Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] La prorogation du délai pour présenter une demande de permission d’en appeler est refusée. La demande de permission d’en appeler est rejetée.

Aperçu

[2] Le demandeur, D. W. (prestataire), a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi le 9 avril 2017 et a demandé une antidatation de la demande au 18 novembre 2016, soit la date à partir de laquelle il était capable de travailler et disponible pour le faire. La défenderesse, à savoir la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a rejeté la demande d’antidatation et a maintenu la décision à la suite d’une demande de révision. Le prestataire a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale, mais l’appel a été rejeté. Il demande maintenant la permission d’en appeler devant la division d’appel.

[3] La demande de prorogation du délai est rejetée, et je rejette donc la demande de permission d’en appeler. La demande du prestataire a été présentée en retard, et je ne suis pas convaincu qu’il serait dans l’intérêt de la justice d’autoriser la poursuite de la demande.

Questions préliminaires

La demande de permission d’en appeler a-t-elle été présentée en retard?

[4] Une demande de permission d’en appeler doit être présentée dans les 30 jours suivant la date à laquelle la décision de la division générale a été communiquée à une partie. Cependant, il n’y avait aucun renseignement au dossier qui confirmait la date exacte à laquelle la décision a été reçue. Dans de tels cas, l’article 19(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit qu’une décision est communiquée 10 jours après la date à laquelle elle a été envoyée par la poste. La décision est datée du 2 mars 2018 et elle a été envoyée par la poste le 5 mars 2018, accompagnée d’une lettre. Par conséquent, sauf la preuve du contraire, la décision aurait été communiquée le 15 mars 2018.

[5] Aucune preuve ne donne à penser que la décision a été reçue à une date antérieure ou ultérieure au 15 mars 2018. Par conséquent, la demande de permission d’en appeler du prestataire aurait dû être reçue au plus tard le 14 avril 2018.

[6] Même si la lettre originale de la demande de permission d’en appeler est datée du 2 avril 2018, le cachet postal sur l’enveloppe indique qu’elle a été envoyée le 1er juin 2018. Selon l’étampe sur la lettre, celle-ci a été reçue le 5 juin 2018. La demande était incomplète à sa réception. Le 12 juin 2018, le Tribunal a informé le prestataire que, s’il complétait sa demande d’ici le 13 juillet 2018, elle serait considérée comme ayant été reçue le 5 juin 2018, date à laquelle la lettre initiale a été reçue. Le prestataire s’est conformé à la demande, et le Tribunal a confirmé que la demande du prestataire était complète le 9 juillet 2018.

[7] J’estime que la demande de permission d’en appeler du prestataire a été reçue le 5 juin 2018 et qu’elle est ainsi en retard de 52 jours.

Questions en litige

[8] La division d’appel devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire pour accorder une prorogation du délai pour que le prestataire puisse présenter sa demande?

[9] Si la prorogation du délai est accordée, le prestataire a-t-il une chance raisonnable de succès en appel?

Analyse

Le prestataire devrait-il se voir accorder une prorogation du délai?

[10] L’article 57(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) me confère le pouvoir discrétionnaire d’accorder une prorogation du délai dans lequel une permission d’en appeler peut être présentée.

[11] Afin de déterminer si je dois exercer ce pouvoir discrétionnaire en faveur du prestataire et lui accorder une prorogation du délai, je dois examiner la jurisprudence, y compris les arrêts Canada (Ministre du Développement des ressources humaines) c. Gattellaro et Muckenheim c Canada (Commission de l’assurance-emploi)Note de bas de page 1. Ces décisions ont énuméré certains facteurs qui devraient être pris en considération dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire d’accorder ou de refuser une prorogation de délai.

[12] Les facteurs établis par ces arrêts (facteurs établis dans l’arrêt Gattellaro) sont les suivants :

  • la partie demanderesse démontre l’intention constante de poursuivre l’appel;
  • il existe une explication raisonnable pour le retard;
  • la prorogation du délai ne cause aucun préjudice à l’autre partie;
  • La cause de l’affaire est défendable.

[13] L’importance accordée à chacun des facteurs mentionnés ci-dessus peut varier selon l’affaire. Dans certaines affaires, des facteurs différents peuvent être pertinents. Selon la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Larkman, le facteur primordial est l’intérêt de la justiceNote de bas de page 2.

[14] Dans la lettre du Tribunal datée du 9 juillet 2018, celui-ci a précisément demandé au prestataire d’expliquer le retard de sa demande de permission d’en appeler. Le prestataire a répondu dans une lettre datée du 16 juillet 2018, qui a été reçue par le Tribunal le 25 juillet 2018.

[15] Le prestataire a déclaré ne pas avoir reçu des renseignements exacts ou opportuns sur la question de savoir s’il avait le droit de toucher des prestations d’assurance-emploi (ou avoir reçu des renseignements erronés, trompeurs ou difficiles à accéder), avoir reçu une correspondance inutile depuis le refus du versement de prestations, et avoir cotisé au régime depuis longtemps.

