Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal accueille l’appel. La décision de la division générale datée du 21 mars 2018 est annulée.

Aperçu

[2] L’intimée, R. T. (la prestataire), occupait un emploi à temps plein lorsqu’elle a quitté volontairement son emploi parce qu’elle avait accepté un poste sur appel au X. Il n’y avait pas d’heures garanties, mais la prestataire espérait que le poste devienne permanent, ce qui signifierait une augmentation importante du salaire et la possibilité de meilleurs avantages sociaux. L’appelante, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a déterminé que la prestataire n’avait pas démontré qu’elle était fondée à quitter volontairement son emploi. La prestataire s’est donc vu refuser des prestations. Elle a demandé un réexamen de cette décision. La Commission a toutefois maintenu la décision initiale.

[3] La prestataire a interjeté appel de la décision de la Commission devant la division générale, qui a conclu que la prestataire ne disposait d’aucune solution de rechange raisonnable avant de quitter son emploi, compte tenu de toutes les circonstances. La division générale a conclu qu’il n’y avait aucune raison pour que la prestataire demeure à son poste à temps plein parce qu’elle a accepté un poste qui rémunérait davantage et qui pouvait mener à un travail permanent à temps plein.

[4] La Commission a obtenu la permission d’en appeler à la division d’appel. La Commission soutient que la division générale a commis une erreur de droit en ignorant la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale selon laquelle le fait de quitter un emploi permanent pour occuper un emploi à temps partiel ou sur appel ne constitue pas un motif valable aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi, même si le nouvel emploi offre un meilleur salaire et de meilleurs avantages sociaux.

[5] Le Tribunal doit décider si la division générale a commis une erreur de droit en faisant fi de la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et en acceptant le désir de la prestataire d’améliorer sa situation personnelle et financière comme motif valable de quitter volontairement son emploi.

[6] Le Tribunal accueille l’appel de la Commission.

Question en litige

[7] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en faisant fi de la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et en acceptant le désir de la prestataire d’améliorer sa situation personnelle et financière comme motif valable de quitter volontairement son emploi?

Analyse

Mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que lorsque la division d’appel entend des appels conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l'Emploi et du Développement social, la division d’appel n’a d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de cette loiNote de bas de page 1.

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieureNote de bas de page 2.

[10] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait commis une erreur de droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, le Tribunal doit rejeter l'appel.

Question en litige : La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en faisant fi de la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et en acceptant le désir de la prestataire d’améliorer sa situation personnelle et financière comme motif valable de quitter volontairement son emploi?

[11] L’appel est accueilli.

[12] Les faits sont simples et non contestés.

[13] La prestataire occupait un emploi à temps plein lorsqu’elle a quitté volontairement son emploi parce qu’elle a accepté un poste sur appel au X, ce qui signifierait une augmentation de salaire importante. De plus, l’emploi convenait mieux à sa famille. Lorsque la prestataire a décidé de quitter son emploi à temps plein, il n’y avait pas d’heures garanties, mais elle espérait que le poste deviendrait permanent, ce qui signifierait de meilleurs avantages sociaux. Un ami avait commencé à figurer sur la liste de disponibilité et un an plus tard avait un poste permanent.

[14] Le Tribunal conclut que la division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a fait fi de la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et accepté le désir de la prestataire d’améliorer sa situation personnelle et financière comme motif valable de quitter volontairement son emploiNote de bas de page 3.

[15] L’employée qui quitte volontairement son emploi pour accepter un emploi sur appel sans garantie d’heures et sans promesse d’emploi à temps plein, bien que cet emploi offre la possibilité d’un emploi permanent et de meilleurs avantages sociaux à l’avenir, a certainement une excellente raison de le faire en termes personnels. Toutefois, il est contraire aux principes mêmes qui sous-tendent le régime d’assurance-emploi que cette employée soit en mesure d’imposer le fardeau économique de sa décision aux cotisants au fondsNote de bas de page 4.

[16] Le Tribunal estime que le fait de renoncer à un emploi à temps plein pour un travail sur appel, dont l’ampleur est nécessairement incertaine, ne peut être considéré comme un motif valable en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi.

[17] Le Tribunal n’est pas convaincu non plus à partir de la preuve soumise à la division générale que les conditions de travail de la prestataire étaient si intolérables qu’elles ne lui laissaient d’autre choix que de démissionner lorsqu’elle l’a fait. De plus, il ressort clairement de la preuve soumise à la division générale que la prestataire n’a pas consulté de médecin ni discuté de ses problèmes de santé avec son employeur avant de décider de démissionner.

[18] Les solutions de rechange de la prestataire étaient de conserver l’emploi permanent à temps plein jusqu’à ce qu’elle trouve quelque chose de plus convenable qui serait permanent et à temps plein, de discuter de ses problèmes de santé avec son employeur pour trouver une solution ou de tenter de conclure une entente avec l’employeur pour lui permettre d’être disponible sur appel tout en conservant son emploi à temps plein.

Conclusion

[19] Le Tribunal accueille l’appel. La décision de la division générale datée du 21 mars 2018 est annulée.

 

Date de l’appel :

Mode d’instruction :

Comparutions :

Le 10 juillet 2018

Téléconférence

Me Julie Villeneuve, représentante de l’appelante

R. T., intimée

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