Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi le 9 août 2016. Le 6 septembre 2016, l’intimée a exclu l’appelant du bénéfice des prestations après avoir conclu qu’il avait volontairement quitté son emploi sans y être fondé (sans justification). L’appelant a demandé un réexamen de cette décision et, le 10 novembre 2016, l’intimée a maintenu sa décision initiale. L’appelant a interjeté appel de la décision de réexamen devant le Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») le 29 novembre 2016.

[2] Le Tribunal doit déterminer s’il y a lieu d’exclure l’appelant du bénéfice des prestations en vertu de l’article 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») au motif qu’il a quitté volontairement son emploi sans y être fondé.

[3] L’audience a été tenue par vidéoconférence pour les raisons suivantes :

  1. le fait que l’on ne prévoit pas que la crédibilité figure au nombre des questions principales;
  2. le fait que l’appelant sera la seule partie à comparaître à l’audience;
  3. le fait que l’appelant ou d’autres parties sont représentés.

[4] Les personnes suivantes étaient présentes à l’audience : l’appelant et son représentant, L. D..

[5] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était fondé ou justifié à quitter volontairement son emploi. Les motifs de cette décision suivent.

Preuve

[6] Le 9 août 2016, l’appelant a présenté une demande initiale de prestations, et une période de prestations a été établie comme commençant le 31 juillet 2016. L’appelant a indiqué que la raison pour laquelle il avait quitté son emploi était une pénurie de travail.

[7] Le 12 août 2016, l’employeur a émis un relevé d’emploi (RE) dans lequel la mention « a démissionné » était indiquée comme raison d’émettre le RE.

[8] Le 23 août 2016, le 29 août 2016 et le 1er septembre 2016, l’intimée a tenté de communiquer avec l’appelant pour discuter des raisons de sa cessation d’emploi et a laissé des messages lors des deux premières tentatives pour que l’appelant retourne les appels.

[9] Le 6 septembre 2016, l’intimée a parlé à l’employeur de l’appelant, qui a confirmé qu’il n’y avait pas de pénurie de travail ni que le contrat d’emploi de l’appelant était arrivé à expiration, mais plutôt que c’est l’appelant qui avait démissionné.

[10] Le 7 septembre 2016, l’appelant a dit à l’intimée qu’il avait démissionné de son emploi parce qu’on l’avait rétrogradé de son poste de gestionnaire à un poste au téléphone.

[11] L’appelant a envoyé, en date du 11 octobre 2016, une demande de réexamen de la décision à l’intimée. L’appelant a indiqué que la décision rendue par l’intimée lui avait été communiquée verbalement le 26 septembre 2016, mais qu’aucune décision écrite ne lui avait été expédiée. Dans sa demande, l’appelant a réitéré qu’on avait apporté d’importants changements à ses tâches et qu’on l’avait rétrogradé. Il a indiqué qu’il avait essayé de parler à l’employeur, mais qu’on n’arrêtait pas de lui donner des réponses évasives. Il a ajouté qu’on avait amputé son salaire et que l’employeur avait supprimé les primes qu’il touchait. Il a déclaré qu’il avait moins d’heures à son nouveau poste. L’appelant a déclaré que cela avait créé une situation d’insatisfaction au travail, qu’on lui avait promis une promotion, mais qu’on lui a ultérieurement dit que le poste qui lui était promis n’était plus disponible, de sorte que cela a créé un milieu de travail empreint de relations conflictuelles. Il a dit que la situation a engendré un conflit entre lui et la direction. Il a cité les décisions suivantes comme portant sur des cas semblables au sien et dans lesquels des décisions favorables aux appelants ont été rendues : X, CUB 72485; Harlick, CUB 57228; Montreuil, CUB 35206; Montreuil c. Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada et Canada (PG), A-868-96; Patterson, CUB 46727; Moser, CUB 50083; Laidlaw, CUB 57618

[12] Dans une lettre datée du 1er novembre 2016, l’intimée a informé l’appelant qu’elle était en train d’examiner sa demande de réexamen et elle lui a demandé de communiquer avec elle dans les dix jours de la réception de cette lettre. L’intimée a ajouté que si l’appelant n’entrait pas en communication avec elle, elle procéderait à son réexamen et une décision serait rendue sur la base des renseignements au dossier.

[13] Le 7 novembre 2016, l’appelant a appelé l’intimée et a répété qu’on l’avait rétrogradé du poste de gestionnaire de la formation à un poste ordinaire d’agent du service à la clientèle. Il a indiqué que l’employeur lui a dit que ce changement était dû au fait que moins de gens étaient embauchés et que l’entreprise n’avait plus besoin d’un gestionnaire de la formation. L’appelant a indiqué qu’on lui a dit que l’employeur allait probablement embaucher d’autres employés dans les six prochains mois et qu’on le réaffecterait alors au poste de gestionnaire de la formation une fois que ces nouveaux employés seraient embauchés. Il a indiqué qu’on avait réduit ses 40 heures de travail hebdomadaires à un nombre situé entre 30 et 40 heures par semaine. Il a indiqué qu’il n’y avait aucune différence dans le taux horaire ou dans les avantages sociaux, mais qu’il gagnait moins d’argent en raison de la réduction du nombre de ses heures de travail. L’appelant a indiqué qu’il s’est adressé à sa superviseure, qui lui a dit qu’on ne pouvait rien faire, car il n’y avait pas suffisamment d’achalandage pour justifier un poste de gestionnaire de la formation. Il a indiqué que, lorsqu’il est allé travailler et a vu que, pour la semaine suivante, on le réaffectait à un poste de téléphoniste, il a quitté sur le champ parce qu’il était fâché et ne se sentait pas à l’aise de retourner travailler parmi ses pairs après avoir aidé à leur formation. L’appelant a dit qu’il n’a pas cherché un autre emploi ni n’a pensé à demander un congé avant de démissionner.