[16] Malheureusement, la réponse du prestataire n’a pas expliqué la raison de la présentation tardive de sa demande de permission d’en appeler. Par conséquent, il n’y a aucune preuve sur laquelle je peux me fonder pour conclure que le prestataire avait l’intention constante de poursuivre l’appel ou qu’il avait une explication raisonnable pour le retard. J’estime que ces deux facteurs sont défavorables à l’accord d’une prorogation du délai.

[17] J’ai également examiné la question du préjudice à l’égard de la défenderesse. Je n’estime pas qu’un retard de 52 jours soit suffisamment important pour causer préjudice à la capacité de la défenderesse de préparer une réponse dans le cadre de l’appel, ou compromettre de façon inacceptable la finalité prévue par autre partie. Ce facteur est favorable à l’accord d’une prorogation.

[18] Le facteur final établi dans l’arrêt Gattellaro dont je dois tenir compte est la question de savoir si le prestataire a une cause défendable. Une cause défendable s’apparente à une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 3.

[19] Pour que la demande de permission d’en appeler soit accueillie, je devrais conclure qu’il existe une chance raisonnable de succès ou une « cause défendable » selon laquelle la division générale a commis l’un des types d’erreurs décrits par les moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS et énoncés ci-dessous :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[20] À moins que je puisse conclure à l’existence d’une cause défendable selon laquelle la division générale a commis l’une de ces erreurs, je ne serai pas capable d’accorder la permission d’en appeler, et ce, même si j’étais en désaccord avec la conclusion de la division générale.

[21] Le prestataire a déclaré dans son formulaire de permission d’en appeler que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle et que la division générale a commis une erreur importante concernant les faits versés dans le dossier d’appel. Cependant, le prestataire n’a ni cerné un principe de justice naturelle inobservé ni expliqué la façon dont une conclusion de fait particulière a été tirée de façon abusive ou arbitraire ou la façon dont la preuve a été ignorée ou mal interprétée dans une conclusion.

[22] Le prestataire fait valoir qu’il est traité injustement parce qu’il n’est pas avocat et qu’il ne comprend pas la décision de la division générale, mais il ne dit pas la façon dont il est traité injustement ou la façon dont l’audience et l’appel étaient déficients ou responsables de sa compréhension limitée. S’il croit que les motifs sont inadéquats, il n’a pas expliqué la mesure dans laquelle ils le sont.

[23] Le prestataire laisse également entendre qu’il devrait être admissible aux prestations parce qu’il a cotisé au régime, mais je peux seulement examiner un appel fondé sur les moyens d’appel prévus à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS, et cet argument ne correspond à aucun de ces moyens.

[24] La division générale a conclu que le prestataire n’avait pas un motif valable justifiant le retard de sa demande de prestations pour la période du 18 novembre 2017 au 9 avril 2017. Cette conclusion était fondée principalement sur le témoignage du prestataire selon lequel il n’était pas admissible parce qu’il avait plus de 65 ans, il n’avait rien fait pour vérifier cette allégation jusqu’à ce que son épouse voie quelque chose sur Internet, et il n’y avait eu aucun obstacle physique l’empêchant de présenter une demande initiale à une date antérieure.

[25] Le prestataire n’a pas laissé entendre que la division générale avait tort à cet égard ou qu’il existait une autre preuve que la division générale a ignorée, mais j’ai néanmoins examiné la question de savoir si la division générale pourrait avoir mal interprété ou ignoré la preuve dans sa conclusion. J’ai examiné le dossier conformément aux directives données dans des décisions comme l’arrêt Karadeolian c Canada (Procureur général)Note de bas de page 4, mais je n’ai pas constaté une cause défendable selon laquelle la division générale a tenu compte de la preuve de façon erronée.

[26] Le prestataire n’a pas une cause défendable selon laquelle la division générale a omis d’observer un principe de justice naturelle selon l’article 58(1)(a) de la Loi sur le MEDS, a commis une erreur au titre de l’article 58(1)(b), ou a fondé sa décision sur une conclusion de fait, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance au titre de l’article 58(1)(c). Par conséquent, ce facteur n’appuie pas l’accord d’une prorogation de délai, et j’accorder beaucoup d’importance à ce facteur.

[27] Après avoir examiné l’ensemble des facteurs prévus dans l’arrêt Gattellaro, je ne suis pas convaincu qu’il est dans l’intérêt de la justice d’accorder la prorogation du délai. J’ai déjà conclu que le prestataire n’a pas une cause défendable, ce qui signifie que je ne pourrais pas accorder la permission d’en appeler, quoi qu’il en soit.

Conclusion

[28] La prorogation du délai pour demander la permission d’en appeler est refusée.

[29] Par conséquent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

 

Représentant :

W. D., non représenté

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