Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Introduction

[1] Le 26 avril 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada a déterminé que la demande initiale de prestations de la demanderesse (aussi appelée prestataire) ne pouvait pas être considérée comme ayant été présentée plus tôt, conformément au paragraphe 10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). La prestataire a présenté une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal le 12 juin 2017.

Questions en litige

[2] La demande de permission d’en appeler a-t-elle été présentée dans les délais prescrits, et si tel n’est pas le cas, une prorogation de délai pour présenter la demande tardive devrait-elle être accordée?

[3] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[4] L’alinéa 57(1)a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) prévoit que la demande de permission d’en appeler doit être présentée dans les trente jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision de la division générale.

[5] L’alinéa 19(1)a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que la décision est présumée avoir été communiquée à la partie si elle est transmise par la poste ordinaire, le dixième jour suivant celui de sa mise à la poste.

[6] Le paragraphe 57(2) de la Loi sur le MEDS permet à la division d’appel d’accorder un délai supplémentaire pour présenter une demande de permission d’en appeler.

[7] Au titre des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS, il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[8] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

[9] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[10] La prestataire soutient que la boîte aux lettres de son immeuble d’appartements était brisée du 8 au 12 mai 2017, et qu’elle n’a reçu la décision de la division générale que le 16 mai 2017.

[11] En ce qui a trait à sa demande de permission d’en appeler, la prestataire soutient qu’elle ne savait pas qu’il était important de présenter sa demande de prestation dans les délais impartis et que la décision est injuste.

Analyse

Question préliminaire : demande tardive

[12] La décision de la division générale a été rendue le 26 avril 2017. La prestataire a soutenu que sa boîte aux lettres était brisée du 8 mai au 12 mai, et qu’elle n’avait reçu la lettre de décision par la poste que le 16 mai 2017. Il n’y a aucune preuve du contraire.

[13] Les dossiers du Tribunal révèlent également que la prestataire avait demandé de connaitre l’état de sa décision le 26 avril 2017 et qu’un agent du Tribunal lui avait dit d’attendre de trois à quatre semaines avant de la recevoir. La date actuelle de la livraison se trouve à l’intérieur de l’estimation fournie par l’agent du Tribunal, et par conséquent, il semble plausible que la livraison était tout simplement en retard, ou qu’il y a eu une tentative de livraison pendant la période où la boîte aux lettres était brisée et qu’une nouvelle tentative n’a eu lieu que plusieurs jours après que la boîte aux lettres ait été réparée.

[14] J’accepte la preuve de la prestataire et conclus que la décision lui a été communiquée le 16 mai 2017. L’alinéa 57(1)a) de la Loi sur le MEDS prévoit qu’une prestataire doit présenter sa demande de permission d’en appeler dans les trente jours suivant la date où elle reçoit communication de la décision. Sa demande, présentée le 12 juin 2017, se trouve dans les trente jours suivant cette date, et n’est donc pas en retard.

[15] Par conséquent, je n’ai pas besoin de déterminer si une prorogation de délai devrait être accordée à la prestataire.

Permission d’en appeler : L’appel de la prestataire a-t-il une chance raisonnable de succès?

[16] Dans sa demande de permission d’en appeler, la prestataire a mentionné que la division générale avait commis une erreur en n’omettant d’observer un principe de justice naturelle ou en excédant ou refusant d’exercer sa compétence. La prestataire a décrit pourquoi elle n’était pas d’accord avec la conclusion de la division générale, mais elle n’a pas précisé de quelle façon la division générale avait enfreint un principe de justice naturelle ou commis une erreur de compétence.

[17] Par conséquent, la division d’appel a écrit à la prestataire le 19 juin afin de lui demander qu’elle complète sa demande en fournissant ses motifs d’appel. Dans la lettre, l’on expliquait les moyens d’appel et demandait à la prestataire d’expliquer pourquoi elle croyait que son appel avait une chance raisonnable de succès selon ces motifs. Selon les dossiers du Tribunal, la prestataire a appelé en réponse à la lettre du 19 juin et a été avisée par un employé du Tribunal que le Tribunal avait besoin de fournir des motifs pour son appel ainsi que les raisons pour lesquelles son appel avait une chance raisonnable de succès. Elle a mentionné qu’elle fournirait une réponse sous peu. Le 4 juillet 2017, la prestataire a rappelé pour dire qu’elle n’avait pas répondu à la lettre, car elle avait été hospitalisée. Un employé du Tribunal a encore une fois expliqué qu’elle avait besoin de prouver qu’il y avait une erreur dans la décision de la division générale et qu’elle devait fournir des moyens d’appel.

[18] Les registres téléphoniques ne révèlent pas que la prestataire a précisé ses moyens d’appel oralement, et elle n’a pas présenté d’explication écrite supplémentaire.

