Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée.

Apercu

[2] Après avoir été mise à pied de son emploi en octobre 2016, la demanderesse, R. K. (prestataire), a commencé un programme d’études au début de janvier 2017. Ses études étaient subventionnées dans le cadre de Deuxième carrière, un programme du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Formation professionnelle de l’Ontario (MESFP). Elle a refusé un rappel au travail à la fin de janvier, car elle participait déjà à son programme et aurait été obligée de rembourser la subvention dont elle bénéficiait dans le cadre du programme Deuxième carrière si elle l’abandonnait.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a finalement déterminé que la prestataire avait volontairement quitté son emploi sans justification en refusant de retourner au travail. La Commission n’a pas accepté le fait qu’elle ait été autorisée par la Commission ou par son représentant désigné à suivre la formation. La prestataire a demandé une révision, mais sa demande a été rejetée. De plus, son appel à la division générale a été rejeté. Elle demande maintenant la permission d’en appeler.

[4] La demande n’a aucune chance raisonnable de succès. La division générale n’avait pas compétence pour examiner la négligence alléguée du MESFP de l’Ontario ou de son mandataire présumé, Second Chance Employment Counselling (Second Chance). De même, la division générale n’avait pas compétence quant au retard de la Commission pour statuer sur l’inadmissibilité et demander le recouvrement du versement excédentaire ou quant à l’argument de la prestataire selon lequel la Commission a fait preuve de négligence. Il n’existe aucune cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de la négligence ou du retard ou que la prestataire avait une justification valable pour quitter son emploi en vue de fréquenter l’école sans autorisation.

Questions en litige

[5] Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de la négligence de la Commission ou de ses représentants désignés, d’autres gouvernements ou des mandataires d’autres gouvernements?

[6] Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale a commis une erreur de droit en exigeant de la part de la prestataire qu’elle ait obtenu l’autorisation d’une autorité désignée avant de quitter son emploi (ou de refuser d’y retourner)?

Analyse

Principes généraux

[7] La tâche de la division d’appel est plus restreinte que celle de la division générale. La division générale est habilitée à examiner et à apprécier les éléments de preuve dont elle est saisie et à tirer des conclusions de fait. Elle applique ensuite le droit à ces faits afin de tirer des conclusions sur les questions de fond soulevées en appel.

[8] Pour sa part, la division d’appel ne peut intervenir dans une décision de la division générale que si elle peut déterminer que cette dernière a commis l’une des erreurs correspondant aux moyens d’appel prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), lesquels sont exposés ci-dessous :

  1. a) La division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) La division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) La division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[9] L’appel ne peut être accueilli à moins que la division générale ait commis l’une de ces erreurs, et ce, même si la division d’appel n’est pas d’accord avec sa conclusion et l’issue de l’affaire.

[10] À ce stade, pour pouvoir accorder la permission d’en appeler et permettre à l’appel de suivre son cours, je dois conclure qu’au moins l’un des moyens d’appel confère à l’appel une chance raisonnable de succès. Il a été établi qu’une chance raisonnable de succès signifie de disposer d’une cause défendableNote de bas de page 1.

Négligence de la part des autres gouvernements et de leurs agents

[11] La prestataire a déclaré devant la division générale et soutient toujours qu’elle s’est fiée aux conseils de Second Chance, le conseiller en emploi qui administrait le processus de demande du programme subventionné Deuxième carrière pour le MESFP de l’Ontario (auparavant le ministère de la Formation et des Collèges et Universités). La prestataire a souligné qu’elle avait assisté à une séance d’orientation et qu’elle avait rempli les documents nécessaires pour compléter le processus auprès du MESFP. Elle a également soutenu que le MESFP avait également fait preuve de négligence en ne demandant pas à la Commission l’autorisation de refuser du travail.

[12] Qu’il y ait eu ou non négligence de la part de Second Chance ou du MESFP (dont Second Chance est un mandataire présumé), ces questions n’ont rien à voir avec la décision dont la division générale était saisie et ne relèvent pas de sa compétence. La division générale a compétence pour entendre les appels interjetés contre les décisions de réexamen et juger les appels fondés sur les dispositions de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) et du Règlement sur l’assurance-emploi. Il est impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit en omettant d’apprécier ou d’accepter la négligence d’un ministère de l’Ontario ou de ses agents ou entrepreneurs.

