Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. Le Tribunal conclut que le prestataire n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence afin qu’il puisse établir une période de prestations pour recevoir des prestations d’assurance-emploi (AE). De plus, le prestataire n’a pas démontré qu’il avait eu un motif valable au cours de toute la période du délai pour présenter sa demande de prestations d’AE. Par conséquent, la demande antidatée est rejetée.

Aperçu

[2] Le prestataire a présenté une demande de prestations d’AE le 16 février 2017. Cependant, sa dernière journée de travail était le 14 mars 2016. Le prestataire a demandé que sa demande de prestations d’AE soit antidatée, expliquant qu’il a été forcé à arrêter de travailler, car il était en train de suivre le processus de résidence permanente et que cela a pris plus de temps que prévu. La Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission) a déterminé que le prestataire n’était pas admissible à des prestations d’AE. De plus, la Commission a refusé d’antidater la demande. Le prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission auprès du Tribunal de la sécurité sociale. 

Questions préliminaires

[3] Si une partie omet de se présenter à une audience, le Tribunal peut procéder en son absence, s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience aux termes du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale.

[4] Les renseignements transmis par Postes Canada démontrent que le prestataire a signé l’avis d’audience le 17 janvier 2018. Compte tenu de cet élément de preuve, le Tribunal est convaincu que le prestataire a reçu l’avis d’audience, et par conséquent, l’appel sera instruit en l’absence du prestataire. Le Tribunal note également que le prestataire n’a pas du tout communiqué avec le Tribunal immédiatement après la tenue de l’audience afin de demander un ajournement ou afin d’exprimer son intention de participer à l’audience.

Questions en litige

  1. Le prestataire était-il admissible à des prestations d’AE?
  2. La demande du prestataire était-elle admissible à une antidatation au 15 mars 2016?

Analyse

[5] Les dispositions législatives pertinentes sont présentées à l’annexe de la décision en l’espèce.

1. Le prestataire était-il admissible à des prestations d’AE?

[6] Pour être admissible à des prestations d’AE, le prestataire doit avoir accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable requis au cours de la période de référence applicable (Canada (Procureur général) c. Terrion, 2013 CAF 97).

À quel moment est la période de référence applicable?

[7] Le Tribunal estime que la période de référence applicable est la période de cinquante-deux semaines qui précède le début d’une période de prestations prévue à l’alinéa 8(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). De plus, la période de prestations applicable débute le dimanche de la semaine au cours de laquelle la demande initiale de prestations d’AE est présentée, conformément à l’alinéa 10(1)b) de la Loi sur l’AE.

[8] Le prestataire a présenté une demande de prestations d’AE le 16 février 2017. Par conséquent, sa demande de prestations a été établie à partir du dimanche avant la date de sa demande ou le 12 février 2017. À partir de cela, le Tribunal confirme que la période de référence du prestataire est la période de 52 semaines qui précède le 12 février 2017 ou la période du 14 février 2016 au 11 février 2017.

[9] La période de référence peut être prolongée, conformément à l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur l’AE. Le prestataire a mentionné dans sa demande de prestations d’AE qu’il avait reçu une indemnité d’accident du travail. Si le prestataire recevait une indemnité d’accident du travail au cours de sa période de référence, sa période de référence pourrait être prolongée par le nombre de semaines au cours desquelles il était incapable de travailler en raison d’une maladie ou d’une blessure. Au cours d’une conversation téléphonique avec la Commission, le prestataire a affirmé avoir reçu une indemnité d’accident du travail en 2015. Le Tribunal estime que la période au cours de laquelle le prestataire recevait une indemnité d’accident du travail précède sa période de référence, et que par conséquent, elle ne peut pas être utilisée pour prolonger la période de référence. Le Tribunal conclut que la période de référence du prestataire s’étend du 14 février 2016 au 11 février 2017.

Le prestataire a-t-il accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable requis?

