Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Aperçu

[1] L’appelante a présenté une demande tardive de prestations d’assurance-emploi (AE) parce qu’elle attendait de recevoir des documents pour confirmer qu’elle serait admissible. Elle a présenté sa demande initiale en mars 2017, et celle-ci a été rejetée parce que l’appelante n’avait accumulé aucune heure assurable au cours de sa période de référence. Elle souhaite que sa demande soit antidatée en septembre 2015 étant donné qu’il s’agit du moment où elle s’est retrouvée au chômage. Le Tribunal doit déterminer si sa demande peut être antidatée.

Décision

[2] L’appel est rejeté. La demande de l’appelante ne peut pas être antidatée étant donné qu’elle n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable pendant toute la période du retard pour présenter sa demande initiale de prestations.

Questions préliminaires

[3] Aucune des parties dans le cadre de l’appel n’a participé à l’audience par téléconférence à l’heure prévue, et ce, malgré le fait qu’ils en ont été dûment informés. L’appelante a reçu l’avis d’audience le 24 janvier 2018, car le reçu de livraison de Postes Canada a été signé par l’appelante à cette date. Une version modifiée de l’avis d’audience a été reçue le 9 février 2018 selon un autre reçu de livraison de Postes Canada signé par l’appelant. De plus, le Tribunal est convaincu que l’appelante était au courant de la tenue de l’audience, car elle a demandé à un représentant autorisé de présenter des observations en son nom. Le représentant a confirmé qu’il était prêt à poursuivre et qu’il ne souhaitait pas attendre la présence de l’appelante.

[4] En fonction de ce qui précède, le Tribunal a poursuivi l’audience en l’absence des parties, en vertu du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[5] Question 1  : L’appelante a-t-elle un motif valable pour justifier le retard pour présenter sa demande initiale de prestations?

[6] Question 2  : Si l’appelante avait un motif valable pour justifier le retard, aurait-elle été admissible au versement de prestations le 27 septembre 2015?

Analyse

[7] L’antidatation des demandes initiales est expliquée au paragraphe 10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi). La Loi prévoit que lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

Question 1 : L’appelante a-t-elle un motif valable pour justifier le retard pour présenter sa demande initiale de prestations?

[8] Non, la demande ne peut pas être antidatée étant donné que l’appelante n’a pas démontré qu’elle avait un motif valable justifiant le fait qu’elle n’a pas présenté sa demande pendant toute la période du retard.

[9] Le motif valable n’est pas la même chose que le fait d’avoir un bon motif ou une justification pour le retard. Afin d’établir l’existence d’un motif valable, l’appelante doit démontrer qu’elle a fait ce qu’une personne raisonnable dans sa situation aurait fait pour s’enquérir de ses droits et de ses responsabilités selon la Loi (Canada (PG) c. Albrecht, A‑172‑85).

[10] L’appelante doit démontrer qu’elle avait un motif valable justifiant le fait qu’elle n’a pas présenté une demande initiale de prestations pendant toute la période du retard, soit du 27 septembre 2015, jour où elle s’est retrouvée au chômage, jusqu’au 21 mars 2017, jour où elle a présenté sa demande initiale de prestations.

[11] Pour expliquer ce retard de 18 mois, l’époux de l’appelante, qui agissait à titre de représentant, a déclaré que, lorsque celle-ci s’est retrouvée au chômage, elle a choisi de ne pas déposer une demande de prestations jusqu’à ce qu’elle soit certaine qu’elle serait admissible.

[12] L’appelante a été employée pendant plusieurs mois dans une entreprise de nettoyage. Cet emploi a pris fin en juillet 2015. Après avoir occupé ce poste, l’appelante a travaillé brièvement à titre de nettoyeuse dans un hôtel. Elle s’est retrouvée au chômage à nouveau le 27 septembre 2015 et elle est demeurée sans emploi jusqu’en août 2016.

[13] L’appelante dit qu’elle n’a pas présenté une demande initiale de prestations immédiatement après avoir été congédiée le 27 septembre 2015 parce que son époux avait consulté le site Web de Service Canada et qu’il en avait conclu qu’elle n’avait pas assez d’heures pendant son emploi le plus récent comme nettoyeuse d’hôtel afin d’établir une demande. Elle a demandé que l’Agence du revenu du Canada (ARC) rende une décision au sujet du caractère assurable de son emploi précédent au sein de l’entreprise de nettoyage afin qu’elle puisse utiliser les heures accumulées dans le cadre de cet emploi et être admissible aux prestations. Elle a reçu la décision de l’ARC le 19 août 2016 selon laquelle son emploi était assurable.

[14] Après avoir reçu la décision de l’ARC, l’appelante soutient qu’elle a attendu de voir si l’employeur allait interjeter appel de cette décision avant d’aller de l’avant. Le droit d’appel de l’employeur a pris fin le 19 novembre 2016. L’époux de l’appelante a communiqué avec l’ARC en janvier 2017 pour vérifier que l’employeur n’avait pas interjeté appel. L’appelante a soutenu que le motif du retard pour vérifier l’état de l’appel était qu’elle pensait que les Fêtes retarderaient le processus. Alors, son époux a seulement appelé après la fin des Fêtes.

