Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] Comme je l’ai expliqué dans ma décision relative à la demande de permission d’en appeler, voici les faits essentiels dans cet appel :

  • L’appelante, K. C., a travaillé sous un contrat d’une durée déterminée comme enseignante à temps plein pour la division scolaire de X, du 8 septembre 2015 au 28 avril 2016. Selon les modalités du contrat (d’une durée inférieure à une année scolaire complète), l’appelante ne pouvait pas accumuler de journées de maladie non utilisées ni d’ancienneté, et son contrat n’était pas renouvelable automatiquement. Elle n’était pas admissible à la répartition de son salaire sur 12 mois puisqu’elle ne travaillait pas pendant une année scolaire complète; elle avait cependant reçu un salaire d’appoint au cours des quatre dernières semaines de son contrat.
  • À la fin de son contrat d’une durée déterminée, l’appelante a travaillé comme enseignante suppléante pour la division scolaire. À ce titre, elle ne remplaçait pas un seul enseignant occupant un seul poste. Elle était plutôt « sur appel » et travaillait dans différentes écoles de la division scolaire, qui l’appelait au besoin pour qu’elle vienne travailler à 7 h. En tant qu’enseignante suppléante, elle touchait un salaire moindre et ne bénéficiait ni d’un régime de soins de santé ni de congés de maladie payés. Elle a fini par travailler approximativement l’équivalent de quatre jours par semaine, en moyenne, du 2 mai au 24 juin 2016.
  • Le 7 juin 2016, l’appelante a accepté une offre pour un poste permanent d’enseignante à la division scolaire, auprès d’une école différente de celle où elle avait travaillé sous un contrat à durée déterminée, pour une entrée en service le 6 septembre 2016. Elle a déclaré qu’elle recevrait un salaire à compter du 30 septembre 2016. La division scolaire a accepté, à titre discrétionnaire, de transférer les congés de maladie inutilisés qu’elle avait accumulés durant son contrat à durée déterminée. Elle a conservé ses cotisations de retraite par l’intermédiaire d’une entité distincte de la division scolaire.

[3] Le 24 juin 2016, l’appelante a demandé des prestations d’assurance-emploi pour la période de congé estivale. Le Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE), pris en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE), ne permet pas aux enseignants de toucher des prestations régulières durant les périodes de congé, sous réserve de certaines exceptions :

33(2) Le prestataire qui exerçait un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence n’est pas admissible au bénéfice des prestations, sauf celles prévues aux articles 22, 23, 23.1, 23.2 ou 23.3 de la Loi, pour les semaines de chômage comprises dans toute période de congé de celui-ci, sauf si, selon le cas :

  1. a) son contrat de travail dans l’enseignement a pris fin;
  2. b) son emploi dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance;
  3. c) il remplit les conditions requises pour recevoir des prestations à l’égard d’un emploi dans une profession autre que l’enseignement.

[4] L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que l’appelante n’était pas admissible au bénéfice des prestations. En appel, la division générale a ensuite confirmé que les exceptions prévues aux articles 33(2)(a) et (b) ne s’appliquaient pas. La permission d’appeler de la décision de la division générale a été accordée sur le fondement d’une possible erreur de droit relativement au critère pour l’enseignement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance. Le moyen d’appel concerné, prévu à l’article 58(1)(b) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS), veut que la division générale « a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier ».

Analyse

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit relativement à un emploi exercé sur une base de suppléance?

[5] La Cour d’appel fédérale a d’abord interprété le concept de l’enseignement « exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance » (qui figurait alors à l’article 46.1(1) du Règlement sur l’AE) dans Dupuis-Johnson v Canada (Commission de l’emploi et de l’immigration), 1996 CanLII 12471 (CAF). La Cour a conclu que les prestataires enseignants, qui travaillaient sous des contrats à durée déterminée durant l’année scolaire, ne travaillaient pas sur une base occasionnelle ou de suppléance puisque leur travail [traduction] « était évidemment exercé de façon continue et prédéterminée et non sur une base occasionnelle ou de suppléance. » Plus tard, dans Stephens c Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), 2003 CAF 477, la Cour d’appel fédérale a renvoyé l’affaire au juge-arbitre pour qu’il détermine si, dans les faits, l’emploi du demandeur était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance. Même si la Cour n’a pas elle-même tranché cette question, elle a noté qu’ « [i]l est théoriquement possible qu’un enseignant soit employé comme suppléant pendant des périodes qui surviennent à des intervalles suffisamment réguliers pour qu’on ne puisse pas affirmer qu’il s’agit d’un emploi “exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance” » et que « la simple existence d’un contrat d’enseignement à durée déterminée visant une période précise n’empêche pas nécessairement une personne de se prévaloir des dispositions de l’alinéa 33(2)b) ».