[14] Le 7 novembre 2016, l’employeur a dit à l’intimée que l’appelant avait dit qu’il quittait pour des raisons personnelles. L’employeur a déclaré que l’appelant n’avait jamais occupé un rôle de gestion, mais qu’on lui avait demandé de participer au programme [traduction] « Un échelon au-dessus » de la compagnie, qui était conçu pour sortir des employés de leurs tâches régulières au téléphone et de leur permettre d’acquérir de l’expérience en faisant quelque chose de différent pendant une courte période. L’employeur a déclaré qu’on avait choisi l’appelant pour participer à ce programme et qu’on lui avait fait assumer ce rôle pendant deux mois et que, lorsqu’on l’a réaffecté à son rôle régulier, il en fut très mécontent. L’employeur a indiqué que les heures de travail, le taux de rémunération et les primes de l’appelant sont restés les même durant sa participation à ce programme et que le titre de son poste n’avait pas changé. L’employeur a indiqué que ce programme est assez souvent mis en œuvre au sein de l’entreprise, mais qu’il ne dispose pas de documents faisant état de détails sur le programme ou de la participation de l’appelant au programme.

[15] Le 7 novembre 2016, l’intimée a informé l’appelant qu’elle ne pouvait pas lui verser des prestations d’assurance-emploi pour la période du 31 août au 2 septembre 2016 au motif qu’il ne se trouvait pas au Canada, et que, comme il était en vacances, il ne pouvait pas prouver sa disponibilité pour travailler.

[16] Le 9 novembre 2016, l’appelant a dit à l’intimée qu’on l’avait officiellement promu au poste de gestionnaire et qu’il avait assumé ce rôle pendant plus d’un an avant d’être rétrogradé à un poste d’agent du service à la clientèle. Il a confirmé qu’il a démissionné en citant des raisons personnelles, mais il a dit qu’il avait évoqué la rétrogradation dans son courriel de démission. L’appelant a fourni à l’intimée une copie de son courriel de démission daté du 1er août 2016. Dans le courriel de démission, l’appelant parlait de sa désillusion face à la compagnie et décrivait les circonstances ayant entouré le renvoi d’une chef d’équipe avec qui il avait une relation. L’appelant évoquait aussi les responsabilités croissantes qu’il assumait au sein de l’entreprise et expliquait en quoi consistait son rôle, notamment [traduction] « fournir de l’aide pour toutes les tâches concernant les questions, les permissions, le soutien technique et les conseils de leadership, s’occuper des appels remontés (transmission des appels à un échelon supérieur) pour toutes les tâches, appeler les clients qui avaient demandé à parler à un supérieur lorsque je n’étais pas disponible, tenir les réunions (quotidiennement) tant pour l’étage que pour le service de simplification, surveiller l’étage tout en assumant le rôle de superviseur lorsque [les chefs d’équipe] devaient aller en pause ou déjeuner, écouter occasionnellement les appels pris par les agents du service à la clientèle et compléter alors l’encadrement avec les évaluations de la qualité et s’occuper de toutes sortes d’affaires à régler. » Dans le courriel, l’appelant parlait de l’expérience de travail des agents et de leurs frustrations lorsqu’ils doivent composer avec des changements inutiles ainsi qu’à la pression constamment imposée par la direction pour faire les choses de la bonne manière. L’appelant a indiqué qu’on l’a [traduction] « remis aux appels » et que l’employeur voulait « du sang neuf » comme soutien à l’étage et qu’il a considéré cela comme une rétrogradation. L’appelant a indiqué que son congédiement devrait être considéré comme un congédiement constructif et que son RE devrait rendre compte de cela.

[17] Le 9 novembre 2016, l’intimée a parlé à l’employeur, qui a indiqué que l’appelant était toujours classé comme étant un agent du service à la clientèle pendant qu’il participait au programme [traduction] « Un échelon au-dessus » de la compagnie. L’employeur a ajouté, qu’habituellement, il fait alterner les employés pour participer au programme et que l’appelant s’était déjà acquitté de ce mandat dans le cadre du programme. L’employeur a déclaré qu’un changement a été apporté au régime de rémunération en janvier 2016, mais que cela ne s’est pas accompagné d’une diminution du salaire réel des employés. L’employeur a déclaré, qu’à la suite de changement, il a entamé des négociations contractuelles avec son client pour faire augmenter le salaire de ses employés, mais lorsque les employés ont eu vent des négociations, ils ont présumé qu’une augmentation salariale s’ensuivrait immédiatement.

[18] Le 10 novembre 2016, l’intimée a avisé l’appelant que pour que l’on considère qu’il avait une justification à son départ, c’est-à-dire qu’il était fondé à quitter son emploi, il fallait qu’il prouve qu’il avait épuisé toutes les solutions de rechange raisonnables et que, en l’occurrence, il n’avait pas de justification pour quitter son poste. L’intimée a informé l’appelant qu’elle maintenait sa décision initiale.

[19] Le 29 novembre 2016, l’appelant a déposé un avis d’appel au Tribunal.

[20] Le 5 mai 2017, l’intimée a précisé qu’aucune lettre initiale de décision n’avait été envoyée à l’appelant pour l’informer que l’intimée avait jugé que l’appelant avait volontairement quitté son emploi sans y être fondé (sans justification). L’intimée a indiqué que, bien que l’appelant lui ait parlé le 7 septembre 2016, le document « Renseignements supplémentaires concernant une demande de prestations » n’indique pas si l’appelant a alors été informé ou pas de la décision.

