A-338-03, Easson A-1598-92). Cependant, il faut tout de même que l’inconduite ou le départ volontaire soit appuyé par la preuve au dossier.

[24] Après avoir examiné l’ensemble de la preuve, le Tribunal remarque qu’il n’est pas contesté que l’appelante a été congédiée et l’ensemble de la preuve au dossier démontre que la question en litige devrait être analysée d’un point de vue d’inconduite. De ce fait, le Tribunal analysera la question de l’inconduite afin de déterminer si l’exclusion devrait être maintenue.

[25] Selon le paragraphe 30(1) de la Loi, un prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi s’il perd un emploi en raison de son inconduite.

[26] La Loi ne définit pas la notion d’inconduite. Cependant, la jurisprudence a établi qu’aux fins du paragraphe 30(1) de la Loi, il y a inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c’est-à-dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédié. (Mishibinijima A-85-06).

[27] Il incombe à la partie qui allègue l’inconduite de la prouver (Larivée 2007 CAF 312). À cet égard, la Commission doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite.

[28] Quels sont les gestes reprochés ?

[29] Selon la Commission, l’appelante a fait preuve d’inconduite en se comportant des manières suivantes :

  1. L’appelante a pris un congé non autorisé par son employeur; et elle aurait maintenu une demande de congé malgré le refus de l’employeur;
  2. L’intervention d’une tierce partie pour régler le différend;

Le Tribunal analysera chacun des gestes reprochés afin de déterminer s’ils ont bel et bien eurent lieu et si ces gestes constituent de l’inconduite au sens de la Loi.

L’appelante a pris un congé non autorisé par son employeur; et elle aurait maintenu une demande de congé malgré le refus de l’employeur

[30] Pour que le Tribunal puisse conclure à l’inconduite, il doit disposer des faits pertinents et d’une preuve suffisamment circonstanciés pour lui permettre, d’abord, de savoir comment l’employé a agi et, ensuite, de juger si ce comportement était répréhensible. (Meunier A-130-96; Joseph A-636-85)

[31] Est-ce que le geste reproché a eu lieu ?

[32] La Commission avance que l’appelante a fait preuve d’inconduite en prenant un congé non autorisé par son employeur. Toutefois, le Tribunal remarque que le geste reproché ne s’est pas produit.

[33] En effet, selon les témoignages de l’appelante et de son père, l’appelante a été congédiée le 20 juillet 2016. Ce fait est de plus corroboré par les déclarations de l’employeur et par le relevé d’emploi. Les parties sont d’accord que la demande de congé de l’appelante était pour le mois d’août 2016. Ainsi, contrairement à la position de la Commission, le Tribunal détermine que l’appelante n’a pas pris un congé non autorisé, car sa demande de congé était pour des dates postérieures à son congédiement.

[34] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal conclut que le geste reproché ne s’est pas produit. Ainsi, le Tribunal ne peut déterminer s’il y a eu de l’inconduite.

[35] De plus, selon la Commission, l’appelante a provoqué la perte de son emploi en maintenant sa demande de congé alors que l’employeur l’avait refusée.

[36] Le Tribunal détermine que ce geste ne s’est pas non plus produit, car la preuve au dossier démontre que la demande de congé de l’appelante avait préalablement été accordée.

[37] En effet, la preuve démontre que la demande de congé n’avait pas été refusée. Au contraire, selon la pièce GD3-24, l’employeur a expliqué que l’appelante a demandé de partir en congé du 11 août au 23 août 2016. Cette demande a été accordée à la condition que l’appelante soit de retour au travail le 22 août 2016. Afin d’aider l’appelante dans ses démarches de revenir au travail le 22 août 2016, l’employeur, a expliqué qu’il a aidé l’appelante a trouvé des billets d’avion. Et ils avaient même trouvé un billet d’avion au prix de 200$. De plus, selon la déclaration de l’employeur, au moment que l’employeur a congédié, l’employeur était en train d’aider l’appelante à trouver les moyens de transport pour qu’elle soit de retour au travail le 22 août 2016. De ce fait, le Tribunal détermine que l’appelante n’a pas maintenu une demande de congé qui avait été refusée. Ainsi, le geste reproché ne s’est pas produit.

[38] Comme mentionné précédemment, il appartient à la Commission de faire la preuve, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. Ainsi, pour que le Tribunal puisse conclure à l’inconduite de l’appelante, il doit avoir devant lui une preuve suffisante pour lui permettre de savoir comment l’appelante a agi et, ensuite, de juger si ce comportement constitue une inconduite au sens de la Loi.

