Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté. L’appelant n’a pas réussi à prouver qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi.

Aperçu

[2] L’appelant travaillait comme opérateur de chaises suspendues, effectuant le nettoyage de vitres d’immeubles de grande hauteur. Étant donné ce qui s’était produit l’année précédente et la nature de ce secteur d’activités, il s’attendait à ce que la saison pour son emploi aille approximativement du mois d’avril à la fin du mois d’octobre ou au début du mois de novembre. L’appelant a demandé des prestations, croyant que l’employeur n’avait pas de travail pour lui en raison des conditions météorologiques. L’employeur s’étant attendu à ce que l’appelant continue de travailler à un nouveau lieu de travail, il a considéré que l’appelant avait abandonné son poste. L’intimée a conclu que l’appelant n’était pas fondé à quitter volontairement son emploi parce qu’il existait des solutions de rechange raisonnables à son départ.

Questions préliminaires

[3] L’appelant a déposé les documents suivants au Tribunal après l’audience : des relevés téléphoniques tirés du téléphone de sa sœur, faisant état d’un appel fait à l’employeur le 18 janvier 2018; un extrait de la politique de l’employeur; une capture d’écran du téléphone du frère de l’appelant montrant un appel reçu de l’employeur le 21 novembre 2017; et une capture d’écran du téléphone du frère de l’appelant montrant un message texte de l’employeur. L’audience a été tenue par vidéoconférence et l’appelant s’est présenté à celle‑ci muni des documents en question. Il a renvoyé à ceux‑ci dans le cadre de son témoignage, et le Tribunal a accepté qu’ils soient déposés après l’audience.

Questions en litige

[4] Le Tribunal est appelé à répondre aux questions suivantes :

  1. L’appelant a-t-il quitté son emploi volontairement?
  2. Dans l’affirmative, l’appelant était‑il fondé à quitter volontairement son emploi?

Analyse

[5] Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites en annexe de la présente décision.

[6] Le paragraphe 30(1) de la Loi sur l’assurance‑emploi prescrit que le prestataire est exclu du bénéfice des prestations d’assurance‑emploi s’il quitte volontairement un emploi sans justification.

[7] C’est à l’intimée qu’il incombe de prouver que l’appelant a quitté son emploi volontairement. Il revient ensuite à l’appelant de prouver qu’il était fondé à quitter son emploi (Canada (Procureur général) c White, 2011 CAF 190).

Première question : L’appelant a-t-il quitté son emploi volontairement?

[8] Le Tribunal conclut que l’appelant a quitté son emploi volontairement. Il s’agit de déterminer si l’employé avait le choix de rester ou de quitter (Canada (Procureur général) c Peace, 2004 CAF 56).

[9] L’appelant nie avoir quitté son emploi volontairement, car il faisait alors trop froid pour effectuer son travail. Il a indiqué que, suivant la norme dans son domaine, la saison prend fin en octobre ou en novembre en raison des conditions météorologiques.

[10] L’employeur a fourni des imprimés de messages textes à l’intimée. À l’audience, l’appelant avait en sa possession les téléphones sur lesquels les soi‑disant messages textes ont été sauvegardés. L’appelant a confirmé que le contenu de ces messages était identique à ce que l’employeur avait fourni. Le Tribunal a entendu les témoignages et de l’appelant et de son frère, qui a été appelé à témoigner par l’appelant et qui travaillait pour le même employeur et faisait le même travail que l’appelant. L’appelant et son frère faisaient équipe.

[11] L’un des messages textes, daté du 21 novembre 2017, provenait du frère de l’appelant, qui demandait si lui et l’appelant pourraient obtenir des prestations d’assurance‑emploi s’il n’y avait pas de travail. L’employeur a répondu qu’il y avait du travail, a fourni l’adresse du nouveau lieu de travail et a indiqué qu’ils commenceraient au nouvel emplacement dès que leur équipement pourrait être déplacé. En réponse, le frère de l’appelant a demandé si l’adresse fournie se trouvait au centre‑ville, et il n’a obtenu aucune réponse.

