Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Décision

[1] L’appel est rejeté. Le fait que l’appelant a déclaré être au travail alors qu’il ne l’était pas a causé la perte de son emploi.

Aperçu

[2] L’appelant a été congédié de son emploi parce qu’il a prétendu être au travail alors qu’il ne l’était pas et qu’il a déclaré travailler vers minuit alors qu’il avait véritablement terminé de travailler à 21 h 30. L’appelant nie les allégations et croit avoir été licencié au moment où il a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (intimée) a refusé l’accord de prestations à l’appelant parce qu’il a perdu son emploi en raison de son inconduite.

Questions en litige

[3] Le Tribunal doit déterminer ce qui suit :

  1. L’appelant a-t-il perdu son emploi en raison de l’infraction présumée?
  2. L’appelant a-t-il commis la présumée infraction?
  3. La présumée infraction constitue-t-elle une inconduite?

Analyse

[4] Les dispositions législatives pertinentes sont présentées à l’annexe de la présente décision.

Question 1 : l’appelant a-t-il perdu son emploi en raison de l’infraction présumée?

[5] Oui, l’appelant a perdu son emploi parce qu’il a déclaré être au travail alors qu’il n’y était pas. L’employeuse a présenté des copies d’un journal de bord d’un véhicule, de relevés téléphoniques, d’un rapport sur le code d’accès d’une porte et de déclarations de témoins pour appuyer le motif du congédiement.

Question 2 : l’appelant a-t-il commis la présumée infraction?

[6] Oui, le Tribunal estime que l’intimée a prouvé que l’appelant a commis l’infraction présumée, car l’employeuse a fourni une version des faits plus crédible en présentant des copies de relevés téléphoniques, d’un rapport sur le code d’accès d’une porte et trois déclarations de témoins pour appuyer la conclusion selon laquelle l’appelant a menti en déclarant travailler alors qu’il ne travaillait pas.

[7] Le Tribunal estime que l’argument de l’appelant selon laquelle il a quitté le lieu de travail à 21 h 30 à la fin de son quart manque de crédibilité parce que sa déclaration à l’audience contredit ses déclarations initiales. Selon celles-ci, l’appelant n’est pas rentré chez lui à 21 h 30; il a pris sa pause-repas jusqu’à 22 h 30, il est allé à la station d’essence et il est retourné travailler.

[8] Le Tribunal estime que la preuve de l’employeuse comprenant le relevé téléphonique et le rapport sur le code d’accès d’une porte est crédible, car elle a fourni un historique appuyant le fait que l’employeuse a téléphoné l’appelant à 22 h 11 et que, à 22 h 14, l’appelant a téléphoné à son collègue afin que celui-ci retourne travailler. Le rapport sur l’accès à une porte obtenue à l’aide du numéro 1234560, qui était le numéro de l’appelant selon ses collègues et lui, faisait état d’un accès à 22 h 52.

[9] Le Tribunal estime qu’il faut accorder plus d’importance à la déclaration du collègue parce qu’elle corrobore la preuve présentée par l’employeuse selon laquelle l’appelant et lui avaient quitté le travail plus tôt le 5 janvier 2017, vers 21 h 20, et selon laquelle l’appelant a téléphoné à son collège afin de retourner travailler à 22 h 45.

[10] Le Tribunal estime qu’il faudrait accorder plus d’importance aux déclarations initiales et spontanées que celles présentées à la suite d’une décision défavorable de l’intimée (Bellefleur c. Canada (PG), 2008 CAF 13).

Question 3 : la présumée infraction constitue-t-elle une inconduite?

[11] Il y a inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c’est-à- dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l’exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu’il soit congédié (Canada (PG) c. Lemier, 2010 CAF 314; Hastings, 2007 CAF 372).

[12] Il incombe à l’intimée de prouver que la perte d’emploi du prestataire a été causée par son inconduite (Lepretre, 2011 CAF 30; Granstrom, 2003 CAF 485).

