Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] La demande de permission d’en appeler est refusée.

Apercu

[2] Le demandeur, B. B., a travaillé comme agent correctionnel du 27 août 2015 au 2 janvier 2016, date à laquelle il a été congédié. Il a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi en mai 2017, immédiatement après avoir reçu un relevé d’emploi de son employeur et avoir pris connaissance du motif de la cessation d’emploi.

[3] La défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté la demande de prestations d’assurance-emploi après avoir déterminé que le demandeur n’avait pas cumulé suffisamment d’heures d’emploi assurable entre le 22 mai 2016 et le 20 mai 2017. Le demandeur a ensuite demandé que sa demande de prestations soit antidatée au 5 janvier 2016, car cela lui donnerait alors suffisamment d’heures d’emploi assurable pour être admissible au bénéfice des prestations d’assurance-emploi. La défenderesse a rejeté la demande d’antidatation du demandeur, estimant que ce dernier ne disposait pas d’un motif valable pour présenter sa demande en retard. Le demandeur a demandé une révision, mais la défenderesse a maintenu sa position.

[4] Le demandeur a interjeté appel de la décision issue de la révision auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, laquelle a rejeté l’appel, estimant que le demandeur n’a pas démontré qu’il disposait d’un motif valable pour justifier la présentation en retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi. Le demandeur demande maintenant la permission d’interjeter appel de la décision de la division générale au motif que cette dernière n’a pas observé un principe de justice naturelle et a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Je dois déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès, c’est-à-dire si une cause défendable existe.

[5] Je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès, car le demandeur n’a pas précisé de quelle façon la division générale aurait pu manquer à un principe de justice naturelle, commettre une erreur de droit ou fonder sa décision sur une conclusion de fait erronée sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Questions en litige

[6] Le demandeur a cerné deux questions qui, à son avis, correspondent à une cause défendable :

  1. existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale n’a pas respecté un principe de justice naturelle?
  2. existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en concluant que le demandeur ne disposait pas d’un motif valable pour justifier la présentation en retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi?

Analyse

[7] Les seuls moyens d’appel prévus aux termes de l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] Avant d’accorder la permission d’en appeler, je dois avoir la certitude que les motifs de l’appel correspondent aux moyens d’appel figurant à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS et que l’appel a une chance raisonnable de succès. La Cour fédérale a adopté cette approche dans l’arrêt TraceyNote de bas de page 1. Le demandeur a cerné deux questions que je dois examiner.

Question en litige no 1 : Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale n’a pas respecté un principe de justice naturelle?

[9] Le demandeur soutient que la division générale n’a pas respecté un principe de justice naturelle. La justice naturelle vise à assurer qu’un demandeur bénéficie d’une occasion équitable de présenter sa cause et que l’instance soit équitable et exempte de partialité. La justice naturelle se rapporte aux questions d’équité procédurale devant la division générale plutôt qu’à l’incidence d’une décision de cette dernière sur l’une ou l’autre des parties concernées. Les prétentions du demandeur ne soulèvent aucune question d’équité procédurale ou de justice naturelle qui concerne la division générale. Il n’a présenté aucun élément de preuve donnant à penser que la division générale l’a autrement privée d’une occasion de présenter sa cause pleinement et de façon équitable ou a fait preuve de partialité à son égard. Je ne suis donc pas convaincue qu’un appel fondé sur ce moyen a une chance raisonnable de succès.

Question en litige no 2 : Existe-t-il une cause défendable selon laquelle la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance en concluant que le demandeur ne disposait pas d’un motif valable pour justifier la présentation en retard de sa demande de prestations d’assurance-emploi?

[10] Le demandeur soutient également que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, en déterminant qu’il n’a pas démontré qu’il disposait d’un motif valable pour expliquer pourquoi il n’a pas présenté sa demande de prestations d’assurance-emploi entre le 3 janvier 2016 et le 23 mai 2017. Le demandeur n’a pas non plus mentionné d’autres conclusions de fait erronées présumées.

