Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 11 octobre 2016. Le 28 novembre 2016, l’intimée a exclu l’appelant du bénéfice des prestations après avoir déterminé qu’il avait volontairement quitté son emploi sans y être fondé. L’appelant a demandé un réexamen de cette décision et, le 30 décembre 2016, l’intimée a maintenu sa décision initiale. L’appelant a interjeté appel de la décision de réexamen devant le Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») le janvier 2017.

[2] Le Tribunal doit déterminer si l’appelant est exclu du bénéfice des prestations en vertu de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») au motif qu’il a volontairement quitté son emploi sans y être fondé.

[3] L’audience a été tenue par vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. le fait que la crédibilité puisse être une question déterminante;
  2. le fait que l’appelant sera la seule partie à comparaître à l’audience;
  3. l’information au dossier, y compris le besoin d’obtenir des renseignements supplémentaires.

[4] Les personnes suivantes étaient présentes à l’audience :

  • S. K. – l’appelant
  • S. L. – la femme de l’appelant

[5] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. Les motifs de la décision suivent .

Preuve

[6] Une demande initiale de prestations d’assurance-emploi a été établie le 30 octobre 2016. Dans la demande de prestations, l’appelant a indiqué qu’il avait été licencié de son emploi en raison d’une pénurie de travail.

[7] Le relevé d’emploi émanant de 1703671 Alberta Ltd (Pulse Air) indique que le prestataire a travaillé du 21 avril au 5 octobre 2016 et qu’il a démissionné.

[8] Lorsque l’intimée a communiqué avec l’appelant, le 1er novembre 2016, ce dernier a indiqué qu’il avait dû démissionner pour des raisons de santé. Il a déclaré qu’il avait une blessure à la main et que son emploi supposait de taper au clavier et, qu’en raison de sa blessure, il n’était plus capable d’accomplir son travail. Il a ajouté qu’il n’avait pas de billet de son médecin indiquant qu’il devrait quitter son emploi et que c’est plutôt lui-même qui a pris la décision de démissionner.

[9] L’intimée a communiqué avec l’appelant le 16 novembre 2016 afin d’obtenir des renseignements supplémentaires. L’appelant a déclaré qu’il a informé son employeure qu’il avait des problèmes à la main, mais que l’on n’a rien fait pour l’aider. Il a déclaré avoir demandé un congé à son employeure, mais qu’on le lui a refusé. L’appelant a ajouté qu’il a été forcé de prendre une journée de maladie pour pouvoir aller chez le médecin, parce que son employeure ne voulait pas lui accorder un congé pour ses rendez-vous. L’appelant a déclaré qu’il a donné sa démission le 15 septembre 2016 et qu’il a donné trois semaines d’avis à son employeure. Il a déclaré qu’il a pris une journée de maladie durant la semaine du 23 septembre pour aller voir son médecin. Le médecin a déclaré que l’appelant devrait prendre une semaine de congé et lui a prescrit des médicaments. L’appelant est retourné travailler et a quitté son emploi le 10 octobre.

[10] Le 17 novembre 2016, l’intimée a communiqué avec l’employeure de l’appelant. On a demandé à l’employeure si elle savait pourquoi l’appelant avait démissionné. L’employeure a indiqué qu’elle ne le savait pas vraiment. Elle a déclaré qu’à son dernier mois de travail l’appelant voulait s’absenter et qu’elle ne pouvait pas lui accorder les jours de congé qu’il voulait, car un autre employé avait démissionné sans préavis et qu’elle n’avait personne pour couvrir le quart de l’appelant et le poste soudainement devenu vacant. L’employeure a déclaré que l’appelant a commencé à prendre des jours de maladie au lieu de se présenter au travail. Elle a déclaré qu’elle ne savait jamais quand il allait revenir au travail.