[21] Le 23 mai 2017, l’appelant a déposé des observations additionnelles au Tribunal en réponse à la réponse que l’intimée a faite à la demande du Tribunal en vertu de l’article 32 de la Loi dans laquelle l’appelant contestait l’affirmation de l’intimée selon laquelle il n’avait pas donné suite aux demandes de renseignements supplémentaires de l’intimée. L’appelant a déclaré qu’il s’est donné du mal pour communiquer avec l’intimée. Il a dit que, selon lui, l’intimée n’avait pas suivi la Loi ni le Règlement sur l’assurance-emploi (le « Règlement »).

[22] À l’audience, l’appelant a déclaré qu’on l’avait initialement embauché pour prendre les appels en tant qu’agent du service à la clientèle, qu’il répondait aux appels des clients qui demandaient des renseignements et qu’on lui garantissait 30 heures de travail par semaine. Il a indiqué que les quarts de travail étaient assignés en fonction du rendement et que, lorsqu’il a commencé à travailler, il était généralement affecté au quart de 15 h 30 à minuit, mais que lorsqu’il a quitté son rôle d’agent de service à la clientèle, il travaillait du lundi au vendredi, de 8 h à 16 h. L’appelant a témoigné que, sur la base de son rendement, il a été promu en janvier 2015, lorsqu’un gestionnaire des opérations lui a demandé d’être un superviseur du soutien à la simplification et que, en assumant ce rôle, il allait former des agents à la façon de répondre aux appels téléphoniques et il allait répondre à leurs questions pendant qu’ils prenaient des appels dans un contexte réel. L’appelant a déclaré que lui aussi prenait des appels lorsque des clients demandaient à parler à un gestionnaire, et qu’il tenait les réunions le matin et répondait à toutes les questions.

[23] L’appelant a déclaré qu’en septembre 2015, sa petite amie, qui était chef d’équipe chez l’employeur, a été renvoyée, qu’elle pensait que c’était en raison de la relation qu’elle entretenait avec lui et que les relations amoureuses entre employés étaient mal vues par la haute direction. Il a indiqué qu’au même moment son gestionnaire principal des opérations voulait le rétrograder, mais que sa superviseure est intervenue. Il a déclaré qu’il était devenu clair, avec le temps, que la direction lui en voulait. Il a déclaré qu’en janvier 2016 l’employeur a déduit 1 $ l’heure les primes des employés, et qu’il leur a promis, après que des employés se soient plaints, qu’il leur accorderait de substantielles hausses de salaire. L’appelant a déclaré qu’en février 2016, il a passé une entrevue pour être formateur en salle de classe, qu’il s’est présenté à une entrevue et qu’on lui a dit qu’il recevrait les résultats dans la semaine, mais qu’il n’a rien reçu pendant deux mois et qu’il s’est alors adressé au directeur pour savoir ce qui se passait et qu’on lui a dit que l’employeur ne faisait plus d’embauche pour ce poste. Il a indiqué que, d’après lui, si ses rapports avec l’employeur avaient été bons, comme ils l’étaient par le passé, il aurait été embauché pour ce poste. Il a décrit l’atmosphère de travail en indiquant qu’il ne recevait aucun soutien ni instructions de la haute direction sur la façon dont il devrait composer avec les futurs changements.

[24] Au sujet de son dernier jour de travail, l’appelant a expliqué qu’habituellement les employés sont avisés de leurs quarts de travail trois semaines à l’avance, mais qu’il s’est rendu au travail et qu’il a constaté qu’on l’avait affecté au quart de 15 h 30 à minuit le lundi et qu’on le remettait à la prise des appels téléphoniques, sans qu’il ait eu une véritable conversation avec un gestionnaire des opérations pour savoir si ces changements prenaient effet immédiatement. Il a dit qu’il allait probablement démissionner à ce moment-là, mais que ce jour-là, un gestionnaire des opérations lui a dit qu’il était en train d’espionner une agente du service à la clientèle parce qu’il n’aimait pas la façon dont elle se conduisait et qu’il voulait qu’elle parte. L’appelant a dit qu’il avait prévenu l’agente de faire attention, mais il a été réprimandé par le gestionnaire de l’agente pour avoir fait cela. Il a dit que le lendemain il a rédigé sa lettre de démission.

[25] L’appelant a dit qu’il avait signifié à ses gestionnaires, dans les mois qui ont précédé sa décision de démissionner, qu’il ne voulait pas reprendre le poste de préposé aux appels parce qu’il considérerait cela comme une rétrogradation et que cela serait inapproprié, mais les gestionnaires se sont contentés de l’envoyer promener sans lui donner de réponse directe. Il a déclaré que le programme [traduction] « Un échelon au-dessus » était un nom informel pour le rôle qu’il assumait, mais quand on lui a dit qu’il participerait au programme, on lui a dit qu’il était un gestionnaire du soutien à la simplification et que les gens qu’il formerait le considéreraient comme leur gestionnaire.