[39] Force est de constater qu’en l’espèce la preuve des gestes reprochés n’existe pas. Ainsi le Tribunal ne peut juger si ce comportement constitue une inconduite au sens de la Loi.

L’intervention d’une tierce partie pour régler le différend.

[40] Par ailleurs, selon la Commission, l’appelante a fait preuve d’inconduite en laissant son père intervenir afin de régler le différend qui existait entre elle et son employeur.

[41] Le Tribunal détermine que selon l’ensemble de la preuve au dossier et des témoignages de l’appelante et de son père que ce geste s’est bel et bien produit. En effet, le père de l’appelante a témoigné qu’il est intervenu auprès de l’employeur afin de négocier avec l’employeur au nom de l’appelante. Est-ce que ce geste constitue de l’inconduite au sens de la Loi?

[42] Selon l’article 30 de la Loi, un prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd son emploi en raison de sa propre inconduite. Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Tucker, [1986] 2 C.F. 329 (C.A.F.), la Cour d’appel fédérale a établi que [...] L’inconduite, qui rend l’employé congédié inadmissible au bénéfice d’indemnités de chômage, existe lorsque la conduite de l’employé montre qu’il néglige volontairement ou gratuitement les intérêts de l’employeur, par exemple, en commettant des infractions délibérées, ou ne tient aucun compte des normes de comportement que l’employeur a le droit d’exiger de ses employés, ou est insouciant ou négligent à un point tel et avec une fréquence telle qu’il fait preuve d’une intention délictuelle [...]

[43] Dans le cas en l’espèce, l’appelante n’était pas présente lors de la conversation qui a eu lieu entre son père et Madame G.. De plus, selon la déclaration de Monsieur B., c’est bien le père de l’appelant qui aurait fait preuve d’intimidation envers Madame G.. De plus, l’employeur a confirmé que pendant qu’il parlait avec l’appelante, cette dernière a passé le téléphone à son père. Finalement, l’employeur indique clairement que n’eut été l’intervention du père de l’appelante, cette dernière n’aurait pas été congédiée. Ainsi, le Tribunal détermine que l’appelante a été congédiée à cause du comportement de son père et que ce comportement ne lui est pas attribuable. Le Tribunal estime qu’il n’existe aucun élément de preuve pour démontrer que l’appelante a manqué à une obligation fondamentale résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Tucker, A-381-85, Lemire, 2010 CAF 314). Le Tribunal considère également que l’appelante n’a pas négligé volontairement ou gratuitement les intérêts de son employeur ni fait preuve d’une intention délictuelle à son endroit (Tucker, A-381- 85).

[44] La jurisprudence enseigne qu’une inconduite est un manquement d’une portée telle que son auteur pouvait normalement prévoir qu’il serait susceptible de provoquer son congédiement (Locke 2003 FCA 262; Cartier 2001 FCA 274).

[45] Est-ce que l’appelante savait qu'elle serait probablement congédiée en permettant à son père d’intervenir ?

[46] Le Tribunal ne peut pas conclure que, dans les circonstances, la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite allait mener à son congédiement. En effet, la preuve démontre qu’au mois de mars 2016, l’employeur avait accepté la demande de congé de l’appelante pour que cette dernière assiste aux funérailles de sa grand-mère au mois d’août 2016. Ce n’est qu’en réalisant au mois de juillet 2016 que l’employeur avait tout de même prévu que l’appelante travaille durant ses journées de vacances; que l’appelante a fait part de la situation à son père et que ce dernier lui a proposé de l’aider. De plus, au moment où le père de l’appelante est intervenu, l’appelante et l’employeur étaient encore en train de trouver des solutions afin que l’appelante puisse revenir son voyage plus tôt que prévu. Conséquemment, le Tribunal détermine que l’appelante ne pouvait savoir que le geste de permettre à son père de parler à son employeur était de nature à entraver les obligations envers son employeur et qu’il était réellement possible qu’elle soit congédiée. (Tucker, A-381-85, Mishibinijima, 2007 CAF 36)

[47] Le Tribunal rappelle que dans un cas d’inconduite, le fardeau de la preuve appartient à la Commission ou à l’employeur, selon le cas (Lepretre, 2011 CAF 30 ;Granstrom, 2003 CAF 485) Le Tribunal conclut que, dans le cas présent, la Commission ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombe à cet égard.

Conclusion

[48] Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas été congédiée en raison de son inconduite. En conséquence, la décision de la Commission de l’exclure du bénéfice des prestations d’assurance-emploi n’est pas justifiée dans les circonstances.

[49] L’appel est accueilli.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi
  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. (a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. (b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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