[19] La justice naturelle vise à assurer qu’une partie bénéficie d’un processus équitable, non pas d’une perception d’équité relativement à l’issue de la décision. En règle générale, cela signifie que la partie a le droit d’avoir un décideur impartial, d’être entendue, de connaitre les éléments de preuve à réfuter et de réfuter ces éléments de preuve. Il n’y a rien dans la demande de la prestataire qui laisserait entendre que le processus auprès de la division générale n’a pas été équitable. La prestataire n’a pas non plus identifié d’erreur de compétence. Je ne relève aucune cause défendable selon les motifs énoncés sur lesquels la prestataire a fondé sa demande.

[20] Cependant, la prestataire a également mentionné dans sa demande qu’elle n’avait pas une bonne compréhension du régime d’assurance-chômage, et elle a dit qu’elle n’était pas capable d’avoir accès à des prestations en raison du fait qu’elle ne comprenait pas les règles et les délais. Je vais présumer qu’elle avait l’intention de soutenir que la division générale avait tiré des conclusions de fait qui ne tenaient pas compte de son ignorance du régime et du droit. Cela pourrait s’agir d’une [traduction] « conclusion de fait erronée », au sens de l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS.

[21] Cela n’était pas son argument principal devant la division générale. La prestataire avait témoigné qu’elle n’avait pas présenté de demande de prestations en temps opportun, car elle se trouvait à l’extérieur du pays, elle avait été malade en raison de sa grossesse et déprimée à son retour, et elle s’attendait à reprendre son précédent emploi. Lorsqu’elle s’est fait questionner par le membre de la division générale, la prestataire a ajouté qu’elle ne savait pas qu’elle serait admissible à des prestations après être allée à l’extérieur du pays.

[22] Après avoir examiné le dossier, j’estime que l’appel n’a pas de chance raisonnable de succès en soutenant que la division générale a ignoré ou mal interprété sa preuve. La division générale a tenu compte de sa preuve, mais a conclu qu’elle ne satisfaisait pas au critère relatif au « motif valable ». Dans sa décision, la division générale traite de ses diverses raisons pour lesquelles sa demande était tardive et prend acte de son explication selon laquelle elle ne savait pas qu’elle serait admissible, mais elle a conclu que tous ses motifs ne [traduction] « démontr[aient] pas qu’elle avait agi comme l’aurait fait une personne raisonnable et prudente dans les mêmes circonstances pour se renseigner sur ses droits et ses obligations en vertu de la Loi ».

[23] De plus, la prestataire n’a soulevé aucune cause défendable selon laquelle la division générale aurait commis une erreur de droit. Lorsqu’elle a conclu que la prestataire n’avait pas démontré qu’elle avait un motif valable, la division générale a appliqué le critère juridique approprié. Conformément au paragraphe 10(4) de la Loi sur l’AE, une demande peut être antidatée seulement si l’on peut conclure qu’il y a un motif valable expliquant le délai pour présenter la demande initiale de prestations d’assurance-emploi au cours de toute la période écoulée.

[24] Finalement, je ne suis pas convaincue qu’il y ait une cause défendable selon laquelle la division générale aurait commis une erreur dans la façon dont elle a appliqué le droit aux faits, s’il s’agit là de l’intention de la prestataire. Les décisions de la Cour d’appel fédérale appuient la conclusion de la division générale selon laquelle le manque de connaissance relativement à l’admission n’est pas un « motif valable ». La Cour a toujours maintenu qu’un prestataire a une obligation positive de confirmer ses obligations en vertu de la Loi sur l’AE. Elle a également soutenu qu’une personne qui agit de bonne foi et qui choisit de se chercher un emploi plutôt que de recevoir des prestations, comme la prestataire semble avoir fait au cours de la période de mars 2015 à août 2015, n’a quand même pas démontré qu’elle avait [traduction] « un motif valable », comme il est exigé pour que la demande soit antidatéeNote de bas de page 1. La division générale est tenue d’appliquer le droit, y compris le droit de la manière qui est interprété par les tribunaux.

[25] La demanderesse n’a identifié aucun moyen d’appel grâce auquel l’appel aurait une chance raisonnable de succès, et je n’en trouve aucun. J’ai examiné l’ensemble du dossier afin de déterminer si d’autres éléments de preuve pertinents avaient été négligés ou mal interprétés, ou si toute autre erreur était apparente. La division générale semble avoir traité la prestataire de manière équitable et correcte, elle semble avoir compris et considéré tous les éléments de preuve pertinents et semble avoir appliqué le bon critère juridique de manière appropriée. La division générale compatissait avec les circonstances difficiles de la prestataire, mais elle ne pouvait pas conclure que la prestataire avait un motif valable au cours de l’ensemble de la période du délai.

[26] Je ne suis pas en mesure de trouver d’erreur dans la décision de la division générale qui confèrerait à l’appel de la prestataire une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[27] La demande de permission d’en appeler est rejetée.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.