Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

[1] Le 25 septembre 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada a conclu que l'appelante dans cette affaire (la prestataire en l'espèce) avait volontairement quitté son emploi sans justification. L'ancien employeur de la prestataire, qui était la partie mise en cause dans l'instance devant la division générale, a présenté une demande de permission d'en appeler devant la division d'appel le 1er novembre 2017.

Question en litige

[2] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[3] Selon les paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission », et la division d'appel « accorde ou refuse cette permission ».

[4] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[5] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier:
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[6] L'employeur soutient que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] À l'appui de cet argument, l'employeur déclare que la division générale s'est fondée sur deux documents, à savoir les lignes directrices du conseil des commerçants et consultants spécialisés en prothèses auditives de la Colombie-Britannique (lignes directrices de la C.-B.) et une lettre du collège des professionnels de la parole et de l'audition de la Colombie-Britannique datée du 9 septembre 2017 (lettre du collège) qui étaient, selon l'employeur, non pertinentes.

[8] L'employeur soutient également que la division générale a ignoré la preuve selon laquelle la manière dont la prestataire a effectué sa pratique et supervisé son étudiant avait été approuvée par le collège des professionnels de la parole et de l'audition de la Colombie‑Britannique (collège).

[9] Finalement, l'employeur soutient que la division générale n'a pas tenu compte que la prestataire avait menacé de démissionner de son emploi avant de soulever une préoccupation concernant la supervision de l'étudiant.

[10] Aucune observation n'a été présentée par la défenderesse, la Commission de l'assurance-emploi du Canada, ou par la prestataire.

Analyse

[11] L'employeur considère comme non pertinents deux des documents versés à la preuve devant la division générale :

  • les lignes directrices de la C.-B. sont déclarées comme étant non pertinentes parce qu'elles ont été produites par le conseil des spécialistes et consultants en prothèses auditives, conseil qui n'existe plus et dont les politiques et les lignes directrices étaient déjà désuètes au moment où la prestataire a soulevé des préoccupations concernant les pratiques de son employeur;
  • la lettre du collège est déclarée comme non pertinente parce qu'elle représente une mise à jour de la politique et des lignes directrices survenue après les préoccupations soulevées par la prestataire et après que celle-ci a quitté son emploi.

[12] La prestataire n'avait pas présenté les politiques ou lignes directrices de l'ancien conseil des spécialistes et consultants en prothèses auditives (conseil). Cependant, elle avait présenté une lettre datée du 9 juin 2009 et produite par l'ancien conseil à l'intention de l'ancien superviseur de la prestataire (et ancien partenaire de l'employeur) qui décrit les responsabilités du superviseur d'un étudiant. La préoccupation de l'employeur concernerait ce document.

[13] La division générale a reconnu la préoccupation de l'employeur selon laquelle la lettre du 9 juin 2009 aurait appliqué les lignes directrices et les politiques du défunt conseil. Elle a convenu que ce conseil n'existait plus et que les politiques de celui-ci ne s'appliquaient plus. Cependant, la division générale a quand même convenu que la lettre du 9 juin 2009 avait une valeur probante parce qu'elle était en harmonie avec la déclaration de 2010 selon laquelle le collège demandait à ce que la lettre soit signée par l'étudiant et cosignée par le superviseur. Selon la déclaration, le déclarant a participé à un programme de [traduction] « supervision comme il a été conseillé par le greffier du collège ».

[14] L'employeur laisse entendre que la lettre du 9 septembre 2017 du collège n'est pas pertinente, et on ne devrait pas s'y fier parce qu'elle renvoie à des politiques et à des lignes directrices qui l'emportent sur les politiques et les lignes directrices en vigueur pendant la période visée (politiques pertinentes). Cependant, l'employeur n'a pas souligné des différences importantes entre la lettre du 9 septembre 2017 et les politiques pertinentes qui donneraient à penser que la division générale a commis une erreur en tenant compte de la lettre.

[15] Je souligne qu'il existe des différences entre l'avis du collège énoncé dans la lettre du 9 septembre 2017 et les politiques pertinentes prévues dans les lignes directrices du collège (qui font état que la plus récente révision a été effectuée le 12 juin 2015).