[11] L’employeure a déclaré que l’appelant avait demandé des journées de congé et qu’elle lui avait dit non parce qu’elle n’avait personne pour couvrir son quart. Elle a déclaré que la semaine de la période des Fêtes de fin d’année chevauchait l’horaire de travail de l’appelant. Après quoi, l’appelant a simplement commencé à prendre des jours de maladie en disant qu’il avait une blessure à la main. L’employeure a déclaré que ce problème de blessure à la main a été soulevé soudainement. Elle a déclaré que l’appelant n’avait jamais mentionné ce problème avant et qu’il ne l’avait fait que trois semaines avant son départ.

[12] Le Tribunal a questionné l’employeure au sujet d’un emploi avec tâches modifiées pour l’appelant et de ses problèmes à la main et lui a demandé si l’appelant avait fait une telle demande. L’employeure a déclaré lorsqu’elle a dit non aux vacances du prestataire, celui-ci lui a remis sa lettre de démission. L’appelant a indiqué qu’il a donné sa démission lorsque ses vacances n’ont pas été approuvées et qu’il a pris des journées de maladie en disant à l’employeure qu’il avait une blessure à la main.

[13] En consultant ses dossiers, l’employeure a précisé que l’appelant avait donné sa démission le 15 septembre et que sa démission était due à des problèmes liés au travail. L’avis était de deux semaines et son dernier jour a été le 7 octobre 2016. L’employeure a déclaré qu’après que l’appelant eut remis sa lettre de démission, il a commencé à prendre des jours de maladie. L’appelant a ensuite déclaré qu’on lui a conseillé de s’absenter du travail jusqu’au 30 septembre pour raisons de santé. On a demandé à l’employeure s’il y avait des modifications qui auraient pu être apportées au poste occupé par l’appelant pour moins solliciter la main de l’appelant. L’employeure a déclaré que le prestataire travaillait comme assistant dans un cabinet médical et qu’il n’y a pas grand-chose que l’on pouvait faire pour modifier la nature de son emploi. L’employeure a indiqué que l’appelant aurait pu demander un congé de maladie, mais qu’il ne l’a jamais fait, et qu’il a simplement donné sa démission.

[14] Le 25 novembre 2016, l’intimée a de nouveau communiqué avec l’appelant. L’intimée a indiqué à l’appelant que l’employeure avait dit qu’il avait demandé des jours de congé à l’avance parce qu’il avait des personnes qui venaient lui rendre visite, puis qu’il avait pris des journées de maladie pour ces jours-là après qu’on lui eut refusé ses jours de congé. L’appelant a déclaré que ce n’était pas ce jour-là seulement. Il a déclaré qu’il ne se sentait pas bien et qu’il allait se marier. On a demandé à l’appelant de fournir des précisions. Il a déclaré que c’était le jour où sa mère et son père revenaient à la maison. Il a déclaré qu’il ne sentait pas bien à cette époque et qu’il subissait les pressions liées à son mariage prochain. Il a déclaré avoir vu un médecin ce jour-là aussi. Il a déclaré qu’il ne se sentait pas bien et que tout pesait sur ses épaules et qu’il devait appeler ses parents de la maison. Il a déclaré qu’il était difficile de s’occuper de cela tout seul, si bien qu’il a demandé un ou deux jours.

[15] On a demandé à l’appelant s’il avait demandé à prendre ces jours-là de congé puis s’il avait pris des journées de maladie lorsqu’on avait refusé de lui accorder ces jours de congé. L’appelant a déclaré que ce n’était pas ce jour-là. Il a déclaré que c’était le 23 septembre. Il a ensuite dit qu’il s’est absenté cinq jours et qu’il avait fourni à son employeure une note du médecin pour une semaine d’absence. Il a déclaré que c’était la raison que son médecin avait demandé et qu’il avait déjà soumis cette note au docteur. L’appelant a déclaré avoir donné sa démission le 15 septembre. On lui a demandé s’il avait vu son médecin avant de donner sa démission. L’appelant a déclaré que l’employeure avait déjà embauché quelqu’un d’autre. On a demandé à l’appelant de confirmer qu’il avait donné son préavis et que l’employeure avait embauché quelqu’un d’autre. Il a répondu oui, dans les deux ou trois jours. Il a déclaré qu’à cette époque-là il avait trop mal. Il a déclaré que c’est après qu’il eut donné son préavis de démission que son employeure lui a donné plus de travail et qu’il avait plus mal à la main et qu’il est allé voir le médecin.

