Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté, car l’appelant n’a pas prouvé qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi. Les motifs de cette décision suivent.  

Aperçu

[2] L’appelant avait quitté son emploi à long terme après avoir pris la décision de suivre une formation dans une autre ville. Après que l’intimée ait dit à l’appelant qu’il n’était pas admissible au bénéfice de prestations, l’appelant a modifié les raisons pour lesquelles il avait quitté son emploi. L’appelant affirme maintenant qu’il a quitté son emploi à cause de sa santé, de sa famille, du transport et de problèmes personnels.

Questions préliminaires

[3] Personne ne s’est présenté à l’audience par téléconférence, bien que les deux parties aient été dûment avisées. Le Tribunal est convaincu que l’appelant avait reçu l’avis d’audience qui avait été envoyé le 4 janvier 2018, puisque le récépissé de livraison de Postes Canada a été signé par l’appelant le 13 janvier 2018. De plus, rien n’indique que l’appelant aurait demandé un ajournement. Par conséquent, le Tribunal est allé de l’avant afin de trancher l’appel sur le fond en l’absence des parties, conformément au paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

Questions en litige

[4] Le Tribunal doit trancher les questions en litige suivantes :

  1. L’intimée a-t-elle prouvé que l’appelant avait volontairement quitté son emploi?
  2. Si tel est le cas, l’appelant a-t-il prouvé qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi?
  3. S’il ne réussit pas à démontrer qu’il avait été fondé à le faire, l’appelant a-t-il accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible à des prestations depuis qui a quitté son emploi?

Analyse

[5] Pour tirer ces conclusions, le Tribunal a tenu compte des dispositions législatives pertinentes, lesquelles se trouvent à l’annexe de la décision.

[6] L’intimée doit s’acquitter du fardeau de la preuve en démontrant que l’appelant avait volontairement quitté son emploi. Puis, il revient ensuite à l’appelant de s’acquitter du fardeau de la preuve en démontrant qu’il avait été fondé à quitter son emploi (Green c. Canada (Procureur général), 2012 CAF 313; Canada (Procureur général) c. White, 2011 CAF 190; Canada (Procureur général) c. Patel, 2010 CAF 95).

Départ volontaire

[7] La question de savoir si un employé a quitté volontairement son emploi est une question simple. La question qu’il faut se poser est la suivante. L’employé avait-il le choix de rester ou de quitter (Canada (Procureur général) c. Peace, 2004 CAF 56)?

[8] Le Tribunal conclut que l’appelant avait volontairement quitté son emploi, car il avait le choix de rester et de continuer à travailler. L’appelant n’a pas contesté le fait que le choix de garder son poste lui revenait. L’appelant a d’abord soutenu dans sa demande initiale qu’il avait choisi de quitter son emploi afin de déménager dans une autre ville et de participer à une formation. Le fait que l’appelant ait choisi de quitter son emploi est appuyé par le relevé d’emploi (RE), lequel énonce que le motif de cessation d’emploi était que l’appelant avait quitté l’emploi pour s’installer dans une autre ville pour ses enfants. Par conséquent, le Tribunal estime que l’appelant a volontairement quitté son emploi. Donc, l’intimée s’est acquittée de son fardeau.

Justification

[9] Au moment de déterminer si l’appelant avait été fondé à quitter volontairement son emploi, le Tribunal doit tenir compte de toutes les circonstances et déterminer si la seule solution raisonnable de l’appelant était de quitter son emploi, conformément à l’alinéa 29c) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). Cet alinéa se poursuit en dressant une liste non exhaustive des circonstances précises dont il faut tenir compte au moment de déterminer si l’appelant avait été fondé à quitter son emploi.

[10] La simple présence de l’une des circonstances énumérées à l’article 29 de la Loi sur l’AE ne prouve pas automatiquement que l’appelant avait été fondé à quitter son emploi. L’appelant doit quand même prouver que sa seule solution raisonnable était de quitter son emploi.

[11] Après avoir examiné toutes les circonstances de cette affaire, le Tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, l’appelant n’a pas démontré qu’à l’époque où il a volontairement quitté son emploi, il s’agissait de sa seule solution raisonnable. Par conséquent, l’appelant n’a pas prouvé qu’il avait été fondé à quitter son emploi.

[12] En tirant les conclusions susmentionnées, le Tribunal a tenu compte du fait que mis à part certaines exceptions, il incombe à l’assuré, comme contrepartie de sa participation au régime d’assurance-emploi, de ne pas provoquer le risque et encore moins de ne pas transformer un simple risque en une certitude de chômage. En quittant son emploi permanent à long terme sans garantie d’avoir un emploi continu ailleurs, l’appelant a causé son chômage (Canada (Procureur général) c. Marier, 2013 CAF 39).

[13] Bien qu’il soit légitime que l’appelant veuille modifier la nature de son travail, cela ne peut pas être fait au détriment de la caisse de l’assurance-emploi. De plus, avoir le désir d’apporter une modification ne constitue pas une justification pour quitter un emploi (Canada (Procureur général) c. Bell, 2013 CAF 155; Canada (Procureur général) c. Martel, A-1691-92).

[14] L’appelant a affirmé qu’il avait été fondé à quitter son emploi compte tenu des circonstances qui suivent. A) Il avait besoin d’un changement, alors qu’il a fait le choix de quitter son emploi à long terme afin de participer à une formation dans une autre ville; B) il avait des problèmes de transport et des problèmes familiaux; et C) il avait dû quitter son emploi en raison de problèmes de santé.