[6] Dans Canada (Procureur générale) c Blanchet, 2007 CAF 377, la Cour d’appel fédérale a approfondi la question dans son analyse :

[38] L’exception consentie à l’alinéa 33(2)b) met l’emphase sur l’exercice de l’emploi et non sur le statut de l’enseignant qui l’exerce. En d’autres termes, un enseignant peut, par exemple, avoir un statut de suppléant, mais durant sa période de référence être appelé, et s’engager par contrat, à exercer un emploi non pas sur une base occasionnelle ou de suppléance, mais sur une base régulière ou à intervalle régulier à temps partiel. Même s’il garde son statut de suppléant selon l’entente collective qui régit la commission scolaire et le syndicat des enseignants, il n’exerce pas sur une base de suppléance l’emploi à temps partiel qu’il a contracté. Il ne rencontre pas alors les conditions de l’exception de l’alinéa 33(2)b). Comme le disait notre collègue la juge Sharlow au paragraphe 2 de l’affaire Stephens c. Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines), supra, il est possible « qu’un enseignant soit employé comme suppléant pendant des périodes qui surviennent à des intervalles suffisamment réguliers pour qu’on ne puisse pas affirmer qu’il s’agit d’un emploi “exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance” ».

[42] […] La définition de suppléance que l’on retrouve à la page 1020 de ce dictionnaire réfère au « fait d’être suppléant ». « Suppléant » est défini par référence à la personne qui supplée quelqu’un dans ses fonctions sans en être titulaire. Et le verbe « suppléer » signifie remplacer quelqu’un dans ses fonctions.

[43] La version 2007 du Guide, à la page 3 du Chapitre 14, précise qu’aux fins du Règlement, « l’enseignement occasionnel est un enseignement à intervalles irréguliers, dispensé de façon occasionnelle ou sur demande ». Et à ces fins, il « y a suppléance lorsqu’une personne est sur appel ou qu’elle peut remplir les fonctions d’un autre enseignant temporairement, durant par exemple, les congés sans solde, les vacances ou les congés de maladie » : ibidem.

[44] Je suis d’accord qu’il faut donner à ces termes le sens usuel et usité du dictionnaire et non un sens littéraire, philosophique ou figuré. Mais la démarche ne s’arrête pas là. Il faut examiner le contrat qu’a signé l’enseignant ou l’enseignante pour déterminer si l’emploi est exercé sur une telle base ou non au sens de l’alinéa 33(2)b). Ceci m’amène à l’application de cette démarche aux faits de l’instance.

[46] Les défenderesses ont exercé leur emploi en vertu de contrats d’enseignement à temps partiel ou à la leçon ou les deux […]

[47] Suivant l’entente intervenue entre le Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires francophones et la Centrale de l’enseignement du Québec pour le compte des syndicats d’enseignantes et d’enseignants qu’elle représente, la commission scolaire est tenue d’offrir « un contrat à temps partiel au suppléant qu’elle engage pour remplacer une enseignante ou un enseignant à temps plein ou à temps partiel, lorsqu’il est préalablement déterminé que la période d’absence de cette enseignante ou enseignant est supérieure à deux (2) mois consécutifs » : voir la clause 5-1.11 de l’entente.

[48] C’est précisément cette situation qui a cours en l’instance. Dans ces circonstances, je ne crois pas qu’on puisse dire que l’emploi a été exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance. Pour reprendre les termes du juge Marceau dans l’affaire Dupuis-Johnson, supra, au paragraphe 8, les défenderesses étaient sous contrat durant les périodes de vacances en cause et « leur emploi dans l’enseignement, aussi temporaire et précaire qu’aient été leur contrats [pour les périodes en cause], a certes été exercé de façon continue et prédéterminée et non sur une base occasionnelle ou de suppléance au sens de l’alinéa 33(2)b) [sic] ».

[7] Plus récemment, la Cour d’appel fédérale a rejeté des demandes de contrôle judiciaire portant sur des décisions où le juge-arbitre avait conclu que les demandeurs étaient « employés de manière continue et pour une durée prédéterminée et qu’ils ne pouvaient être considérés comme des enseignants occasionnels ou des suppléants » (Arkinstall c Canada (Procureur général), 2009 CAF 313).

