Assurance-emploi (AE)

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Décision et motifs

Décision

[1] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler à la division d’appel.

Aperçu

[2] La demanderesse, 9051-6394 Québec Inc. (employeur), a émis des relevés d’emploi à l’intention de quatre de ses employés, à la suite de périodes de travail qu’ils ont effectuées pour son compte au cours des années 2006 à 2011, et pour lesquelles des prestations d’assurance-emploi leur ont été versées. À la suite d’une enquête qu’elle a effectuée, la défenderesse, la Commission de l’assurance-emploi du Canada, a conclu que l’employeur avait émis de faux relevés d’emploi pour ces quatre employés et qu’il lui avait fourni de faux renseignements relativement au travail effectué par deux de ces quatre employés.

[3] L’employeur est en désaccord avec les décisions rendues à son endroit par la Commission. Il a expliqué que les relevés d’emploi qu’il a émis reflètent les renseignements provenant de son registre des employés et qu’il ne s’agit pas de faux relevés d’emploi. L’employeur a interjeté appel devant le conseil arbitral de l’assurance-emploi. Ce dossier a par la suite été transféré à la division générale.

[4] La division générale a conclu que l’imposition d’une pénalité monétaire à l’employeur pour avoir perpétré des actes délictueux lors de l’émission de neuf relevés d’emploi (neuf actes délictueux) au cours de la période du 6 septembre 2009 au 14 novembre 2011, de même qu’en remplissant et en signant deux formulaires « Demandes de renseignements – registres de paie » (deux actes délictueux), dont l’un est daté du 13 mars 2011 et l’autre, du 9 juin 2011, est justifiée aux termes de l’article 39 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[5] La division générale a également conclu que la remise d’une lettre d’avertissement à l’employeur pour avoir perpétré des actes délictueux (huit actes délictueux) lors de l’émission de huit relevés d’emploi, au cours de la période du 4 juin 2007 au 27 avril 2009, est justifiée en vertu de l’article 41.1 de la Loi sur l’AE.

[6] L’employeur demande maintenant au Tribunal la permission d’en appeler de la décision de la division générale.

[7] L’employeur, au soutien de sa demande de permission d’en appeler, réitère sa position selon laquelle les relevés d’emploi ne contiennent pas de faux renseignements puisqu’ils ont été complétés à partir des données provenant du registre des employés.

[8] En date du 11 juillet 2018, le Tribunal a expédié une lettre à l’employeur afin de lui demander d’expliquer en détail pourquoi il demandait la permission d’en appeler de la décision rendue par la division générale. Il lui a alors été signalé qu’il n’était pas suffisant de seulement répéter devant la division d’appel ce qui avait déjà été dit devant la division générale.

[9] En réponse à la demande du Tribunal, l’employeur fait valoir qu’il n’a pas deux possibilités pour remplir le relevé d’emploi et qu’il faut absolument se servir du registre des paies afin de remplir le relevé d’emploi. L’employeur aimerait que la division d’appel tranche la question de savoir comment il peut y avoir eu fraude de sa part dans un tel cas. Il soutient que la division générale ne s’est pas prononcée sur cette question.

[10] Le Tribunal doit décider si on peut soutenir que la division générale a commis une erreur révisable qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[11] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler puisqu’aucun des moyens d’appel soulevés par l’employeur ne confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[12] Est-ce que le prestataire soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès? 

Analyse

[13] L’article 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) précise les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont les suivantes : la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[14] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience relative à l’affaire sur le fond. C’est une première étape que l’employeur doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui dont il devra s’acquitter à l’audience de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande de permission d’en appeler, l’employeur n’a pas à prouver sa thèse, mais il doit établir que son appel a une chance raisonnable de succès. En d’autres mots, il doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a eu erreur révisable sur laquelle l’appel peut avoir gain de cause.

[15] La permission d’en appeler sera en effet accordée par le Tribunal s’il est convaincu qu’au moins un des moyens d’appel soulevé par l’employeur confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[16] Pour ce faire, le Tribunal doit être en mesure de déterminer, conformément à l’article 58(1) de la Loi sur le MEDS, s’il existe une question de principe de justice naturelle, de compétence, de droit ou de fait dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision contestée.