[26] Le Tribunal a demandé à l’appelant pourquoi, dans sa demande initiale de prestations, il a indiqué qu’il avait perdu son emploi en raison d’une pénurie de travail, alors qu’il a envoyé à l’employeur un courriel de démission dans lequel il précise les raisons de sa démission. L’appelant a répondu qu’il recherchait ce qui serait le plus approprié et qu’il n’a rien trouvé qu’il aurait choisi, qu’il ne voulait pas donner l’impression qu’il avait démissionné et qu’il n’était pas directement congédié ou suspendu. Lorsqu’on lui a posé la question, il a dit qu’il imaginait qu’il avait effectivement démissionné, qu’il a bel et bien démissionné, mais qu’il pensait qu’on l’avait forcé à le faire, de sorte qu’il pensait qu’il s’agissait davantage d’un congédiement constructif. Lorsqu’on lui a demandé de décrire le programme [traduction] « Un échelon au-dessus », l’appelant a dit que lorsque de nouveaux agents prenaient les appels téléphoniques et avaient des questions au sujet de leurs appels, ils allaient le voir, qu’il répondait aux demandes des clients qui voulaient parler à un gestionnaire et qu’il tenait les réunions chaque matin et à la fin de la journée. Il a indiqué qu’on lui avait dit qu’on l’avait sélectionné pour faire partie du programme en raison de ses aptitudes et que c’était la même chose pour les autres employés qui avaient assumé ce rôle, précisant que c’est la haute direction qui remarquait ces candidats potentiels au programme et que la haute direction souhaitait qu’ils transmettent leurs qualités aux nouveaux employés. Lorsqu’on lui a demandé si les employés étaient assignés de façon permanente au programme, l’appelant a répondu pas nécessairement, que parfois que cela ne fonctionne pas et qu’il arrive que les employés sélectionnés soient réaffectés aux appels, mais que, dans son cas, il a assumé ce rôle pendant 18 mois consécutifs. L’appelant a confirmé qu’il s’attendait à bénéficier d’une promotion à la fin du programme.

[27] L’appelant a nié l’affirmation que l’employeur a faite à l’intimée selon laquelle, pendant qu’il participait au programme « Un échelon au-dessus », ses heures de travail, son taux de rémunération, ses primes et le titre de son poste restaient les mêmes. Il a déclaré qu’en janvier 2007, un an après qu’il eut commencé à assumer ce rôle, les participants avaient perdu 1 $ sur leurs primes et qu’on lui avait garanti 40 heures par semaine, mais qu’on avait confirmé que le nouveau rôle ne s’accompagnait pas d’une hausse salariale, Concernant sa déclaration à l’intimée voulant qu’après qu’on l’eut rétrogradé à son ancien poste, il n’y a pas eu de réduction salariale ni des avantages sociaux, lorsqu’on lui a demandé si ce n’était pas là une indication qu’il n’avait jamais été promu ni rétrogradé, l’appelant a répondu qu’il était un gestionnaire, qu’il formait des gens, qu’il prenait des appels en qualité de gestionnaire et qu’il avait le pouvoir de prendre des décisions en tant que gestionnaire et que lorsqu’on est rétrogradé, on n’est pas un gestionnaire. Il a ajouté qu’il serait maintenant en train de travailler aux côtés de gens qu’il avait formés en tant que gestionnaire, ce qui aurait été très embarrassant et représentait clairement un recul dans la hiérarchie. Il a déclaré que, selon lui, il avait bénéficié d’une promotion, même si celle-ci ne s’était pas accompagnée d’une hausse de salaire. L’appelant n’était pas d’accord pour dire que le programme « Un échelon au-dessus » était une occasion de perfectionnement, déclarant plutôt qu’il s’agissait d’une occasion de gravir un échelon dans la hiérarchie. Il a confirmé que lorsqu’il a obtenu le nouveau rôle, on ne lui a pas présenté une nouvelle offre d’emploi et qu’on ne lui avait remis aucun document écrit concernant l’emploi qu’il pourrait produire comme preuve. Questionné au sujet de l’entrevue d’emploi à laquelle il s’était présenté et à savoir si quelqu’un d’autre avait obtenu le poste, l’appelant a répondu qu’il ne le savait pas, mais qu’il pensait que des personnes avaient bel et bien été embauchées, bien que l’employeur lu a dit qu’il n’embauchait plus pour le poste.

Observations

[28] L’appelant se dit en désaccord avec l’interprétation que l’intimée fait de la Loi et du Règlement. Il dit croire que la Loi prévoit qu’une personne a droit à des prestations d’assurance-emploi lorsque son milieu de travail devient toxique et hostile et que la Loi et le Règlement sont clairs sur le fait que lorsque la direction d’une entreprise décide de réduire le salaire d’un employé, de le rétrograder sans justification et de ne pas tenir ses promesses de promotion, il s’agit d’une forme de congédiement constructif. L’appelant soutient que l’intimée a tort lorsqu’elle dit qu’elle a demandé à l’appelant d’envoyer d’autres renseignements par la poste et qu’il a refusé de le faire et il affirme que le fait que l’intimée n’ait pas envoyé de lettre de décision initiale à l’appelant est une indication que son dossier n’a pas été adéquatement pris en considération. Il fait valoir que sa relation avec l’employeur s’était détériorée et que le climat de travail était devenu toxique et hostile, si bien qu’il a eu raison de remettre une lettre de démission et de qualifier cela de congédiement constructif. L’appelant a renvoyé le Tribunal à d’autres décisions arbitrales, dont Liggatt (CUB 66311), X (CUB 74457) et J.V. (CUB 79453).

