Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Aperçu

[1] L’appelant s’est fait congédier en raison de remarques désobligeantes envers des invités, des collègues et son superviseur, ce qui comprend des commentaires déplacés à caractère racial et sexuel. Il a reçu plusieurs avertissements verbaux faisant état que son comportement ne serait pas toléré et qu’il y aurait des conséquences. L’employeur dispose d’une politique sur le harcèlement dont l’appelant a pris connaissance et signée. L’appelant concède qu’il a proféré ces remarques et reconnaît qu’il n’aurait pas dû les faire, et que l’employeur l’a averti à ce sujet et lui a rappelé la politique en place, mais il ne croyait pas qu’il serait congédié pour ce motif. L’appelant croyait que l’employeur tentait de se débarrasser de lui en raison de ses problèmes aux jambes et qu’il serait soumis au régime collectif d’assurance-maladie. La Commission a rejeté la demande de l’appelant en déterminant qu’il a perdu son emploi en raison de son inconduite.

Décision

[2] L’appel est rejeté. Par son inconduite, l’appelant a enfreint la politique sur le harcèlement de l’employeur ce qui a entraîné son congédiement.

Questions préliminaires

[3] Ni l’appelant ni son représentant n’ont participé à l’audience. L’accusé de réception de Postes Canada démontre que l’appelant et son représentant ont signé leur avis d’audience respectif, et que l’avis a été bel et bien livré le 22 décembre 2017. Le Tribunal est convaincu que les deux parties ont reçu leur avis d’audience et a appliqué sa compétence au titre du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[4] L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison de l’infraction présumée?

[5] L’appelant a-t-il commis la présumée infraction?

[6] La présumée infraction constitue-t-elle une inconduite?

Analyse

[7] Les dispositions législatives pertinentes sont présentées à l’annexe de la présente décision.

Question 1 : L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison de l’infraction présumée?

[8] Oui. Le Tribunal conclut que l’appelant a perdu son emploi puisqu’il a enfreint la politique de l’employeur sur le harcèlement. L’employeur a congédié l’appelant parce qu’il est grossier et en raison des remarques déplacées à caractère racial et sexuel proférées aux autres membres du personnel et aux invités, et rapportées par son gestionnaire. L’employeur n’a émis aucun avertissement écrit, mais il a donné plusieurs avertissements verbaux à l’appelant en plus d’afficher la politique sur le babillard de santé et sécurité au travail. L’employeur soutient que l’appelant savait que son harcèlement continuel pourrait mener à son congédiement. L’employeur a produit des déclarations de témoins démontrant le comportement de l’appelant qui ne sont pas contestées par ce dernier.

Question 2 : L’appelant a-t-il commis la présumée infraction?

[9] Oui. Le Tribunal estime que la Commission a démontré que l’appelant a enfreint la politique de l’employeur sur le harcèlement en proférant des remarques désobligeantes aux autres membres du personnel et aux invités. L’appelant concède qu’il savait que ses commentaires constituent du harcèlement et qu’il n’aurait pas dû les proférer.

Question 3 : La présumée infraction constitue-t-elle une inconduite?

[10] Il y a inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c’est-à-dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédié (Canada (Procureur général) c. Lemier, 2010 CAF 314; Canada (Procureur général) c. Hastings, 2007 CAF 372).

[11] Il incombe à la Commission de prouver que le prestataire a perdu son emploi en raison de son inconduite (Lepretre c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 30; Canada (Procureur général) c. Granstrom, 2003 CAF 485).

[12] L’appelant ne croyait pas qu’il serait congédié pour ce motif puisqu’il agissait ainsi depuis plusieurs années, mais il concède que ses gestes constituent du harcèlement. L’appelant reconnaît qu’il connaissait la politique puisque l’entreprise s’assure que tout le monde la signe, ce qu’il a fait. L’appelant reconnaît également qu’on l’a averti à ce sujet et qu’on lui a rappelé la politique au travail; et il admet avoir proféré des remarques déplacées aux autres membres du personnel et aux invités.

[13] Le lien entre l’emploi et l’inconduite est un lien de causalité et non un lien de simultanéité (Canada (Procureur général) c. McNamara, 2007 CAF 107).

[14] Un comportement agressif ou grossier constitue de l’inconduite notamment s’il s’avère nuisible à l’intérêt de l’employeur. Un employeur ne peut tolérer un comportement agressif physique ou verbal au travail puisqu’il menace la sécurité de tous, l’efficacité du travail et l’atmosphère. De plus, cela crée des conflits parmi les collègues et dans la relation entre l’employé et l’employeur de sorte que l’employeur ne peut plus se fier à un employé qui se comporte de cette façon.

[15] Il faut également, en plus de la relation causale, que l’inconduite soit commise par l’employé alors qu’il était à l’emploi de l’employeur, et qu’elle constitue un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Canada (Procureur général) v. Nolet, CAF, A-517-91).

[16] Le Tribunal conclut que les gestes graves liés au comportement de l’appelant constituent de l’inconduite et que ce sont ses propres gestes qui ont causé son congédiement.

[17] Le Tribunal estime que les remarques désobligeantes proférées par l’appelant étaient délibérées et volontaires. L’appelant a admis avoir proféré des remarques désobligeantes aux autres membres du personnel et aux invités, et celles-ci sont volontaires (Auclair c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 19).

[18] Le Tribunal conclut que l’appelant aurait dû savoir qu’il pourrait être congédié puisqu’il a reconnu avoir reçu des avertissements verbaux et savoir qu’il avait enfreint la politique de l’employeur sur le harcèlement en parlant de cette façon. Il savait qu’en enfreignant la politique, il pourrait être congédié puisqu’il s’est engagé à respecter la politique au moment d’en prendre connaissance et de la signer (Mishibinijima c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 36).

[19] L’appelant fait valoir qu’il croyait que l’employeur l’avait congédié en raison de ses problèmes aux jambes.

[20] Déterminer si le congédiement du prestataire représentait une sanction appropriée est une erreur. Le Tribunal doit considérer si l’inconduite est le motif réel du congédiement du prestataire (Macdonald,A-152-96).

[21] Le Tribunal estime que l’appelant n’a pas été congédié en raison de ses problèmes aux genoux puisque l’employeur lui a remis une déclaration selon laquelle l’employeur ne connaissait pas ces problèmes de santé; l’appelant consent qu’il a simplement discuté avec son superviseur [de ces problèmes] et qu’il n’a pas pris de congé de maladie en raison de ses problèmes de santé.

[22] Le Tribunal estime que la lettre de congédiement démontre clairement que le manquement grave à la politique de l’entreprise sur le harcèlement au travail constituait l’incident final qui a entraîné le congédiement de l’appelant, et que malgré les avertissements verbaux et l’aide reçue, ce dernier a continué d’agir de façon inappropriée.

[23] Le Tribunal tranche que l’appelant est exclu du bénéfice des prestations d’assurance-emploi pour avoir enfreint la politique de l’employeur sur le harcèlement et que son inconduite s’est avérée nuisible à l’intérêt ou au mieux-être de l’employeur puisque ce dernier a senti que les gestes de l’appelant visaient à créer des conflits dans la relation entre l’employé et l’employeur.

Conclusion

[24] L’appel est rejeté.

Mode d’audience : Téléconférence

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

29 Pour l’application des articles 30 à 33 :

  1. a) « emploi » s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
  2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
  3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
  4. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
  5. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
  6. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;

30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

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