[11] Le demandeur prétend que la division générale a commis une erreur en [traduction] « formulant l’hypothèse selon laquelle il était une personne déraisonnable ». Il soutient qu’il a démontré qu’il avait [traduction] « un motif valable et raisonnable pour expliquer le retard » quand il a tenté d’obtenir de son employeur un relevé d’emploi pour connaître la raison de la cessation de son emploi.

[12] Dans son appel à la division générale, le demandeur a expliqué avoir présenté sa demande de prestations d’assurance-emploi en retard parce qu’il a dû attendre plus d’un an avant de recevoir un relevé d’emploi de son employeur. Il a également précisé qu’il ignorait qu’il aurait pu présenter sa demande de prestations d’assurance-emploi sans avoir le relevé d’emploi.

[13] La division générale s’est penchée sur l’explication que le demandeur a fournie pour expliquer son retard. Elle a reconnu l’explication du demandeur selon laquelle il attendait de recevoir un relevé d’emploi de son employeur. Elle a également reconnu le fait que le demandeur a dû attendre passablement longtemps avant de recevoir le relevé d’emploi, et ce, malgré les efforts qu’il a déployés pour l’obtenir. Étant donné que la division générale a tenu compte à juste titre de cet élément de preuve dans le cadre de son analyse, l’on ne peut pas dire qu’un appel aurait une chance raisonnable de succès au motif que la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] Tout au plus, le demandeur prétend que la division générale a commis une erreur en présumant qu’il a agi de façon déraisonnable, sans vraiment évaluer le caractère raisonnable de son retard. Il soutient qu’il a agi raisonnablement parce qu’il avait communiqué avec [traduction] « l’assurance-emploiNote de bas de page 2 » et qu’on l’avait informé qu’il devait fournir la raison de la cessation de son emploi. Il souligne également qu’il a fait des efforts concertés pour obtenir un relevé d’emploi de la part de son employeur.

[15] La division générale a tenu compte de ces explications. Essentiellement, le demandeur souhaite que l’on détermine de nouveau s’il a agi de manière raisonnable ou non en présentant en retard sa demande de prestations d’assurance-emploi. Cependant, l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS prévoit des moyens d’appel bien précis et ne permet pas une nouvelle appréciation de la preuveNote de bas de page 3.

[16] La division générale, dans le cadre de son évaluation du caractère raisonnable des mesures prises par le demandeur, a cité les décisions rendues par la Cour d’appel fédérale dans les arrêts Canada (Procureur général) c TrinhNote de bas de page 4 et Canada (Procureur général) c BeaudinNote de bas de page 5. Ces décisions établissent le critère aux termes de l’article 10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE) selon lequel un demandeur est censé prendre rapidement des mesures raisonnables pour s’enquérir de ses obligations au titre de la Loi sur l’AE. La division générale a déterminé qu’il faudrait que le demandeur démontre qu’il a fait ce qu’une personne raisonnable dans sa situation aurait fait pour connaître ses droits et ses obligations aux termes de la Loi sur l’AE. Elle a cerné le critère juridique approprié à appliquer pour déterminer s’il y avait un motif valable.

[17] Les observations du demandeur donnent à penser que la division générale a commis une erreur en appliquant des principes établis aux faits. Il s’agit là d’une question mixte de fait et de droit. Ce n’est pas une erreur de droit. Cette situation est semblable à l’affaire dont était saisie la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Quadir c Canada (Procureur général)Note de bas de page 6 dans le cadre duquel la question en litige était la même et il a été déterminé que la division générale n’avait pas compétence pour trancher des questions mixtes de fait et de droit. Je n’ai pas compétence pour intervenir dans la décision de la division générale concernant le caractère raisonnable des mesures prises par le demandeur. Par conséquent, je ne suis pas convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[18] La demande de permission d’en appeler est refusée.

Représentant :

Eleanor Wallace, représentante du demandeur

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