[29] L’intimée soutient que, du fait que l’appelant n’a pas donné suite à la demande qu’elle lui avait faite de fournir des renseignements additionnels, elle a rendu sa décision en se fondant sur les faits au dossier le 6 septembre 2016, mais qu’il n’y a aucune indication permettant de savoir si l’appelant a été informé de cette décision lorsqu’il a appelé le 7 septembre 2017. L’intimée déclare que l’appelant n’était pas fondé à quitter volontairement son emploi parce qu’il n’avait pas épuisé toutes les solutions raisonnables avant son départ, par exemple, continuer d’occuper son emploi jusqu’à ce qu’il en trouve un autre lui convenant davantage. L’intimée souligne que, bien que l’appelant ait dit qu’on l’avait rétrogradé de son rôle de gestionnaire pour le réaffecter à son poste régulier et que ses heures et sa rémunération avaient été réduites, l’employeur a précisé que l’appelant avait pris part à un programme qui permettait aux employés d’acquérir de l’expérience dans d’autres rôles et que lorsque la durée de sa participation à ce programme a pris fin, l’appelant a été réaffecté à son poste régulier. L’intimée déclare que la période de paie figurant dans le RE de l’appelant montre des gains bihebdomadaires ininterrompus pour les 34 dernières semaines de son emploi. L’intimée déclare que l’appelant n’a commencé à se chercher un emploi qu’après avoir démissionné, même s’il indique que sa « désillusion » face à la compagnie a commencé en septembre 2015.

Analyse

[30] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe de la présente décision.

[31] Le Tribunal note que l’intimée a inclus une preuve concernant une exclusion du bénéfice des prestations d’assurance-emploi au motif que l’appelant ne se trouvait pas au Canada et qu’il ne pouvait pas prouver sa disponibilité pour travailler. Le Tribunal note aussi que la question faisant l’objet de l’appel porte uniquement sur la décision de réexamen de l’intimée concernant le départ volontaire sans justification de l’appelant. L’article 113 de la Loi stipule que quiconque se croit lésé par une décision de la Commission rendue en application de l’article 112 peut interjeter appel de cette décision devant le Tribunal de la sécurité sociale. Comme l’article 112 de la Loi ne fait pas mention de décisions de réexamen concernant l’exclusion du bénéfice des prestations pour absence du Canada, le Tribunal n’a pas compétence pour se prononcer sur cette partie des observations de l’appelant.

[32] Le Tribunal note aussi que l’intimée a omis d’envoyer une lettre initiale de décision à l’appelant pour l’informer qu’elle avait déterminé qu’il avait volontairement quitté son emploi sans y être fondé. L’appelant a soutenu que l’erreur de l’intimée est une indication que l’intimée n’a pas dûment pris en considération son dossier et qu’elle n’a pas suivi la Loi et le Règlement. Le Tribunal est guidé par la Cour d’appel fédérale qui, dans sa décision Desrosiers c. Canada (PG), A-128-89, a entériné le principe établi par le juge-arbitre dans la décision Desrosiers (CUB 162330) selon lequel une erreur d’écriture qui ne cause aucun préjudice au prestataire n’est pas fatale à la décision portée en appel. L’appelant a dit que l’intimée lui a verbalement communiqué sa décision initiale le 26 septembre 2016 et qu’il a demandé un réexamen de cette décision, à la suite duquel il a exercé son droit d’interjeter appel de la décision de réexamen devant le Tribunal. Le Tribunal n’accepte donc pas l’argument de l’appelant selon lequel l’intimée n’a pas dûment examiné son cas et n’a pas suivi la Loi ou le Règlement; le Tribunal estime plutôt que l’erreur que l’intimée a commise en n’envoyant pas sa lettre de décision initiale à l’appelant ne cause pas de préjudice à ce dernier.

[33] Le paragraphe 30(1) de la Loi stipule qu’un prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il quitte volontairement un emploi sans justification (c’est-à-dire sans y être fondé). Le critère à appliquer, en tenant compte de toutes les circonstances, est de savoir si le prestataire avait une solution de rechange raisonnable au départ lorsqu’il a quitté son emploi.

[34] Le fardeau de la preuve repose sur la Commission, à qui il incombe de prouver que le départ était volontaire. Après quoi, le fardeau de la preuve se déplace vers le prestataire, à qui il incombe de démontrer qu’il était fondé à quitter son emploi, c’est-à-dire que son départ avec une justification.

Green c. Canada (PG), 2012 CAF 313; Canada (PG) c. White, 2011 CAF 190; Canada (PG) c. Patel, 2010 CAF 95

Départ volontaire d’un emploi

[35] Le Tribunal conclut que l’appelant a quitté volontairement son emploi. La preuve que l’intimée a produite sous la forme du RE provenant de l’employeur indique que l’appelant a démissionné.

[36] Bien que, dans sa demande initiale de prestations d’assurance-emploi, l’appelant ait indiqué qu’il avait perdu son emploi en raison d’une pénurie de travail, à l’audience, il a clarifié cela en disant qu’il avait bel et bien quitté son emploi, mais qu’il pensait qu’on l’avait forcé à faire cela. L’appelant a produit à l’intimée un courriel qu’il avait envoyé à l’employeur le 1er août 2016 et dans lequel il signifiait sa démission prenant effet immédiatement, avant d’exposer les détails des raisons de sa démission. L’appelant a argué que sa cessation d’emploi devrait être considérée comme un congédiement constructif et que la Loi et le Règlement sont clairs sur le fait que les décisions de la direction d’une entreprise de réduire le salaire d’un employé, de le rétrograder sans justification et de ne pas tenir ses promesses de promotion sont une forme de congédiement constructif.

[37] Le Tribunal n’accepte pas l’argument de l’appelant voulant que, parce qu’il considère que l’employeur l’a congédié de façon constructive, il n’a pas volontairement quitté son emploi. Même si l’appelant était mécontent de devoir retourner à son poste d’agent du service à la clientèle au téléphone et même s’il a mentionné le milieu de travail comme étant devenu toxique et hostile, le Tribunal juge que la preuve est insuffisante pour conclure que l’employeur voulait se débarrasser de l’appelant et que ce dernier ne pouvait pas se permettre de continuer à occuper son emploi. Sur ce point, le Tribunal trouve appui dans la décision Canada (PG) c. Peace, 2004 CAF 56, dans laquelle la Cour d’appel fédérale a maintenu que, pour l’application du paragraphe 30(1) de la Loi, la question de savoir si un employé a quitté volontairement son emploi est une question simple et que la question qu’il faut se poser est la suivante : L’employé avait-il le choix de rester ou de quitter? Par conséquent, le Tribunal estime que l’appelant a quitté son emploi volontairement.