Question en litige: est-ce que l’employeur soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

[17] L’employeur, au soutien de sa demande de permission d’en appeler, fait valoir qu’il n’a pas deux possibilités pour remplir le relevé d’emploi et qu’il faut absolument se servir du registre des paies afin de remplir le relevé d’emploi. L’employeur aimerait que la division d’appel tranche la question de savoir comment il peut y avoir fraude dans ces circonstances. Il fait valoir que la division générale ne s’est pas prononcée sur cette question.

[18] Le Tribunal constate que la division générale n’a pas retenu l’argument de l’employeur selon lequel les relevés d’emploi ne contiennent pas de faux renseignements puisqu’ils ont été remplis à partir des données provenant du registre des employés.

[19] La division générale a déterminé que même si les données apparaissant sur les relevés d’emploi proviennent du registre des employés (registre de paie), cette situation ne fait pas en sorte de rendre véridiques les renseignements consignés sur les relevés d’emploi de ses employés puisque les renseignements fournis par l’employeur ne concordent pas avec les périodes au cours desquelles les employés ont travaillé pour lui.

[20] La division générale a jugé que la preuve de la Commission démontre que les employés travaillaient, alors qu’ils disaient ne pas travailler pendant qu’ils recevaient des prestations. Des éléments que l’employeur n’a pas pris en compte dans les relevés qu’il a émis.

[21] La division générale souligne que la preuve présentée par la Commission a été obtenue à partir des documents provenant de l’employeur. Ces documents se réfèrent essentiellement aux copies de factures, de bons de commande, de bordereaux de dépôt signés par les employés en question. Dans des documents intitulés « Certificat d’un document », la Commission a indiqué que les documents qu’elle a recueillis (« imprimé ou groupe d’imprimés ») représentaient « l’original, une copie ou un extrait des registres du personnel et des salaires, des feuilles de paie, des grands livres, des comptes ou autres livres ou documents d’un employeur ».

[22] La division générale a déterminé que la Commission a démontré que les relevés d’emploi émis par l’employeur contenaient de faux renseignements et que celui-ci lui a également transmis de faux renseignements dans deux documents intitulés « Demande de renseignements – registres de paie ».

[23] La division générale a jugé que l’employeur savait que les quatre employés avaient accompli du travail à son bénéfice lorsqu’ils ont signé des documents (ex. : factures, bons de commande, bordereaux de dépôt) dans des périodes au cours desquelles il a déclaré qu’ils n’avaient pas travaillé ou n’avaient pas été à son emploi.

[24] La division générale a conclu que la Commission a démontré que les gestes reprochés à l’employeur ont été commis sciemment et que l’employeur a fait de fausses déclarations en toute connaissance de cause.

[25] La division générale a déterminé que l’employeur a choisi de ne pas prendre en compte des renseignements provenant des factures, des bons de commande et des bordereaux de dépôt de son entreprise démontrant que les employés en question avaient travaillé dans des périodes au cours desquelles il a indiqué qu’ils n’avaient pas travaillé.

[26] Tel que souligné par la division générale, la seule exigence posée par le législateur est celle d’avoir fait une déclaration fausse ou trompeuse sciemment, c’est-à-dire en toute connaissance de cause. L’absence d’intention de frauder n’est d’aucune pertinenceNote de bas de page 1.

[27] L’appel devant la division d’appel du Tribunal n’est pas un appel où l’on procède à une nouvelle audience où une partie peut présenter de nouveau sa preuve et espérer une décision favorable.

[28] Le Tribunal constate que, malgré sa demande spécifique du 11 juillet 2018, l’employeur ne soulève aucune question de droit ou de fait ou de compétence dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision contestée.

[29] Après examen du dossier d’appel, de la décision de la division générale et des arguments au soutien de la demande de permission d’en appeler, le Tribunal conclut que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. L’employeur ne soulève aucune question dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision contestée.

Conclusion

[30] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler devant la division d’appel.

 

Représentant :

9051-6394 Québec Inc., demanderesse, représentée par Yvon Duhaime

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