[16] On a demandé à l’appelant s’il avait donné son préavis parce qu’il avait un peu mal à la main, mais pas trop au point d’aller voir le médecin. L’appelant a dit oui. Il a dit qu’à cette période-là il ne se sentait pas bien, jusqu’au 23 septembre, lorsqu’il a eu trop de travail à faire et trop de douleur. Il a déclaré qu’avant le 15 septembre que tout allait bien qu’il n’avait pas de problème. On lui a demandé pourquoi il avait quitté son emploi le 15 septembre puisque tout allait bien. L’appelant a répondu a répondu qu’il commençait à avoir un peu mal. Il a déclaré que l’employeure lui a alors donné plus de travail à faire et a embauché quelqu’un d’autre dans les deux ou trois jours. Il a déclaré qu’il avait, alors, déjà l’intention de quitter son emploi. Il a déclaré qu’il ne pouvait pas se présenter au travail et qu’il avait une bonne raison pour cela. L’appelant a démissionné parce qu’il croyait, d’après ce que ses collègues disaient, que l’employeure allait lui donner plus de travail à faire et l’inciter à démissionner. Il a déclaré que, le 15 septembre, elle lui donnait davantage de travail et que, à cette période, il postulait à de nombreux postes. Il a déclaré que, parce qu’il avait des entrevues, il pouvait quitter, mais il n’a pas obtenu le poste à l’autre endroit. Questionné sur le poste à l’autre endroit, l’appelant a déclaré que le poste avait été annulé, car ils ne voulaient plus embaucher quelqu’un. Il a déclaré que, essentiellement, il quitterait et aurait à repartir du début à ce nouveau poste. L’appelant a confirmé qu’il n’a pas reçu d’offre d’emploi.

[17] Le 26 novembre 2016, l’intimée a de nouveau communiqué avec l’appelant. Ce dernier a déclaré qu’il avait de problèmes de santé, mais que son employeure ne lui offrait pas de soutien. Il a pris une journée de maladie et a fini par prendre une semaine de congé à la demande du médecin et a déclaré qu’il avait produit un certificat médical à son employeure. L’appelant a ajouté qu’il a fini par quitter son emploi parce qu’il avait mal à la main, mais qu’il n’avait pas parlé à un médecin avant de prendre cette décision.

[18] L’appelant a demandé un réexamen de la décision de l’intimée de l’exclure du bénéfice des prestations pour avoir volontairement quitté son emploi sans y être fondé. À l’appui de sa demande de réexamen, l’appelant a argué que son employeur lui donnait de plus en plus de travail malgré le fait qu’il avait un problème à la main. L’appelant a eu l’impression que son employeure lui donnait plus de travail qu’il pouvait en faire dans l’espoir de le faire démissionner. L’appelant affirme, en outre, lorsqu’il a demandé congé pour voir son médecin, son employeure le lui a refusé. L’appelant a aussi déclaré qu’il ne pouvait pas obtenir un rendez-vous chez son médecin en dehors de ses heures de travail.