[12] Il ne paraît avoir eu aucune autre communication entre l’appelant et l’employeur jusqu’à trois appels manqués, adressés à l’appelant et à son frère par l’employeur le 5 décembre 2018. Ces appels manqués ont été suivis d’un message texte de l’employeur indiquant qu’il avait été mis fin à l’emploi de l’appelant et que ce dernier devait rapporter les téléphones et autres pièces d’équipement au bureau.

[13] L’appelant a témoigné qu’il avait cru qu’il n’y avait plus de travail lorsqu’il s’était mis à faire trop froid et que l’employeur n’avait fait aucune autre communication concernant le nouveau lieu de travail. L’appelant a témoigné qu’il n’avait fait aucune tentative pour communiquer avec l’employeur après que son frère eut demandé si le nouveau lieu de travail se trouvait au centre‑ville.

[14] Le Tribunal conclut que l’appelant a quitté son emploi volontairement. Les témoignages donnés par l’appelant et son frère sont compatibles avec les déclarations faites par l’employeur à l’intimée, à savoir plus particulièrement que l’appelant a demandé s’il pouvait demander des prestations d’assurance‑emploi et s’est fait répondre par l’employeur qu’il y avait encore du travail. L’appelant a été informé qu’il y avait encore du travail et s’est fait donner l’adresse du nouveau lieu de travail. Il a choisi de ne pas s’y présenter ou de ne demander aucun autre renseignement à l’employeur. Le Tribunal conclut que l’appelant avait le choix de rester ou de quitter son emploi et qu’il a quitté son poste volontairement.

Deuxième question : L’appelant était‑il fondé à quitter volontairement son emploi?

[15] Pour déterminer si un prestataire était fondé à quitter volontairement son emploi, le Tribunal doit se demander si, compte tenu de l’ensemble des circonstances, le prestataire n’avait d’autre solution raisonnable que de partir. Il incombe à l’appelant de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’avait pas d’autre solution que de quitter son emploi (Canada (Procureur général) c White, 2011 CAF 190).

[16] Compte tenu de l’ensemble des circonstances, le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas fondé à quitter son emploi, car d’autres solutions raisonnables s’offraient à lui, à savoir qu’il aurait pu communiquer avec l’employeur pour confirmer le nouveau lieu de travail. Il aurait pu également raisonnablement demander à l’employeur de confirmer s’il était mis à pied ou non en raison des conditions de météo qui avaient changé et en raison de la nature saisonnière du travail.

[17] Les témoignages de l’appelant et de son frère confirment qu’ils ont tous deux cru que les conditions météorologiques les auraient empêchés de travailler davantage pour la saison. Lorsque l’employeur n’a pas répondu au message texte de son frère, l’appelant a cru que la saison avait pris fin et qu’il n’y avait plus de travail. Le Tribunal conclut que l’appelant et son frère ont cru qu’il faisait alors trop froid pour effectuer le travail que l’on attendait d’eux. Toutefois, le frère de l’appelant avait envoyé un message texte à l’employeur pour lui demander si lui et l’appelant pouvaient se mettre au chômage s’il n’y avait plus travail. L’employeur a répondu qu’il y avait du travail et a fourni l’adresse du nouvel emplacement. Le frère de l’appelant a demandé si le nouveau lieu de travail se trouvait au centre‑ville et il n’a obtenu aucune réponse. Le Tribunal conclut, sur le fondement des témoignages et des messages textes, qu’il n’y a eu aucune autre communication entre l’appelant et l’employeur jusqu’au 5 décembre 2017.