[15] L’appelante explique que le délai supplémentaire pour présenter sa demander a été causé par son hypothèse selon laquelle elle ne pouvait pas aller de l’avant avant d’avoir obtenu un relevé d’emploi (RE) pour les deux emplois. Le 25 janvier 2017, l’appelante a demandé un RE de Service Canada pour son emploi au sein de l’entreprise de nettoyage, soit cinq mois après avoir reçu la décision de l’ARC quant au caractère assurable de l’emploi. Au cours de sa visite à Service Canada, il a été demandé à l’appelante si elle voulait présenter une demande de prestations d’AE, et elle a refusé. Elle a reçu le RE le 7 mars 2017 et a présenté une demande initiale de prestations le 21 mars 2017.

[16] L’obligation de présenter avec célérité sa demande de prestations est considérée comme étant très exigeante et très stricte. C’est la raison pour laquelle l’exception relative au « motif valable justifiant le retard » est appliquée parcimonieusement (Canada (Procureur général) c. Brace, 2008 CAF 118).

[17] L’intimée a fait valoir que l’appelante n’avait pas agi comme une personne raisonnable l’aurait faite en ne prenant pas des mesures favorables afin de clarifier son affirmation erronée selon laquelle elle ne pouvait pas présenter une demande de prestations sans une copie de son RE de l’entreprise de nettoyage. Le représentant de l’appelante a déclaré qu’aucune personne chez Service Canada n’a dit à l’appelante qu’elle pouvait présenter une demande de prestations sans le RE. Le Tribunal n’accepte pas cet argument, parce que ces renseignements sont accessibles sur le site Web de Service Canada et que l’appelante aurait pu vérifier cette exigence lorsqu’elle s’est rendue à un bureau de Service Canada en janvier 2017 et qu’il lui a été demandé si elle voulait présenter une demande de prestations. Une personne raisonnable dans sa situation aurait demandé des renseignements sur son admissibilité aux prestations, et il est déraisonnable d’avoir omis de le faire.

[18] La principale raison donnée par l’appelante relativement à son retard pour présenter sa demande prestations était qu’elle ne voyait pas l’utilisé de présenter une demande sans être certaine d’être admissible. L’appelante a déclaré que les retards ont été causés parce qu’elle attendait de recevoir la décision de l’ARC et le RE relativement à l’un de ses emplois. L’incapacité de l’appelante à obtenir un RE et l’attente / le report pour la présentation de sa demande à ce motif ne constitue pas un motif valable de retard (Brace, précité). Le Tribunal estime que ce motif de retard ne constitue pas un motif valable, parce que l’appelante n’était pas tenue de détenir ces renseignements avant de présenter sa demande initiale de prestations et que l’intimée aurait pu elle-même demander la décision de l’ARC et le RE au nom de l’appelante après avoir reçu la demande de cette dernière. Au lieu de s’enquérir de ses droits et de ses obligations, l’appelante s’est fondée sur ses hypothèses selon lesquelles elle devait obtenir ces documents avant de présenter une demande et elle a attendu. Le fait que l’appelante s’est fondée sur des renseignements non vérifiés ou des hypothèses non fondées ne constitue pas un motif valable (Canada (Procureur général) c. Trinh, 2010 CAF 335).

[19] Le Tribunal estime que les raisons données par l’appelante n’a pas démontré l’existence d’un motif valable pendant toute la période du retard. À l’exception de l’époux de l’appelant qui a revu le site Web de Service Canada après que l’appelante s’est retrouvée au chômage, l’appelante a reconnu qu’elle ne s’est jamais enquise de ses droits et de ses obligations auprès de Service Canada. Une personne raisonnable dans sa situation aurait communiqué avec Service Canada et vérifié les renseignements qu’elle avait au lieu d’attendre 18 mois avant de présenter sa demande initiale de prestations. Malheureusement, elle n’a déployé aucun effort pour s’informer de son admissibilité aux prestations au cours de toute la période en question.

[20] Une personne raisonnable est tenue, à moins de circonstances exceptionnelles, de vérifier assez rapidement si elle a droit à des prestations et de s’assurer des obligations que lui impose la Loi (Canada (Procureur général) c. Carry, 2005 CAF 367). Aucun élément de preuve n’indique que des circonstances exceptionnelles ont empêché l’appelante de s’informer de ses droits et obligations ou de demander des prestations à un moment ou un autre pendant la période du retard de 18 mois.

[21] Le Tribunal conclut que l’appelante n’a pas prouvé l’existence d’un motif valable pendant toute la période du retard pour présenter sa demande de prestations et que, par conséquent, elle n’est pas admissible à l’antidatation de sa demande.

Question 2 : Si l’appelante avait un motif valable pour justifier le retard, aurait-elle été admissible au versement de prestations le 27 septembre 2015?

[22] Étant donné que le Tribunal a conclu que l’appelante n’a pas démontré l’existence d’un motif valable pour justifier le retard pour la présentation de sa demande initiale pendant toute la période, la question de savoir si elle serait admissible aux prestations à la date antérieure n’a pas besoin de faire l’objet d’un examen, car l’appel ne peut pas être accueilli sans que ces deux facteurs soient respectés. Pour cette raison, le Tribunal ne tirera pas une autre conclusion sur l’admissibilité de l’appelante aux prestations à la date antérieure.

Conclusion

[23] La demande ne peut pas être antidatée, car l’appelante n’a pas démontré que, pendant toute la période du retard, elle a fait ce qu’une personne raisonnable dans sa situation aurait fait pour s’enquérir de ses droits et de ses obligations. Il n’était pas nécessaire de tenir compte de la question de savoir si l’appelante aurait été admissible à la date antérieure.

[24] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Comparutions :

Téléconférence

S. L., représentant de l’appelante

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

10 (4) Lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

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