[19] En parlant à l’intimée le 30 décembre 2016, l’appelant a déclaré que la principale raison pour laquelle il avait quitté son emploi était que, lorsqu’il a demandé à prendre congé pour aller chez le médecin, on le lui avait refusé parce que son employeure lui a dit que le cabinet était trop occupé pour qu’on se passe de ses services. L’appelant a déclaré qu’il ne pouvait pas travailler dans un tel environnement, que c’était le pire employeur chez qui il n’avait jamais travaillé depuis qu’il était arrivé au Canada et qu’il allait mourir au travail, alors que sa main lui faisait si mal. On a demandé à l’appelant s’il aurait pu obtenir son rendez-vous chez le médecin en dehors des heures de travail, mais il a répondu que son médecin travaillait aux mêmes heures que lui. L’appelant a ensuite dit qu’il a dû attendre plus d’un mois avant de recevoir son dernier chèque de paye, qu’il devait demander la permission avant d’aller aux toilettes et qu’on ne lui accordait pas de congés pour aller à des rendez-vous, rendre visite à ses parents ou se marier. On a également demandé à l’appelant pourquoi il n’avait pas obtenu une note du médecin et pourquoi il n’avait pas discuté d’un congé de maladie avec l’employeure ou ne s’était pas trouvé un autre emploi avant de quitter celui qu’il occupait; il a répondu qu’il avait bel et bien produit un billet du médecin pour une semaine de congé à son employeure. L’appelant a également déclaré que sa main allait mieux et qu’il pouvait utiliser un clavier, et il a de nouveau dit que la principale raison pour laquelle il avait quitté son emploi était que son employeure ne voulait pas lui accorder des jours de congé pour aller à ses rendez-vous.

[20] Dans la déclaration écrite que l’appelant a déposée au Tribunal de 24 janvier 2017, il indique que son employeur voulait qu’il démissionne, de sorte qu’elle a créé une situation qui l’a poussé à quitter volontairement son emploi. L’appelant a aussi dit que son employeure était cupide et qu’elle avait attendu 45 jours avant de lui renvoyer son dernier chèque de paye.

Témoignage oral

[21] L’appelant a commencé son témoignage en disant que son employeure ne lui permettait pas d’aller aux toilettes, de déjeuner à l’extérieur ou d’aller voir son médecin de famille, Il a déclaré qu’il avait l’impression que son employeure s’attendait à ce qu’il fasse le travail de deux personnes, son travail régulier et aussi former de nouveaux employés en même temps. L’appelant a déclaré qu’il a essayé de faire de son mieux pour remplir ces deux rôles, mais qu’après un mois, il a demandé à son superviseur si l’on pouvait embaucher un autre employé pour que sa charge de travail ne soit pas aussi lourde. L’appelant a également dit comment des employés avaient démissionné et n’avaient pas été remplacés, si bien qu’il a découvert qu’il lui fallait aussi couvrir les tâches de ces postes.

[22] L’appelant travaillait dans un centre cardiovasculaire où il répondait aux appels téléphoniques et prenait des rendez-vous pour les patients avec les médecins de la clinique. Son travail nécessitait l’utilisation de sa main et de son poignet, et il lui fallait se servir d’un ordinateur toute la journée. L’appelant a expliqué qu’il avait eu un accident de travail en octobre 2012 lorsqu’il s’était cassé le bras en travaillant sur un chariot élévateur. L’appelant pensait que c’est ce qui expliquait les douleurs à son bras et à son poignet. Toutefois, il n’a pas été en mesure d’aller voir son médecin pour que l’on détermine quel était le problème, car son employeure ne voulait pas qu’il s’absente du travail pendant les heures de travail des médecins. Au lieu de cela, lorsqu’il parlait à son employeure de ses douleurs à la main, elle lui disait de prendre une pause dans la salle de repos. L’appelant a décidé de prendre un jour de maladie afin d’aller voir son médecin de famille, puisque son employeure ne lui permettait pas de s’absenter du travail. Il a indiqué que son médecin lui a dit de prendre une semaine de congé et de retourner travailler avec des tâches modifiées. L’appelant a demandé à son employeure de lui offrir un poste avec tâches modifiées, mais cela lui a été refusé car son travail nécessitait d’utiliser l’ordinateur et de parler au téléphone. Étant donné la nature de son emploi, il n’y avait rien d’autre qu’il pouvait faire sans devoir utiliser sa main.