A)  Le choix de l’appelant de participer à une formation

[15] Même si l’appelant avait affirmé dans sa demande initiale qu’il avait quitté son emploi pour participer à une formation, l’appelant a plus tard reconnu qu’à l’époque où il avait quitté son emploi, c’est-à-dire le 22 décembre 2016, il ne s’était pas inscrit à la formation et il n’avait pas été préapprouvé pour participer à la formation. L’appelant a admis sans hésitation que la formation ne devait commencer qu’en avril 2017 et qu’il n’a pas déménagé dans la ville pour se rapprocher du lieu de formation, comme il l’avait mentionné initialement. Plutôt, l’appelant a affirmé plus tard qu’il avait quitté son emploi, car il avait besoin d’un changement après avoir travaillé pour le même employeur pendant 23 ans.

[16] Le Tribunal félicite l’appelant pour vouloir participer à une formation afin de se perfectionner et d’améliorer la situation de sa famille. Cependant, quitter un emploi pour participer à une formation ne constitue pas une justification en vertu de la Loi sur l’AE (Canada (Procureur général) c. Trochimchuk, 2011 CAF 268; Canada (Procureur général) c. Martel, A-1691-92).

B)  Problèmes de transport et problèmes familiaux

[17] Le Tribunal n’accepte pas le fait que l’appelant n’avait d’autres choix que de quitter son emploi en raison de problèmes familiaux et de problèmes de transport. C’est la raison pour laquelle l’appelant n’a mentionné ces problèmes qu’après qu’on lui ait dit qu’il ne recevrait pas de prestations. De plus, l’appelant n’a fourni aucun élément de preuve pour appuyer ces motifs.

[18] Il n’y a aucune disposition dans la Loi sur l’AE qui permet à un appelant de prouver qu’il était fondé à quitter son emploi en raison de problèmes familiaux ou de problèmes de transport. L’employeur de l’appelant a dit à l’intimée qu’il aurait accordé un congé sans solde à l’appelant s’il en avait fait la demande. Par conséquent, si l’appelant devait régler des problèmes familiaux ou des problèmes de transport, il aurait dû en avoir discuté avec son employé et avoir demandé un congé sans solde au besoin, le temps qu’il règle ses problèmes familiaux ou de transport.

[19] L’appelant a affirmé que la décision de quitter son emploi à long terme avait été fondée sur un choix qu’il avait fait; celui-ci était peut-être, à l’époque, un bon choix personnel. Même si un choix personnel peut constituer un motif valable, cela n’équivaut pas aux exigences permettant de prouver qu’un appelant était fondé à quitter son emploi, faisant supporter par d’autres le fardeau de son chômage (Canada (Procureur général) c. White, 2011 CAF 190; Tanguay c. Canada (Commission d’assurance-chômage), A-1458-84).

C)  Problèmes de santé

[20] L’appelant peut être fondé à quitter son emploi si les conditions de travail constituent un danger pour sa santé et s’il a exploré toutes les solutions de rechange raisonnables avant de quitter son emploi, conformément au sous-alinéa 29c)(iv) de la Loi sur l’AE. Cela étant dit, l’appelant doit fournir une preuve médicale démontrant que ses conditions de travail étaient dangereuses pour sa santé. L’appelant doit également tenter de résoudre le problème avec son employeur et doit tenter de trouver un autre emploi avant de quitter son emploi.

[21] L’appelant n’a fourni aucune preuve pour appuyer le fait que son emploi était dangereux pour sa santé ou qu’il avait demandé des conseils à son employeur ou à son médecin, ce qui constitue des solutions raisonnables plutôt que de quitter son emploi. De plus, il n’y a pas de preuve à l’appui du fait que l’appelant s’est cherché un autre emploi avant de quitter son emploi. Par conséquent, le Tribunal estime que l’appelant n’a pas réussi à prouver qu’il avait été fondé à quitter son emploi pour des raisons médicales.

Solutions raisonnables

[22] Le Tribunal est d’accord avec l’intimée sur le fait que l’appelant n’a pas exploré toutes ses solutions raisonnables avant de quitter son emploi. Voici quelques exemples de telles solutions : 1) s’assurer d’être préapprouvé pour participer à la formation avant de quitter son emploi; 2) demande un congé sans solde à son employeur afin de régler ses problèmes médicaux, familiaux ou de transport; 3) demander de l’aide médicale; 4) se trouver un autre emploi avant de quitter son emploi.

[23] Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal estime que, selon la prépondérance des probabilités, l’appelant n’a pas réussi à prouver que sa seule solution raisonnable était de quitter volontairement son emploi. Par conséquent, l’appelant n’a pas réussi à prouver qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi, conformément aux articles 29 et 30 de la Loi sur l’AE.

Emploi après son départ volontaire

[24] Il n’y a aucun élément de preuve à l’appui du fait que l’appelant aurait occupé un emploi assurance depuis son départ volontaire de son emploi. Par conséquent, l’appelant n’a pas réussi à prouver qu’il était admissible au bénéfice de prestations en vertu de l’article 30 de la Loi sur l’AE.

Conclusion

[25] L’appel est rejeté. L’appelant n’a pas réussi à démontrer qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 29 Pour l’application des articles 30 à 33 :
    1. a)  emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
    2. b)  la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
    3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
      1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
      2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
      3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    4. c)  le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
      1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
      2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
      3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
      4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
      5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
      6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
      7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
      8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
      9. (ix) modification importante des fonctions,
      10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
      11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
      12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
      13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
      14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.
  2. 30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :
    1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
    2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.
  3. (2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.
  4. (3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.
  5. (4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.
  6. (5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.
  7. (6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.
  8. (1) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations — qu’elle soit initiale ou non — n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.
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