[13] La loi ne définit pas l’inconduite. Par conséquent, l’intimée doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le prestataire savait ou aurait dû savoir qu’il était réellement possible qu’il soit congédié en raison de son comportement (Mishibinijima c. Canada (Procureur général), 2007 CAF 36).

[14] Le Tribunal estime que les actions de l’appelant étaient volontaires et délibérés et qu’elles étaient nuisibles aux intérêts ou au bien-être de l’employeuse, car celle-ci a clairement eu l’impression que les actions posées par l’appelant lorsqu’il a tenté d’être rémunéré pour des heures pendant lesquelles il n’a pas travaillé avaient pour but de nuire à la relation entre l’employeuse et l’employé.

[15] L’appelant nie les allégations de l’employeuse et fait valoir qu’il a terminé de travailler à 21 h 30 et qu’il est retourné chez lui. Il n’est jamais retourné sur le lieu de travail, il n’a jamais appelé son collègue pour lui demander de retourner travailler, et l’appel de l’employeuse a été reçu avant 21 h 30.

[16] L’appelant s’est contredit en déclarant qu’il n’a jamais quitté le lieu de travail plus tôt pour ensuite convenir que, lorsque l’employeuse est venue lui parler de l’incident le lendemain, il a admis son erreur et a demandé pardon, mais elle a répondu par la négative, a dit qu’il a menti et lui a retiré son laissez-passer et le téléphone de l’entreprise avant de lui dire qu’il était congédié.

[17] L’appelant ne savait pas d’où l’employeuse avait obtenu la preuve, mais il était incapable de fournir des explications raisonnables concernant les relevés téléphoniques ou la façon dont on a eu recours à son code d’accès à 22 h 52. L’appelant ne pouvait pas expliquer la raison pour laquelle sa version des faits à l’audience est différence de celle présentée à la Commission.

[18] Le lien entre l’emploi et l’inconduite doit être un lien de causalité, et non un lien de simultanéité (McNamara, 2007 CAF 107).

[19] En plus d’avoir un lien de causalité, l’inconduite doit être commise par le membre du personnel alors que celui-ci était embauché par l’employeur et elle doit constituer un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Canada (Procureur général) c. Nolet, C.A.F., A-517-91).

[20] Un employeur a le droit de s’attendre à ce que les membres de son personnel fassent preuve d’une certaine rigueur éthique en matière d’honnêteté et de loyauté. Un employeur est fondé à congédier un membre du personnel, même sans préavis, s’il découvre que ce dernier s’est conduit d’une manière qui lui permet de douter qu’il possède ces qualités personnelles.

[21] Le Tribunal estime que l’appelant a perdu son emploi lorsqu’il a sciemment pris la décision de quitter son emploi plus tôt que prévu et que les actions de ce dernier étaient volontaires et délibérées. L’appelant a convenu avoir admis à l’employeuse qu’il avait fait une erreur et il lui a demandé pardon.

[22] Le Tribunal estime, selon la prépondérance des probabilités, que le fait que l’appelant ait appelé un collègue afin qu’il retourne au lieu de travail à la suite d’un appel téléphonique de son employeuse au cours duquel elle lui a demandé la quantité de travail qui reste à faire alors que les employés avaient déjà quitté le lieu de travail, il savait ou il aurait dû savoir qu’il pourrait être congédié pour avoir essayé de cacher le fait qu’il a quitté le travail plus tôt.

Conclusion

[23] Le Tribunal estime que l’intimée avait prouvé que l’appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite et qu’elle a correctement imposé une inadmissibilité pour une période indéterminée au titre des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi.

[24] L’appel est rejeté.

Mode d’audience :

Comparutions :

En personne

D. R., appelant

Annexe

Droit applicable

Loi sur l'assurance-emploi

29 Pour l’application des articles 30 à 33 :

  1. a) « emploi » s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
  2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
  3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
    1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
    2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre, (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
    3. (iii) de continuer d'exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d'une activité, d'une entreprise ou d'un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;

30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

(3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations,

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