[23] Le Tribunal a appris que l’appelant n’avait obtenu qu’un jour de maladie d’avril à septembre. Il a déclaré que la pression s’accentuait, car son employeure ouvrait un deuxième emplacement et transférait du personnel de son emplacement au nouvel endroit, si bien qu’en bout de ligne il n’y avait plus que quatre personnes pour faire le travail de six.

Observations

[24] L’appelant a plaidé ceci ;

  1. il a été force de quitter son emploi parce qu’il effectuait un travail administratif et que ce travail lui causait des douleurs aux mains;
  2. on refusait de lui accorder des jours de congé pour régler ce problème;
  3. son employeure continuait de lui donner plus de travail qu’il ne pouvait possiblement en faire.

[25] L’intimée a plaidé ceci :

  1. l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi parce qu’il n’a pas exploré toutes les solutions de rechange raisonnables avant son départ;
  2. compte tenu de l’ensemble de la preuve, une solution raisonnable au départ aurait été de demander un congé et/ou d’obtenir un certificat médical pour prouver qu’il lui fallait quitter son emploi. Par conséquent, l’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi au sens de la Loi.

Analyse

[26] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe de la présente décision.

[27] L’article 30 de la Loi stipule que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il a volontairement quitté son emploi sans justification, c’est-à-dire sans y être fondé. C’est à l’intimée qu’il incombe de prouver que le départ était volontaire. Le fardeau de la preuve se déplace ensuite vers l’appelant, à qui il incombe de démontrer qu’il était « fondé » à quitter son emploi (Green c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 313).

L’appelant a-t-il quitté son emploi volontairement?

[28] En l’espèce, la preuve documentaire qui a été produite indique que l’appelant a remis sa lettre de démission à son employeure le 15 septembre 2016. L’appelant a donné un préavis de trois semaines à l’employeure et a quitté son emploi le 5 octobre 2016. La lettre de démission de l’appelant indique qu’il a démissionné pour des problèmes liés au travail.

[29] Le Tribunal conclut que l’intimée a démontré que l’appelant a volontairement quitté son emploi.

L’appelant était-il fondé à quitter son emploi?

[30] Ayant déterminé que l’appelant a quitté son emploi volontairement, le Tribunal doit maintenant se pencher sur la question de savoir si l’appelant était fondé à quitter cet emploi. Le critère à appliquer pour déterminer si l’appelant était « fondé » à quitter son emploi aux termes de l’article 29 de la Loi consiste à se demander si, compte tenu de toutes les circonstances et selon la prépondérance des probabilités, l’appelant n’avait pas d’autres solution raisonnable que le départ (Canada (Procureur général) c. White, 2011 CAF 190).

[31] L’alinéa 29(c) stipule que le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées dans la liste non exhaustive dressée pour le Tribunal, son départ constituait la seule solution raisonnable dans son cas. Le Tribunal doit soupeser chaque circonstance pour déterminer s’il y a « justification » ou non.

[32] L’intimée affirme que l’appelant avait de nombreuses options à sa disposition avant de quitter son emploi. À la lecture de la preuve documentaire, le Tribunal considère que l’appelant a plusieurs fois essayé de voir son médecin de famille en raison de sa douleur à la main. Il a été dit au Tribunal que l’employeure de l’appelant ne voulait pas qu’il s’absente du travail durant la journée pour obtenir l’aide médicale dont il avait besoin. L’appelant affirme en outre qu’on l’encourageait à travailler pendant l’heure du dîner et qu’on le regardait même de travers s’il prenait une pause pour aller chercher de l’eau.