Justification pour quitter un emploi

[38] La Cour d’appel fédérale a statué que pour établir l’existence d’une « justification », c’est-à-dire pour établir que le prestataire était « fondé » à quitter son emploi, il faut que soit démontré, en tenant compte de l’ensemble des circonstances et selon la prépondérance des possibilités, que le prestataire n’avait pas d’autre solution raisonnable que le départ. Finalement, c’est au prestataire qu’il incombe de démontrer que son départ volontaire avait une « justification », c’est-à-dire qu’il était « fondé » à quitter son emploi.

Tanguay c. Canada (Commission de l’assurance-emploi), A-1458-84; Canada (PG) c. MacNeil c. Canada (Commission de l’assurance-emploi), 2009 CAF 306; Canada (PG) c. White, 2011 CAF 190

[39] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas démontré qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. L’appelant affirme qu’on l’a rétrogradé de son poste, que ses heures de travail ont été réduites, ce qui lui a causé un manque à gagner, et qu’il ne touchait plus de primes. Il a témoigné que l’employeur a congédié sa petite amie et que cette dernière croyait que c’était en raison de leur relation, puisque les relations amoureuses entre employés sont mal vues par la haute direction. Il a dit que, au même moment, le gestionnaire principal des opérations voulait le rétrograder, mais que sa superviseure directe est intervenue. L’appelant a parlé d’un lieu de travail empreint d’insatisfaction et où régnait un conflit entre lui et la direction, et que, lorsqu’il a vu qu’il devait retourner à son poste régulier d’agent du service à la clientèle, il a démissionné sur-le-champ. Il a déclaré que ses rapports avec l’employeur s’étaient détériorés, et que le climat de travail était devenu hostile et toxique, ce qui avait entraîné sa démission.

[40] L’appelant a déclaré qu’on l’avait promu à un poste de gestionnaire en janvier 2015 en fonction de son rendement, mais qu’on l’avait ensuite rétrogradé à son ancien poste après 18 mois. Il a décrit son rôle dans l’occupation du poste de gestionnaire comme consistant à former de nouveaux agents, à répondre à leurs questions, à prendre les appels de clients qui demandaient aux agents de parler à un supérieur et à tenir les réunions quotidiennes. Il a déclaré que les nouveaux agents le considéraient comme leur gestionnaire. L’appelant a confirmé qu’il avait été sélectionné pour faire partie du programme « Un échelon au-dessus » en fonction de son rendement et, lorsqu’on lui a demandé de décrire le programme, l’appelant a répété sa description de son rôle dans le poste de gestionnaire. Bien que l’employeur ait dit à l’intimée que le programme « Un échelon au-dessus » était un programme auquel les employés participaient à tour de rôle et qui était conçu pour sortir les employés de leurs rôles de tous les jours au téléphone et leur donner l’occasion d’acquérir de l’expérience en faisant quelque chose de différent pendant une courte période, l’appelant a déclaré qu’il n’était pas d’accord pour dire que ce programme était une occasion de perfectionnement professionnel et a plutôt dit qu’il s’agissait d’une occasion de gravir un échelon, bien qu’il n’ait jamais reçu une offre d’emploi officielle pour ce poste ni n’ait obtenu une hausse salariale associée au poste.

[41] Le Tribunal estime que la preuve est insuffisante pour conclure que l’appelant a été promu, et il conclut que, en fonction de son rendement, l’appelant a été choisi pour participer à un programme qui le sortait de ses tâches régulières pendant une période d’une durée limitée, ainsi que l’a décrit l’employeur. Bien que l’appelant ait insisté pour dire qu’il avait été promu, il a confirmé à l’intimée la preuve émanant de l’employeur selon laquelle il n’avait pas obtenu de hausse salariale pour assumer son nouveau rôle, bien que ce poste se soit accompagné d’une augmentation de son salaire en raison du nombre accru d’heures de travail. Compte tenu de la reconnaissance du programme « Un échelon au-dessus » par l’appelant et de sa participation à ce programme, de son témoignage indiquant qu’on ne lui a pas fait une offre officielle d’emploi pour le rôle qu’il assumait dans le cadre du programme « Un échelon au-dessus » et du fait qu’il a dit à l’employeur qu’il ne voulait pas retourner à son rôle de prise des appels de clients parce qu’il considérait cela comme une rétrogradation, le Tribunal estime qu’il est plus raisonnable de conclure que le programme était une mesure temporaire mise en place par l’employeur pour récompenser et perfectionner des employés. Sur ce fondement, le Tribunal accorde plus de poids à la preuve de l’intimée produite sous la forme d’informations fournies par l’employeur qu’à la preuve de l’appelant selon laquelle il a été promu au poste de gestionnaire.