[10] Les heures accumulées en dehors de la période de référence ne peuvent pas rendre un prestataire admissible aux prestations (Haile c. Canada (Procureur général), 2008 CAF 193).

[11] Le Tribunal estime que le prestataire n’avait pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour être admissible à des prestations d’AE. Le Tribunal accepte la preuve de la Commission selon laquelle le prestataire vivait dans une région où le taux de chômage était de 10,20 % à l’époque où il a présenté une demande de prestations d’AE et il avait accumulé 144 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence. Le prestataire n’a pas contesté le taux de chômage ou le nombre d’heures d’emploi assurable. Par conséquent, le Tribunal confirme que le nombre minimal d’heures d’emploi assurable requis par le prestataire afin qu’il puisse recevoir des prestations d’AE était de 525 heures selon le tableau qui se trouve au paragraphe 7(2) de la Loi sur l’AE.

[12] Le prestataire a soutenu que les quatre semaines requises pour présenter une demande de prestations d’AE devraient s’appliquer aux quatre semaines après qu’il ait obtenu son statut de résident permanent, et les heures assurables qu’il a accumulées avant le 16 mars 2016 devraient être acceptées pour qu'il soit admissible à des prestations d’AE. Malheureusement, les exigences de la Loi sur l’AE sont claires et ne prévoient aucune exception ni aucun pouvoir discrétionnaire. Le prestataire a présenté une demande de prestations d’AE 11 mois après qu’il se soit retrouvé au chômage, et cela a fait en sorte qu’il n’avait pas suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible à des prestations d’AE. Le Tribunal conclut que le prestataire n’a pas suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible à des prestations d’AE, car il avait accumulé 144 heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence, mais il en avait besoin de 525 pour être admissible.

2. La demande du prestataire était-elle admissible à une antidatation au 15 mars 2016?

[13] L’antidatation d’une demande de prestations d’AE peut se faire en vertu du paragraphe 10(4) de la Loi sur l’AE. Le prestataire doit démontrer ce qui suit :

  1. a) il y avait un motif valable pour expliquer le délai, et ce, pour l’ensemble de la période du retard;
  2. b) il était admissible à des prestations d’AE à une date antérieure.

[14] L’obligation de présenter avec célérité sa demande de prestations est considérée comme étant très exigeante et très stricte. C’est la raison pour laquelle l’exception relative au « motif valable justifiant le retard » est appliquée parcimonieusement (Canada (Procureur général) c. Brace, 2008 CAF 118).

a) Le prestataire a-t-il démontré qu’il avait un motif valable pour son retard?

[15] Le prestataire a affirmé qu’il avait été mis à pied de son emploi le 14 mars 2016, car sa demande de résidence permanente avait été rejetée, ce qui l’empêchait de travailler au Canada. Sa résidence permanente lui a été accordée le 19 janvier 2018, et il a présenté une demande de prestations d’AE le 16 février 2017, soit quatre semaines après avoir obtenu son statut de résident permanent.

[16] Afin de prouver qu’il avait un motif valable pour avoir tardé à présenter une demande initiale de prestations d’AE, un prestataire doit démontrer qu’il a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les mêmes circonstances pour se renseigner sur ses droits et obligations en vertu de la Loi sur l’AE (Kamgar c. Canada (Procureur général), 2013 CAF 157).

[17] Le Tribunal estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les mêmes circonstances.

[18] Le prestataire a affirmé à plusieurs reprises qu’il n’avait aucune connaissance des programmes d’AE et des délais prescrits. Il a affirmé que ni Citoyenneté et Immigration Canada ni son employeur lui a dit qu’il pouvait présenter une demande de prestations d’AE lorsqu’il a été mis à pied. Il a dit qu’il avait été un travailleur temporaire pendant huit ans et ne savait pas qu’il serait en mesure de demander des prestations d’AE. La Commission a demandé au prestataire s’il avait déjà remarqué les retenues normales qui se trouvaient sur ses chèques de paie pour l’AE ou pour le Régime de pensions du Canada. Il a répondu qu’il ne savait pas que l’AE existait et qu’il a seulement pris connaissance de cela lorsque son comptable lui a dit au moment de faire sa déclaration de revenus.