[18] Une semaine après l’échange avec l’employeur, le 29 novembre 2017, l’appelant a présenté une demande de prestations d’assurance‑emploi et indiqué qu’il ne travaillait plus en raison d’un manque de travail. Le Tribunal conclut que la dernière communication de l’employeur contredit cette affirmation et indique expressément qu’il y avait du travail pour l’appelant. Compte tenu de ces circonstances, il aurait été raisonnable de faire le suivi auprès de l’employeur pour confirmer le nouveau lieu de travail ou confirmer si les conditions météorologiques l’empêchaient de travailler davantage, ainsi que l’appelant le croyait.

[19] Bien que l’appelant ait pu croire qu’il avait un bon motif de quitter son emploi en raison de l’absence de communication de la part de l’employeur et des conditions météorologiques, un bon motif n’est pas nécessairement suffisant pour satisfaire au critère du « motif valable » (Canada (Procureur général) c Laughland, 2003 CAF 12). Le « motif valable » n’est pas synonyme de « raison » ou de « motif » (Tanguay c Canada (Commission de l’assurance‑emploi), A‑1458‑84).

[20] Compte tenu de l’ensemble des circonstances, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé qu’il n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi.

Conclusion

[21] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé, compte tenu de l’ensemble des circonstances, qu’il n’avait d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi. Par conséquent, il n’a pas prouvé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi et il est donc exclu du bénéfice des prestations en conformité avec les articles 29 et 30 de la Loi.

[22] L’appel est rejeté.

Date de l’audience :

Mode d’instruction :

Comparutions :

16 juillet 2018

Vidéoconférence

A. A., appelant

Annexe

La loi

Loi sur l’assurance-emploi

29 Pour l’application des articles 30 à 33 :

  1. a) emploi s’entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations;
  2. b) la suspension est assimilée à la perte d’emploi, mais n’est pas assimilée à la perte d’emploi la suspension ou la perte d’emploi résultant de l’affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l’exercice d’une activité licite s’y rattachant;
  3. b.1) sont assimilés à un départ volontaire le refus :
    1. (i) d’accepter un emploi offert comme solution de rechange à la perte prévisible de son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où son emploi prend fin,
    2. (ii) de reprendre son emploi, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment où il est censé le reprendre,
    3. (iii) de continuer d’exercer son emploi lorsque celui-ci est visé par le transfert d’une activité, d’une entreprise ou d’un secteur à un autre employeur, auquel cas le départ volontaire a lieu au moment du transfert;
  4. c) le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées ci-après, son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :
    1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
    2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
    3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
    4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
    5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
    6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
    7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
    8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non-rémunération de celles-ci,
    9. (ix) modification importante des fonctions,
    10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
    11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
    12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
    13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
    14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

30 (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il ne soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

(3) Dans les cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.

(4) Malgré le paragraphe (6), l’exclusion est suspendue pendant les semaines pour lesquelles le prestataire a autrement droit à des prestations spéciales.

(5) Dans les cas où le prestataire qui a perdu ou quitté un emploi dans les circonstances visées au paragraphe (1) formule une demande initiale de prestations, les heures d’emploi assurable provenant de cet emploi ou de tout autre emploi qui précèdent la perte de cet emploi ou le départ volontaire et les heures d’emploi assurable dans tout emploi que le prestataire perd ou quitte par la suite, dans les mêmes circonstances, n’entrent pas en ligne de compte pour l’application de l’article 7 ou 7.1.

(6) Les heures d’emploi assurable dans un emploi que le prestataire perd ou quitte dans les circonstances visées au paragraphe (1) n’entrent pas en ligne de compte pour déterminer le nombre maximal de semaines pendant lesquelles des prestations peuvent être versées, au titre du paragraphe 12(2), ou le taux de prestations, au titre de l’article 14.

(7) Sous réserve de l’alinéa (1)a), il demeure entendu qu’une exclusion peut être imposée pour une raison visée au paragraphe (1) même si l’emploi qui précède immédiatement la demande de prestations - qu’elle soit initiale ou non - n’est pas l’emploi perdu ou quitté au titre de ce paragraphe.

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