[8] En l’espèce, la division générale a conclu que l’emploi de l’appelante ne correspondait pas à la définition d’un emploi exercé sur une base « occasionnelle » ou « de suppléance » puisqu’elle avait obtenu un emploi sur une base régulière et que la relation d’emploi s’était poursuivie :

[traduction]

[36] Le Tribunal juge que la preuve ne permet pas de démontrer que l’emploi de l’appelante correspond à la définition d’un emploi exercé sur une base « occasionnelle » ou « de suppléance », comme le relevé d’emploi révèle que l’appelante, immédiatement après la fin de son contrat terminant le 28 avril 2016, avait commencé à travailler sous contrat comme suppléante le 2 mai 2016 et jusqu’à la fin de l’année scolaire, et accumulé 291 heures d’emploi assurable, ce qui équivaut environ à quatre jours de travail par semaine durant toute cette période.

[37] D’après le témoignage de l’appelante, le Tribunal constate que, même si elle avait été classée enseignante suppléante, elle avait obtenu un emploi sur une base régulière comme elle avait des compétences spécialisées en musique et en français. L’appelante a aussi affirmé dans son témoignage que le directeur de son école devait prendre des dispositions spéciales pour obtenir un contrat de suppléance pour qu’elle puisse continuer de travailler jusqu’à la fin du mois de juin 2016. Plus tard durant cette période, le 16 juin 2016, l’appelante a reçu et a accepté une offre de contrat pour un poste permanent d’enseignante à temps plein pour l’année scolaire suivante.

[38] Le Tribunal estime que le statut que donne la commission scolaire ou la convention collective à un enseignant n’est pas pertinent. Un enseignant n’exerce pas un emploi sur une base occasionnelle ou de suppléance si la preuve révèle qu’il travaille d’une façon qui est, d’une quelconque manière, régulière, continue ou prédéterminée, ou s’il travaille sous contrat temporaire en remplaçant d’autres enseignants sur une base à temps plein ou à temps partiel. En l’espèce, la relation d’emploi entre la prestataire et la commission scolaire s’est poursuivie durant la période visée. [mise en évidence]

[9] Selon moi, l’affirmation soulignée où est utilisée la disjonction « ou » est une description inexacte et trop large du critère juridique établi dans la jurisprudence. Un emploi qui est régulier « d’une quelconque manière » n’est pas nécessairement un emploi qui soit « suffisamment régulier », et l’emploi doit être exercé de façon « continue et prédéterminée » plutôt que sur une base de suppléance. Bien que les critères d’un emploi « suffisamment régulier » et d’un emploi exercé de façon « continue et prédéterminée » sont tous deux employés dans la jurisprudence, ils expriment selon moi la même chose : un emploi d’enseignant suppléant qui est exercé de façon sporadique et imprévisible, plutôt que de façon continue et prédéterminée, ne sera pas suffisamment régulier. De plus, la division générale a confondu la notion de la continuité de l’emploi par l’entremise de contrats consécutifs (pertinente pour savoir s’il y a eu cessation d’emploi, aux fins de l’article 33(2)(a)) et la notion de la continuité de l’emploi dans le cadre d’un contrat de suppléance (pertinente pour déterminer la nature de l’emploi, aux fins de l’article 33(2)(b)).

[10] En appliquant le mauvais critère juridique aux faits incontestés, la division générale a commis une erreur de droit et présenté sous un faux jour l’emploi exercé par l’appelante entre avril et juin 2016. Malgré cette erreur, je constate que l’issue de l’appel est, ultimement, correcte. Je précise que je suis habilitée, en vertu de l’article 59 de la Loi sur le MEDS, à rejeter l’appel, à rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, à renvoyer l’affaire à la division générale, ou à confirmer, infirmer ou modifier la décision de la division générale. Comme il n’y a pas de lacunes substantielles dans le dossier de preuve, il est inutile de renvoyer l’affaire à la division générale.