[16] La lettre datée du 9 septembre 2017 fait état de ce qui suit :

[traduction]
Pendant la phase de supervision rapprochée (les premières 330 heures de stage de 660), le superviseur doit être sur place en tout temps avec l'étudiant et doit observer celui-ci pendant les 30 premières heures cliniques.

[17] À titre de comparaison, les lignes directrices de 2015 du collège prévoient 140 heures d'observation directe, 350 heures de supervision rapprochée, puis 350 heures de supervision générale. Dans les deux premières phases (490 heures au total), le superviseur devait être sur place en tout temps.

[18] La lettre datée du 9 septembre 2017 et l'énoncé de politique de juin 2015 prévoient qu'un étudiant doit informer le greffier à l'avance de toute modification proposée dans le plan du superviseur / de supervision.

[19] Dans la mesure où la lettre datée du 9 septembre 2017 prévoit les exigences en matière de supervision qui diffèrent de la politique précédente, celles-ci semblent, à première vue, moins strictes que celles prévues dans la politique en vigueur au moment où la prestataire a soulevé sa préoccupation. Il est difficile de constater la façon dont l'examen de la lettre de septembre 2017 par la division générale aurait pu causer préjudice à l'employeur.

[20] Les exigences actuelles, comme il en est fait état dans la lettre du 9 septembre 2017, demeurent pertinentes dans la mesure qu'elles démontrent une régularité dans les lignes directrices du collège.

[21] À mon avis, la réelle question de l'employeur concerne l'importance relative accordée par la division générale aux divers éléments de preuve. Toutefois, mon rôle n'est pas d'apprécier la preuve de nouveau. À la lumière de la décision, il est évident que la division générale a justifié la manière dont elle a apprécié la preuve et qu'elle s'est fondée sur la preuve pour tirer les conclusions appropriées. L'employeur n'a pas soulevé une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur en tenant compte des documents versés dans la preuve.

[22] L'employeur a également fait valoir que la division générale a ignoré la preuve de l'employeur concernant la façon dont il a confirmé au collège que ses pratiques étaient acceptables. Dans sa décision, la division générale examine cette preuve aux paragraphes 24, 29 et 33 et dans son analyse au paragraphe 43. La division générale a convenu que l'employeur a appelé le collège et qu'il croyait se conformer aux lignes directrices et à la politique du collège. Cependant, en tenant compte de la question de savoir si les préoccupations de la prestataire au sujet des pratiques de l'employeur étaient justifiées, la division générale a choisi d'accorder plus d'importance à la preuve documentaire, comme les réelles politiques du collège. Je n'estime pas que la preuve de l'employeur a été ignorée ou mal interprétée. Comme il a été souligné précédemment, l'appréciation de la preuve est de la compétence de la division générale en tant que juge des faits.

[23] L'employeur fait valoir que la division générale a ignoré la preuve selon laquelle la prestataire avait menacé de démissionner et de lancer son entreprise. La division générale aborde ce point aux paragraphes 17, 18, 24, 29 et 37 de sa décision. En réalité, la division générale a déclaré avoir donné beaucoup d'importance à la lettre datée du 1er novembre 2015 étant donné qu'elle confirme l'intention de la prestataire de démissionner si les choses ne changeaient pas. Cela a facilité la décision de la division générale selon laquelle la prestataire avait quitté volontairement son emploi, et non qu'elle avait été congédiée.

[24] Cependant, la décision de la division générale selon laquelle la prestataire n'avait aucune autre solution raisonnable que celle de quitter son emploi concernait la conclusion selon laquelle elle avait quitté son emploi parce que son employeur s'attendait à ce qu'elle agisse d'une façon allant à l'encontre des normes du collège [traduction] « malgré la suggestion de l'employeur selon laquelle la prestataire était généralement malheureuse relativement aux choses au bureau ». L'employeur n'a pas présenté une cause défendable selon laquelle la division générale a ignoré ou mal interprété d'une façon quelconque la preuve selon laquelle la prestataire avait menacé de démissionner ou avait d'autres raisons de démissionner, ou une cause défendable au motif que la conclusion de la division générale selon laquelle son départ a été motivé par sa préoccupation d'ordre professionnel avait été tirée de façon abusive ou arbitraire.

[25] J'ai examiné le dossier de l'instance devant la division générale, mais je n'ai cerné aucune preuve mal interprétée ou ignorée.

[26] Pour tous les motifs susmentionnés, j'estime que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[27] La demande est rejetée.

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