Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] Le 19 mai 2017, la division générale du Tribunal de la sécurité sociale a conclu que l’appelant avait quitté son emploi sans justification au titre des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[3] L’appelant a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel le 18 août 2017. Il est présumé avoir reçu communication de la décision de la division générale le 29 mai 2017. La demande tardive de permission d’en appeler a été accueillie et la permission d’en appeler a été accordée le 13 septembre 2017.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience par téléconférence pour les raisons suivantes :

  • la complexité de la question en litige;
  • le fait que l’on ne prévoit pas que la crédibilité des parties figure au nombre des questions principales;
  • les renseignements au dossier, y compris le besoin de renseignements supplémentaires;
  • l’exigence du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale selon laquelle l’instance doit se dérouler de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l’équité et la justice naturelle permettent.

[5] L’appelant a participé à l’audience et il était représenté par S. F. L’intimée était représentée par Suzanne Prud’homme.

Droit applicable

[6] Au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS). il est prévu que les seuls moyens d’appels sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’appelant avait quitté volontairement son emploi sans justification au titre des articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE.

Norme de contrôle

[8] La Cour d’appel fédérale a conclu que le mandat de la division d’appel est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le MEDS. La division d’appel n’exerce pas un pouvoir de surveillance semblable à celui exercé par une cour supérieure (Canada (Procureur général) c. Jean, 2015 CAF 242; Maunder c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 274).

[9] Par conséquent, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Analyse

Faits non contestés

[10] L’appelant a été employé par l’entreprise Norcon Marine Service Ltd jusqu’au 18 avril 2016. À ce moment-là, l’employeur a effectué un test antidrogue au hasard, conformément à sa politique en matière de drogues et d’alcool. L’appelant avait lu et signé la politique. Lorsque son tour est venu de se soumettre à un test au hasard, l’appelant a refusé et a quitté le lieu de travail. Si le test avait donné lieu à un résultat positif, l’appel aurait eu la chance de fournir un test négatif dans une période de trois semaines.

Position des parties

[11] L’appelant soutient qu’il n’a pas quitté son emploi. Il déclare qu’il a été congédié par son employeur. De plus, la décision de la division générale ne tenait pas compte de la jurisprudence récente selon laquelle un test antidrogue fait au hasard sur les employés est en soi discriminatoire, même pour des postes importants sur le plan de la sécurité, puisque cela ne reflète pas une déficience actuelle ou future liée au travail.

[12] L’appelant soutient que le jour où il a refusé de se soumettre au test antidrogue pour employés était un jour normal de travail, et qu’il n’a jamais comporté de manière à discréditer son travail ou sa personnalité depuis qu’il a commencé son emploi. Son employeur n’avait aucune raison de croire qu’il avait consommé des drogues ou que son test serait positif.

[13] L’appelant soutient que l’employeur a enfreint ses propres procédures. Tous les employés qui ont affiché un résultat positif pour le cannabis ont récupéré leur emploi. Il était évident que l’employeur voulait le congédier.

[14] L’intimée soutient que, lorsque l’appelant a refusé de passer un test de détection d’alcool et de drogues, c’est l’appelant, et non l’employeur, qui a entrepris la cessation du lien employeur-employé.

[15] L’intimée soutient que l’appelant était pleinement conscient de la politique en matière de drogues et d’alcool de l’employeur, que celui-ci avait le droit d’effectuer un test antidrogue au hasard à n’importe quel moment, et qu’un doute raisonnable n’était pas nécessaire. L’appelant a accepté de se conformer à cette politique et il a donné l’autorisation à l’employeur de recueillir des échantillons et des renseignements médicaux, d’effectuer une fouille corporelle et de fouiller ses effets personnels et d’autres biens personnels le 18 juin 2015.

[16] L’intimée soutient que la division générale a tenu compte de l’ensemble de la preuve portée à sa connaissance, qu’elle n’a pas mal interprété la preuve et qu’elle n’a pas tiré de conclusions de fait de façon abusive ou arbitraire en l’espèce ou mal appliqué le critère juridique du départ volontaire selon la Loi sur l’AE.

Décision de la division générale

[17] La division générale a conclu que l’appelant aurait pu conserver son emploi s’il avait accepté de passer le test antidrogue comme il avait été demandé. En ce qui concerne les autres plaintes formulées par l’appelant au sujet de ses conditions de travail, il aurait pu demeurer employé et abordé ces problèmes tout en cherchant un autre emploi entretemps.

La division générale a-t-elle commis une erreur lorsqu’elle a conclu que l’appelant avait quitté volontairement son emploi sans justification au titre des articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE?

