Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Le 12 janvier 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (Tribunal) a déterminé que la répartition de la rémunération avait été calculée conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement).

[3] L’appelant a déposé une demande de permission d’en appeler à la division d’appel le 3 février 2017. La permission d’en appeler a été accordée le 15 février 2017.

Mode d’audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la ou des questions en litige;
  • le fait que l’on ne prévoit pas que la crédibilité des parties figure au nombre des questions principales;
  • l’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires;
  • l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[5] L’appelant était présent à l’audience, et Irene Cheng le représentait. Aucun représentant de l’intimée ne s’est présenté à l’audience, même si l’intimée avait reçu un avis d’audience. Une interprète, Christina Tam, était présente à l’audience.

Droit applicable

[6] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7]  Le Tribunal doit déterminer si la division générale a commis une erreur en concluant que les sommes reçues par l’appelant avaient valeur de rémunération et qu’elles devaient être réparties en application des articles 35 et 36 du Règlement.

Observations

[8] L’appelant fait valoir les arguments suivants à l’appui de l’appel :

  • L’article 46.01 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) et le paragraphe 56(1) du Règlement s’appliquent à ce cas, et la division générale ne les a pas abordés dans sa décision.
  • L’article 46.01 énonce spécifiquement qu’aucune somme n’est à rembourser, à titre de remboursement d’un versement excédentaire de prestations, « s’il s’est écoulé plus de trente-six mois depuis le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération est payée ».
  • Le temps qui s’est écoulé entre la mise à pied en novembre 2010 et le moment où l’indemnité de départ déterminée a été reçue en décembre 2014 est de bien plus de 36 mois, période indiquée à l’article 46.01.
  • Il conteste les calculs incohérents pour la détermination du montant dû ainsi que la demande d’un deuxième délai de carence pour cette demande de prestations en particulier.

[9] L’intimée fait valoir les arguments suivants à l’encontre de l’appel de l’appelant :

  • La division générale a conclu que l’indemnité de cessation d’emploi (35 457,71 $) constituait une rémunération et avait été répartie correctement.
  • La division générale a tiré des conclusions de fait qui concordaient avec les éléments de preuve; elle n’a pas commis d’erreur en rejetant l’appel parce qu’elle a rendu une décision raisonnable conforme au Règlement, ainsi qu’à la jurisprudence établie.
  • L’appelant n’a pas soulevé l’argument relatif à l’article 46.01 de la Loi devant la division générale.
  • Il est suggéré que l’article 46.01 de la Loi accorde à l’intimée le pouvoir discrétionnaire de ne pas créer de trop-payé si plus de 36 mois s’est écoulé depuis le licenciement ou la cessation d’emploi pour lequel la rémunération est payée et si le coût administratif pour la détermination du trop-payé est égal ou supérieur au montant à récupérer.
  • Pour l’application de l’article 46.01 de la loi, l’intimée a mené une étude afin de comparer les montants provenant d’un congédiement injustifié — ou des biens d’un particulier ayant déclaré faillite — et les montants des trop-payés. L’intimée a déterminé que la moyenne du coût administratif pour établir un trop-payé en 2016 était de 329,00 $.
  • Ce montant comprend les coûts estimés pour mener les enquêtes nécessaires et la révision de la demande, pour communiquer avec le prestataire et établir des mesures de recouvrement des créances, et pour effectuer une révision administrative ainsi que le travail lié à un appel. En l’occurrence, le montant du trop-payé est de 1 503, 000$
  • L’intimée est d’avis que, en l’espèce, le montant du trop-payé, soit 1 503, 00 $ est plus élevé que le coût de 329,00 $. Par conséquent, l’article 46.01 ne s’applique pas.
  • En ce qui a trait à la défalcation d’un trop-payé en vertu du paragraphe 56(1) du Règlement, la Cour d’appel fédérale a confirmé à maintes reprises que l’intimée est seule à avoir compétence en vertu de l’article 56 du Règlement pour défalquer un trop-payé et que ni le conseil arbitral (maintenant la division générale) ni le juge-arbitre (maintenant la division d’appel) n’est habileté à traiter des questions relatives à la défalcation d’un trop-payé. Par conséquent, l’on ne peut pas affirmer que la division générale a commis une erreur en omettant de traiter de cet article, puisqu’il ne relève pas de la compétence du Tribunal.

Norme de contrôle

[10] L’appelant n’a pas présenté d’observations concernant la norme de contrôle applicable.

[11] L’intimée soutient que la division d’appel ne doit aucune déférence à l’égard des conclusions de la division générale en ce qui a trait aux questions de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier. Toutefois, pour les questions mixtes de fait et de droit et pour les questions de fait, la division d’appel doit faire preuve de déférence envers la division générale. Elle ne peut intervenir que si la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance – Pathmanathan c. Bureau du juge-arbitre, 2015 CAF 50.

[12] Le Tribunal note que la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242, mentionne au paragraphe 19 de sa décision que lorsque la division d’appel « agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la [d]ivision générale du Tribunal de la sécurité sociale, la [d]ivision d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure ».