Négligence de la part de la Commission

[13] La prestataire a également fait valoir que la Commission a fait preuve de négligence en prenant autant de temps pour statuer sur son exclusion du bénéfice des prestations ou pour demander le recouvrement du versement excédentaire. 

[14] Selon le paragraphe 52(1) de la Loi sur l’AE, la Commission peut examiner de nouveau une demande dans un délai de 36 mois. L’obligation d’un prestataire de rembourser une somme versée par la Commission pour toute période pour laquelle il est exclu du bénéfice des prestationsNote de bas de page 2 constitue une créance de Sa MajestéNote de bas de page 3, et la seule limite légale applicable au recouvrement du versement excédentaire par la Commission est celle de 72 mois prévue au paragraphe 47(3). La Commission a bien tranché la question du réexamen dans les 36 mois et a pris des mesures pour recouvrer le versement excédentaire dans les 72 mois. Bien qu’il soit préférable que toutes les décisions de la Commission soient prises plus rapidement, il n’y a pas de délai légal régissant l’examen ou le recouvrement du versement excédentaire qui soit pertinent dans les circonstances de cette affaire.

[15] La prestataire n’a pas réussi à prouver que les processus de traitement et d’examen de la Commission outrepassaient les pouvoirs que lui confère la Loi sur l’AE, et il est donc impossible de soutenir que la division générale a commis une erreur en droit en ne jugeant pas les actions de la prestataire contraires à la loi.

Quitter volontairement son emploi sans justification valable

[16] Le paragraphe 29(c) de la Loi sur l’AE prévoit que le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi si, compte tenu de toutes les circonstances, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable. Aux termes de l’article 30, le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il a volontairement quitté son emploi sans justification. La prestataire ne conteste pas le fait qu’elle ait volontairement quitté son emploi en refusant le rappel de son employeur, mais elle est d’avis qu’elle avait une justification valable de le faire, car elle croyait que son programme avait été approuvé.

[17] La division générale a utilisé le bon critère juridique et l’a appliqué correctement. Il est bien établi que quitter son emploi pour aller à l’école n’est pas une « justification valable »Note de bas de page 4. Cela est vrai, même lorsque l’investissement du prestataire dans la formation est en jeuNote de bas de page 5. Bon nombre des autorités jurisprudentielles reconnaissent également une exception lorsqu’un prestataire est autorisé par la Commission à quitter son emploi pour aller à l’écoleNote de bas de page 6. Cependant, le fait d’être dirigé vers un programme n’équivaut pas à une autorisation de quitter son emploi (ou de refuser un rappel, en l’espèce). Il est possible que le fait que la prestataire ait été « dirigée » par le MESFP constitue une orientation donnée par une autorité désignée aux termes de l’article 25 de la Loi sur l’AE, auquel cas l’article 25 aurait pour effet de réputer la prestataire comme étant capable et disponible nonobstant l’article 18 de la Loi sur l’AE, qui lui permettrait de demander des prestations pendant ses études. La prestataire croyait avoir été dirigée vers son programme par Second Chance ou par le MESFP. Elle a également compris que son acceptation au programme Deuxième carrière comprenait une autorisation de la Commission de refuser un rappel au travail. Ce n’était pas le cas.

[18] Je reconnais que la prestataire croyait suivre les conseils du programme provincial du MESFP et de l’agence de placement Second chance, et qu’elle pensait pouvoir se fier à ces conseils. Malheureusement pour elle, elle n’a pas confirmé l’exactitude de ces conseils auprès de la Commission. Rien ne prouvait que la Commission avait autorisé la prestataire à quitter son emploi pour suivre le programme ou à refuser un rappel afin de poursuivre le programme.

[19] Je reconnais que la prestataire peut avoir vécu des difficultés financières en raison de son exclusion du bénéfice des prestations et des efforts déployés par la Commission pour recouvrer le versement excédentaire, mais je ne suis pas en mesure de cerner une cause défendable permettant de soutenir que la division générale a commis une erreur de droit.

[20] Suivant les directives de la Cour fédérale dans des arrêts comme celui de KaradeolianNote de bas de page 7, j’ai consulté le dossier pour trouver d’autres éléments de preuve qui pourraient avoir été omis ou mal compris, mais je n’ai pu cerner une cause défendable découlant d’une telle erreur.

[21] La prestataire n’a soulevé aucun des moyens prévus au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS et l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[22] La permission d’en appeler est refusée.

Représentante :

R. K., non représentée

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