[42] Étant donné sa conclusion concernant la nature temporaire du rôle de l’appelant dans le programme « Un échelon au-dessus », le Tribunal conclut que, ainsi que le soutient l’intimée, l’appelant n’a pas épuisé toutes les solutions de rechange raisonnables avant de quitter son emploi. Outre sa description selon laquelle il a été rétrogradé de son poste, l’appelant a mentionné un certain nombre d’autres problèmes qu’il avait avec l’employeur. Cependant, le Tribunal considère qu’il n’y a aucune preuve permettant de conclure que les conditions de travail de l’appelant étaient telles qu’elles constituaient une justification pour son départ immédiat, et ce, malgré la description d’un climat de travail toxique et hostile par l’appelant. Il est clair que l’appelant voulait gravir des échelons au-delà de son poste d’agent du service à la clientèle, et c’était là une louable ambition de sa part. Il a déclaré qu’il s’est présenté à une entrevue pour un autre poste, mais que l’employeur lui a ultérieurement dit que ce poste ne serait pas comblé. Bien que l’appelant ait laissé entendre qu’il aurait été embauché pour ce poste si ses relations avec l’employeur avaient été aussi bonnes qu’elles le fussent par le passé, la preuve est insuffisante pour conclure que l’employeur a délibérément refusé à l’appelant le poste qu’il visait lorsqu’il s’est présenté à l’entrevue. De fait, l’appelant a déclaré qu’il ignorait si quelqu’un avait été embauché pour le poste, bien qu’il ait ajouté qu’il pensait que des personnes avaient bel et bien été embauchées. Le Tribunal estime que l’appelant aurait pu attendre d’autres occasions de promotion avant de quitter son emploi comme il l’a fait.

[43] L’appelant a témoigné qu’à sa dernière journée de travail, il a vu, au tableau des horaires, qu’on le remettait aux appels téléphoniques, sans avoir eu une véritable conversation avec le gestionnaire des opérations pour dire si ces changements prenaient effet immédiatement. Le Tribunal note que l’employeur a expliqué ce changement à l’appelant en lui disant qu’il le rétablirait dans son rôle de gestionnaire une fois qu’on aurait embauché de nouvelles personnes dans les six prochains mois et note aussi que l’appelant a aussi parlé à sa superviseure, qui lui a expliqué que le volume d’activités ne permettait pas à l’entreprise de se doter d’un gestionnaire de la formation. Le Tribunal considère que, dans ces circonstances, étant donné l’intérêt que l’appelant portait à son rôle dans le programme « Un échelon au-dessus », il aurait pu attendre qu’une autre occasion s’offre à lui de faire partie du programme à l’avenir. Le Tribunal estime aussi que, étant donné le malaise que l’appelant a dit ressentir pour ce qui était de retourner à son poste régulier au téléphone, il aurait pu se mettre en quête d’un autre emploi avant de quitter son emploi.

[44] L’appelant a déclaré que la réduction du nombre de ses heures de travail à la suite de sa réaffectation à son poste aux appels téléphoniques signifiait aussi que son salaire était réduit. Le Tribunal reconnaît qu’aux termes du sous-alinéa 29(c)(vii) de la Loi le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment une modification importante de ses conditions de rémunération, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas. Néanmoins, le Tribunal a déjà conclu que l’appelant travaillait temporairement dans un programme à l’issue duquel il devait retourner à son rôle initial pour lequel on lui avait garanti moins d’heures de travail qu’il n’en travaillait lorsqu’il participait au programme. Le Tribunal n’y voit pas là une modification importante des conditions de rémunération de l’appelant; il s’agirait plutôt d’une situation où l’appelant a temporairement bénéficié d’un plus grand nombre d’heures de travail pendant qu’il participait au programme « Un échelon au-dessus » et que, alors qu’il conservait le même taux de rémunération pendant sa participation au programme, son salaire a augmenté en raison du plus grand nombre d’heures.

[45] L’appelant a parlé d’une réduction de prime de 1 $ l’heure qu’on lui a appliquée en janvier 2016. L’employeur a dit à l’intimée qu’il avait opéré un changement dans le régime de rémunération en janvier 2016, mais a indiqué que cela ne s’était pas accompagné d’une diminution particulière du salaire réel des employés. L’employeur a également dit que lorsque les employés ont eu vent des négociations contractuelles en cours, ils ont présumé qu’une hausse salariale s’ensuivrait immédiatement. Incidemment, l’appelant a témoigné que l’employeur avait promis aux employés des hausses substantielles. Le Tribunal retient la preuve de l’intimée reçue de l’employeur parce qu’il juge que l’employeur était objectif et neutre quant à l’issue du présent appel. Par conséquent, le Tribunal accorde plus de poids à la preuve de l’intimée selon laquelle un changement opéré dans le régime de rémunération en janvier 2016 n’a pas engendré de réduction particulière du salaire réel des employés que la preuve de l’appelant selon laquelle il a perdu une prime. En conséquence, le Tribunal conclut qu’il n’y a pas eu de modification importante des conditions de rémunération de l’appelant.

[46] Au sujet de son affirmation selon laquelle le climat de travail était toxique et empreint d’hostilité, l’appelant a dit que c’était en raison des promotions qu’on lui avait promises et du fait qu’après s’être présenté à une entrevue pour un poste il s’est fait dire que ce poste n’était plus disponible. Il a témoigné qu’après le congédiement de sa petite amie, toute conversation qu’il avait l’employeur était glaciale et unilatérale et que l’employeur n’était pas réceptif à ce que l’appelant disait. Bien que le Tribunal comprenne que le congédiement de sa petite amie ait causé des préoccupations à l’appelant et que l’appelant était, on peut le comprendre, mécontent de n’avoir pas bénéficié d’une promotion, le Tribunal estime que la preuve fournie par l’appelant n’étaye pas sa description du climat toxique et d’hostilité qui régnait au milieu de travail. Le Tribunal reconnaît, à la lumière de la détérioration des relations avec son employeur mentionnée par l’appelant, qu’il y ait pu avoir quelques conflits non réglés entre l’appelant et l’employeur. Toutefois, en concluant que l’appelant aurait pu prendre des mesures pour résoudre les conflits qu’il avait avec son employeur avant de quitter son emploi, le Tribunal est guidé par la Cour d’appel fédérale qui a statué que c’est au prestataire qu’il incombe, dans la plupart des cas, de tenter de résoudre les conflits en milieu de travail avec un employeur ou de démontrer qu’il a déployé des efforts pour se trouver un autre emploi avant de prendre unilatéralement la décision de quitter un emploi.

