Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] Le Tribunal rejette l’appel.

Apercu

[2] L’appelant, J. L. (prestataire), a présenté une demande initiale de prestations d’assurance-emploi. Après étude de la demande, la Commission de l’assurance-emploi du Canada l’a informé qu’il n’avait pas droit à des prestations d’assurance-emploi parce qu’il avait perdu son emploi en raison de son inconduite. La Commission a conclu que le geste du prestataire, soit de s’absenter du travail du 25 au 29 juillet 2016, alors que l’employeur lui avait refusé son congé, constituait de l’inconduite. Le prestataire a demandé la révision de cette décision. La Commission a informé le prestataire qu’elle maintenait sa décision initiale. Le prestataire a interjeté appel de la décision auprès de la division générale.

[3] La division générale a déterminé que le prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduite puisqu’il avait décidé, sans l’autorisation de son employeur, de prendre des vacances. Elle a jugé que le prestataire savait ou aurait dû savoir qu’il risquait réellement d’être congédié en agissant de la sorte.

[4] La permission d’en appeler a été accordée par le Tribunal. Le prestataire soutient que la division générale a commis une erreur en omettant de prendre en compte « que l’impression que ses vacances seraient approuvées » avait été rendue possible par son supérieur immédiat. Il fait valoir que ce n’était pas une vague impression tirée de son propre jugement, mais bien de paroles prononcées par son supérieur immédiat selon lesquelles il n’y aurait pas de problèmes, que ce n’était qu’une formalité.

[5] Le Tribunal doit décider si la division générale a erré en concluant que le prestataire avait fait preuve d’inconduite alors que l’employeur lui avait laissé croire que sa demande de congé n’était qu’une formalité.  Il doit également décider si la division générale a erré en accordant foi à la version de l’employeur malgré son absence lors de l’audience devant la division générale.

[6] Le Tribunal rejette l’appel du prestataire.

Questions en litige

[7] Est-ce que la division générale a erré en concluant que le prestataire avait fait preuve d’inconduite alors que l’employeur lui avait laissé croire que sa demande de congé n’était qu’une formalité?

[8] Est-ce que la division générale a erré en accordant foi à la version de l’employeur alors qu’il était absent lors de l’audience?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[9] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS)Note de bas de page 1.

[10] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure. 

[11] En conséquence, à moins que la division générale n’ait pas observé un principe de justice naturelle, qu’elle ait erré en droit ou qu’elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l’appel.

Question en litige no 1: est-ce que la division générale a erré en concluant que le prestataire avait fait preuve d’inconduite alors que l’employeur lui avait laissé croire que sa demande de congé n’était qu’une formalité?

[12] Le rôle de la division générale est de déterminer si la conduite de l’employé constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) et non pas de déterminer si la gravité de la sanction imposée par l’employeur est justifiée ou non ou si le geste de l’employé constitue un motif valable de congédiementNote de bas de page 2.

[13] D’ailleurs, la notion d’inconduite ne prévoit pas qu’il est nécessaire que le comportement fautif résulte d’une intention coupable; il suffit que l’inconduite soit consciente, voulue ou intentionnelle. Autrement dit, pour constituer de l’inconduite, l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendementNote de bas de page 3.

[14] Lors de ses déclarations en appel, le prestataire a fait valoir que son superviseur lui a laissé entendre que la confirmation de ses vacances était une formalité.  Il soutient que puisque la division générale a jugé son témoignage crédible, elle aurait dû retenir son témoignage dans son entièreté. Il fait également valoir que la division générale a erré en accordant de la crédibilité à la version de l’employeur puisque celle-ci contenait des contradictions manifestes.

[15] Il ressort de la décision générale que celle-ci a fondé sa décision sur la preuve non contredite devant elle selon laquelle le prestataire a pris des vacances, alors qu’il avait été avisé, quelques jours avant son départ, du refus de l’employeur.

[16] La division générale a conclu que le prestataire avait perdu son emploi en raison de son inconduite puisqu’il avait décidé, sans l’autorisation de son employeur, de prendre des vacances. Elle a conclu que compte tenu de la gravité du geste, le prestataire aurait dû savoir qu’il serait congédié.

[17] Il ressort clairement de la jurisprudence qu’une absence au travail, sans permission de l’employeur, et plus particulièrement après avoir expressément été avisé du refus du congé par l’employeur, constitue une inconduite au sens de la Loi sur l’AE.

[18] Malheureusement pour le prestataire, la jurisprudence qu’il a présentée ne lui est d’aucun secours puisqu’elle concerne des situations où l’employeur avait soit clairement accepté le congé demandé par le prestataire pour ensuite tardivement le refuser ou n’avait pas fourni de réponse officielle, ce qui n’est pas le cas en espèce.

[19] Il existe une différence fondamentale entre le fait de partir en vacances sans avoir reçu d’approbation tout en tenant pour acquis que la demande a été approuvée et la conclusion de la division générale selon laquelle le prestataire est parti en sachant que sa demande n’avait pas été approuvée.

[20] Bien qu’il soit véridique que l’employeur a par la suite communiqué avec le prestataire afin de le réembaucher et que l’employeur lui ait alors mentionné avoir voulu en faire un exemple, ces faits ne changent pas la nature de l’inconduite qui a initialement conduit au congédiement du prestataireNote de bas de page 4.

[21] Le Tribunal n’a pas le pouvoir de juger une affaire de nouveau ou de substituer son pouvoir discrétionnaire à celui de la division générale. La compétence du Tribunal est délimitée par le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS.

[22] Le Tribunal conclut qu’il était loisible à la division générale de rendre une conclusion comme elle l’a fait. Elle a rendu une décision qui est conforme à la loi et à la jurisprudence.

[23] Ce moyen d’appel est rejeté.

Question en litige no 2 : est-ce que la division générale a erré en accordant foi à la version de l’employeur alors qu’il était absent lors de l’audience?

[24] Le prestataire reproche à la division générale d’avoir accordé plus de poids à la preuve de l’employeur alors qu’il était absent lors de l’audience et qu’il ne pouvait le contre-interroger. 

[25] Tel qu’il a été précédemment mentionné, la décision de la division générale repose sur un fait non contesté, soit la décision du prestataire de prendre des vacances malgré le refus de son employeur. 

[26] Quoi qu’il en soit, le Tribunal est d’avis que le seul fait qu’une partie soit présente et que l’autre soit absente ne doit pas être un facteur déterminant. La division générale est libre de préférer la crédibilité de l’une ou de l’autre.

[27] De plus, la Cour d’appel fédérale a décidé que les conseils arbitraux (maintenant la division générale) ne sont pas liés par les règles de preuve strictes qui s’appliquent devant les tribunaux criminels ou civils et qu’ils peuvent recevoir et retenir la preuve par ouï-direNote de bas de page 5.  La division générale ne pouvait donc rejeter la preuve de l’employeur seulement parce que le prestataire n’avait pas eu l’occasion de contrer-interroger l’employeurNote de bas de page 6.

[28] Le Tribunal est d’avis que le prestataire était au courant de la preuve au dossier avant sa présence devant la division générale et qu’il a eu amplement le temps de préparer sa défense. La division générale lui a permis de présenter ses arguments au sujet de toute l’affaire dont elle était saisie, et le prestataire a eu l’occasion de contredire la position de l’employeur.

[29] Ce moyen d’appel est rejeté.

Conclusion

[30] Le Tribunal rejette l’appel.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 12 juin 2018

Téléconférence

J. L., appelant
Y. B., représentant de l’appelant
Manon Richardson, représentante de l’intimée

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