Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est accueilli en partie et le dossier est renvoyé à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) pour une nouvelle audience devant un membre différent, uniquement sur les questions de la pénalité et de l’avis de violation.

Introduction

[2] Le 11 janvier 2017, la division générale du Tribunal a conclu que :

  • la répartition de la rémunération conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement) doit être maintenue;
  • l’imposition d’une pénalité pour avoir fait une fausse déclaration en fournissant sciemment un renseignement faux ou trompeur à l’intimée doit être maintenue aux termes de l’article 38 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi).
  • l’avis de violation émis en vertu de l’article 7.1 de la Loi doit être maintenu.

[3] L’appelante a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel le 3 février 2017. La permission d’en appeler a été accordée le 14 février 2017.

Mode d’audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la question en litige;
  • l’on ne prévoit pas que la crédibilité des parties figure au nombre des questions principales;
  • l’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des renseignements supplémentaires;
  • l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[5] L’appelante a participé à l’audience. Bien que l’intimée ait reçu l’avis d’audience, elle ne s’est pas présentée.

Droit applicable

[6]Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que la rémunération avait été répartie conformément aux articles 35 et 36 du Règlement, que la pénalité était justifiée selon l’article 38 de la Loi et que l’avis de violation avait été donné conformément à l’article 7.1 de la Loi.

Observations

[8] L’appelante fait valoir les arguments suivants au soutien de son appel :

  • La division générale a commis une erreur dans son interprétation et dans son application du critère juridique pour l’imposition d’une pénalité.
  • Les faits démontrent qu’elle ne pouvait pas savoir ou avoir dû savoir qu’elle était dans l’obligation de déclarer ses revenus.
  • L’intimée ne s’est pas acquittée de la charge qui lui incombait de démontrer que l’appelante avait sciemment transmis de faux renseignements quant aux revenus gagnés pendant un congé de maternité.
  • Son explication était raisonnable et méritait davantage d’importance et de considération dans la décision même de la division générale. Cette explication ne devait pas être considérée seulement comme un facteur atténuant dans l’évaluation de la pénalité qui a résulté du verdict d’une décision.

[9] L’intimée fait valoir les arguments suivants à l’encontre de l’appel :

  • L’appelante a travaillé auprès de Walaw Inc. qui lui versait des sommes entre le 13 janvier et le 18 mai 2013. Au cours de cette même période, l’appelante recevait des prestations parentales. Donc, l’intimée a déterminé que les sommes représentaient une rémunération conformément au paragraphe 35(2) du Règlement, et la rémunération non déclarée devait être répartie conformément à l’article 36 du Règlement.
  • La conclusion de la division générale, à savoir que l’appelante avait travaillé et avait touché une rémunération et à savoir que l’intimée avait correctement réparti cette rémunération, était raisonnable et compatible avec la preuve qui avait été acceptée.
  • L’appelante avait la connaissance subjective d’être retournée au travail pendant qu’elle touchait des prestations parentales. L’omission de déclarer un retour hâtif au travail en janvier 2013 a été faite de plein gré, même si elle a expliqué avoir compris que, puisqu’elle travaillait seulement à temps partiel, il lui était tout de même permis de réclamer des prestations parentales.
  • L’intimée a satisfait à son obligation d’établir que l’appelante avait fait 10 déclarations fausses ou trompeuses quand elle a accepté les mandats de prestations pour 18 semaines (du 13 janvier au 18 mai 2013), après son retour au travail chez Walaw.
  • De plus, bien que l’appelante ne travaillait qu’à temps partiel pendant la période en cause, sa rémunération versée par Walaw (GD3-20) était bien plus considérable que son taux de prestations. L’on soutient respectueusement qu’il n’est ni logique ni raisonnable pour l’appelante d’avoir cru, en ces circonstances, que son admissibilité aux prestations ne serait pas influencée parce qu’elle travaillait seulement à temps partiel.
  • L’on soutient respectueusement qu’il était loisible à la division générale de tirer les conclusions de fait qu’elle a tirées, et que la division générale n’a commis aucune erreur en rejetant l’appel sur cette question, puisque la décision était raisonnable, conforme à la Loi, de même qu’à la jurisprudence établie.
  • L’intimée soutient qu’elle a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière judiciaire en vertu du paragraphe 7.1(4) de la Loi lorsqu’elle a décidé d’émettre un avis de violation.
  • Rien dans la décision de la division générale ne permet de croire que celle-ci ait été partiale au détriment de la prestataire d’une façon quelconque, ou qu’elle n’ait pas fait preuve d’impartialité. La preuve ne révèle pas non plus qu’il y aurait eu un manquement à la justice naturelle dans cette affaire.