Canada (PG) c. White, 2011 CAF  190; Canada (PG) v. Hernandez, 2007 CAF 320; Canada (PG) c. Murugaiah, 2008 CAF 10

[47] L’appelant a renvoyé le Tribunal à un certain nombre de décisions CUB (décisions du juge-arbitre du Canada). Bien que le Tribunal ne soit pas lié par les décisions CUB, il fera des commentaires sur les affaires citées qu’il considère comme étant raisonnablement similaires à celle de l’appelant eu égard à la question tranchée par le juge-arbitre. Dans X (CUB 72485), le juge-arbitre a jugé que le conseil arbitral (maintenant la division générale) avait erré dans sa décision de rejeter l’appel de la prestataire sans avoir tenu compte de faits portés à sa connaissance, en l’occurrence les relations conflictuelles entre la prestataire et son supérieur. Le Tribunal estime que cette affaire peut être distinguée de l’affaire en instance en ce que le Tribunal a conclu que la description que l’appelant a faite du climat de travail en le qualifiant d’hostile et toxique n’est pas soutenue par la preuve. Le Tribunal estime, pour les mêmes raisons, que le cas de l’appelant est différent de l’affaire Liggatt (CUB 66311).

[48] Dans la décision Patterson (CUB 46727), l’employeur de la prestataire avait réorganisé ses activités et éliminé le poste occupé par la prestataire, et il lui avait offert un autre poste dont le nombre d’heures était réduit. Le juge-arbitre a statué que la question de fait essentielle de la réduction du nombre d’heures de la prestataire n’avait pas été prise en compte comme représentant « une modification importante de ses conditions de rémunération ». Le Tribunal estime que ce cas diffère de celui de l’appelant en ce que l’appelant assumait temporairement un nouveau rôle et devait retourner ensuite à l’occupation de son poste régulier. À ce chapitre, le Tribunal a déjà conclu que la réintégration de l’appelant à son poste régulier et la réduction du nombre d’heures qu’il travaillait en occupant le poste temporaire par rapport aux heures qu’on lui garantissait dans son poste régulier ne constituent pas une modification importante de ses conditions de rémunération.

[49] De la même façon, dans Montreuil c. Commission de l’emploi et de l’immigration du Canada et le procureur général du Canada (PG), A-868-96, la Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel que la prestataire avait interjeté à l’encontre de la décision rendue par le juge-arbitre au motif que la décision du juge-arbitre ne révélait pas de motifs justifiant son intervention dans la décision du conseil arbitral selon laquelle la prestataire était justifiée de quitter son emploi en raison de la diminution de son salaire. Là encore, le Tribunal a déjà conclu qu’il n’avait pas eu de modification importante des conditions de rémunération de l’appelant; plutôt, l’appelant a temporairement bénéficié d’un plus grand nombre d’heures de travail, ce qui a donné lieu à une augmentation de son salaire pendant qu’il participait au programme « Un échelon au-dessus ».

[50] Dans la décision Moser CUB 50083), le juge-arbitre a accueilli l’appel interjeté par le prestataire en raison des faits qui révélaient que le poste occupé par le prestataire avait été aboli, et que, même si l’employeur avait offert un nouveau poste à l’appelant, l’horaire de travail était moins favorable et l’imposition d’une autre période de probation laissait sous-entendre un manque de confiance de la part de l’employeur envers M. Moser et pouvait être formulée comme une façon de le congédier ultérieurement sans avoir à lui verser une indemnité de départ pour le travail accompli au sein de la compagnie. Là encore, le Tribunal a conclu, en l’espèce, que l’appelant retournait à son poste régulier et non à un nouveau poste. Bien que l’appelant ait témoigné qu’avant qu’on le fasse participer au programme « Un échelon au-dessus », il travaillait de 8 h à 16 h à son poste régulier, et que, à son retour à son poste régulier, on lui avait assigné le quart de travail de 15 h 30 à minuit, il s’agissait là d’un quart que, selon son propre témoignage, l’appelant effectuait lorsqu’il a commencé à travailler chez l’employeur. Le Tribunal conclut que la preuve est insuffisante pour conclure que le fait que l’appelant devait travailler de 15 h 30 à minuit était une indication qu’il était soumis à une autre période de probation et qu’il n’y a aucune preuve devant le Tribunal indiquant que l’appelant ait demandé à travailler de 8 h à 16 h; plutôt, l’appelant a quitté son emploi volontairement. Le Tribunal conclut, pour les mêmes raisons, que le cas de l’appelant diffère de celui de l’affaire J.V. (CUB 79453).

[51] À la lumière de ce qui précède, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas démontré qu’il n’avait aucune autre solution raisonnable au départ lorsqu’il a quitté son emploi, ni n’a montré qu’il était « fondé » à quitter son emploi, au sens de l’article 29 de la Loi, ou qu’il avait une « justification » pour cela au sens de l’article 30 de la Loi.

Conclusion

[52] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi
  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii)  de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii)  nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v)  nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii)  modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x)  relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii)  discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1)  Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations — qu’elle soit initiale ou non — n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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