Assurance-emploi (AE)

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Décision et Motifs

Décision

[1] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler devant la division d’appel.

Apercu

[2] La demanderesse, S. D. (prestataire), occupait un poste à temps partiel à raison de 20 heures par semaine pour la Ville de X, ainsi qu’un emploi à temps partiel pour la Commission scolaire X. Elle a cessé de travailler pour la Commission scolaire en raison d’un manque de travail et a quitté son emploi pour la Ville de X afin de déménager à Montréal et de trouver un emploi d’enseignante. La Commission a déterminé que la prestataire avait quitté volontairement son emploi pour des raisons personnelles qui ne pouvaient justifier un départ volontaire. À la suite d’une demande de révision, la Commission de l’assurance-emploi du Canada a maintenu sa décision initiale. La demanderesse a interjeté appel à la division générale.

[3] La division générale a conclu que la décision de la prestataire de déménager à Montréal demeurait un choix personnel qui ne constituait pas une justification au sens de l’alinéa 29c) de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE). La division générale a également conclu que la prestataire n’avait pas l’assurance raisonnable d’un autre emploi lorsqu’elle a décidé de quitter son emploi auprès de la Ville de X.

[4] La prestataire demande maintenant au Tribunal la permission d’appeler de la décision de la division générale.

[5] La prestataire, au soutien de sa demande de permission d’en appeler, réitère les arguments présentés à la division générale. Elle fait valoir qu’un emploi à temps partiel est insuffisant pour subvenir aux besoins de trois enfants. Elle maintient qu’elle avait l’assurance raisonnable d’un emploi lorsqu’elle a quitté son emploi auprès de la Ville de X. Elle compare sa situation d’enseignante en congé pendant la période estivale à celle des pêcheurs qui abandonnent la pêche en automne et en hiver. Elle estime avoir droit au chômage.

[6] Le Tribunal doit décider si on peut soutenir que la division générale a commis une erreur révisable et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[7] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler puisqu’aucun des moyens d’appel soulevés par la prestataire ne confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[8] Est-ce que la prestataire soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès? 

Analyse

[9] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) spécifie les seuls moyens d’appel d’une décision de la division générale. Ces erreurs révisables sont que la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence; qu’elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier; ou qu’elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[10] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience sur le fond de l’affaire. C’est une première étape que la prestataire doit franchir, mais le fardeau est ici inférieur à celui dont elle devra s’acquitter lors de l’audience de l’appel sur le fond. À l’étape de la demande permission d’en appeler, la prestataire n’a pas à prouver sa thèse, mais elle doit établir que son appel a une chance raisonnable de succès. En d’autres mots, elle doit établir que l’on peut soutenir qu’il y a eu une erreur révisable grâce à laquelle elle pourrait avoir gain de cause en appel.

[11] La permission d’en appeler sera en effet accordée par le Tribunal s’il est convaincu qu’au moins l’un des moyens d’appel soulevés par la prestataire confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[12] Pour ce faire, le Tribunal doit être en mesure de déterminer, conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, s’il existe une question de principe de justice naturelle, de compétence, de droit ou de fait dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision contestée.

Question : Est-ce que la prestataire soulève, dans ses moyens d’appel, une erreur révisable qu’aurait commise la division générale et qui confère à l’appel une chance raisonnable de succès?

[13] La prestataire, au soutien de sa demande de permission d’en appeler, réitère les arguments présentés à la division générale. Elle fait valoir qu’un emploi à temps partiel comme enseignante est insuffisant pour subvenir aux besoins de trois enfants. Elle maintient qu’elle avait l’assurance raisonnable d’un emploi lorsqu’elle a quitté son emploi à la Ville de X. Elle compare sa situation d’enseignante en congé pendant la période estivale à celle des pêcheurs qui abandonnent la pêche en automne et en hiver. Elle estime avoir droit au chômage.

[14] La preuve dont disposait la division générale démontre que la prestataire travaillait pour la Ville de X, et qu’une relation employeur-employée existait. Elle était donc dans un état d’employée au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'AE. De plus, l’article 29 de la Loi sur l'AE prévoit que, pour l’interprétation des articles 30 à 33, « emploi » s’entend de tout emploi exercé par un prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations.

[15] La preuve non contestée démontre que la prestataire a quitté son emploi à temps partiel auprès de la Ville de X pour se rendre à Montréal où elle était convaincue qu’elle aurait un emploi à temps plein comme enseignante vu la pénurie de main-d’œuvre dans ce domaine dans la région de Montréal.

[16] La division générale a conclu d’après la preuve que la prestataire a pris la décision personnelle de quitter son emploi auprès de la Ville de X afin d’améliorer sa situation et que cela ne constituait pas une justification au sens de l’alinéa 29c) de la Loi sur l'AE.

[17] Tel que l’a souligné la division générale, bien qu’il soit légitime pour une personne « de vouloir améliorer son sort, en changeant d’employeur ou la nature de son travail, elle ne peut faire supporter le coût de cette légitimité par ceux et celles qui contribuent à la caisse de l’assurance-emploi ». En effet, le fait de vouloir quitter son emploi pour améliorer sa situation ne constitue pas une justification au sens de l’alinéa 29c) de la Loi sur l'AE.Note de bas de page 1

[18] De plus, le désir d’un prestataire d’améliorer sa situation financière peut constituer un motif valable, mais il ne constitue pas une justification pour quitter son emploi au sens de la Loi sur l'AE.Note de bas de page 2

[19] La division générale a également conclu que la prestataire n’avait pas l’assurance d’un autre emploi au moment où elle a décidé de quitter celui à la Ville de X.

[20] La Cour d’appel fédérale a établi que la notion d’« assurance raisonnable d’un autre emploi », décrite au sous-alinéa 29c)(vi) de la Loi sur l'AE, suppose l’existence de trois éléments : une « assurance raisonnable », « un autre emploi » et un « avenir immédiat ».Note de bas de page 3

[21] La preuve dont disposait la division générale démontre qu’au moment où la prestataire a choisi de devenir chômeuse à la fin du mois de juin 2017, la prestataire ne savait pas si elle aurait un emploi, auprès de quel employeur, et ne savait pas à quel moment dans l’avenir elle aurait un emploi.

[22] Bien que la prestataire a réussi à trouver rapidement un emploi comme enseignante après avoir quitté son travail auprès de la Ville de X, on ne peut pas affirmer qu’elle savait quel emploi elle obtiendrait ou connaissait l’identité de son futur employeur au moment où elle a quitté son emploi. Au mieux, elle savait qu’elle avait d’excellentes chances d’être embauchée.

[23] En ce qui concerne l’argument relatif aux pêcheurs, tel que l’a souligné la division générale, il ne lui appartenait pas de modifier la loi afin que la période estivale des enseignants soit considérée au même titre que la période hivernale des pêcheurs. Tout changement dans la loi doit provenir du Parlement.

[24] Après examen du dossier d’appel, de la décision de la division générale et des arguments au soutien de la demande de permission d’en appeler, le Tribunal n’a d’autre choix que de conclure que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Conclusion

[25] Le Tribunal refuse la permission d’en appeler devant la division d’appel.

Représentant :

S. D., non représentée

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