[33] L’appelant déclare qu’il a commencé à avoir mal à la main début juin en raison du volume de données qu’il tapait au clavier. Il a déclaré qu’il s’était cassé le bras dans un accident en 2012 et que cette blessure n’avait pas bien guéri et que, bien que cela ne lui avait pas causé de problème au fil des ans, la nature de son emploi faisait qu’il lui était difficile de reposer sa main et que cela commençait à lui causer des douleurs. Le Tribunal a entendu l’appelant dire que des mois se sont écoulés sans qu’il ressente davantage de douleur. L’appelant a également déclaré qu’il n’avait pas la possibilité de voir son médecin de famille, car les heures ouvrables du cabinet de son médecin étaient les mêmes que les heures de travail de l’appelant et qu’il n’arrivait pas à obtenir de son employeure la permission de prendre congé pour aller voir son médecin.

[34] Le Tribunal a trouvé que l’appelant, de par son témoignage, est une personne directe et assurée. Compte tenu de cette impression au sujet de l’appelant, le Tribunal conclut que l’appelant a parlé à son employeure de son besoin de voir un médecin et que son employeure était au courant de sa douleur à la main. Toutefois, le Tribunal constate aussi que la chronologie n’est pas logique. L’appelant a indiqué qu’il a commencé à avoir mal à la main en juin 2016 et que cela a empiré par la suite. Quant à l’employeure, elle indique que l’appelant n’a fait mention des problèmes qu’il avait à la main qu’au moment où il a donné sa démission, le 15 septembre 2016.

[35] Selon le témoignage que l’appelant a fourni le 25 novembre 2016, lorsqu’il a parlé à l’intimée, ses douleurs à la main ne sont devenues intenses que le 23 septembre 2016, huit jours avant qu’il ne donne sa démission. Durant cette conversation tenue en novembre, l’appelant n’a fait aucune mention de douleurs à la main qu’il aurait eues au mois de juin. En fait, le Tribunal note que l’appelant a indiqué qu’à cette période il avait un peu mal, mais pas suffisamment pour aller voir le médecin. Ce témoignage de l’appelant confirme ce qu’a dit l’employeure, à savoir qu’il n’y a eu aucune indication, de la part de l’appelant, concernant des problèmes à la main avant le moment de sa démission.

[36] L’appelant a aussi déclaré qu’il avait tenté, de nombreuses fois, d’inciter son employeure à embaucher plus de personnel, car il manquait deux employés à l’emplacement où travaillait l’appelant et que la charge de travail de l’appelant faisait qu’il avait encore plus mal à la main. Le Tribunal conclut que l’employeure était bien au courant de la situation de l’appelant et, puisqu’il n’y a aucune mention d’une éventuelle mesure d’adaptation qui aurait été prise pour l’appelant, spécifiquement pour son problème à la main, ni d’accommodement, de façon générale, pour sa charge de travail, le Tribunal considère que l’appelant était justifié de nourrir des préoccupations au sujet de son emploi.

[37] Le Tribunal note que l’appelant avait indiqué, dans sa déclaration au Tribunal, qu’il avait l’impression que son employeure lui rendait le travail de plus en plus difficile. L’appelant a poursuivi en disant qu’il avait le sentiment que son employeure faisait cela pour le pousser à démissionner. L’appelant a déclaré qu’on lui posait des questions lorsqu’il allait aux toilettes ou qu’il prenait une pause pour aller boire de l’eau. Il a indiqué qu’il avait demandé à prendre congé en raison de ses douleurs à la main et que son employeure lui a dit qu’elle y penserait. Il a aussi déclaré qu’il avait demandé deux jours de congé et qu’on les lui refusait. En raison de ce refus, l’appelant a été forcé de prendre un jour de maladie afin de pouvoir faire quelque chose pour ses douleurs à la main.

[38] Bien que le Tribunal estime que l’environnement de travail décrit par l’appelant était difficile, le Tribunal note que l’appelant a mentionné qu’il manquait deux employés. L’appelant a déclaré qu’il avait demandé à son employeure de combler ces postes pour lesquels il devait accomplir le travail des employés manquants et qu’elle n’a rien fait à ce sujet. L’appelant a déclaré que son employeure faisait cela pour le faire démissionner. Le Tribunal trouve ce scénario difficile à accepter. Étant donné, comme l’a dit l’appelant, qu’il manquait déjà deux employés dans l’effectif, le Tribunal a du mal à croire que l’employeure aurait délibérément essayé de pousser l’appelant à démissionner, en se retrouvant ainsi avec trois postes non comblés avec lesquels elle aurait dû composer.