[18] La preuve selon laquelle l’appelant a refusé de subit le test de dépistage de drogues et d’alcool au hasard n’est par contestée, et ce, même s’il avait lu et accepté la politique de tolérance zéro en matière de drogues et d’alcool de l’employeur avant le test.

[19] Comme il a été conclu par la division générale, l’intimée aurait pu conserver son emploi s’il n’avait pas pris la décision de refuser le test. Si le test avait donné lieu à un résultat positif, l’appel aurait eu la chance de fournir un test négatif dans une période de trois semaines. Tous les employés qui ont affiché un résultat positif pour le cannabis ont récupéré leur emploi. La preuve démontre clairement que c’était l’appelant, et non l’employeur, qui a causé la perte d’emploi en refusant de subir le test effectué au hasard.

[20] L’appelant insiste sur le fait qu’il n’a pas démissionné, mais qu’il a plutôt été congédié par l’employeur, qui lui a dit de faire ses bagages et de quitter le navire.

[21] L’appelant, qui a informé l’employeur qu’il ne subirait pas le test effectué au hasard à toutes fins et intentions et qu’il n’a donné aucun autre choix à l’employeur que celui de mettre fin au contrat d’emploi de l’appelant.

[22] Par conséquent, le congédiement n’est que la sanction de la cause réelle de la perte d’emploi, à savoir la décision de l’appelant de refuser le test effectué au hasard.

[23] Le congédiement n’était en fait que la conséquence logique de l’acte délibéré de l’appelant et ne saurait faire oublier qu’il y a eu, d’abord et avant tout, départ volontaire de l’appelant (Canada (Procureur général) c. Côté, 2006 CAF 219).

[24] L’appelant fait valoir que la décision de la division générale ne tenait pas compte de la jurisprudence récente selon laquelle un test antidrogue fait au hasard sur les employés est en soi discriminatoire, même pour des postes importants sur le plan de la sécurité, puisque cela ne reflète pas une déficience actuelle ou future liée au travail.

[25] La seule question sur laquelle devait véritablement statuer la division générale était de savoir si l’appelant avait quitté volontairement son emploi conformément aux articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE, et non celle de savoir si la conduite de l’appelant était un motif valable de congédiement (Canada (Procureur général) c. Lemire, 2010 CAF 314).

[26] La conclusion de la division générale était que l’appelant aurait pu conserver son emploi s’il avait accepté le test antidrogue comme il avait été demandé et qu’il avait d’autres solutions raisonnables.

[27] Le Tribunal estime que la jurisprudence de l’appelant doit se distinguer des faits de l’espèce. Depuis le début, l’appelant était pleinement conscient de la politique de tolérance zéro en matière de drogues et d’alcool étant donné qu’il s’agissait d’une condition essentielle de son emploi. Cette politique n’était pas imposée de façon unilatérale par l’employeur à l’égard de l’appelant au cours de son emploi. Son premier jour d’emploi était le 18 juin 2015 (GD3-5, GD3-13), et la politique a été lue et signée par l’appelant le même jour (GD3-45). L’appelant a reconnu que, s’il voulait l’emploi, il devait accepter cette politique (GD3-26).

[28] L’appelant a accepté et signé cette politique et il a donné à son employeur le droit d’effectuer un test antidrogue au hasard et en tout temps, et ce, même sans l’existence d’un doute raisonnable. Il n’a jamais contesté cette condition d’emploi avant le test effectué au hasard. En fait, le test a seulement été effectué 10 mois plus tard, le 18 avril 2016.

[29]  Étant donné l’ensemble de la preuve, une autre solution raisonnable à celle de quitter son emploi aurait été celle de se conformer à la politique en matière de test antidrogue de l’employeur et de subit ledit test, précisément étant donné qu’il aurait eu la chance de fournir un test négatif dans les trois semaines suivantes. Il existait d’autres recours pour l’appelant que celui de quitter le navire s’il avait échoué au test antidrogue.

[30] De plus, comme l’a conclu la division générale, le Tribunal n’est pas convaincu d’après la preuve que les conditions de travail de l’appelant étaient si intolérables que la démission était sa seule option.

[31] Comme il a été déclaré au cours de l’audience relative à l’appel, la division d’appel n’est pas habilitée à juger de nouveau une affaire ni à substituer son pouvoir discrétionnaire à celui de la division générale. La compétence de la division d’appel est limitée par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. À moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

[32] Le Tribunal estime qu’il n’existe aucune preuve à l’appui des moyens d’appels invoqués par l’appelant ou de tout autre moyen d’appel possible. La décision de la division générale est appuyée par les faits et est conforme à la loi et à la jurisprudence.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté.

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