[19] Le Tribunal estime que le prestataire était au courant des prestations d’AE lorsque sa déclaration d’impôt a été préparée en 2016, mais qu’il a attendu jusqu’au 16 février 2017 pour présenter une demande de prestations d’AE. Dans sa demande d’antidatation de sa demande de prestations, qu’il a présenté le même jour que sa demande de prestations d’AE, il a mentionné qu’il avait commencé à faire affaire avec un comptable pour préparer sa déclaration de revenus en 2016 et que c’est à ce moment-là que son comptable lui a fait part de renseignements au sujet des prestations d’AE. Plus tard, il a mentionné que son comptable lui avait donné beaucoup de conseils sur les différents types de prestations qui existent. Le prestataire a déclaré dans sa demande de révision datée du 17 mars 2017 qu’il n’avait pas le droit de travailler au Canada et qu’il n’était pas admissible à des prestations d’AE. À la suite de sa demande de révision, le prestataire a affirmé que son comptable lui a fourni des renseignements au sujet des prestations d’AE en 2017. Il a ajouté qu’il avait communiqué avec l’Agence du revenu du Canada (ARC) au sujet des prestations fiscales pour enfants et qu’on lui avait dit qu’il n’était pas admissible à ces prestations. Il a présumé que s’il ne recevait pas de prestations de l’ARC, il ne recevra pas de prestations d’autres ministères fédéraux. Même si le prestataire avait affirmé que son comptable lui avait fourni des renseignements au sujet des prestations d’AE en 2017, le Tribunal est convaincu que le prestataire a reçu ses renseignements de la part de son comptable en 2016.

[20] Le Tribunal estime que le prestataire n’a pas démontré qu’il avait un motif valable pour justifier le délai entre le moment où son comptable l’a avisé des prestations d’AE en 2016 et le moment où il a présenté une demande de prestations d’AE en février 2017. Le motif valable pour expliquer le retard n’est pas la même chose que le fait d’avoir une bonne raison ou une justification pour le retard. Le prestataire était au courant de l’existence des prestations d’AE en 2016, mais il n’a pas présenté de demande et n’a pas communiqué avec Service Canada. Une personne raisonnable aurait communiqué avec Service Canada et ne se fonderait pas sur le rejet d’un autre type de prestation par une autre organisation gouvernementale.

[21] Le prestataire a soutenu qu’il avait présenté une demande de prestations d’AE quatre semaines après qu’il soit devenu admissible. Le moment entre le 15 mars 2016, lorsque sa demande de résident permanent a été rejetée, et le 19 janvier 2017, lorsque sa demande de résident permanent a été accueillie, ne devrait pas être pris en compte pour calculer le « délai de quatre semaines » prescrit pour présenter une demande de prestations d’AE. Il a affirmé que le délai prescrit de quatre semaines devrait être appliqué aux quatre semaines après qu’il soit devenu admissible. Même si le Tribunal respecte cet argument, il n’en demeure pas moins que rien n’empêchait le prestataire de présenter une demande de prestations d’AE ou à tout le moins, de se renseigner au sujet de son admissibilité.

[22] Le prestataire a également fait valoir qu’il a une famille à nourrir et qu’il doit prendre soin de deux enfants. Il a cotisé à l’AE pendant des années sans demander du soutien, car il n’en avait pas besoin, mais maintenant qu’il en a besoin, il ne peut pas y avoir accès. Cependant, le simple fait de cotiser au programme d’AE ne garantit pas que des prestations d’AE soient payables. Les prestataires sont encore tenus de présenter une demande de prestations d’AE avec célérité et de remplir les conditions d’admissibilité nécessaires.

b) Le prestataire était-il admissible à des prestations d’AE à une date antérieure?