L’emploi de l’appelante en mai et juin 2016

[11] Je ne suis pas d’accord avec l’observation de l’intimée voulant que l’emploi de l’appelante ne pouvait être qualifié d’emploi exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance parce qu’elle avait maintenu une relation avec la division scolaire. Si l’on met l’accent sur l’exercice de son emploi en mai et juin 2016 (conformément à Blanchet), il est tout à fait évident que l’emploi exercé par l’appelante correspondait à la définition ordinaire d’un emploi dans l’enseignement sur une base de suppléance, puisqu’elle était disponible sur appel et remplaçait de façon temporaire des enseignants absents dans différentes écoles, effectuant leurs tâches sans pourtant devenir titulaire d’un poste. Même si l’appelante a travaillé la plupart du temps pendant la durée de son contrat, l’emploi qu’elle a exercé durant cette période n’était pas prédéterminé : elle n’a pas été embauchée afin de remplacer un enseignant précis pour une période définie; elle était appelée tôt le matin pour venir travailler; elle ne savait pas d’un jour à l’autre si elle allait enseigner le lendemain ni où elle enseignerait; et elle ne travaillait pas tous les jours ni selon un horaire prévisible durant la durée de son contrat. Cet emploi semblerait correspondre précisément à ce que l’on entend d’un emploi dans l’enseignement exercé sur une base de suppléance. Il est difficile d’imaginer quel emploi répondrait à ce critère si l’emploi exercé par l’appelante en mai et juin 2016 n’y répondait pas. Je conclus que l’emploi exercé par l’appelante en mai et juin 2016 est le mieux décrit comme un emploi dans l’enseignement exercé sur une base de suppléance, au sens de l’article 33(2)(b) du Règlement sur l’AE.

L’emploi de l’appelante de septembre 2015 à avril 2016

[12] De septembre à avril, l’appelante a travaillé à temps plein sous un contrat à durée déterminée. En dépit des observations intéressantes de sa représentante, cet emploi n’a été exercé sur une base ni occasionnelle ni de suppléance au sens établi par la Cour d’appel fédérale, comme nous l’avons vu plus haut : la travailleuse a été embauchée pour remplacer un enseignant dans le cadre d’un poste à temps plein et pour une durée déterminée, et a exercé son emploi au cours de cette période de façon à la fois continue et prédéterminée. Même s’il a été conclu dans la décision CUB 23306, invoquée par la représentante de l’appelante, qu’un contrat de trois mois en enseignement représentait un emploi exercé sur une base occasionnelle, cette décision datant de 1994 a depuis été définitivement supplantée par les arrêts Dupuis-Johnson et Blanchet.

L’ « emploi dans l’enseignement » de l’appelante était-il exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance, de sorte que s’appliquait l’exception prévue à l’article 33(2)(b)?

[13] L’article 33(2) du Règlement sur l’AE, cité précédemment, prévoit qu’un prestataire « qui exerçait un emploi dans l’enseignement pendant une partie de sa période de référence » ne peut pas toucher de prestations régulières durant les périodes de congé, sous réserve de trois exceptions. La seconde de ces exceptions est dans le cas où « son emploi dans l’enseignement était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance ».

[14] Il est alors question de savoir si le fait d’avoir travaillé dans l’enseignement sur une base de suppléance pendant une petite partie de l’année scolaire est suffisant aux fins de l’article 33(2)(b). Cette question ne peut reposer sur la continuité de l’emploi, comme l’a soutenu l’intimée, puisque l’exception prévue à l’article 33(2)(b) est indépendante de celle prévue à l’article 33(2)(a). Même si la représentante de l’appelante a soutenu qu’un emploi dans l’enseignement exercé sur une base de suppléance de n’importe quelle durée peut susciter l’application de l’exception prévue à l’article 33(2)(b), mon interprétation des dispositions réglementaires me laisse croire le contraire.

[15] L’article 33(2) s’applique à un prestataire qui a exercé un emploi dans l’enseignement pendant tout partie de sa période de référence (soit habituellement les 52 semaines précédentesNote de bas de page 1). Il s’agit de la première question à régler, et dans la présente affaire, il n’est pas controversé que l’appelante a exercé un emploi dans l’enseignement durant une partie de sa période de référence. Plus précisément, elle a travaillé dans l’enseignement sous des contrats de travail du 8 septembre 2015 au 28 avril 2016 et du 2 mai 2016 au 24 juin 2016. À mon avis, il découle de la question initiale que « l’emploi dans l’enseignement » d’un prestataire, au sens de l’article 33(2)(b), fait référence à cette même période d’enseignement, c’est-à-dire à son emploi dans l’enseignement au cours de sa période de référence, et non à des parties de cet emploi.

[16] Si le législateur avait voulu que puisse se prévaloir d’une exception à l’inadmissibilité tout prestataire dont l’emploi dans l’enseignement au cours de la dernière année incluait une partie d’enseignement sur une base occasionnelle ou de suppléance, il aurait été simple de formuler autrement l’article 33(2)(b) pour qu’il s’applique; par exemple, si « tout » emploi dans l’enseignement ou « toute partie » de cet emploi était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance, ou si l’emploi dans l’enseignement du prestataire était exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance « lorsqu’il y a eu arrêt de la rémunération ». J’estime que, sans de telles précisions, l’article 33(2)(b) commande que l’emploi dans l’enseignement soit considéré comme un tout au regard de la période de référence. Selon moi, il deviendrait absurde si le type d’emploi en enseignement exercé pendant une seule semaine ou deux d’une année scolaire déterminait l’admissibilité ou l’inadmissibilité d’un enseignant à des prestations durant les périodes de congé. Ainsi, d’après l’interprétation que j’en fais, l’article 33(2)(b) prévoit une exception à l’inadmissibilité dans le cas d’un prestataire dont l’emploi en enseignement durant sa période de référence était principalement ou entièrement exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance.