[13] La Cour d’appel fédérale indique également ce qui suit :

Non seulement la Division d’appel a-t-elle autant d’expertise que la Division générale du Tribunal de la sécurité sociale et n’est-elle donc pas tenue de faire preuve de déférence, mais au surplus un tribunal administratif d’appel ne saurait exercer un pouvoir de contrôle et de surveillance réservé aux cours supérieures provinciales ou, pour les « offices fédéraux », à la Cour fédérale et à la Cour d’appel fédérale [...]

[14] La Cour d’appel fédérale a conclu que lorsque la division d’appel « entend des appels conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, la [d]ivision d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loi ».

[15] Le mandat de la division d’appel du Tribunal décrit dans l’arrêt Jean a par la suite été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

[16] Conformément aux instructions mentionnées ci-dessus, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Analyse

Les faits

[17] Une demande initiale de prestations d’assurance-emploi a été établie à compter du 17 mars 2013.

[18] Le 10 décembre 2012, le syndicat et le Mackenzie Sawmill ont conclu une entente selon laquelle la liste d’ancienneté sera prolongée afin que les employés conservent leur emploi, car l’intention de l’employeur était de rouvrir une petite scierie le 31 mars 2013. Cependant, l’employeur n’a pas été capable de respecter son engagement et, par conséquent, la liste d’ancienneté a expiré le 31 mars 2013. À la lumière de cela, en vertu de l’article XXVIII de la convention collective, l’indemnité de cessation d’emploi devient payable 30 jours calendriers après le 31 mars 2013.

[19] En septembre 2013, le syndicat a déposé un grief au sujet de l’indemnité de cessation d’emploi prévue par l’entente collective, et dans l’entente datée du 3 octobre 2014, l’employeur a accepté de versé une indemnité de cessation d’emploi à certains employés le 31 décembre 2014 ou avant cette date. Le calcul des montants de l’indemnité de cessation d’emploi a été déterminé selon l’ancienneté des employés en date du 31 mars 2013.

[20] L’employeur n’a pas produit de relevé d’emploi modifié. Le montant de l’indemnité de cessation d’emploi versé à chacun des employés a été remis à l’intimée au moyen d’une liste nominative. L’appelant a reçu 35 457,71 $.

[21] Le 10 mai 2016, l’intimée a avisé l’appelant que l’indemnité de départ d’un montant de 35 457, 71 $ était considéré comme une rémunération, et que ce montant serait imputé sur sa période de prestations du 31 mars au 14 septembre 2013, avec un solde résiduel réparti sur la semaine commençant le 15 septembre 2013. La décision a entraîné un trop-payé de 1 503,00 $ (GD3-14).

[22] L’appelant a demandé une révision de la décision de l’intimée et, le 16 juillet 2016, la demande de révision a été rejetée.

Décision de la division générale

[23] La division générale a conclu que l’indemnité d’un montant de 35 457, 71 $ constituait une rémunération, et que ce revenu découlait de la cessation d’emploi de l’appelant le 31 mars 2013. Par conséquent, ces sommes devaient être réparties, conformément aux paragraphes 35(2) et 36(9) du Règlement.

Article 46.01 de la Loi

[24] L’appelant soutient en appel que l’article 46.01 de la Loi s’applique à son affaire. L’article 46.01 énonce spécifiquement qu’aucune somme n’est à rembourser, à titre de remboursement d’un versement excédentaire de prestations, « s’il s’est écoulé plus de trente-six mois depuis le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération est payée ».

[25] L’appelant soutient que le temps qui s’est écoulé entre la mise à pied en novembre 2010 et le moment où l’indemnité de départ déterminée a été reçue en décembre 2014 est de bien plus de 36 mois, période indiquée à l’article 46.01. Par conséquent, aucun remboursement d’un trop-payé de prestations ne s’applique.

[26] L’intimée soutient que l’article 46.01 de la Loi accorde à l’intimée le pouvoir discrétionnaire de ne pas créer de trop-payé si plus de 36 mois s’est écoulé depuis le licenciement ou la cessation d’emploi pour lequel la rémunération est payée et si le coût administratif pour la détermination du trop-payé est égal ou supérieur au montant à récupérer.

[27] Pour l’application de l’article 46.01 de la Loi, l’intimée a mené une étude afin de comparer les montants provenant d’un congédiement injustifié — ou des biens d’un particulier ayant déclaré faillite — et les montants des trop-payés. L’intimée a déterminé que le coût administratif moyen pour établir un trop-payé en 2016 était de 329,00 $. Ce montant comprend les coûts estimés pour mener les enquêtes nécessaires et la révision de la demande, pour communiquer avec le prestataire et établir des mesures de recouvrement des créances, et pour effectuer une révision administrative ainsi que le travail lié à un appel. En l’occurrence, le montant du trop-payé est de 1 503, 00 $.

[28] L’intimée est d’avis que, en l’espèce, le montant du trop-payé, soit 1 503,00 $ est plus élevé que le coût de 329,00 $. Par conséquent, l’article 46.01 ne s’applique pas.