[23] La loi exige que le prestataire réponde aux deux facteurs afin que sa demande puisse être antidatée. Puisque le prestataire n’a pas démontré qu’il avait un motif valable au cours de l’ensemble de la période écoulée, le Tribunal estime que l’appel du prestataire ne peut pas être accueilli. Par conséquent, le Tribunal n’examinera pas la question à savoir s’il était admissible à des prestations d’AE à une date antérieure.

Conclusion

[24] Le prestataire a attendu près de 11 mois avant de présenter une demande de prestations après avoir perdu son emploi, et par conséquent, il n’a pas accumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable au cours de sa période de référence pour être admissible à des prestations d’AE, conformément à l’article 7 de la Loi sur l’AE.

[25] Le prestataire n’a pas démontré qu’il avait un motif valable tout au long de la période de retard, soit du 14 mars 2016 au 16 février 2017. Le prestataire n’a pas démontré que, selon la prépondérance des probabilités, il a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans ses circonstances semblables pour se renseigner sur ses droits et obligations. Par conséquent, la demande d’antidatation de la demande de prestations d’AE du prestataire est rejetée en vertu du paragraphe 10(4) de la Loi sur l’AE.

[26] L’appel est rejeté.

Annexe

Droit applicable

Loi sur l’assurance-emploi

  1. 7(1) Les prestations de chômage sont payables, ainsi que le prévoit la présente partie, à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.
  2. (2) L’assuré remplit les conditions requises si, à la fois :
    1. a) il y a eu arrêt de la rémunération provenant de son emploi;
    2. b) il a, au cours de sa période de référence, exercé un emploi assurable pendant au moins le nombre d’heures indiqué au tableau qui suit en fonction du taux régional de chômage qui lui est applicable.
  3. Tableau
    Taux régional de chômage Nombre d’heures d’emploi assurable requis au cours de la période de référence

    6 % et moins

    700

    plus de 6 % mais au plus 7 %

    665

    plus de 7 % mais au plus 8 %

    630

    plus de 8 % mais au plus 9 %

    595

    plus de 9 % mais au plus 10 %

    560

    plus de 10 % mais au plus 11 %

    525

    plus de 11 % mais au plus 12 %

    490

    plus de 12 % mais au plus 13 %

    455

    plus de 13 %

    420

  4. 8(1) Sous réserve des paragraphes (2) à (7), la période de référence d’un assuré est la plus courte des périodes suivantes :
    1. a) la période de cinquante-deux semaines qui précède le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1);
    2. b) la période qui débute en même temps que la période de prestations précédente et se termine à la fin de la semaine précédant le début d’une période de prestations prévue au paragraphe 10(1).
  5. (2) Lorsqu’une personne prouve, de la manière que la Commission peut ordonner, qu’au cours d’une période de référence visée à l’alinéa (1)a) elle n’a pas exercé, pendant une ou plusieurs semaines, un emploi assurable pour l’une ou l’autre des raisons ci-après, cette période de référence est prolongée d’un nombre équivalent de semaines :
    1. a) elle était incapable de travailler par suite d’une maladie, d’une blessure, d’une mise en quarantaine ou d’une grossesse prévue par règlement;
    2. b) elle était détenue dans une prison, un pénitencier ou une autre institution de même nature et n’a pas été déclarée coupable de l’infraction pour laquelle elle était détenue ni de toute autre infraction se rapportant à la même affaire;
    3. c) elle recevait de l’aide dans le cadre d’une prestation d’emploi;
    4. d) elle touchait des indemnités en vertu d’une loi provinciale du fait qu’elle avait cessé de travailler parce que la continuation de son travail la mettait en danger ou mettait en danger son enfant à naître ou l’enfant qu’elle allaitait.
  6. 10(1) La période de prestations débute, selon le cas :
    1. a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
    2. b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine est postérieure à celle de l’arrêt de rémunération.
  7. (4) Lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.
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