Norme de contrôle

[10] L’appelante n’a fait aucune déclaration quant à la norme de contrôle applicable.

[11] L’intimée soutient que la division d’appel ne doit aucune déférence à l’égard des conclusions de la division générale en ce qui a trait aux questions de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier. Toutefois, pour les questions mixtes de fait et de droit et pour les questions de fait, la division d’appel doit faire preuve de déférence envers la division générale. Elle ne peut intervenir que si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance – Pathmanathan c. Bureau du juge-arbitre, 2015 CAF 50.

[12] Le Tribunal constate que la Cour d’appel fédérale affirme, au paragraphe 19 de l’arrêt Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, que « [l]orsqu’elle agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la [d]ivision générale du Tribunal de la sécurité sociale, la [d]ivision d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. »

[13] La Cour d’appel fédérale poursuit en soulignant ce qui suit :

Non seulement la [d]ivision d’appel a-t-elle autant d’expertise que la [d]ivision générale du Tribunal de la sécurité sociale et n’est-elle donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale […].

[14] La Cour conclut que « [l]orsqu’elle entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi. »

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal, tel qu’il est décrit dans l’arrêt Jean,a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

[16] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Analyse

[17] L’appelante ne nie pas avoir travaillé pendant sa période de prestations ou avoir touché une rémunération provenant de Walaw Inc. pour la période du 13 janvier au 18 mai 2013.

[18] La décision de la division générale de répartir la rémunération de l’appelante à la période pendant laquelle elle était prestataire est conforme aux articles 35 et 36 du Règlement et est fondée sur la preuve au dossier.

[19] L’appelante soutient en appel que la division générale a commis une erreur dans son interprétation et dans son application du critère juridique pour l’imposition d’une pénalité.

[20] Le Tribunal juge que la décision de la division générale manque de clarté et est ambiguë. D’un côté, la division générale conclut selon la preuve que l’appelante devait avoir connaissance de sa responsabilité de déclarer ses revenus au fur et à mesure qu’elle les reçoit, et d’un autre côté, la division générale conclut que l’appelante savait qu’elle faisait une fausse déclaration. Elle a ensuite accordé une réduction de la pénalité sur la base que l’appelante était [traduction] « confuse par rapport à l’information qu’elle lisait sur le site Web, et elle ne pouvait pas comprendre l’information en parlant avec un agent », ce qui constituait l’explication de l’appelante pour avoir fait une fausse déclaration.

[21] À la révision de la décision de la division générale, il semble que la division générale a appliqué un critère objectif. La question de savoir si l’appelante avait la connaissance subjective que ses déclarations étaient fausses n’a pas clairement été posée.

[22]Afin d’imposer une pénalité à l’appelante, la division générale devait conclure, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelante savait subjectivement qu’elle faisait des déclarations fausses ou trompeuses – Canada (Procureur général) c. Bellil, 2016 CAF 107.

[23] Compte tenu de cette conclusion, la décision de la division générale relativement à l’avis de violation ne peut être maintenue.

[24] Pour tous les motifs susmentionnés, le dossier sera renvoyé à la division générale pour la tenue d’une nouvelle audience devant un membre différent, mais seulement sur les questions de l’avis de violation et de la pénalité.

Conclusion

[25] L’appel est accueilli en partie et le dossier est renvoyé à la division générale pour une nouvelle audience devant un membre différent, uniquement sur les questions de la pénalité et de l’avis de violation.

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