Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Introduction

Le 6 septembre 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada a déterminé qu’une allocation reçue par le demandeur (requérant) à titre d’indemnité a été correctement répartie du 2 janvier 2016 au 25 décembre 2016. Le 13 octobre 2017, le requérant a déposé une demande de permission d’en appeler devant la division d’appel du Tribunal.

Question en litige

[1] L’appel a-t-il une chance raisonnable de succès?

Droit applicable

[2] Au titre des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission, et la division d’appel accorde ou refuse cette permission.

[3] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS prévoit que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[4] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Observations

[5] Le requérant a soutenu devant la division générale qu’il aurait pu accepter la cessation d’emploi le 30 décembre 2015, soit au moment de la suppression du poste. Il a plutôt choisi, selon les conditions de la convention collective, d’être licencié et de demeurer un employé jusqu’au 30 juin 2016. Au cours de cette période, il serait admissible aux prestations complémentaires d’assurance-emploi, et il aurait droit de miser sur des postes et de voir ses années de service reconnues. Il a aussi conservé son ancienneté auprès du syndicat, continué à accumuler des vacances et des congés de maladie, et il est demeuré un employé de l’entreprise.

[6] En conséquence de son choix, le requérant fait valoir qu’il n’a pas cessé son emploi ou qu’il n’est pas admissible à une indemnité de départ jusqu’à ce qu’il mette lui-même fin à son emploi ou à la fin de la période de six mois. Par conséquent, il n’aurait pas dû recevoir d’indemnité de départ du 2 janvier 2016 au 30 juin 2016.

[7] Le requérant fait maintenant valoir que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle, a erré en droit et a commis d’importantes erreurs de fait. Plus précisément, le requérant prétend que les allocations d’indemnité devaient uniquement être payées après le 30 juin 2016, et que le paragraphe 36(15) du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE) prévoit que les allocations payées ou payables sous forme de montant forfaitaire sont réparties à compter de la première semaine où elles lui sont payées ou payables.

[8] Le requérant a présenté des éléments de preuve supplémentaires dans ses observations devant la division d’appel; toutefois, je ne prendrais pas en considération cette preuve. La preuve n’est pas essentielle à la question de savoir si la division générale a erré en tenant compte de la preuve portée à sa connaissance.

Analyse

Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit en tranchant le début de la période de répartition en tenant uniquement compte de la date à laquelle le poste de l’employeur a été éliminé?

[9]  Bien que le requérant soutienne que les trois moyens d’appel s’appliquaient, ses arguments pointent vers une erreur potentielle de droit. Étant donné que le requérant se fonde sur son interprétation du paragraphe 36(15) du Règlement sur l’AE, ses arguments n’ont aucune chance raisonnable de succès. Le paragraphe 36(15) renvoie précisément aux allocations décrites à l’alinéa 35(2)e), qui sont des paiements au titre ou au lieu d’une pension. Rien ne suggère qu’une portion de l’indemnité de départ était au titre ou au lieu d’une pension.

[10] En vertu des directives émises par la Cour fédérale, j’ai néanmoins été au-delà de la demande en examinant le dossier pour déceler d’autres erreurs potentiellesNote de bas de page 1.

[11] L’enregistrement audio de l’audience démontre clairement que le membre de la division générale a tenu compte de la question décisive comme motif du paiement des indemnités de départ. Elle mentionne ceci (à 15 minutes 43 secondes) : [traduction] « Ce qu’il faut trancher aujourd’hui c’est [...] c’était : Quelle était le motif du paiement? Pourquoi a-t-il reçu le paiement? » La division générale a conclu que l’emploi du requérant a pris fin le 30 décembre 2015, et a conclu que le paiement de l’indemnité de départ est attribuable à la suppression de son poste. Par conséquent, la division générale a tranché que la répartition doit commencer au moment de la suppression, c.-à-d. au licenciement.

[12] Que l’indemnité de départ soit payable en raison de la suppression du poste du requérant lorsque l’obligation de payer de l’employeur était encore sous condition ou que le paiement ait été versé en raison de la cessation finale d’emploi du requérant lorsque l’obligation devait se cristalliserNote de bas de page 2 demeure une question factuelle. Toutefois, le motif du paiement permet uniquement de déterminer si le paiement peut être considéré comme un revenu, et personne ne remet en question le fait qu’il s’agissait d’un paiement d’indemnité ou qu’il faut le considérer comme un revenu. Rien dans le Règlement sur l’AE ne suggère que le motif du paiement détermine la date à laquelle la répartition doit débuter.

[13] Le paragraphe 36(9) du Règlement sur l’AE énonce uniquement que la répartition débute au licenciement ou à la cessation d’emploi. En l’espèce, la suppression du poste coïncide avec le licenciement, mais pas nécessairement avec la cessation d’emploi.

[14] Le libellé du paragraphe 36(9) ne définit pas clairement si les termes « licenciement » et « cessation » doivent être considérés de façon distincte ou synonyme, mais le licenciement et la cessation peuvent effectivement être distincts. Le Règlement sur l’AE ne tranche pas si le « licenciement » ou la « cessation » doit être employé lorsque la date diffère, et il n’y a pas de précédent qui puisse aider dans cette détermination.

[15] Toutefois, la décision de l’arbitre (CUB 28611) est considérée comme la référence législative qui détermine l’ambiguïté des termes « licenciement » et « cessation ». L’arbitre mentionne que les deux termes sont synonymes, pourtant la loi est illogique s’ils ne sont pas considérés comme des synonymes. En tentant de régler cette difficulté, l’arbitre a procédé sur le même motif utilisé dans la décision préalable de l’arbitre, qui, a-t-il noté, a déterminé de façon constante que pour trancher le début de la période de répartition, la date finale à laquelle la relation employé-employeur est rompue doit prévaloir.

[16] La division générale a tenu compte de l’application du paragraphe 36(9) pour le licenciement, mais pas pour la cessation. J’estime qu’il est possible que la division générale ait erré au titre de l’alinéa 58(1)b) en ce sens qu’il aurait mal interprété ou mal appliqué la loi. Par conséquent, j’estime que la demande a une chance raisonnable de succès.

[17] Compte tenu de mes conclusions susmentionnées, je ne suis pas tenu de déterminer si la division a manqué un principe de justice naturelle ou si elle a tiré une conclusion de fait erronéeNote de bas de page 3.

Conclusion

[18] La demande est accueillie.

[19] Le requérant peut faire valoir d’autres moyens d’appel pendant l’audience d’appel sur le fond du litige.

[20] La décision d’accorder la permission d’en appeler ne présume aucunement du résultat de l’appel sur le fond.

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