[29] La disposition législative pertinente en l’espèce se lit comme suit :

45 Lorsque le prestataire reçoit des prestations au titre d’une période et que, soit en application d’une sentence arbitrale ou d’un jugement d’un tribunal, soit pour toute autre raison, l’employeur ou une personne autre que l’employeur — notamment un syndic de faillite — se trouve par la suite tenu de lui verser une rémunération, notamment des dommages-intérêts pour congédiement abusif ou des montants réalisés provenant des biens d’un failli, au titre de la même période et lui verse effectivement la rémunération, ce prestataire est tenu de rembourser au receveur général à titre de remboursement d’un versement excédentaire de prestations les prestations qui n’auraient pas été payées si, au moment où elles l’ont été, la rémunération avait été ou devait être versée.

46.01 Aucune somme n’est à rembourser aux termes de l’article 45 ou à retenir aux termes du paragraphe 46(1), à titre de remboursement d’un versement excédentaire de prestations, s’il s’est écoulé plus de trente-six mois depuis le licenciement ou la cessation d’emploi du prestataire pour lequel la rémunération est payée ou à payer et que, de l’avis de la Commission, le coût administratif pour la détermination du remboursement est vraisemblablement égal ou supérieur à sa valeur.

[30] L’intimée a été avisée qu’une entente de règlement arbitral avait été conclue entre l’appelant et son employeur, et qu’il avait reçu une indemnité de cessation d’emploi. Il s’agit spécifiquement d’une raison comme celles énumérées aux articles 45 et 46 de la Loi qui permet d’effectuer des corrections à des calculs relativement aux prestations à verser.

[31] Dans ses observations, l’intimée ne conteste pas le fait que plus de 36 moins s’étaient écoulés depuis la mise à pied ou la cessation d’emploi pour laquelle la rémunération a été payée ou est à payer. Elle soutient que l’article 46.01 n’est pas pertinent en l’espèce puisque le coût administratif pour déterminer le trop-payé n’est pas égal ou supérieur au montant à récupérer.

[32] L’appelant conteste le montant du trop-payé de 329,00 $ pour recouvrer le trop-payé de 1 503,00 $, plus précisément lorsque l’on prend en compte le travail associé à l’appel en l’espèce. Il estime que cela est égal ou supérieur au montant à recouvrer.

[33] Compte tenu du fait que l’intimée n’avait pas de représentant à l’audience de l’appel, le Tribunal a demandé, au moyen d’une lettre, qu’elle fournisse un rapport complet et détaillé expliquant comment l’intimée arrive à un trop-payé de 1 503,00 $ et au coût administratif de 329 100 $. L’intimée a répondu au Tribunal le 21 août 2017. L’appelant a eu l’occasion de répondre aux observations supplémentaires de l’intimée, mais a choisi de ne pas le faire.

[34] Pour l’application de l’article 46.01 de la Loi, l’intimée a mené une étude afin de comparer les montants provenant d’un congédiement injustifié — ou des biens d’un particulier ayant déclaré faillite — et les montants des trop-payés. L’intimée a déterminé que le coût administratif moyen pour établir un trop-payé en 2016 était de 329,00 $. Ce montant comprend les coûts estimés pour mener les enquêtes nécessaires et la révision de la demande, pour communiquer avec le prestataire et établir des mesures de recouvrement des créances, et pour effectuer une révision administrative ainsi que le travail lié à un appel.

[35] En l’espèce, le montant du trop-payé est de 1 503,00 $ et le coût administratif moyen pour établir un trop-payé était de 329,00 $ en 2016. Par conséquent, l’article 46.01 n’est pas pertinent en l’espèce puisque le coût administratif pour déterminer le trop-payé n’est pas égal ou supérieur au montant à récupérer.

[36] Le Tribunal estime que l’intimée avait exercé son pouvoir discrétionnaire correctement lorsqu’il avait établi que le coût pour déterminer un trop-payé n’était pas égal ou supérieur au montant à récupérer.

[37] Pour les motifs susmentionnés, ce moyen d’appel est rejeté.

Calculs incohérents relatifs au montant dû et à la demande d’un deuxième délai de carence

[38] L’intimée explique clairement le calcul du trop-payé aux pièces GD3-26 et AD7-3. En ce qui a trait à la période de carence, le paragraphe 19(1) de la Loi confirme que la rémunération déclarée par l’appelant au cours de la période de carence devait être déduite sur les trois semaines au cours desquelles les prestations seraient normalement payables.

[39] Pour les motifs susmentionnés, ce moyen d’appel est également rejeté.

Paragraphe 56(1) du Règlement

[40] En ce qui a trait à la demande de défalcation de l’appelant, la Cour d’appel fédérale a confirmé à maintes reprises que l’intimée est seule à avoir autorité, conformément au paragraphe 56(1) du Règlement, pour défalquer un trop-payé. La division d’appel du Tribunal a également déterminé à plusieurs reprises que le Tribunal n’était pas habileté à gérer des questions liées à la défalcation d’un trop-payé.

Conclusion

[41] L’appel est rejeté.

[42] Les montants que l’appelant avait reçus devaient être considérés comme une rémunération et devaient être répartis, conformément aux paragraphes 35(2) et 36(9) du Règlement.

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