[39] Le facteur déterminant pour le tribunal et l’absence de conseils médicaux concernant les douleurs à la main de l’appelant et sa capacité de travailler. Bien que le Tribunal constate que l’appelant avait mal à la main, il est troublé par le fait que l’appelant n’ait pas obtenu de preuve médicale concernant sa main avant de quitter son emploi. L’appelant a déclaré qu’il avait de la difficulté à obtenir un congé pour aller voir son médecin au sujet de sa main. La demande de vacances pendant la période des Fêtes et de congés que l’appelant a faite à l’employeure ne lui a pas été accordée, si bien qu’il a pris la décision de prendre une journée de maladie pour aller voir son médecin. Dans son témoignage, l’appelant a indiqué que son médecin lui a dit de prendre une journée. Le problème que cela pose au Tribunal réside dans le fait que l’appelant a indiqué qu’il a donné sa démission le 15 septembre 2016 et qu’il n’a vu son médecin que la semaine d’après. Le témoignage de l’appelant indique que le médecin de famille de l’appelant lui a dit de prendre une semaine de congé et lui a donné une ordonnance pour des médicaments. Le Tribunal n’a été saisi d’aucune preuve supplémentaire indiquant qu’il a été conseillé à l’appelant de quitter son emploi.

[40] L’appelant a indiqué qu’il avait dû démissionner à cause de sa douleur à la main, mais il ressort clairement de la preuve que l’appelant a donné sa démission avant même d’aller voir son médecin de famille. En outre, la preuve indique que l’on a conseillé à l’appelant de prendre une semaine de congé, ce qu’il n’a pas fait. Il n’y a pas non plus, dans la preuve, d’indication que l’appelant ait tenté d’obtenir des tâches modifiées auprès de son employeure. Compte tenu du climat de travail, le Tribunal présume que l’employeure de l’appelant ne lui aurait pas proposé des tâches modifiées; même si cela avait été une option, c’est à l’appelant qu’incombe la responsabilité d’étudier les options.

[41] Le Tribunal note aussi que l’employeure a indiqué, dans ses déclarations à l’intimée, que l’appelant aurait pu demander un congé de maladie pour s’occuper de la douleur à sa main. Pourtant, il n’y a aucun témoignage, de la part de l’appelant, indiquant qu’il aurait demandé à son employeure de prendre un congé médical après qu’il eut consulté son médecin de famille. Au lieu de cela, l’appelant a terminé les trois semaines de sa période de préavis avant la démission et a mis fin à son emploi.

[42] Compte tenu de cette information, le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi. Bien que l’appelant ait effectivement eu de la difficulté à prendre congé pour aller voir son médecin de famille, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas exploré toutes les options possibles concernant son emploi. Au lieu de commencer par aller voir son médecin de famille pour déterminer la nature de ses douleurs à la main, l’appelant a décidé de quitter son emploi puis a pris une journée de maladie pour aller voir son médecin. Son médecin lui a indiqué qu’il devrait prendre un congé et lui a prescrit des médicaments pour la douleur. Au lieu de retourner travailler et de faire savoir cela à son employeure, l’appelant est juste retourné travailler et a terminé sa période de préavis de trois semaines avant sa démission, puis il a quitté. Il n’y a donc eu aucune tentative de sauver son emploi et l’appelant a plutôt jugé qu’il lui fallait démissionner. Bien que le Tribunal compatisse à la frustration que son environnement de travail et son employeure ont pu causer à l’appelant, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter son emploi avant d’explorer toutes les options disponibles.

[43] Pour ces motifs, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter son emploi.

Conclusion

[44] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi
  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations — qu’elle soit initiale ou non — n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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