[17] Bien que la jurisprudence n’en ait pas traité directement, cette interprétation cadre avec les conclusions tirées dans des appels concernant des prestataires dont les périodes de référence comprenaient différents types d’emploi dans l’enseignement :

  • Dans Blanchet, les demandeurs ne pouvaient pas se prévaloir de l’article 33(2)(b) du fait qu’ils avaient enseigné sur une base de suppléance en plus de l’avoir fait sous contrat à temps partiel ou à la leçon. En discutant de la portée de l’article 33(2)(b), le juge Létourneau a affirmé que le bénéfice de l’exception s’obtient par « l’exercice de l’emploi durant la période de référence ».
  • Dans la décision CUB 72175A, l’exception prévue à l’article 33(2)(b) ne s’appliquait pas au prestataire qui avait enseigné sous un contrat régulier à temps partiel d’octobre à juin puis sur appel de septembre à novembre et de mars à avril.
  • Dans CUB 80691, l’exception prévue à l’article 33(2)(b) ne s’appliquait pas au prestataire qui avait enseigné sous un contrat à temps partiel de septembre à février puis sur appel de février à juin.

[18] En l’espèce, l’ « emploi dans l’enseignement » de l’appelante fait référence à son emploi dans l’enseignement entre septembre 2015 et juin 2016, dans l’ensemble. Elle a enseigné de façon régulière pendant huit mois, puis a enseigné sur une base de suppléance pendant moins de deux mois (durant lesquels elle a accepté un emploi permanent pour l’année suivante). Eu égard aux rôles d’enseignante occupés par l’appelante durant sa période de référence dans son ensemble, et au fait que son emploi d’enseignante suppléante n’en avait été qu’une composante mineure, je juge que l’on ne peut considérer son « emploi dans l’enseignement » durant sa période de référence comme ayant été exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance. Dans ces circonstances, l’appelante ne peut se prévaloir de l’exception à l’inadmissibilité prévue à l’article 33(2)(b).

La division générale a-t-elle erré relativement à l’exception pour la résiliation d’un contrat, au titre de l’article 33(2)(a)?

[19] Pour ce qui est la question distincte de savoir si l’appelante pouvait éviter d’être inadmissible aux prestations du fait que son contrat de travail dans l’enseignement avait pris fin, j’estime que la division générale n’a commis aucune erreur susceptible de révision en décidant que la condition prévue à l’article 33(2)(a) n’avait pas été remplie. Rien ne donne à penser que la division générale a mal compris les faits, particulièrement que l’appelante avait travaillé durant l’année scolaire sous deux contrats distincts et qu'elle avait signé un nouveau contrat pour l’année suivante avant la fin de son second contrat. La division générale a examiné la jurisprudence puis, après avoir appliqué aux faits de l’appel le critère consistant à savoir s’il y avait eu « une rupture claire dans la continuité de son emploiNote de bas de page 2 », elle a conclu que l’appelante n’avait pas connu, comme employée, une véritable rupture de sa relation avec l’employeur.Note de bas de page 3 Je conclus que la division générale n’a commis aucune erreur de droit à cet égard dans sa décision.

Conclusion

[20] Ainsi, il n’y a aucune erreur susceptible de révision relativement à l’exception à l’inadmissibilité prévue à l’article 33(2)(a) et, bien que la division générale a erré en concluant que l’emploi de l’appelante n’avait pas été exercé sur une base occasionnelle ou de suppléance de mai à juin 2016, j’ai conclu que l’exception à l’inadmissibilité prévue à l’article 33(2)(b) ne s’appliquait pas à la situation de l’appelante. Par conséquent, son inadmissibilité à des prestations régulières pour la période de congé estivale de 2016 est maintenue, et l’appel est rejeté.

 

Date de l’audience :

Mode d’audience :

Comparutions :

Le 9 avril 2018

Téléconférence

K. C., appelante

N. Kerr, représentante de l’appelante

Matthew Vens, représentant de l’intimée

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